Introduction
Leçon 1 : Le procès et l'art du montage - À propos de Young Mister Lincoln de John Ford
Cette leçon analyse les westerns de Ford en se concentrant sur la manière dont le cinéaste met en scène les relations de la violence et de la loi, un des enjeux caractéristiques de ce genre cinématographique consacré à la Conquête de l’Ouest. Si tous les westerns articulent leurs histoires autour de l’opposition entre wilderness et civilization, structure de la frontière où se joue l’œuvre fondatrice des pionniers, tous ceux de Ford montrent que cette structure est moins une opposition frontale qu’une articulation dialectique. C’est particulièrement flagrant pour l’enjeu juridique et politique de la constitution d’une communauté, qui passe de la sauvagerie de la loi de l’Ouest à un état civil garanti par le droit.
Leçon 2 : Une pédagogie de la justice : Anatomy of a murder d'Otto Preminger
Cette leçon se concentre sur un seul film de John Ford, qui n’est pas un western, Vers sa destinée (Young Mr. Lincoln, 1939). Voulant montrer le début de carrière du futur président, le cinéaste s’attache à sa découverte du droit et, condensant certains éléments biographiques, invente le premier procès gagné par le jeune avocat.
La dramaturgie du procès, en justice accusatoire, sert de structure à la dramaturgie du film et permet de faire réfléchir le spectateur à la nature du droit qui n’est possible qu’à la condition de s’écarter de la ligne droite de la vengeance, de prendre le temps de la réflexion, du recoupement des témoignages, parce qu’il se distingue de l’action vengeresse du justicier. Leçon de droit et leçon de cinéma se confondent ici.
Leçon 3 : Les mises en scène de procès dans des films hollywoodiens (1956-1962): De quelques effets de distanciations
Grâce à ses talents, un avocat réussira à innocenter un homme ayant tué le violeur de sa femme. En mettant en scène ce procès, Anatomy of a Murder montre la justice américaine en action, avec ses approximations, ses manœuvres et ses coups de théâtre. On découvre en fin de compte que la justice, pas davantage que la politique, ne consiste en une recherche de la vérité, mais est un affrontement réglé selon des procédures précises afin de trancher un différend.
Leçon 4 : Violence et loi dans les westerns de John Ford
Cette leçon propose des analyses de mises en scène de procès représentés dans des films hollywoodiens de la fin des années 50.
A la fin des années 50, plusieurs films hollywoodiens ont mis en scène des procès. Plutôt que d’interroger la pertinence de classer ces longs-métrages dans un genre filmique particulier, celui des « films de procès », nous avons choisi de voir en quoi les choix de réalisation pour ces séquences de procès possèdent certaines caractéristiques communes à des films pourtant très différents. Il apparaît notamment que ces scènes sont surtout l’occasion, pour les réalisateurs, de créer des effets de distanciation entre les spectateurs et le film qu’ils regardent.
Leçon 5 : Représentation cinématographique des procès politiques
Cette leçon permet de faire surgir la manière dont la représentation des procès politiques montre une vision purement théâtrale et ritualisée des mécanismes de la loi, le processus légal devenant un spectacle pur, basé sur une dimension spectaculaire assumée.
Leçon 6 : Quelques discours fascistes dans le cinéma italien des « années de plomb »
Le cinéma italien a été, dès la fin des années 60 et dans les années 70, marqué par ce qu’on a nommé les « années de plomb », période de violence politique, de lutte armée de la gauche dite « extraparlementaire » et de terrorisme, qui a culminé avec l’enlèvement et l’assassinat d’Aldo Moro par les Brigades Rouges. Le fascisme est présent dans cette période, soit par nostalgie, soit par l’émergence d’une extrême droite dont on sait qu’elle a été responsable de nombre d’attentats visant à engendrer une déstabilisation du pouvoir dominé par la Démocratie chrétienne, et une reprise en main, éventuellement au travers d’un coup d’État sur le modèle de la Grèce des Colonels ou du Chili de Pinochet. Ce cours étudie cinq discours fascistes choisis tant au travers du « grand » cinéma politique caractéristique de l’époque que de films « de genre ».
Leçon 7 : Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Ce que le cinéma nous apprend de notre vision du Parlement
Saluant le départ de J. Bercow fin octobre 2019, B. Johnson le compara à Tony Montana ! Qui aurait cru qu'un Premier ministre ferait entrer Scarface à Westminster ? Cette citation, comme l'apparition de B. Le Maire dans son propre rôle dans Quai d'Orsay, permettent de montrer que les liens entre cinéma et Parlement ne sont pas univoques. Si le cinéma inspire le Parlement, l'inverse est également vrai, même si le Parlement n'est souvent qu'un figurant. Il est alors permis de se demander si cette peinture est conforme à la réalité.
Leçon 8. Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Travailleur / patron : (Re)penser les rapports de travail à la lumière du cinéma
Cette leçon étudie la représentation du travail au cinéma, représentation dont l’importance dépasse des enjeux strictement narratifs (caractérisation des personnages, élément moteur du récit) : elle constitue un véritable vecteur de description, d’interrogation et d’examen critique des rapports de travail – rapports de force et de classe, essentiellement. Si le droit du travail est rarement directement filmé, il est toujours présent, indirectement, dans les conséquences concrètes que son application, ou non, a sur l’existence des personnages. Ces représentations cinématographiques du droit du travail, par lesquelles le cinéma se fait le témoin et l’écho de son évolution, et de ses dysfonctionnements, ne peuvent manquer d’intéresser les juristes, préoccupés d’y remédier.
Leçon 9. Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Montrer le droit : Depardon, Rouch, Verdier et Nabede
Raymond Depardon, avec 10e chambre, instants d'audiences (2004), Jean Rouch, Jaguar (1967), Raymond Verdier et Banimeleleng Nabede, La Justice divine chez les Kabyè du Togo (1998) ont produit des images et des récits qui permettent d’interroger la présence du droit et la notion de véracité dans le cinéma documentaire.
Des extraits ont été choisis pour mettre en évidence ces témoignages sociologiques, ethnographiques contextualisés, où, dans le cas de Jaguar, fiction et documentaire sont étroitement liés.
Leçon 10. Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Le juge et la caméra : Le droit entre documentaire et fiction dans Close up d'Abbas Kiarostami
Dans Close up d’Abbas Kiarostami, le réalisateur enquête sur un fait divers : Hossain Sabzian, un modeste imprimeur, s’est fait passer pour un grand réalisateur auprès d’une famille Téhéranaise qui découvre la supercherie au bout de quelques jours en sa compagnie. Kiarostami décide alors de filmer l’audience et paraît même y participer activement. La procédure à l’œuvre semble alors particulièrement étrange mais les limites entre le documentaire et la fiction se révèlent perméables. C’est au tour du spectateur de mener l’enquête : l’étrangeté de ce procès tient-elle aux spécificités de la procédure iranienne (entre droit musulman et codification européennes) ou des artifices cinématographiques ? Pourquoi la recherche de l’intention est-elle au cœur des interrogatoires ?
Leçon 11. Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Filmer aux bords du judiciaire : La fabrique du récit judiciaire dans Young Mister Lincoln et Sergeant Rutledge de John Ford
Cette leçon est consacrée à deux films de Ford, Young Mr. Lincoln (1939) et Sergeant Rutledge, deux films où il ne s’agit pas simplement de montrer des procès mais de montrer le judiciaire. En plaçant sa caméra non pas à l’intérieur du procès, mais sur ses bords, Ford décentre sa mise en scène du drame, pour inviter le spectateur à réfléchir aux conditions de possibilité du judiciaire et à sa fragilité intrinsèque : il montre aussi bien ce qui le rend nécessaire que ce qui risque à tout moment de le compromettre. On analyse donc ici les procédés cinématographiques par lesquels le cinéaste, dans chacun de ces deux films, montre la fabrique du récit judiciaire et les conditions de sa véridicité.
Leçon 12. Colloque « Filmer le droit, le droit filmé » : Caméras et écrans dans les prétoires : Les nouveaux objets du rituel judiciaire
Il existe entre le cinéma et le procès un lien intime et contrarié, tendu entre ce qui les rapproche et ce qui les sépare irrémédiablement. Il se fait essentiellement dans ce que l’on appelle les films de prétoire, à savoir les films qui s’attachent à reconstituer précisément un procès, qu’il soit fictif ou réel, afin d’expliquer le fonctionnement de la justice et de sensibiliser le public à la complexité de l’acte de juger. Longtemps interdits de prétoire, les réalisateurs de fiction ont souvent joué, voire se sont joués, de cette forme de censure, inscrivant dans le cadre de leur fiction judiciaire, des écrans ou des caméras, des films dans le film. Sans doute était-ce un moyen astucieux, détourné autant qu’approprié, de reprendre une place qu’on leur refusait. Mais ils ont aussi, par ce procédé, interrogé l’exercice de la justice. Les réalisateurs nous livrent ainsi dans leurs films, une réflexion sur l’Image, son essence, les conditions de sa construction et de sa diffusion. Cette image peut être manquante – image interdite de l’audience – question étudiée notamment dans L’Hermine de C. Vincent (2015) et Bamako d’A. Sissako (2006) ; ou à l’inverse envahissante – celle qui s’invite désormais sous toutes ses formes à l’audience – comme dans La fille au bracelet de S. Demoustier (2019). Le cinéma relaye ainsi un débat de société dont la justice ne peut plus faire l’économie, celui de l’usage judiciaire des images.
Leçon 13 : Conclusions du colloque « Filmer le droit, le droit filmé »