Présentation
Six ans après son entrée en vigueur, cinq ans après la publication des premiers plans, la loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordres est entrée dans sa phase contentieuse. Aucune décision n'a, à ce jour, été rendue sur le fond. Après les atermoiements sur la compétence juridictionnelle et aujourd'hui les débats sur la signification de la mise en demeure et ses liens avec l'objet de l'assignation, le tribunal judiciaire de Paris doit se préparer à apporter les éclairages tant attendus sur la teneur d'un dispositif législatif qui a fait de la France l'un des premiers pays au monde à ancrer dans son droit positif la responsabilité des entreprises en matière de durabilité.
Dans un espace normatif en mutation, le juge doit faire face à de nombreuses difficultés. Outre celles propres à être « le premier à juger », outre encore les incertitudes liées au contenu de ce qu'est ce devoir de vigilance par-delà ses filiations internationale et pluridisciplinaire, quel rôle le législateur a-t-il assigné au juge dans un dispositif dont il a fait reposer le contrôle sur une double action en injonction et en responsabilité ? Par ailleurs, si le devoir de vigilance s'inscrit dans un mode de régulation des activités économiques mondiales que d'aucuns dénomment la compliance, comment juger la suffisance des mesures adoptées afin que sa mise en œuvre ne se réduise pas à un pur exercice de conformité interne ? Le juge dispose d'outils pour surmonter ces difficultés mais encore faut-il que ceux-ci soient minutieusement employés.
Au regard des intérêts protégés par le texte et de la liberté des moyens laissée aux entreprises pour prévenir et atténuer leurs atteintes, dans quelles mesures le juge peut-il puiser dans les droits de l'environnement et des libertés fondamentales ou encore dans ceux du travail et des procédures collectives plus familiers de l'acte de juger la gestion, des méthodes de contrôle pouvant lui servir de sources d'inspiration ? Comment les diverses techniques d'interprétation de la règle de droit et les pouvoirs échus au juge pour trancher les litiges peuvent-ils être mobilisés pour lui permettre d'appliquer un texte résolument peu disert ?
Alors que l'Union Européenne s'attèle à faire du Vieux continent le premier territoire climatiquement neutre en transformant l'économie et le modèle d'entreprise, les attentes vis-à-vis de la loi sur le devoir de vigilance sont grandes. Si les projecteurs sont aujourd'hui braqués sur le juge français, les réponses apportées ne sauraient être autres que proprement juridiques. Dans ce contexte, un dialogue entre universitaires, magistrats et avocats, de diverses disciplines, doit être engagé. C'est l'ambition de ce colloque à l'attention de la profession et des avocats des causes en jeu afin de leur permettre de percevoir quelques repères.
Programme
9h30 : Propos introductifs
Pauline Abadie, Maître de conférences en droit privé, Université Paris Saclay
Grégoire Leray, Professeur de droit privé, Université Côte d'Azur
Matinée - les difficultés de juger
Présidence : Julien Richaud, Magistrat, cour d'appel de Paris
10h00 : Un texte sibyllin
Julien Richaud, Magistrat, cour d'appel de Paris
10h20 : Être le premier à juger
Olivier Descamps, Professeur d'histoire du droit, Université Paris 2 Panthéon-Assas
10h40 : Echanges avec la salle
Pause
11h10 : Un devoir aux inspirations multiples
Béatrice Parance, Professeure de droit privé, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis
11h30 : Le juge dans le droit de la compliance
Régis Bismuth, Professeur de droit public, Sciences Po Paris
11h50 : Echanges avec la salle
Pause déjeuner
Après-midi - Surmonter les difficultés
Présidence : Manuel Carius, Magistrat, cour d'appel de Montpellier, Vice-président de l'Association française des magistrats pour la justice environnementale
Regarder ailleurs (1)
13h30 : Juger la gestion en droit économique
Fabrice Rosa, Professeur de droit privé, Université de Reims
13h50 : Juger les violations des droits fondamentaux
Jean-Pierre Marguénaud, Professeur émérite, Université Montpellier
14h10 : Juger les atteintes à l'environnement
Mathilde Hautereau-Boutonnet, Professeure de droit privé, Université Aix-Marseille
14h30 : Echanges avec la salle
Pause
Accorder son office (2)
15h10 : Répondre à l'urgence, juger le fond
Anaïs Danet, Professeure de droit privé, Université de Reims Champagne-Ardenne
15h30 : Les forces des outils interprétatifs
Marion Larouer, Maître de conférences en droit privé, Université Toulouse Capitole
15h50 : Calibrer les demandes aux pouvoirs du juge
François de Cambiaire, Avocat associé, SEATTLE avocats
16h20 : Connaître les faits, établir le droit : appréhender la complexité
Chantal Arens, Première présidente honoraire de la Cour de cassation
16h40 : Echanges avec la salle
17h00 : Propos conclusifs
François-Guy Trébulle, Professeur de droit privé, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Informations et contact : christine.PALUMBO@univ-cotedazur.fr
Inscrivez-vous : droit.univ-cotedazur.fr
Journée validée au titre de la formation continue des avocats
Colloque organisé par le CERDP de la faculté de droit, Université de Côte d'Azur, l'Université Jean Monnet Paris Saclay, l'ENM, l'IDEP et la SFDE sous la direction scientifique de Pauline Abadie & Grégoire Leray