Christian Lavialle

Professeur émérite
Droit public.
Ecole de droit de Toulouse
Institut Maurice Hauriou
ActualitésPublicationsENCADREMENT DOCTORAL
  • Nathalie Bettio, La circulation des biens entre personnes publiques, thèse soutenue en 2009 à Toulouse 1  

    La circulation des biens entre personnes publiques est un phénomène relativement récent qui s'est développé à partir de la fin des années quatre-vingt marquées par un renforcement de la décentralisation territoriale et une altération du droit public économique traditionnel sous l'influence du néolibéralisme. Jusqu'alors les relations patrimoniales étaient marginales entre personnes publiques, qui en raison de leur objet, étaient plus préoccupées par l'exercice de la puissance publique que par le commerce juridique. La circulation des biens publics, indépendamment de leur domanialité, marque aujourd'hui un nouveau mode de communication entre personnes publiques qui se rapproche du droit privé et des valeurs du marché. Ce processus, consacré par le Code général de la propriété des personnes publiques, entré en vigueur en 2006, révèle une véritable mutation de l'administration. Il s'ensuit en effet une transformation des personnes publiques à travers une reconfiguration fonctionnelle des patrimoines administratifs mais aussi du territoire restructuré par la nouvelle distribution des politiques publiques et une banalisation du commerce entre propriétaires publics. De là découlent un approfondissement de la décentralisation et un retour de l'État-gendarme dans sa fonction régulatrice des politiques domaniales. Son imperium prend alors le pas sur son dominium. L'immixtion de la rationalité économique par la circulation des biens entre personnes publiques signe ainsi le passage d'une conception essentialiste à une conception fonctionnaliste des propriétés publiques et du territoire dans lequel elles s'insèrent.

    Tarik Zair, La gestion décentralisée du développement économique au Maroc, thèse soutenue en 2006 à Toulouse 1  

    Essai de mise en forme d’un État minimal, la décentralisation territoriale est admise aujourd’hui comme une recette inéluctable du développement local. Au Maroc, l’option en faveur des collectivités locales, en tant qu’acteurs économiques, est le résultat d’une “nécessité utilitaire” qui s’est imposée au pouvoir central. L’État vise, par son biais, à occulter son incapacité à sortir le pays de ses crises économiques et à rendre ainsi responsables les pouvoirs décentralisés des échecs éventuels. La gestion décentralisée du développement économique révèle une multitude de contraintes juridiques que les réformes de 2002 n’ont pas pu surmonter. Les cadres institutionnels et territoriales décentralisés s’avèrent inadaptés. La répartition des compétences économiques s’est faite au détriment des autonomies locales. Le caractère spécifique de la compétence économique favorise les contraintes normatives qui s’imposent aux pouvoirs décentralisés. La politisation accrue du développement local l’a certainement fragilisé. La divergence des intérêts en présence s’est faite au détriment de la clarté indispensable à la réussite économique. Le développement a pris, par conséquent, une dimension redistributive et non créatrice de richesses. La mise en œuvre de la politique décentralisée de développement, malgré sa diversité, s’est traduite par des carences apparentes. La planification du développement local et sa gestion témoignent des difficultés à articuler les deux. L’effectivité d’une politique décentralisée de développement est tributaire de l’amélioration des ressources consacrées au développement local ainsi que du dépassement des lacunes méthodologiques.

    Komi Soglo, Le marché d'entreprise de travaux publics , thèse soutenue en 1997 à Toulouse 1  

    La summa divisio au sein des contrats administratifs, reste la distinction entre délégation de service public et marché public. Seulement, la frontière entre les deux catégories n'est pas étanche. Dans ce contexte, l'apparition et le développement du metp, qui semble construit à partir d'éléments empruntés à ces deux catégories, ont entrainé une remise en cause des définitions habituelles d'autant plus que le juge administratif est réticent à créer une zone intermédiaire. Son hybridité rend donc difficile toute démarche de qualification juridique. L'étude révèle que le critère du mode de rémunération, bien que relativement désuet, demeure décisif et permet de reconnaitre au metp la qualité de marché public. Toutefois, l'assimilation pure et simple est exclue puisqu'il subsiste quelques spécificités au régime juridique du metp, notamment en ce qui concerne son exécution. Enfin, ses avantages sur les plans financier et technique ne sont pas négligeables, faisant apparaitre un nouveau type de rapport dans le marché public fondé sur le partenariat public-privé.

  • Fanny Tarlet, Les biens publics mobiliers, thèse soutenue en 2015 à Lyon 3 sous la direction de Sylvie Caudal, membres du jury : Philippe Yolka (Rapp.), Gweltaz Éveillard (Rapp.), Caroline Chamard-Heim    

    Les biens publics mobiliers s’entendent comme l’ensemble des biens mobiliers placés dans une relation juridique patrimoniale avec les personnes publiques. Certes, ils se caractérisent par leur mobilité (comme les biens privés mobiliers), c’est-à-dire une aptitude à la circulation, physique et juridique, vectrice de souplesse et de fragilité, favorable à la dissociation de leurs utilités ; mais la question ici centrale est celle de savoir si la propriété publique est toujours un instrument pertinent pour appréhender cette mobilité. Il s’avère que la propriété publique, lorsqu’elle est sollicitée, exerce potentiellement une force d’attraction efficace sur tous les biens publics mobiliers ; elle permet ainsi de freiner leur circulation. En revanche, une fois le bien capté, la propriété publique ne suffit plus à maîtriser l’intégrité des biens publics mobiliers. Elle n’endigue pas leur délitement et leur évaporation naturels. Elle est même concurrencée par d’autres rapports de droit qui, par des dissociations des utilités des biens, par la déliaison entre propriété et utilisation, conduisent à interroger sa pertinence.

  • Jimmy Meersman, Contribution à une théorie juridique des biens communs, thèse soutenue en 2022 à Université Côte dAzur sous la direction de Catherine Mamontoff présidée par Christian Vallar, membres du jury : Fabrice Melleray (Rapp.), Christophe Roux    

    Rares sont les domaines - environnementaux, culturels, sociaux ou encore économiques - qui ne se trouvent pas saisis au prisme des biens communs. Cet intérêt nouveau pour les biens communs s'explique du fait de l'évolution importante de la société du XXIe siècle, qui interroge le droit de propriété. L'analyse montre cependant que, quelle que soit l'époque, le modèle moderne du droit de propriété - public ou privé - se caractérise toujours par la maîtrise exclusive du bien par son propriétaire. Dans le contexte actuel de mutation de la société, ce modèle présente des limites et apparaît inadapté au regard de certains besoins.Parallèlement, la réflexion sur les biens communs a pris de l'ampleur. Pour une partie de la doctrine, les biens communs apparaissent comme étant à même d'apporter des éléments de réponse à l'inadaptation du droit de propriété, dans le cadre d'une évolution juridique nécessaire. Objet de discussions en doctrine, les biens communs restent encore ignorés par le droit français et ne font l'objet d'aucune définition juridique. Cependant, ils sont abordés par le droit de certains États étrangers. Ils sont également saisis par de nombreuses disciplines, au premier rang desquelles l'économie. La pensée d'Elinor Ostrom, prix Nobel d'économie pour ses travaux sur le sujet, est fondamentale. Du fait de ces particularités, une méthodologie spécifique de recherche a été mise en place, alliant le conceptualisme à l'empirisme.Une théorie juridique des biens communs a ainsi été proposée. Ce qui caractérise les biens communs, c'est leur affectation - à la production, à la préservation et à la répartition d'utilités collectives - dans le cadre d'une gouvernance collective. Cette destination conditionne le droit applicable, d'un genre nouveau, et confère des droits et obligations autres que ceux traditionnels. Les biens communs constituent en cela une catégorie juridique nouvelle.

    Elodie Auda, La mise à disposition d’immeubles de l’Etat au profit des universités. Etude critique d’un système de gestion de biens publics décentralisé, thèse soutenue en 2018 à Université Côte dAzur ComUE sous la direction de Gérard Quiot présidée par Jean-François Joye, membres du jury : Catherine Ribot (Rapp.), Catherine Mamontoff et Christian Vallar    

    La mise à disposition est un système juridique permettant à l’Etat d’autoriser certains de ses opérateurs à employer des immeubles dont il est propriétaire pour leurs missions d’intérêt général. Elle aménage un partage des droits et obligations du propriétaire portant sur ces biens. S’appliquant indifféremment au domaine public et au domaine privé étatiques – par le biais des procédures d’affectation, de remise en dotation ou des conventions d’utilisation – elle constitue un mode de gestion immobilière dérogatoire, empreint des spécificités du droit de la propriété et de la domanialité publiques. Accessoire de la décentralisation fonctionnelle, la mise à disposition est étroitement liée à la forme d’organisation administrative de l’Etat. Elle retranscrit, en matière immobilière, la logique décentralisatrice et recherche un équilibre entre dépendance et autonomie patrimoniale des établissements publics nationaux vis-à-vis de leur tutelle. C’est dans le cadre de la décentralisation du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche que ce système révèle son originalité. De même que la décentralisation fonctionnelle est venue rationaliser une relation institutionnelle séculairement complexe entre les universités et l’Etat, la mise à disposition tente d’équilibrer des rapports patrimoniaux historiquement alambiqués. Elle attribue aux universités une fraction des droits et obligations du propriétaire portant sur des immeubles étatiques et leur garantit une certaine autonomie dans leur gestion immobilière. Elle les maintient concomitamment en situation de dépendance vis-à-vis de l’Etat, qui, face aux maigres ressources des établissements, est propriétaire de la majorité des biens dédiés au service public universitaire. L’analyse critique du système de la mise à disposition, de ses modalités d’application et de ses évolutions fournit un angle d’approche novateur à l’étude des relations entretenues entre les universités et l’Etat, sous le prisme du rapport de dépendance/autonomie qui les caractérise. Sur le plan institutionnel, il est aujourd’hui communément admis qu’une autonomie des universités vis-à-vis de l’Etat est nécessaire à l’individualisation du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche, à sa modernisation et à sa dynamisation. Toutefois, la problématique immobilière suscite des hésitations. L’objectif d’une étude critique de la mise à disposition consiste donc à appréhender le degré d’équilibre entre les notions de dépendance et d’autonomie éventuellement atteint et envisageable ainsi que ses conséquences au sein de la relation patrimoniale étatico-universitaire. Or, dans ce contexte, l’efficacité du système est contestable. Fondé sur une théorie minimaliste, il laisse libre court, dans la pratique, à une multitude d’interprétations, de contournements voire de dévoiements, à la source d’une gestion immobilière fluctuante et d’une relation patrimoniale en mal d’équilibre. En dépit des réformes, les résultats de son application sont peu compatibles avec la récente évolution des logiques de gestion immobilière publique qui, en période de crise budgétaire, rejoignent les questionnements que l’immobilier public et le régime de la domanialité publique suscitent depuis la fin du XIXème siècle. La mise à disposition se révèle alors être un outil juridique complexe, à la fois marqué par les enjeux modernes de la gestion de l’immobilier public, par les spécificités du droit dérogatoire auquel celui-ci est soumis ainsi que par les débats contemporains relatifs au statut des universités, aux modalités d’organisation du service public et aux nouveaux moyens d’action publique dans le paysage administratif français.

    Marine Chouquet, Le domaine privé des personnes publiques : contribution a l'étude du droit des biens publics, thèse soutenue en 2013 à Bordeaux 4 sous la direction de Jean de Gaudusson présidée par Pierre Bon, membres du jury : Philippe Yolka (Rapp.), Fabrice Melleray  

    Le domaine privé des personnes publiques, ensemble de biens publics classiquementappréhendé par opposition au domaine public, subit actuellement une profonde mutation. Lamodification des critères de définition du domaine privé engendre l’insertion de nouveauxéléments dans cette catégorie juridique, et invite à redéfinir son rôle au sein de laclassification des propriétés publiques. Le domaine privé ne peut plus être perçu comme unpatrimoine que l’administration exploiterait « à titre privé ». Il remplit indéniablement unefonction d’intérêt général, en fournissant des revenus à ses propriétaires, ou en leur offrant dessupports pour mener leurs missions. Le développement des hypothèses d’utilisation des biensdu domaine privé à des fins non financières conduit à formuler une proposition dehiérarchisation des utilités publiques qu’ils sont susceptibles de procurer. Elle permet deconcilier la recherche d’un profit avec les autres objectifs de l’action publique. Cette qualitése reflète dans la définition du régime de la domanialité privée, qui accorde une placesignificative à l’objectif de préservation de la valeur économique d’un patrimoine public, ets’ouvre, en parallèle, à une logique de protection des fonctions d’utilité publique remarquabledont ses biens sont les supports. La mutation de la domanialité privée dessine les contoursd’un nouveau régime juridique, apte à concilier les impératifs de protection avec la recherchede valorisation économique des patrimoines publics, ce dont la domanialité publique estincapable. On peut alors envisager de l’étendre à l’ensemble des biens publics, comme unesolution à la crise que traverse la domanialité publique.

  • Déborah Thebault, Les biens publics en droit anglais, thèse soutenue en 2019 à Université Paris Cité sous la direction de Michel Degoffe et Stefan Enchelmaier présidée par Philippe Yolka, membres du jury : Aurélien Antoine (Rapp.), Antoine Louvaris (Rapp.), Alison L. Young    

    Le droit anglais ne connaît ni propriété publique ni service public, personnalité morale de droit public ou dualisme juridictionnel. À défaut, le droit anglais met en œuvre une "échelle" de publicisation des biens. Pour identifier les biens publics, cette étude s'appuie sur l'existence d'un droit public substantiel, qui n'a pas encore fait l'objet d'une reconnaissance formelle en droit anglais. Ce droit public substantiel doit être distingué du judicial review, qualifié par les juristes anglais d'administrative law, mais qui ne constitue qu'un droit public processuel. La substantialité du droit public anglais réside dans l'exorbitance diffuse de règles par rapport au droit commun, lequel comprend les règles de common law et d'equity, mais aussi les règles issues du corpus législatif. Grâce à ce régime exorbitant, nous identifions deux catégories de biens publics sur le fondement des critères organique et fonctionnel. D'abord, les biens sont publics sur le fondement du critère organique, en raison du caractère public de la qualité de leur propriétaire. En droit anglais, il existe, selon nous, deux catégories de propriétaires publics : la Couronne, propriétaire public par les privilèges dont elle bénéficie par la logique organique inhérente au souverain ; et, en raison de l'acception anglaise de la propriété, le public lui-même. Ensuite, les biens sont publics sur le fondement du critère fonctionnel en raison de l'intérêt public poursuivi par leur affectation. C'est le cas des entités ayant un objet charitable, ou bien encore des sociétés privatisées - étant précisé qu'en l'absence de personnalité morale de droit public, la privatisation ne peut être conçue dans son sens continental.