Hugo Revillon, Négociation collective et discours économique, thèse soutenue en 2023 à Université ParisPanthéonAssas, membres du jury : Paul-Henri Antonmattei, Gilles Auzero, Julien Icard et Elsa Peskine
Le droit moderne de la négociation collective suggère une rupture fonctionnelle. Les fonctions et finalités traditionnelles de la négociation collective s’estompent au profit d’une fonction économique alternative. La négociation collective participe à la stimulation du système économique. L’étude se propose d’identifier les racines de cette métamorphose. Le droit de la négociation collective évolue sous l’influence d’un discours économique : le discours économique libéral. La décomposition de la structure du discours permet de révéler une argumentation prônant l’instrumentalisation de la négociation collective au service de l’économie de marché. Cette rhétorique est toutefois insuffisante à l’imbrication des discours économique et juridique. La structure du discours économique s’appuie sur des relais, scientifique et institutionnel, pour faciliter sa diffusion dans le droit de la négociation collective. L’encadrement juridique de la négociation collective en ressort bouleversé : deux dynamiques sont identifiées. La première, l’efficience économique, exprime le souci d’optimiser les coûts de l’agent économique par la conclusion d’une convention ou d’un accord collectif de travail d’entreprise. Le droit de la négociation collective est aussi profondément transformé par la dynamique de la prévisibilité économique. Il favorise l’anticipation de la naissance et de la disparition de la convention collective. Mais l’état du droit positif ne révèle pas l’existence d’une hégémonie normative du discours économique libéral. Le droit de la négociation collective présente encore des zones de résistance qui méritent d’être préservées.
Mathilde Marchal, Le contrat de travail lié à la convention collective, thèse soutenue en 2023 à Paris 1, membres du jury : Gilles Auzero (Rapp.), Florence Canut (Rapp.), Françoise Favennec-Hery et Alexandre Fabre
L’étude des rapports entretenus par la convention collective et le contrat de travail est révélatrice des lacunes que peut porter la notion « d’application » de la convention ou de l’accord collectif au contrat de travail pour expliquer – en totalité – l’ensemble des rapports qu’ils peuvent entretenir. Cette considération se trouve confortée par l’observation qui peut être faite, en droit positif, de dispositifs correspondant à une hypothèse relationnelle singulière entre la convention collective et le contrat de travail, celle de leur liaison, « supplémentant » la relation d’application de l’une à l’autre. L’étude des situations correspondant à cette hypothèse de liaison entre le contrat de travail et la convention collective permet de constater pratiquement la singularité relationnelle perçue, de démontrer l’intérêt d’intégrer la qualification de « contrat de travail lié à une convention collective » qui y correspond, et d’amorcer une réflexion sur le régime qui devrait y correspondre.
Pascale Paolini, Teletravail et libertes fondamentales, thèse en cours depuis 2023
Comment la mise en place généralisée du télétravail aujourd’hui met elle en exergue des contradictions profondes dans l’exercice des libertés fondamentales? Etat actuel et évolutions nécessaires du droit européen et local pour une meilleure cohérence du système.
Christophe Migeon, La participation du comité social et économique aux décisions économiques de l’entreprise, thèse soutenue en 2023 à Université ParisPanthéonAssas, membres du jury : Gilles Auzero, Julien Icard et Grégoire Loiseau
Le comité d’entreprise, devenu comité social et économique, participe aux décisions économiques de l’entreprise. Cette participation emprunte, pour l’essentiel, deux formes : l’information-consultation et la négociation. L’information-consultation est la forme la plus ancienne ; sa dynamique est désormais stabilisée. Procédant d’un incrémentalisme désordonné, l’information-consultation du comité social et économique sur les décisions de l’employeur est critiquable. Elle n’a pas pour objet de lier ce dernier. Les sanctions de la méconnaissance de l’obligation d’information-consultation du comité social et économique ne sont pas non plus de nature à assurer l’effectivité de cette forme de participation. L’essor de la négociation comme vecteur de participation du comité social et économique pourrait résoudre ces difficultés. La négociation transforme son rôle dans l’entreprise. Au terme d’évolutions multiples, le comité social et économique devient progressivement co-titulaire du pouvoir décisionnel dans l’entreprise, en étant l’interlocuteur privilégié de l’employeur dans la négociation. Il intervient pour organiser les conditions de sa participation dans l’entreprise, et pour pallier l’absence de négociateur syndical. Cette accession nouvelle du comité social et économique au pouvoir décisionnel de l’entreprise trouve son point d’orgue dans la possibilité offerte aux partenaires sociaux de décider sa transformation en conseil d’entreprise. Ce dernier est seul habilité à négocier avec l’employeur. Cette transformation marque une évolution capitale de sa participation aux décisions économiques de l’entreprise.
Raphaëlle Grandpierre, Le droit du travail, outil de préservation de l’emploi, thèse soutenue en 2022 à Université ParisPanthéonAssas, membres du jury : Anaëlle Donnette, Grégoire Duchange et Nicolas Moizard
Depuis les années 70, l’emploi et la politique de lutte contre le chômage sont devenus le premier chef de justification de toute réforme en droit du travail. Mais l’instrumentalisation de ce droit par le politique est contestée et interroge. Le droit du travail a-t-il pour objet de lutter contre le chômage et de tendre vers le plein emploi ? En mettant de côté la question des finalités, une autre question interroge encore davantage : le droit du travail peut-il et comment pourrait-il influer sur le taux de chômage ? Pour éclairer ces interrogations, cette étude analyse comment le droit du travail français a été pensé et construit pour contribuer à la préservation de l’emploi au niveau national. La démonstration est organisée en deux temps. Premièrement, pour préserver l’emploi, il est nécessaire de maintenir l’emploi dans les entreprises. À cette fin notamment, le droit du travail limite les ruptures de contrats de travail et privilégie l’adaptation des relations contractuelles. Deuxièmement, préserver l’emploi nécessite d’assurer les transitions professionnelles des salariés dont le contrat pourrait être rompu afin de les maintenir en tout état de cause dans l’emploi. Le droit du travail s’y attèle également grâce à de nombreux dispositifs de formation, d’orientation et de reclassement. Cette étude met en évidence le rôle de l’État, mais révèle également celui des partenaires sociaux, y compris au niveau de l’entreprise, dans la poursuite de cet objectif.
Henri Grego, L'intérêt légitime de l'employeur, thèse en cours depuis 2022
Introduit par la jurisprudence et la doctrine , l’intérêt légitime en droit du travail est une notion dont la variabilité a toujours été étroitement lié aux évolutions économiques et structurelles de l’entreprise. Alors que la notion d’intérêt légitime de l’entreprise a déjà fait l’objet de nombreux travaux universitaires ( C.Lecoeur, La notion d’intérêt de l’entreprise en droit du travail, presses Universitaires d’Aix-Marseille, 2015, M. Oustin-Astorg, Les fonctions de l'intérêt de l'entreprise en droit du travail : contribution à l'étude d'un ordre juridique privé, 2010), celui relatif à l’intérêt légitime de l’employeur semble avoir été quelque peu oublié. J’ai donc choisi de traiter exclusivement de l’intérêt légitime de l’employeur, considérant que les évolutions constatées depuis 1990, sur les situations d’emploi, et en particulier la multiplication des statuts (Travailleur indépendant, auto-entrepreneur, développement de la sous-traitance et plus récemment Uberisation), pouvait justifier de porter un travail de recherche exclusivement sur cette notion. L’objectif de ce projet de thèse étant dans une première partie de définir la notion d’intérêt légitime de l’employeur, en cherchant à définir les fondements (l'intérêt et la légitimité) et l'identification de l'employeur, avant d’être en mesure d’en préciser l’articulation (la convergence et la divergence des intérêts) et le contrôle de celui-ci (les limites et les sanctions).
Aurélien Jousselin, La structuration de la représentation du personnel par la négociation : droit et pratique de la négociation institutionnelle, thèse soutenue en 2021 à Paris 2, membres du jury : Florence Canut, Bernard Gauriau et Laurence Pécaut-Rivolier
Les ordonnances « Macron » de 2017 ont permis la rencontre de la négociation collective avec la représentation du personnel. Jamais les partenaires sociaux n’avaient eu une telle possibilité d’adapter celle-ci. Cette révolution s’accompagne toutefois de nombreuses interrogations. L’intérêt de négocier sur l’instance de représentation du personnel doit être relevé. La méthodologie des négociations doit être analysée, compte tenu de l’objet nouveau et de l’apparition de nouvelles modalités de négociation. Aussi, le régime juridique de « l’accord institutionnel », portant sur la représentation du personnel, pose de nombreuses interrogations dans le silence des textes. La négociation collective et le comité social et économique obéissent à certains principes forts : la compatibilité entre ceux-ci s’avère délicate à appréhender. Face à ces interrogations, l’étude des dispositions légales et des premiers accords institutionnels permet de dessiner le contour des premières structurations des comités sociaux et économiques. Le silence des textes sur le régime juridique de l’accord institutionnel nécessite de s’interroger entre droit commun et droit spécial sur les conséquences de ces accords en termes d’équivalence entre les modes de conclusion et d’autonomie vis-à-vis de principes importants que sont le cycle électoral et le transfert d’entreprise. Un régime juridique autonome sera dessiné, mêlant droit positif et propositions prospectives, afin de faire de l’accord institutionnel un objet juridique reconnu et efficient pour l’instance de représentation du personnel.
Thomas Montpellier, La prévention des risques professionnels à l'épreuve de la responsabilité de l'employeur, thèse soutenue en 2021 à Paris 1, membres du jury : Morane Keim-Bagot (Rapp.), Franck Héas (Rapp.)
La prévention des risques professionnels à l'épreuve de la responsabilité de l'employeur.
Ani Minasian, L'individuel et le collectif en droit du travail, thèse en cours depuis 2020
Paul Viguié, Les sanctions en droit du travail, thèse en cours depuis 2019
La sanction, prise dans sa forme juridique, est nécessairement une décision humaine. Elle peut se définir comme la consécration d'une règle par l'ordre juridique, la conséquence attachée à cette règle ou encore à la mise en oeuvre autoritaire de cette conséquence. La peine infligée à l'auteur d'une infraction se décline selon l'autorité chargée de la répression et la nature de la mesure. Ainsi, sanctions disciplinaires, pénales, administratives et internationales visent ensemble à assurer le respect des règles de droit du travail. La tradition française en matière de sanction en droit du travail n'a pas été bâtie, à la différence d'autres pays européens, sur la mise en place d'un régime général. Au gré des domaines furent créés différents dispositifs, à charge pour le juge et la doctrine de systématiser leurs conditions communes. Les sanctions ne font pas exception à la fondamentalisation du droit du travail, et n'échappent pas à l' « irrésistible extension du contentieux du procès équitable », notamment sous l'influence du droit européen et, dans une moindre mesure, communautaire. Particulièrement notable, l'imbrication des voies pénales et administratives se résout par la primauté de l'action publique. Deux voies étaient ouvertes au législateur : celle d'une dépénalisation, en limitant le recours au droit pénal à la répression des comportements les plus graves et celle d'une déjudiciarisation consistant à désolidariser la sanction de la l'incrimination qui la précède.
Alexia Weissenbacher, L'articulation entre convention collective et contrat de travail : Regards sur les transformations de la négociation collective, thèse soutenue en 2017 à Paris 1, membres du jury : Gilles Auzero (Rapp.), Florence Canut (Rapp.), Grégoire Loiseau et Raymonde Vatinet
La négociation collective a connu une évolution profonde de ses enjeux. Elle ne vise plus seulement à pallier les inégalités inhérentes à la relation de travail individuelle ; en raison de la promotion de la démocratie sociale, elle s'inscrit désormais dans une logique d'accompagnement du pouvoir de l'employeur. A cette fin, le niveau de négociation de l'entreprise est privilégié. La qualité des négociateurs a été précisée et les règles entourant le processus de négociation renforcées, pour parvenir à plus de légitimité de la nonne conventionnelle. Partant, les obstacles à l'application des conventions et accords collectifs sont remis en cause. Dans l'articulation de la convention collective et du contrat de travail, le principe de faveur est affaibli. L'intérêt du salarié pris individuellement recule au profit de la collectivité de travail dans laquelle il s'inscrit. L'intangibilité du contenu obligationnel du contrat de travail régresse elle aussi. Les dispositifs mis en place par la jurisprudence et le législateur pour forcer l'application d'un accord collectif contraire à une stipulation contractuelle se sont multipliés. La protection des droits fondamentaux apparaît désormais comme la seule limite infranchissable à la suprématie de la convention collective vis-à-vis du contrat de travail.
Mathieu Basset, Les accords de travail de niveau transnational., thèse en cours depuis 2017
Mathieu Basset, Devoir de vigilance des sociétés mères et donneuses d’ordre, thèse soutenue en 2017 à Université ParisPanthéonAssas
La loi sur le devoir de vigilance s’inscrit dans un mouvement international de responsabilisation accrue des entreprises. Apparu dans les instruments internationaux du droit souple, il a pénétré le droit interne par la loi du 27 mars 2017. Le législateur est venu lui apporter un caractère contraignant en mettant à la charge des sociétés mères et donneuses d’ordre des prescriptions comportementales afin de prévenir les effets néfastes sur les droits humains et sur l'environnement liés à leurs activités, mais également à l'ensemble des activités de leur chaîne de valeur et d'en rendre compte dans un plan de vigilance. Aux contours flous,le devoir de vigilance invite à repenser les frontières de l'entreprise et le principe d'autonomie juridique des personnes morales. Son originalité réside dans la combinaison d’une responsabilité préventive visant à prévenir ex ante la survenance du dommage et une responsabilité réparatrice permettant aux victimes d’engager la responsabilité juridique de la société mère ou donneuse d’ordre. Les modalités de mise en œuvre et l’effectivité de ces deux dimensions feront l’objet de cette étude.
Abdenbi Allouch, L'argument comparatiste : essai sur les mutations du droit du travail, thèse soutenue en 2016 à Avignon sous la direction de Martine Le Friant, membres du jury : Pascal Lokiec (Rapp.), Pierre-Yves Verkindt (Rapp.), Pascale Deumier
Le discours comparatiste influence le débat sur l’impératif d’efficacité économique en droit du travail ; là où la science comparative exige du temps, de l’attention aux aspects juridiques et extra-juridiques pouvant influencer un système juridique, une méthode et de la modestie (quant aux conclusions auxquelles le comparatiste parvient), la rhétorique comparatiste n’obéit pas aux contraintes du droit comparé. Le comparatisme d’intimidation, principale figure du discours comparatiste dominant en droit du travail, s’érige en instrument de diffusion de « bonnes » pratiques et de « modèles » d’institutions juridiques jugés économiquement efficaces. Il est un outil de propagande ; il permet de dissimuler les positions des différents acteurs sous une apparence de neutralité axiologique et scientifique. La mobilisation de l’argument comparatiste influence et bouscule les catégories juridiques et les représentations sur lesquelles repose le droit du travail.
Hanane Ouirini, Essai sur l'européanisation du droit de la consommation, thèse soutenue en 2016 à Avignon en co-direction avec Agnès Maffre-Baugé, membres du jury : Malo Depincé (Rapp.), Marie-Pierre Dumont-Lefrand (Rapp.)
L’actualité du droit de la consommation est aujourd’hui intrinsèquement marquée par le droit européen. Qu’il s’agisse du droit européen des contrats en général ou du droit européen de la consommation en particulier, la matière est au cœur d’une tension opposant les institutions communautaires qui, animées par la volonté de construire un Code civil européen couvrant le droit des contrats, de la responsabilité délictuelle, quasi-délictuelle et même la gestion d’affaires, sont confrontées aux craintes et réticences locales attachées à leurs spécificités. Le débat juridique analyse et évalue les impacts structurels et conjoncturels résultant de cette européanisation du droit de la consommation. Que celle-ci soit souhaitée ou subie, la réalité de l’évolution du contexte socio-économique ne permet plus aujourd’hui de faire l’économie d’une approche globale et de portée européenne, ne serait-ce qu’au regard de la nécessité de promouvoir et développer le marché intérieur. Le droit de la consommation représente la matière au carrefour d’intérêts divergents qu’il convient de concilier, d’où les propositions d’homogénéisation du droit au niveau européen, portant la promesse d’un droit homogène dont la lisibilité et l’accessibilité seraient le gage d’une protection efficiente du consommateur, acteur clé dans ce vaste processus.
Marie Rogues, La motivation en droit du travail., thèse en cours depuis 2015
Annelieke Gillotot, Relevé d'office du juge et droit de la consommation, thèse soutenue en 2014 à Avignon en co-direction avec Agnès Maffre-Baugé, membres du jury : Christophe Albiges (Rapp.), Malo Depincé (Rapp.)
L’office du juge est organisé par le Code de procédure civile au sein des principes directeurs : le juge est tenu de trancher le litige en droit et qu’il dispose, pour ce faire, de la faculté du relevé d’office de moyens de droit. Cette mission soulève une difficulté particulière en droit de la consommation, et notamment au regard du droit des clauses abusives et du crédit à la consommation : ces domaines impliquent la prise en compte du déséquilibre contractuel dû à la faiblesse du consommateur. L’office du juge est confronté à la nécessité de protéger cette « partie faible », ce qui pose la question de savoir si le juge dispose ou non de la faculté du relevé d’office. La difficulté de la réponse à y apporter ouvre une riche controverse (Partie 1) ; le législateur, au gré des réformes, et le juge, au gré des revirements, vont enrichir cette dernière pour finalement aboutir à une consécration du relevé d’office du juge (Partie 2).Le juge national avait d’abord clairement désapprouvé l’exercice du relevé d’office au nom de la notion d’ordre public de protection. La controverse était finalement soumise à l’appréciation du juge communautaire qui avait permis une consécration de la faculté du relevé d’office. Poussé par la jurisprudence communautaire, le législateur français avait fini par s’aligner sur cette exigence. Puis c’est une nouvelle impulsion de la jurisprudence communautaire qui va à nouveau remettre en cause le droit interne par la consécration d’une obligation du relevé d’office pour le juge. La nouvelle loi « Hamon » du 17 mars 2014 et la jurisprudence interne récente ne témoignent pas d’une réelle satisfaction des exigences posées par le droit communautaire.Il faut saisir, de l’ensemble de cette construction laborieuse de la jurisprudence et de la législation interne, la difficulté que pose la question du relevé d’office du juge en droit de la consommation, qui appelle de prochaines évolutions.
Lou Pratali, La qualification de la prestation de travail., thèse en cours depuis 2012
Laure Beaujot, Les statuts des syndicats professionnels., thèse en cours depuis 2012
Maud Rivolier, La communauté de travail : étude juridique, thèse soutenue en 2023 à Paris 1 sous la direction de Pierre-Yves Verkindt, membres du jury : Frédéric Géa (Rapp.), Alexandre Fabre
Depuis près de deux siècles, la communauté de travail est au centre des controverses sur le sens du droit collectif moderne. Rarement définie, elle s'impose pourtant chaque fois que le droit du travail est confronté à une crise du collectif. Aujourd’hui plus que jamais, la communauté de travail semble se trouver au cœur de toutes les préoccupations. Notion souple, elle s’adapte à la diversité des réalités collectives et évolue au gré des bouleversements socio-économiques. Cette souplesse fait la force de la notion en lui permettant de traverser les époques, les évolutions juridiques et les doctrines. Mais elle devient sa faiblesse lorsque son adaptation se fait au détriment de sa réalité. La communauté de travail est en effet désormais mise à l’épreuve par les transformations globales du monde du travail. Éclatée entre plusieurs sociétés distinctes, fragmentée par les choix de gestion économique des entreprises, perturbée par la révolution numérique, son existence est profondément remise en cause. Plus encore, depuis 2017, la grande liberté conférée aux acteurs du travail par l’essor de la négociation collective fait craindre le risque d’une conception altérée, voire instrumentalisée de la communauté de travail. Faut-il considérer que la notion appartient au passé ou peut-elle encore avoir une place pour répondre aux enjeux du droit du travail ? De cette étude, il ressort que la communauté de travail doit être réancrée sur sa constante : saisir les liens collectifs entre les travailleurs pour garantir une expression collective effective de leurs intérêts.
Jean-Eudes Maes-Audebert, Volonté du salarié et subordination juridique : étude sur les intérêts des parties au contrat de travail, thèse soutenue en 2023 à Paris 1 sous la direction de Grégoire Loiseau, membres du jury : Gilles Auzero (Rapp.), Charlotte Goldie-Genicon
Le droit du travail s’est construit en réaction à la volonté du salarié. Il en a cantonné les effets afin d’éviter que le salarié ne desserve ses propres intérêts. Les réformes contemporaines ont cependant accordé à la volonté du salarié une place sans précédent. Cette promotion interpelle. Mise en avant par le législateur et la jurisprudence, la volonté du salarié n’en demeure pas moins subordonnée. Un paradoxe se laisse apprécier. Comment concilier la montée en puissance de la volonté du salarié avec le phénomène de la subordination juridique ? Cette ascension est-elle de nature à redéfinir la teneur des interactions entre les intérêts des parties au contrat de travail ? La promotion de la volonté du salarié appelle à investiguer l’architecture de l’ordonnancement des relations de travail. Liée à la subordination juridique, la volonté du salarié offre un prisme d’analyse sur la façon dont les dynamiques contemporaines du droit du travail remodèlent les intérêts des parties au contrat de travail. La subordination de la volonté du salarié amorce une investigation des fondements du droit du travail et de ses évolutions. Cette investigation est d’autant plus nécessaire que l’encadrement de la subordination de la volonté du salarié ne relève pas que du droit du travail. Les évolutions du droit des contrats concordent avec la recherche de la protection de la partie faible au contrat et avec le contrôle de l’unilatéralisme. Dans ce contexte, les interrogations se multiplient. Les problématiques soulevées par la subordination de la volonté du salarié se renouvèlent, tant quant à la délimitation des frontières du salariat, qu’au traitement de la subordination de la volonté du salarié.
Chloé Grenouilleau, Promotion des acteurs sociaux et construction du dialogue social, thèse soutenue en 2021 à Paris 1 sous la direction de Grégoire Loiseau, membres du jury : Françoise Favennec-Hery (Rapp.)
Le contrat de travail est un contrat par nature inégalitaire puisqu'il est caractérisé par l’existence d’un lien de subordination. C’est ainsi que l’exercice du syndicalisme tempère le rapport déséquilibré induit par la relation contractuelle. Assurer la représentation et la défense du collectif sont donc deux actions majeures des syndicats. Mais, pour rendre effectif ce rôle, encore faut-il que des salariés s’engagent dans le syndicalisme. Or, aujourd’hui, cet engagement ne rencontre pas un succès grandissant en raison, entre autres, des pratiques de discrimination dans de nombreuses entreprises. Il convient dès lors d’assurer une articulation entre la carrière professionnelle et l’engagement syndical. Pour y parvenir, l’un des axes à emprunter est celui de la négociation collective. En outre, pour assurer la revitalisation du syndicalisme et permettre au dialogue social de prospérer dans l’entreprise, l’ensemble des acteurs y exerçant une quelconque activité doit comprendre non seulement la place des représentants du personnel mais également la leur en raison de la qualité d’acteur social qu’ils détiennent. Le dialogue social est ainsi l’affaire de la communauté sociale tout en étant au service de celle-ci. C’est en communiquant avec les salariés et en les sensibilisant que ce dialogue sera renforcé et pleinement effectif pour être porteur d’innovations et d’avancées sociales bénéfiques tant pour les collaborateurs que pour les entreprises.
Nathalie Mihman, La mobilité juridique des rapports de travail : essai sur la coordination des normes et des prérogatives juridiques, thèse soutenue en 2018 à Paris 10 sous la direction de Antoine Lyon-Caen, membres du jury : Pierre Rodière (Rapp.), Horatia Muir Watt
La terminologie « mobilité juridique « émerge des mouvements de personnel dans des ensembles organisés et normatifs plus vastes que l’entreprise. Au départ cette notion a permis de mettre en exergue la mutation du rapport de travail lorsque ce dernier, sans perdre son rattachement avec une entreprise située dans un ordre juridique étatique, se déploie à l’étranger, en direction d’un nouvel ordre étatique et en direction d’une nouvelle entreprise. La mobilité juridique est une mobilité par changement du droit applicable. Elle est le fruit d’un déplacement spatial du rapport de travail entre des espaces normatifs mutuellement irréductibles. L’assise des rapports de travail juridiquement mobiles est formée par des organisations en dehors des organisations formelles. Il s’agit d’organisations incomplètes. Celles-ci induisent des exigences de coordination.Dans une première partie, il est pris soin de dégager les coordinations normatives comme premières. C’est à partir de celles-ci que peuvent être induites les modalités de coordination des personnes impliquées dans la mobilité. il en ressort une figure renouvelée de l’employeur (il sera question des maitres de l’organisation). Il en ressort également une figure renouvelée du travailleur, dont le développement des « capacités », implique un meilleur ancrage de ses droits dans son environnement normatif de travail et d’emploi. Il en découle en définitive un ordonnancement renouvelé des rapports du travail. Dans une seconde partie, il est porté attention à la similarité des questions juridiques que posent dans un contexte de globalisation les rapports de travail juridiquement mobiles, qu'ils soient réputés de droit purement interne ou internationaux. La coordination des ordres juridiques a pour objet la coordination des entreprises et des travailleurs : il s'agit d'une coordination des coordinations, réalisée par le biais d'une pluralité de principes et de méthodes. Il en ressort l'existence d'un droit international privé du travail contribuant à l'ordonnancement transnational des relations du travail. En définitive, les fonctions du droit du travail et du droit international privé sont mises à l'épreuve dans le cadre de(s) marché(s) nationaux et internationaux
Philippe Piccoli, L'expansion de la formation professionnelle continue, thèse soutenue en 2016 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Yannick Pagnerre (Rapp.)
Depuis les années 1970, la formation professionnelle continue s’étend à de nombreuses activités économiques et sociales, salariées comme non-salariées. La loi et le contrat, notamment, permettent cette expansion réalisée dans une grande instabilité normative. Constamment modifiés, les dispositifs d’accès à la formation sont souvent complexes et parfois peu efficaces. Le financement de la formation professionnelle suscite également des interrogations en raison des nombreuses personnes, publiques ou privées, chargées d’intervenir dans ce domaine. Le dispositif peut et doit être amélioré afin de permettre l’expansion de la formation professionnelle là où celle-ci mérite d’être encouragée.
Maxime Dufour, Clauses contractuelles et non-concurrence : approche de droit des affaires, thèse soutenue en 2016 à Bordeaux sous la direction de Laura Sautonie-Laguionie, membres du jury : Yves Picod (Rapp.), Gilles Auzero
Dans notre monde actuel, les entreprises utilisent, pour se prémunir de toute atteinte et protéger au maximum leurs intérêts économiques, des techniques contractuelles élaborées par la pratique telles que les clauses de non-concurrence, les clauses de confidentialité, les clauses de non-réaffiliation et les clauses de non sollicitation.Ces clauses occupent de multiples champs de l’activité contractuelle en mêlant le droit des contrats, le droit des affaires et le droit du travail. Elles visent à interdire au cocontractant, d’exercer une activité professionnelle, de divulguer des informations secrètes, ou encore d’embaucher certains collaborateurs. Ainsi, elles viennent limiter une liberté fondamentale, plus spécialement la liberté du commerce et de l’industrie. Dès lors, il semble nécessaire d’élaborer un régime juridique commun à toutes ces clauses afin de préserver d’un coté la protection de l’activité économique des entreprises et de l’autre la sauvegarde de la liberté économique des contractants soumis à de telles clauses. L’intérêt d’un régime commun est d’anticiper les conditions de validité et de mise en œuvre des ce type de clauses. De cette façon, la prévisibilité ne ferait plus défaut aux contractants. L’élaboration de ce droit commun passe par deux étapes. La première est relative à l’identification des clauses limitatives de concurrence. Il s’agit de saisir leur autonomie par rapport aux contrats dans lesquels elles peuvent être insérées et d’en tirer les conséquences au niveau leur validité. La seconde est relative à la mise en œuvre de ces clauses. Leur application est délicate car dépendante pour une grande partie de la précision de leur contenu. En cas de non-respect, un vaste choix de remèdes est offert au contractant déçu pour venir sanctionner le manquement contractuel constaté.
Victor Margerin, La reprise des contrats de travail sous le prisme des marchés publics, thèse soutenue en 2016 à La Réunion sous la direction de Ronan Bernard-Ménoret, membres du jury : Hélène Hoepffner (Rapp.), Thierry Lamarche
La reprise des contrats de travail est indéniablement déterminée par le transfert d'entreprise. C'est en effet en raison d'une telle opération que le législateur français prévoit, à l'article L1224-1 c.trav., que tous les contrats de travail en cours au jour du transfert sont automatiquement repris par le cessionnaire. Cependant, ce lien est aujourd'hui oublié sous un enchevêtrement de dispositifs alternatifs ou spécifiques, prévoyant une reprise des contrats de travail en dehors de tout transfert d'entreprise. Ces développements s'expliquent notamment par l'échec du droit européen à harmoniser la législation des États membres sur le sujet. Le droit européen, ne souhaitant pas instaurer une protection uniforme, a fait le choix de n'apporter qu'une définition lacunaire des notions qui constituent pourtant l'essence du transfert d'entreprise. En somme, chaque État est donc libre d'interpréter à sa convenance les dispositions des directives successives, avec, pour seule régulation, l'œil avisé de la Cour de Justice de l'Union Européenne. Cette cacophonie juridique est une opportunité certaine. En effet, au vu de la diversité d'appréhension du sujet par différents droits internes (principalement allemand, anglais et espagnol), une étude comparative permet de mettre à jour les avantages et les carences de notre droit français. Pour ce faire, il conviendra de partir du seul consensus européen sur la question : la perte d'un marché ne constitue pas un transfert d'entreprise. De la redéfinition de l'entreprise à la protection des droits de l'employeur et des salariés, la présente étude propose une simplification du droit du transfert d'entreprise.
Sophie Selusi, La cession du contrat de travail, thèse soutenue en 2015 à Montpellier sous la direction de Christine Neau-Leduc et Paul-Henri Antonmattei, membres du jury : Gilles Auzero (Rapp.), Solange Becqué
S’inscrivant dans un contexte juridique et économique propice, cette thèse propose une utilisationrenouvelée de la cession de contrat adaptée au rapport de travail. Les finalités de ce mécanismejustifient l’opportunité de sa réception et de sa réalisation augurant son développement. Constatantque ni le législateur, ni le juge, ne font référence au dispositif, un effort de définition est accompli.La cession du contrat de travail est l’opération consistant à changer d’employeur avec l’accord dusalarié sans rupture. Repensées sous le prisme de la cession de contrat, les opérations se situant àla frontière du transfert d’entreprise sont clarifiées et réalisées de manière cohérente.Le particularisme du rapport de travail suppose que soit mis en place un système légal garantissantle consentement du salarié. Instaurant une continuité contractuelle, la mise en œuvre de cetinstrument confirme son utilité.
Lucas Bento de Carvalho, L'apport du droit du travail à la théorie générale de l'acte juridique, thèse soutenue en 2015 à Bordeaux sous la direction de Gilles Auzero, membres du jury : Thomas Genicon (Rapp.), Sébastien Tournaux et Guillaume Wicker
Par les représentations qu’elle véhicule et les solutions qu’elle encourage, l’édificationd’une théorie générale n’est jamais neutre au plan axiologique. Sa construction repose certes sur laconnaissance du droit positif de lege lata, mais la mise en ordre qui en résulte demeure quant à elleintimement liée aux perceptions et aux convictions de l’interprète. C’est en ce sens que doit êtreabordée la question de l’apport du droit du travail à la théorie générale de l’acte juridique. La présenteétude met en évidence le caractère protéiforme du phénomène envisagé, sans occulter les situations oùla discipline fait davantage figure de contre modèle que de véritable source d’inspiration. Adoptant unpoint de vue prospectif, cette recherche met en évidence les aspects de droit du travail susceptiblesd’encourager la promotion d’une théorie de l’acte juridique marquée par le pluralisme. La matièrecontribue ainsi à souligner la variété des conditions dans lesquelles se forme la volonté de s’engager,tout comme la diversité de ses modes d’expression. Elle témoigne également d’une capacité certaine àtraduire sur le terrain du Droit, afin de mieux les appréhender, l’altérité des rapports de force et lamutabilité des données factuelles qui accompagnent l’exécution des actes juridiques.
Léa Amic, La loyauté dans les rapports de travail, thèse soutenue en 2014 à Avignon sous la direction de Franck Petit, membres du jury : Bernard Bossu (Rapp.), Denis Mouralis et Valérie Bernaud
Quant à la loyauté, deux éléments particuliers interpellent. D’une part, la relative récence de son émergence dans l’édifice juridique, spécialement jurisprudentiel, contractuel et social, ainsi que la relative novation de ses applications dans le contrat, lequel était classiquement peu investi par le juge, et qui désormais s’inonde de diverses obligations de loyauté à charge des parties. D’autre part, c’est le caractère adapté, voire pertinent, presque affuté de ses commandements qui constitue finalement la première qualité de l’obligation et, pour le rapport de travail, relation déséquilibrée par excellence, la preuve de son utilité contractuelle. Des différences sensibles doivent être bien sûr observées selon qu’elle s’applique aux rapports collectifs ou individuels de travail. La loyauté appelle à cet égard un effort de conceptualisation qui nécessite de s’intéresser précisément à la notion sous l’angle de son émergence pour ensuite s’attacher efficacement à démontrer l’utilité de l’obligation
Julie Arroyo, La renonciation aux droits fondamentaux, thèse soutenue en 2014 à Grenoble sous la direction de Xavier Dupré de Boulois, membres du jury : Stéphanie Hennette-Vauchez (Rapp.), Pascale Deumier et Stéphane Gerry-Vernieres
La renonciation aux droits fondamentaux peut être entendue comme l'engagement juridique d'une personne de ne pas exercer ou d'exercer dans un sens déterminé un de ses droits fondamentaux. Malgré sa relative clandestinité dans la doctrine, la renonciation existe et connaît un régime juridique uniforme. Elle entretient des relations complexes et ambivalentes avec la liberté de son auteur. En effet, la renonciation présente pour particularité de constituer une manifestation significative de la liberté tout en risquant de la contrarier. Du reste, elle implique un aménagement plus ou moins important de l'exercice des droits et, ainsi, une limitation variable de la liberté du renonçant. L'étude de son champ et de sa typologie permet de révéler son existence et d'apprécier son étendue. Seuls certains droits fondamentaux peuvent voir leur exercice aménagé par leur titulaire, la ligne de séparation des droits « renonçables » et « irrenonçables » résultant d'une tension entre la liberté et l'ordre public. L'étude des supports de la renonciation, de sa structure et de ses modalités rend compte de sa fréquence importante et de ses formes juridiques variées. En dépit de ses formes multiples, la renonciation est enserrée dans des règles homogènes. Plus que tout autre acte juridique, elle est susceptible d'attenter à la liberté de son auteur, de sorte que son existence, de sa naissance à sa disparition, est encadrée. La validité de l'acte de renonciation est subordonnée à des conditions qui se trouvent sanctionnées en cas de non-respect. L'exécution de l'engagement du renonçant et son éventuel refus de respecter sa volonté passée sont, eux aussi, enserrés dans certaines normes. Ces dernières dépendent, pour la plupart d'entre elles, des formes revêtues par la renonciation. L'étude favorise, par ailleurs, la compréhension des droits fondamentaux. Elle éclaire leur signification ainsi que leur régime juridique.
Géraldine Dirrenberger, Employeur, salarié et vie privée, thèse soutenue en 2012 à Montpellier 1 sous la direction de Stéphane Darmaisin, membres du jury : Christine Neau-Leduc (Rapp.), Isabelle Cornesse, Olivier Sautel et Éric Bramat
La frontière entre vie privée et vie professionnelle tend vers la confusion. La notion de vie privée est variable par l'importance que chaque individu lui accorde, elle suit également l'évolution de la société. Au sein de la relation de travail, caractérisée par le lien de subordination, quelle place doit-on lui assigner ? S'il est admis qu'il existe bel et bien une sphère privée résiduelle dans l'entreprise, comment la conjuguer efficacement avec les impératifs de productivité du monde du travail ? Malgré une forte protection de la vie privée du travailleur, l'empiètement de la sphère professionnelle sur la sphère privée est un risque supplémentaire de voir la notion se vider de sa substance. Notre étude s'attache à mettre en exergue les mutations intervenues dans l'entreprise notamment par l'usage des nouvelles technologies et les difficultés qu'elles occasionnent au regard de l'impératif de respect des libertés individuelles du salarié. Dans ce contexte, nous envisagerons des solutions pour faire coexister les deux sphères au regard de l'exigence de proportionnalité qui doit présider à la relation de travail.
Krys Pagani, Sport et droit du travail : entre droit commun et droit spécial, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Catherine Puigelier (Rapp.)
Parce que la singularité du sport s’est estompée au fur et à mesure qu’il développait sa dimension économique et que certains de ses acteurs adoptaient un comportement économique rationnel, le droit commun du travail et les normes forgées par l’Union européenne ne pouvaient que trouver application dans ce secteur d’activité. Des particularités du sport la conclusion est parfois tirée qu’une « exception » doit être reconnue et qu’un droit spécial du travail d’origine étatique doit être élaboré. Si leur pertinence n’est pas avérée, celle d’un droit professionnel largement bâti par ses acteurs via la négociation collective nationale ou européenne (dans les limites fixées par la norme étatique) l’est davantage. L’exclusion du droit commun du travail ou de celui de l’Union européenne n’est admissible que si des éléments objectifs et concrets la justifient. Elle ne peut légitimement reposer sur l’existence d’une « coutume ». Si les contraintes liées à l’aléa sportif, à l’équité sportive ou à la brièveté de la carrière de certains de ses acteurs peuvent en relever, encore faut-il les apprécier avec rigueur et mesurer strictement leurs effets sur les conditions d’emploi et de travail. Le particularisme résiduel d’une activité économique ne saurait justifier de l’exclure du droit commun du travail ou du droit de l’Union. L’application de certaines règles étatiques dans le sport pose des problèmes d’articulation normative, notamment en raison d’interférences avec des règles sportives. Mais de ce jeu-là, le droit commun du travail ou le droit de l’Union sort souvent vainqueur. Neutralisant les frontières tracées par le mouvement sportif, notamment entre le sport amateur et le sport professionnel, il obtient, via son juge, que ses impératifs l’emportent.
Aurore Portefaix, Essai sur la responsabilité du salarié, thèse soutenue en 2011 à Montpellier 1 sous la direction de Stéphane Darmaisin, membres du jury : Hugues Kenfack (Rapp.)
La question de la responsabilité du salarié demeure essentielle encore aujourd'hui. En raison de la subordination qui caractérise le travail salarié, des aménagements semblent nécessaires pour organiser les rapports que le travailleur entretient avec l'employeur et les tiers. Deux logiques président à la responsabilité du salarié. Une logique de protection d'abord, qui permet de soustraire le salarié du droit commun. L'ordonnancement d'une protection s'analyse en un impératif dont la finalité est de rétablir le déséquilibre inhérent au contrat de travail. L'effectivité de cet impératif se traduit avec force par l'octroi d'une immunité d'origine légale et jurisprudentielle. Cette protection ne se veut pas absolue pour autant. Certains comportements justifient la réapparition du droit commun et la sanction du salarié du point de vue pénal et civil. Sa protection suscite alors une question : qu'advient-il de l'indemnisation des dommages qu'il aura causés à l'occasion de son travail ? Dans un premier temps, cette logique de protection semble mal s'articuler avec l'indemnisation de la victime. En écartant l'application du droit commun, on prive en effet la victime d'un débiteur. C'est sans compter sur la diversité des mécanismes offerts par le droit positif et qui assurent l'efficacité de la logique indemnitaire. Efficace, elle n'est pas infaillible et présente des limites qui ne pourront pas toujours être corrigés et conduiront à priver d'indemnisation la victime du salarié.
Magali Marguerite, Le droit à la représentation des salariés dans la négociation collective, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Pierre-Yves Verkindt (Rapp.), Bernard Gauriau et Raymonde Vatinet
La négociation collective est au coeur de la production normative en droit du travail. Le droit à la négociation collective proclamé au niveau constitutionnel, européen et international appartient au salarié ; ce dernier ne l’exerce que par ses représentants. Son droit individuel à la négociation se résout donc dans un droit à être représenté qui se déduit de la lecture de l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution et des textes internationaux et européens. Il est paré des qualités d’un droit « justiciable ». Droit subjectif, il peut être invoqué par le salarié. Droit-créance, celui-ci peut revendiquer la mise en place d’une représentation légitime. La légitimité, concept sociologique, doit trouver traduction juridique à travers le droit des représentés de choisir librement leur représentants, et le droit de ceux-ci d’être protégés dans leur mission de négociation. Le vecteur de légitimité est trouvé dans l’expression de la volonté des salariés en vue de la désignation de leurs représentants. Cette expression peut prendre la forme d’un mandat ou de l’élection. Au regard des caractéristiques de l’acte conclu à l’issue de la négociation (l’effet erga omnes des conventions et accords) et de l’intérêt défendu (l’intérêt collectif), l’élection doit être privilégiée. Le législateur s’attache à réaliser la condition de légitimité. Preuve en est la promotion de l’audience électorale par la loi du 20 août 2008. Dans le cadre international et européen, la réalisation d’un droit à la représentation n’est encore que partielle.
Jérôme Davant, Les incidents liés à la protection juridique des investissements étrangers en Chine : effectivité des voies de recours, thèse soutenue en 2010 à Montpellier 1 sous la direction de Daniel Mainguy, membres du jury : Hervé Causse (Rapp.)
Ce travail de recherche a pour objectif d'apporter un éclairage et une compréhension sur l'évolution du droit des affaires en Chine et plus particulièrement sur les outils de protection des investissements pour les étrangers dans ce pays. Cet ouvrage analyse les incidents liés à la protection juridique des investissements étrangers ainsi que l'effectivité des voies de recours en cas de différents.
Fadilé-Sylvie Rifaï, La présomption de bonne foi, thèse soutenue en 2010 à Montpellier 1 sous la direction de Séverine Cabrillac, membres du jury : Marc Nicod (Rapp.)
La présomption de bonne foi a une valeur légale, puisqu’elle est consacrée par le législateur dans l’article 2274 du code civil. Cette thèse est consacrée à l’étude de la bonne foi-croyance erronée pour cerner son contenu et préciser son régime juridique, étant donné que cette notion est toujours accusée d’être floue et vague. La croyance erronée résulte des éléments objectifs matériels significatifs de vérité et invasifs de l’état d’esprit de sa victime. Le critère de la prise en considération et de la protection de cette dernière est la légitimité de la croyance erronée qui qualifie la bonne foi. Lorsque la croyance erronée est légitime, la présomption de bonne foi est consolidée et peut, par conséquent, déployer tous ses effets juridiques. La bonne foi qualifiée jouit, ainsi, d’un pouvoir protecteur et créateur de droits subjectifs qui porte atteinte à la puissance et à l’effectivité de la loi et de certains principes juridiques. La bonne foi a également une fonction fondatrice de certaines règles légales. Cependant, la puissance normative de la présomption de bonne foi consolidée n’est pas absolue ; elle est limitée par la préséance de certaines règles légales qui ne peuvent céder à la fonction créatrice et protectrice de la bonne foi qui est, ainsi, sacrifiée au profit de certains intérêts supérieurs.
Nicolas Pépin, Le lien de subordination juridique dans les relations de travail, thèse soutenue en 2010 à Montpellier 1 sous la direction de Bruno Siau, membres du jury : Stéphane Darmaisin (Rapp.)
La notion de subordination juridique est en confrontation directe avec l'évolution du marché du travail. Face aux contraintes du droit du travail, le salariat est fuit ce qui favorise les montages juridiques mais aussi les réelles alternatives. Ces dernières alimentent aujourd'hui le phénomène des travailleurs économiquement dépendants qui témoigne de l'extension d'une zone grise aux frontières du salariat. Il devient donc parfois bien difficile de définir le contrat de travail. Pourtant, les enjeux sont importants, notamment au regard de l'infraction de travail dissimulé. La subordination juridique étant le critère distinctif du contrat de travail, il convient de faire le point sur les approches successivement proposées par la doctrine et la jurisprudence. Le but de cette thèse est d'essayer de faire le bilan de cette notion instable pour prévoir et proposer les évolutions possibles.
Hervé-Georges Bascou, La pratique du contrôle URSSAF : 25 ans d'expérience pour des droits de la défense de l'entreprise cotisante, thèse soutenue en 2010 à Montpellier 1 sous la direction de Daniel Mainguy, membres du jury : Franck Petit (Rapp.), Bruno Siau et Stéphane Darmaisin
La pratique du contrôle URSSAF confronte une entreprise cotisante à un contrôle des autorités chargées du recouvrement des cotisations URSSAF. La procédure de contrôle doit être appréhendée de manière claire et précise à travers trois questions essentielles, le contrôle, le recouvrement, la contestation.
Marie Leclerc, La correction du contrat de travail, thèse soutenue en 2021 à Paris 2 sous la direction de Jean-Michel Olivier, membres du jury : Sarah Bros, Yannick Pagnerre et Sébastien Tournaux
La correction du contrat de travail représente l’ensemble des mécanismes juridiques qui organisent une modification, un amendement de ce contrat spécifique, en vue de l’amener à correspondre à un certain standard. La correction contractuelle constitue donc une limite au principe de force obligatoire et surtout à son corollaire, l’intangibilité du contrat. Conformément aux termes de l’article 1193 du Code civil, il est possible de distinguer entre les mécanismes de correction qui sont mis en œuvre par la voie négociée, et ceux qui sont imposés aux parties.L’étude de ces différents mécanismes et de leurs régimes respectifs permet de mettre à jour les impératifs qui guident la correction. Le contrat de travail reste un objet juridique particulièrement ambigu, à la fois support mais aussi obstacle et instrument de la subordination du salarié. Il est le réceptacle d’influences contradictoires entre faveur à l’unilatéralisme de l’employeur et bouclier protecteur pour le salarié. Des évolutions du régime de la correction du contrat de travail devraient être envisagées, dans l’objectif de garantir une meilleure cohérence. En parallèle, le développement d’une correction du contrat de travail individuel guidée par un impératif de nature collective interroge. Une telle correction devrait faire l’objet d’un encadrement juridique de nature à assurer une prise en compte des intérêts individuels des deux parties au contrat de travail.
Jean Sandevoir, Essai sur la primauté des conventions et accords collectifs sur les contrats de travail, thèse soutenue en 2020 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Bernard Bossu et Yannick Pagnerre
Les interactions entre les conventions et accords collectifs et les contrats de travail sont multiples. Les conflits entre ces deux types d’acte invitent à s’interroger sur la nature des rapports qu’ils entretiennent. Nombre d’éléments, tenant aux caractéristiques intrinsèques et extrinsèques des conventions et accords collectifs, suggèrent que ces derniers priment sur le contrat de travail. S’agit-il pour autant d’une absolue primauté ? Le principe de faveur permet aux salariés de faire échec à l’effet impératif du contrat collectif, singulièrement en matière de rémunération et de durée du travail. Mais pour combien de temps ? La vigueur du contrat de travail est mise à mal par les accords dérogatoires et de gestion, au premier rang desquels les accords de performance collective. Est-ce à dire que sa capacité de résistance est neutralisée ? Des réponses apportées à ces interrogations, suscitées par la question de la primauté des conventions et accords collectifs sur les contrats de travail, dépendent, pour une part, l’organisation et l’administration de l’entreprise.
Emeline Dudin, Le rôle des salariés dans le fonctionnement des entreprises, thèse soutenue en 2017 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Yannick Pagnerre
Le rôle des salariés dans le fonctionnement des entreprises trouve appui sur l’alinéa 8du Préambule de la Constitution de 1946 : « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises. ». La participation des salariés a pourtant été lente à s’imposer. La crise économique a révélé l’importance de leur association aux décisions sociétales. Les politiques publiques ont tenté de rééquilibrer les forces en présence afin de circonscrire les effets du capitalisme. Des lois successives ont accru les pouvoirs des salariés et des institutions représentatives du personnel dans l’entreprise pour en faire de véritables acteurs dans la gestion de celle-ci. Le paysage législatif révèle la volonté du législateur de faire de l’entreprise une démocratie dans laquelle toutes les parties doivent s’exprimer. Toutefois, que le salarié soit traité comme un associé ou un administrateur, salariés et entrepreneurs demeurent distincts.
Charlotte Serrand, Le traitement juridique des risques psychosociaux, thèse soutenue en 2017 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Yannick Pagnerre
Le caractère subjectif des risques psychosociaux rend difficile leur appréhension juridique alors même que l’employeur a l’obligation de préserver la santé physique et mentale des salariés. L’ensemble des acteurs internes et externes à l’entreprise participent à l’appréhension et à la compréhension de ces risques : employeur, salariés,représentants du personnel, médecin du travail. Leur prise en compte a été largement suscitée par la lutte contre le harcèlement et le stress au travail. Elle est devenue un objet de négociation collective, une source de responsabilité, pour l’employeur et le salarié, un thème de débat sur le terrain sensible de la qualification constatée des troubles d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Elle est aujourd’hui l’un des éléments constitutifs de l’amélioration des conditions de travail au travers du bien-être et de la qualité de vie au travail.
Emilie De la Motte, Les catégories professionnelles en droit social : réflexion sur la distinction des cadres et des non-cadres, thèse soutenue en 2017 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Raymonde Vatinet et Yannick Pagnerre
Préciser la notion de catégorie professionnelle est un exercice essentiel. Les enjeux sont multiples. Ils intéressent la rémunération, le temps de travail, la protection sociale complémentaire, la représentation collective, etc. La reconnaissance des catégories professionnelles, notamment au travers de la distinction des cadres et des non-cadres, participe à l’organisation de l’entreprise et contribue au respect du principe d’égalité de traitement. Cet exercice se révèle néanmoins délicat : le législateur n’a pas précisé les contours du concept de catégorie professionnelle ; la mutation des formes de travail, se traduisant parfois par une uniformisation des fonctions dans l’entreprise, modifie le paysage. Le rôle des partenaires sociaux pour apporter quelque clarté est souvent décisif.
Camille Lefer, Les droits potestatifs dans le contrat de travail, thèse soutenue en 2016 à Paris 2 sous la direction de Jean-Michel Olivier, membres du jury : Julien Icard (Rapp.), Sébastien Tournaux (Rapp.), Thierry Revet
Le droit potestatif permet à son titulaire de créer, modifier ou éteindre la situation juridique d’autrui. La relation de travail, quant à elle, est empreinte d’une logique de pouvoir(s). Comment intégrer dans ces conditions le concept de droit potestatif au contrat de travail ? Comment ce dernier réceptionne-t-il la potestativité ? À quel prix la figure du droit potestatif s’adapte-t-elle ? Si les droits potestatifs sont acceptés dans le contrat de travail, ce n’est que de manière encadrée, dirigée, limitée. Les droits potestatifs sont alors contrôlés et sanctionnés par une jurisprudence qui entend en faire respecter l’esprit et les limites. Mais, parce que le droit potestatif s’exerce au moyen d’un acte unilatéral, parce qu’il s’agit de la faculté d’imposer sa volonté à autrui, les intérêts du destinataire ne doivent-ils pas a minima être préservés ? L’objet du contrat de travail, la subordination du salarié, pose ainsi notamment la question de la place à accorder aux droits et libertés fondamentaux du salarié.
Sophie Capron, La responsabilité sociale des entreprises à la lumière de la santé et de la sécurité au travail, thèse soutenue en 2016 à Paris 2 sous la direction de Jean-François Cesaro, membres du jury : Christine Neau-Leduc et Pierre-Yves Verkindt
La préservation de la santé et de la sécurité du travailleur est aujourd'hui dans le langage de la gestion, du management et progressivement des juristes, liée au concept de « responsabilité sociale d’entreprise ». Les employeurs doivent en tenir compte dans leurs décisions pour tenter de s'assurer l’adhésion des salariés et contribuer à la préservation d’un environnement plus sain. Ces idées, dont les contours manquent parfois de précision, intègrent progressivement le droit positif. Ainsi, à l’aune de son obligation de sécurité de résultat, dont la violation présente le caractère de faute inexcusable, il incombe à l’employeur, en cas de lien du préjudice subi avec le travail, une réparation allant jusqu’à s’étendre aux préjudices jadis exclus par le livre IV du Code de la sécurité sociale. Il est possible de considérer qu'il s'agit d'une rupture de l’équilibre du régime accordant le bénéfice d’une présomption d’imputabilité au salarié, en contrepartie d’une réparation uniquement forfaitaire, avec éventuellement un complément en cas de faute inexcusable. On peut se demander si au-delà des contraintes normatives qui l’y obligent, l’employeur ne doit adopter un «management de la santé » destinée à assurer le fonctionnement immédiat de l'entreprise et à terme la pérennité de son capital humain.
Etienne Devaux, La négociation des conventions et accords collectifs d'entreprise - Essai sur une communauté de travail au service de l'intérêt de l'entreprise, thèse soutenue en 2015 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Raymonde Vatinet et Pierre-Yves Verkindt
Depuis 1982, la négociation collective d’entreprise s’est fortement développée. La conclusion de conventions et accords adaptant les normes issues de niveaux supérieurs revêt une importance croissante. En atteste le rapport remis en septembre 2015 par le président de la section sociale du Conseil d’Etat au Premier ministre dont certaines propositions vont faire l’objet d’une rapide inscription dans la loi. Son objectif est de redynamiser la négociation collective et de permettre à ses acteurs de s’y investir davantage. Le rôle particulier ainsi confié à la négociation collective d’entreprise tient à la proximité qu’entretiennent les créateurs de la norme avec son application. Le cadre dans lequel ce régime a vocation à déployer ses effets n’est pas intangible. Sous un même vocable sont désignés plusieurs périmètres imbriqués au sein desquels différentes communautés de travail peuvent être identifiées. Toutes ne peuvent être un lieu de négociation. Celle-ci est parfois guidée par l’Etat qui "instrumentalise" les partenaires sociaux dans une logique d’action publique par l’intermédiaire d’incitations à traiter de certains thèmes, voire d’obligations. Outil des politiques publiques, la négociation collective d’entreprise est le creuset d’un intérêt, celui d'une communauté de travail, qui se révèle dans un cadre qui doit être déterminé. Cette identification permet aux parties de s’engager dans un processus d’élaboration de la convention ou de l’accord collectif adapté à la situation de l’entreprise dans laquelle le contrat d’entreprise a vocation à s’appliquer.
Charles Guyon, L'influence des normes supranationales sur le droit du travail français, thèse soutenue en 2015 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro, Bernard Gauriau et Jean-Philippe Lhernould
Nul n’est censé ignorer la loi… même supranationale. La « censure » des dispositions relatives au contrat « nouvelles embauches » l’a vigoureusement démontré. Des normes supranationales, l’influence n’a jamais été aussi forte : elles couvrent progressivement l’ensemble des compartiments du droit français du travail. Tous les acteurs, publics et privés, doivent porter leur regard au-delà du cadre hexagonal. Un but est affiché : maîtriser la diffusion des normes supranationales, sans laquelle il n’est point d’adhésion de leurs destinataires, et appréhender les transformations du droit français du travail auxquelles elles conduisent. De nouveaux instruments doivent, à cet effet, être forgés.
Nadia Gssime, La mobilité géographique du salarié, thèse soutenue en 2015 à Paris 1 sous la direction de Grégoire Loiseau, membres du jury : Pascal Lokiec (Rapp.), Julien Icard (Rapp.)
La mobilité géographique du salarié, entendue ici comme le(s) changement(s) de lieu de travail du salarié au sein du territoire national, est un élément central de la relation de travail, tant pour le salarié que pour l'employeur. Le régime juridique applicable n'a été précisément défini qu'à compter des années 2000. Il a aujourd'hui atteint une certaine maturité qui justifie son réexamen et son étude approfondie, afin de déterminer quels sont les principes finalement retenus, leurs modalités d'application, l'articulation des différentes notions et les évolutions prévisibles ou attendues. Le droit de la mobilité géographique a été construit autour du postulat suivant : la notion de lieu de travail est relative, le salarié est tenu à une certaine mobilité. Cet axiome est à l'origine du concept de secteur géographique, de la distinction clause informative et clause de sédentarité, du régime de l'affectation occasionnelle du salarié, de la clause de réversibilité, de l'accord de mobilité interne, plus simplement de l'ensemble du régime de la mobilité géographique du salarié. Essentiellement forgé par le juge, il est également le fruit de la négociation des parties aux contrats de travail et dans une moindre mesure des partenaires sociaux. Quant au législateur, il n'est intervenu que très récemment, non pas pour modifier ou consacrer les principes dégagés par le juge mais pour mettre en place deux dispositifs créés par un accord national interprofessionnel.
Clément Jottreau, Le sort de la relation de travail dans les entreprises en difficulté, thèse soutenue en 2015 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Bernard Gauriau
L’ouverture d’une procédure collective est l’occasion d’un conflit entre protection de l’emploi et survie de l’entreprise. Assurer la pérennité de cette dernière ne peut souvent être réalisé qu’au prix d’une réduction de l’effectif. Ce constat alimente ce qui peut, de prime abord, apparaître quelque peu paradoxale : alors que l’un des objectifs du droit des entreprises en difficulté est d’assurer le maintien de l’emploi, certaines de ses dispositions tendent à accélérer le prononcé de licenciements pour motif économique. Si cette intrusion du droit des entreprises en difficulté, dans un domaine que d’aucuns considèrent comme réservé au droit du travail, peut donner lieu à controverses, elle a une explication : l’inadaptation du second aux contraintes auxquelles est soumise l’entreprise confrontée à une situation de crise susceptible d’emporter l’entité qu’elle frappe et, avec elle, tous les emplois dont elle est porteuse. Trouver les voies d’une conciliation, d’exigences jugées parfois contradictoires, s’impose : assurer la sauvegarde de l’entreprise est le meilleur moyen de préserver les emplois qui y sont attachés.
Mickaël d' Allende, La contribution du droit européen au droit de la protection sociale complémentaire, thèse soutenue en 2014 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Jean-Philippe Lhernould
Aucun cap clair n’a été fixé par les pouvoirs publics européens s’agissant du droit de la protection sociale complémentaire. La contribution du droit européen en la matière est toutefois majeure. Les opérateurs spécialisés chargés de la gestion des régimes institués ont fait l’objet de nombreux textes, quoique non axés spécifiquement sur le droit de la protection sociale complémentaire et ne tenant pas toujours compte de l’originalité du modèle économique et social de certains d’entre eux. Les intérêts des bénéficiaires des dispositifs établis ont été pris en considération davantage en raison de l’extension du rôle du droit du travail au sein de l’Union européenne que des dispositions adoptées en droit de la protection sociale. Située au croisement de plusieurs domaines du droit, de l’économie et de la politique sociale, la protection sociale complémentaire cherche toujours, dans le concert du droit européen, à faire entendre une voix qui lui soit propre. Il est cependant permis d’espérer qu’un fil conducteur soit un jour plus clairement adopté, plaçant l’entreprise, qui constitue le socle du droit de protection sociale complémentaire, au coeur des réflexions et des réformes. C’est en effet au sein des entreprises, et en Europe, qu’est née la protection sociale complémentaire. Il serait cohérent que, deux siècles plus tard, les pouvoirs publics européens reviennent aux origines de celle-ci pour en déterminer l’avenir.
Dorothée Gaire-Simonneau, Les mutations du droit contemporain des relations collectives de travail : pour une lecture habermassienne du droit du travail, thèse soutenue en 2014 à Lille 2 sous la direction de Pierre-Yves Verkindt, membres du jury : Paul-Henri Antonmattei, Dirk Baugard, Sandrine Chassagnard-Pinet et Pascal Lokiec
Le droit des relations collectives de travail change d’image. Entièrement tourné vers l’accord et illustrant un certain « idéal de discussion », le droit des rapports collectifs de travail représente un espace privilégié pour étudier l’explosion des cadres de pensée hérités de l’époque moderne. Par son particularisme il illustre nettement la transition paradigmatique qui s’exprime entre le droit moderne et le droit post moderne. Se substitue à un droit imposé d’« en-haut », un droit négocié par « le bas ». Le droit des relations professionnelles expose les bases d’un nouveau schéma pour repenser les fondements du droit et l’articulation des normes juridiques. La thèse se propose de décrire et de comprendre cette mutation. Orientés vers le besoin de s’approprier les moyens juridiques nécessaires à la formation des normes qui les concernent, les individus veulent participer directement à leur construction. Le pouvoir normateur concédé aux corps intermédiaires consacrant la démocratie sociale « à la française » illustre nettement ce désir. Par une élaboration collective de la règle, le droit conventionnel est l’exemple que l’idéal de diskurs habermassien peut nous permettre d’appréhender autrement cette transformation. Philosophe de la communication et du droit, Jürgen Habermas propose à travers une vision personnelle de la démocratie délibérative de prendre pour source de validité du droit son processus d’élaboration. La procéduralisation du droit propose une théorie nouvelle de la rationalité juridique basée sur une rationalité procédurale, héritée pour J. Habermas d’une morale formelle. Cette thèse transcendant les clivages traditionnels de pensée sur le droit représente la meilleure réponse aux interrogations relatives au « désordre juridique ».
Edouard Vivien, La gestion des effectifs dans les groupes de sociétés, thèse soutenue en 2014 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Bernard Gauriau
Les groupes de sociétés rassemblent des sociétés juridiquement distinctes mais liées entre elles par des rapports de domination et de coopération au point de former une entité relativement identifiable. Leur organisation renvoie au jeu mêlé de la norme sociétaire et de la norme contractuelle. Prises de participation, pactes extra-statutaires, contrats commerciaux permettent à la société dominante de contrôler et de coordonner les activités des sociétés dominées au gré de la stratégie de développement par elle arrêtée. Mais, fondé sur le paradigme de l’entreprise, le droit du travail néglige souvent la relation de dépendance économique et juridique inhérente au groupe. Il n’appréhende qu’une relation de travail binaire unissant la société employeur à ses salariés ; les groupes ont généralement la volonté d’assurer l’unité de la collectivité de travail par la création d’un socle institutionnel commun et le partage d’une vision stratégique. En résulte une politique à bien des égards originale de gestion des effectifs, vecteur d’unité et instrument de protection des intérêts du groupe et de tous ceux qui contribuent au déploiement de son activité… avec l’effet ultime de donner au groupe l’allure d’une entreprise.
Mounir Hedda, La réception des groupes de sociétés par le droit du travail : interrogation sur la position du droit du travail à l'égard de la structuration des rapports de travail et la protection des salariés à l'intérieur des groupes de sociétés, thèse soutenue en 2014 à Paris 1 sous la direction de Grégoire Loiseau, membres du jury : Julien Icard (Rapp.), Alexandre Fabre (Rapp.)
Conçu pour organiser les rapports de travail au sein d'une entreprise simple, constituée d'une seule unité de direction et de travail, et caractérisée par son autonomie économique et juridique, le droit du travail rencontre, aujourd'hui, des difficultés pour encadrer ces rapports au niveau du groupe de sociétés. L'origine de ces difficultés provient du fait que la société employeur se soumet à une domination exercée par une société dite société mère, ou société dominante du groupe. Du fait de cette domination, l'identification de l'employeur, débiteur des obligations imposées par le Code du travail, et l'articulation des rapports collectifs de travail au sein du groupe de sociétés suscitent des difficultés. Au sujet de l'identification de l'employeur, la question qui se pose est de savoir si la qualité d'employeur est accordée uniquement à la société contractante des salariés, ou bien cette qualité se voit attribuée également aux autres sociétés du groupe et notamment à la société dominante de celui-ci? Concernant l'articulation des rapports collectifs de travail, on se demande si les régimes collectifs propres à ces sociétés se substituent-ils au régime collectif spécifique au groupe dont elles relèvent ? Dans le même esprit, le droit du travail rencontre des difficultés pour protéger les salariés à ! 'intérieur du groupe de sociétés. Une interrogation se pose relative à la prise en considération du groupe pour la protection des salariés. Cette thèse se fixe comme objectif l'analyse de la réception du groupe de sociétés par le droit du travail. Il s'agit de déchiffrer, d'un côté, la position du droit du travail à l'égard de la structuration des rapports de travail à l'intérieur du groupe de sociétés et, d'autre côté, sa position à l'égard de la protection des salariés au niveau de cette structure économique.
Grégoire Duchange, Le concept d'entreprise en droit du travail, thèse soutenue en 2014 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro, Grégoire Loiseau et Christine Neau-Leduc
L’entreprise naît en Droit d'un alliage complexe de notions juridiques (le contrat de travail, la personnalité morale, la représentation collective des travailleurs, etc...). L'ordonnancement systématique de celles-ci s'impose pour percevoir la cohérence de l'organisation juridique de celle-là. Des lignes de force se dégagent. Le contrat de travail oppose deux parties aux intérêts antagonistes. Mais la libération de la force de travail du salarié, partie de sa personne, et la pérennisation du lien contractuel les obligent à coopérer. Ce mouvement est renforcé par certains mécanismes étrangers à la nature du contrat de travail. Sont organisés le partage du contrôle de l’entreprise (lequel suppose d’assurer la représentation collective des travailleurs) et celui de ses utilités. Les salariés deviennent alors des quasi-associés. L'organisation juridique de l'entreprise n'est toutefois pas figée par le dogme. Des idéologies concurrentes en façonnent les contours. Certaines s'attachent aux fins. L'entreprise est alternativement mise au service de l'emploi et de l'activité d'entreprendre. D'autres s'intéressent aux moyens. Juristes et économistes prétendent à l'organisation scientifique de l'entreprise.
Marie-Noëlle Rouspide-Katchadourian, Le juge et le contrat de travail : essai sur la relecture judiciaire d'un contrat, thèse soutenue en 2013 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Grégoire Loiseau, Raymonde Vatinet et Pierre-Yves Verkindt
Selon l’article 5 du code civil, les juges ne peuvent « se prononcer par voie de disposition générale et règlementaire sur les causes qui leur sont soumises ». L’article 1134, alinéa 1er, du même code pose le principe de la force obligatoire du contrat. Or, la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation est normative ; son immixtion dans le contrat de travail est patente. Déséquilibré, soumis à un ordre public spécifique, source d’un conflit de droits et de libertés, le contrat de travail présente certaines spécificités. Ces dernières paraissent guider l’action du juge. L’adaptation du contrat constitue l’une des principales manifestations de son intervention. Elle se caractérise par l’enrichissement de l’accord de volontés ou, à l’inverse, par son amputation. De nombreuses obligations sont ajoutées au contrat. Si le fondement avancé par le juge varie, les articles 1134, alinéa 3 et 1135 du code civil justifient, en réalité, cette addition. La soustraction revêt diverses formes. Elle est parfois la source d’un pouvoir créateur ; celui-ci n’est pas toujours susceptible d’être rattaché à la protection des libertés et droits fondamentaux. Au-delà, la réfection conduit le juge à rebâtir et réécrire le contrat. Ce dernier est rebâti sur le fondement de l’article 1134, alinéa 2, du code civil. La volonté des parties est objectivée ; leur volonté réelle n’est pas nécessairement respectée. La réécriture du contrat découle, notamment, de l’application de l’article 1152 du code civil. Mais elle s’étend au-delà de ce texte. Originale et audacieuse, la relecture judiciaire du contrat de travail est liée au particularisme de cet accord.
Coralie Dupin, Les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux dans l'Union européenne : aspects de droit social, thèse soutenue en 2013 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Catherine Puigelier
Les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux n’intéressent pas uniquement le droit des sociétés mais revêtent aussi d’importants aspects de droit social. Si la directive du 26 octobre 2005 facilite ces opérations, le renvoi aux législations nationales opéré soulève de nombreuses difficultés en l’absence de traitement harmonisé de leurs conséquences sociales. Les interrogations suscitées par la mise en oeuvre de la participation des travailleurs aux organes de gestion de la société issue de l’opération n’en sont qu’une illustration. D’autres questions relatives notamment au devenir des instances de représentation du personnel existant au sein des sociétés parties à la fusion, aux normes collectives ou aux contrats de travail, restent en suspens. A celles-ci et à d’autres, cette étude tente d’apporter des réponses. Les enjeux dont les fusions transfrontalières sont porteuses l’exigent.
Cécile Hablot, De la norme privée à la norme publique en droit du travail, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Bernard Bossu, Bernard Gauriau et Raymonde Vatinet
Parmi les normes qui alimentent le droit du travail, la convention collective revêt une nature particulière. Norme privée, elle emporte à l’égard des salariés, les effets d’un règlement. Au-delà, l’intervention d’une autorité publique peut provoquer sa métamorphose. L’extension et l’élargissement conduisent déjà à une métamorphose : un arrêté ministériel déploie les effets de la convention évinçant définitivement son effet relatif. Mais celle-ci ne devient pas pour autant une norme réglementaire. Le glissement de la norme privée vers la norme publique n’est pas complet. Une situation hybride est créée. Mais qu’en est-il alors de l’équilibre entre la liberté des partenaires sociaux et le pouvoir du ministre du Travail ? Quels liens entretiennent le régime de la convention et celui de l’arrêté, le juge judiciaire et le juge administratif ? De la norme privée à la norme publique, la métamorphose est complète lorsque la substance d’un accord collectif est reprise dans le texte d’une loi ou d’un règlement. Les partenaires sociaux sont par là-même associés à la confection de la norme publique. Née d’une pratique, cette participation a reçu consécration législative avant son éventuelle constitutionnalisation. Au-delà du constat de l’interdépendance des partenaires sociaux et du législateur et de la mesure de ses avantages et ses inconvénients, la conception de l’intérêt général, la place du Parlement et le rôle du Conseil constitutionnel sont au coeur de l’étude.
Asli Morin, La convergence des jurisprudences de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat : contribution au dialogue des juges en droit du travail, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Antoine Mazeaud, membres du jury : Jean-François Cesaro, Olivier Dutheillet de Lamothe, Bernard Teyssié et Pierre-Yves Verkindt
La thèse étudie sous leurs aspects, historiques, juridiques, la convergence des jurisprudences du Conseil d’Etat et de la Cour de cassation en droit du travail. D’autres juridictions,nationales (Tribunal des conflits et Conseil constitutionnel), européennes (Cour européenne des droits de l’Homme et Cour de justice de l’Union européenne) concourent à ce rapprochement. La thèse aborde la convergence des objectifs sous deux angles ; l’un né d’une attraction réciproque, l’autre, d’une attraction amplifiée. La convergence jurisprudentielle est successivement qualifiée de « recherchée » et de « nuancée ». Le « juge répartiteur » exerce une influence indirecte, à laquelle s’ajoute celle, directe, des « juges prescripteurs ». A la convergence des objectifs s’ajoute une convergence de la méthode, perceptible à travers les modes d’articulation des sources et les techniques de construction jurisprudentielle. La thèse démontre que le droit du travail, qui s’est construit en réunissant les enseignements du droit civil – la force obligatoire du contrat – et les leçons du droit public – l’importance de l’intérêt général – se révèle être le domaine d’élection d’un échange technique inédit entre les deux ordres juridictionnels. Cette étude signale le passage d’une période d’indifférence mutuelle à celle d’une attention devenue traditionnelle. A l’instar du dialogue qui existe entre le juge et le législateur en matière sociale, se noue un « dialogue des juges » des deux Hautes Juridictions, pour prévenir des discordances majeures.
Aurélie Lemettre, L'organisation des instances de représentation du personnel : essai sur un cadre évolutif, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Bernard Gauriau et Jean-François Cesaro
Si le législateur se préoccupe de l’organisation des instances de représentation du personnel, parfois de leur disparition, il n’envisage guère leur évolution. De celle-ci les opérations de restructuration constituent l’un des principaux facteurs. Elles affectent souvent l’organisation des instances de représentation du personnel, ne serait-ce qu’en provoquant une modification de leur cadre d’organisation. Le législateur ne s’en est que faiblement préoccupé laissant aux partenaires sociaux, par voie d’accord, et au juge, au fil de ses arrêts, le soin d’apporter réponse aux questions apparues. Si ce mode de traitement des interrogations que suscite le devenir des instances de représentation du personnel n’est pas dépourvu de mérites, il présente aussi des inconvénients, singulièrement sur le terrain, toujours sensible, de la sécurité juridique. A une intervention du législateur, il est permis d’appeler. Elle pourrait, au demeurant, être l’occasion de repenser le droit de la représentation du personnel afin d’en épurer les lignes et d’en simplifier l’architecture. Les empilements d’instances ne sont pas nécessairement utiles à la défense des intérêts des salariés … et peuvent compliquer à l’excès la gestion de l’entreprise ou du groupe.
Matthieu Démoulain, Nouvelles technologies et droit des relations de travail : essai sur une évolution des relations de travail, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Catherine Puigelier et Jean-François Cesaro
De Kheops à Internet, des nanotechnologies à la téléportation, les nouvelles technologies rythment la vie des hommes. Fruits de leur intelligence, outils de grands travaux, moteurs de diffusion des savoirs, elles sont cause et effet des progrès de l’humanité. Innervant les relations de travail subordonnées comme tous les compartiments de la société, elles retiennent l’attention du juriste tant elles sont susceptibles de remodeler l’organisation de l’entreprise, de provoquer l’exclusion de la communauté de travail (au moins autant que de rapprocher ceux qui la composent), de provoquer l’entremêlement des vies personnelle et professionnelle. Nul compartiment du droit des relations de travail n’échappe à la pression des nouvelles technologies : au recrutement des salariés elles peuvent donner un nouveau visage ; à la conclusion du contrat de travail elles peuvent offrir instantanéité et dématérialisation ; au temps de son exécution elles imposent normes de sécurité (pour que, de chacun, le corps soit préservé) et normes de vie (pour que, de chacun, l’âme et l’esprit demeurent hors du champ de lecture de l’employeur). Et que dire du jeu de relations collectives remodelées à coup de communications syndicales dématérialisées, de vote électronique, de réunions virtuelles d’instance de représentation du personnel ? Le paysage se transforme. Le corpus normatif, parfois, peine à suivre. Le temps des diseurs de droit n’est pas celui de la science. Mais la science ne peut aller sans que le législateur et le juge, un jour, s’en saisissent. D’intérêts contradictoires où s’entremêlent impératif d’évolution (de l’entreprise) et de protection (du salarié), il leur appartient d’assurer la conciliation.
Damien Chatard, Réflexions sur le jeu croisé des pouvoirs et des responsabilités dans les groupes de sociétés : essai en droit du travail, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Christine Neau-Leduc et Jean-François Cesaro
A l’heure de la globalisation des relations économiques, il est nécessaire que les décisions stratégiques soient prises au plus haut niveau, celui, dans un groupe, de la direction centrale. Or, construit autour du paradigme de la subordination juridique du salarié à l’égard de son employeur, le droit du travail néglige la dépendance économique, voire juridique, de ce dernier à l’égard d’entités juridiquement distinctes. L’employeur placé dans une telle situation peut voire ses choix stratégiques influencés ou commandés. S’esquisse alors l’image d’un « décisionnaire » étranger à la relation contractuelle nouée qui, néanmoins, influence l’exécution des relations de travail dans le groupe. Cette dichotomie dans l’adoption des décisions ne doit pas avoir pour corollaire l’oubli des responsabilités légitimes. Sans aller jusqu’à faire plier l’autonomie juridique des entités constituant le groupe, il convient d’en amender les effets pour que chacun assume les conséquences de ses décisions. Le droit ne peut rester indifférent au réel.
Brune Fournier, Essai sur le risque professionnel en droit social, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Christine Neau-Leduc
Le risque professionnel apparaît à la fin du XIXème siècle. Il est conçu comme le palliatif des insuffisances des principes de responsabilité civile appliquées aux victimes du travail. Le corps blessé au profit de l’industrie doit obtenir réparation. L’accident du travail est né ; sa reconnaissance est strictement encadrée. L’évolution des organisations de travail révèle d’autres insuffisances et induisent l’extension de la notion. D’un principe de responsabilité appliqué à la survenance d’un risque qualifié au préalable, le risque professionnel devient l’expression d’un droit à la sécurité. Les acteurs de l’entreprise y acquièrent un pouvoir de qualification. Au croisement du droit de la sécurité sociale, du droit du travail et du droit de la santé publique, les objectifs assignés évoluent à la lumière des enjeux humains et financiers qui s'y attachent. De nouvelles notions innervent les relations de travail. Le droit du salarié à la sécurité ne peut plus être dissocié d’un droit élémentaire à la santé. Au-delà, le bien-être au travail fait son apparition. Reste à mettre fin aux incertitudes qui affectent la notion de risque professionnel. Notion au périmètre fluctuant, la définir est essentiel. Les enjeux sont d’importance.
Nicolas Collet-Thiry, L'encadrement contractuel de la subordination, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Pierre-Yves Verkindt
Le contrat de travail fonde la relation de travail et institue le rapport de subordination qui se concrétise par la concession d’un pouvoir à l’employeur. C’est donc aux parties qu’il revient de définir l’étendue, le domaine et les limites du pouvoir patronal. Le salarié ne consent qu’à une subordination strictement définie et encadrée par le contrat. Une analyse objective de la volonté implicite des contractants, au regard de leurs attentes légitimes et de la finalité du pouvoir institué, et à la lumière des exigences du droit commun des contrats (notamment l’exigence de détermination de l’objet des obligations) et des droits fondamentaux (en premier lieu le droit à la protection de la santé) permet d’identifier leurs droits et obligations réciproques : quelles sont les prérogatives que l’employeur est habilité à exercer ? Quelles sont les données du rapport d’emploi qui ne peuvent être remises en cause unilatéralement ? Par ailleurs, le salarié tire du contrat plusieurs pouvoirs d’initiative (exception d’inexécution, prise d’acte) lui permettant de réagir à un manquement de l’employeur. Ceux-ci concourent à l’effectivité des prévisions contractuelles et témoignent d’une réhabilitation du salarié en tant que contractant : contractant subordonné, certes, mais contractant à part entière avant tout.
Benjamin Kantorowicz, Le portage salarial, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Patrick Morvan, membres du jury : Marion Del Sol et Bernard Teyssié
Salariat et indépendance : la contradiction est profonde. En France, le droit du travail a été largement bâti sur l'opposition entre travail salarié et travail indépendant. Or, depuis plus de 20 ans, s'est développé en France un nouveau mode d'organisation du travail dénommé « portage salarial ». Il constitue une pratique contractuelle triangulaire établie entre des professionnels autonomes, une société de portage salarial et des clients. Ce mode d’organisation permet à ces professionnels de pouvoir exercer leur activité de façon indépendante, sans contrainte administrative ni de gestion, tout en bénéficiant des garanties sociales attachées au statut de salarié. Suspecté d'illégalité mais satisfaisant à un indéniable besoin social, le portage salarial devait être encadré. La loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail donne à cette pratique un fondement légal et confie aux partenaires sociaux le soin de l’organiser. Malgré l’existence d’un accord collectif de branche, signé le 24 juin 2010, le portage salarial ne fait l’objet d’aucun encadrement législatif. Face au mutisme du législateur et à l’indécision du juge, l’insécurité règne. Il importe alors d’établir précisément les fondements et le mécanisme du portage salarial. Bien que périlleuse, cette quête d’un régime juridique mérite d’être entreprise afin de répondre au mieux aux attentes et aux interrogations des travailleurs et des entreprises qui seraient amenés à utiliser cette formule. Salariat et indépendance : la contradiction n’est que superficielle.
Vincent Manigot, La discrimination en entreprise, réflexions sur un risque, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Pierre-Yves Verkindt et Jean-François Cesaro
La gestion d’une entreprise expose l’employeur au risque de discrimination. Dans son acception originelle, la notion de discrimination vise les distinctions reposant sur un critère illicite. La mise en oeuvre effective de la prohibition des discriminations amène le juge à exiger de l’employeur qu’il justifie de façon pertinente ses décisions. L’entreprise est sommée de développer des outils lui permettant d’apprécier de manière objective les compétences de ses salariés. Au-delà de cet objectif initial, la lutte contre les discriminations doit dorénavant faciliter l’intégration d’un public défavorisé. Les notions d’égalité professionnelle, de diversité, d’actions positives et de discriminations indirectes font aujourd’hui parti du vocabulaire des entreprises. Bien qu’elles ne disposent pas toujours de leviers d’action efficaces pour agir, les pouvoirs publics les contraignent à négocier sur certains thèmes pour résorber les inégalités. L’employeur responsable ne peut ignorer cette métamorphose du concept de discrimination. Il doit déterminer les nouvelles frontières de ce risque afin de mettre en oeuvre les dispositifs adéquats pour faire obstacle à sa réalisation.
Emilie Million-Rousseau, La représentation élue du personnel en matière de santé et de sécurité, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Bernard Bossu et Jean-François Cesaro
Depuis l’apparition du CHSCT en 1982, la représentation élue du personnel a connu de profondes évolutions. Délégués du personnel, comités d’entreprise et CHSCT ont dû s’adapter à la considérable extension des notions de santé et de sécurité. L’intégration de l’impératif de protection de la santé mentale des travailleurs dans le Code du travail a bouleversé le champ de compétences du CHSCT. La prévention des risques psycho-sociaux s’est rapidement invitée au centre de ses préoccupations, élargissant d’autant l’obligation de consultation mise à la charge de l’employeur. Des projets et mesures qui initialement nécessitaient la seule consultation du comité d’entreprise doivent dorénavant être également soumis à l’avis du CHSCT. Dans cette procédure de double consultation l’employeur est guidé par le principe de spécialité qui transforme le comité d’entreprise en simple chambre d’enregistrement des avis de l’instance spécialisée. De l’expansion du CHSCT naissent redondances et lourdeurs. Une réforme doit être envisagée. Transformation de l’instance spécialisée en commission du comité d’entreprise ou redistribution des compétences de chacun : l’alternative offerte impose la discussion.
Pierre Befre, La liberté d'expression des salariés, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Bernard Bossu et Jean-François Cesaro
Salariat et liberté d'expression : la contradiction apparaît irréductible. La subordination inhérente à la relation de travail semble en effet exclure l’exercice de cette liberté. Le salarié, parce qu’il demeure citoyen, doit toutefois en jouir de façon effective. Le représentant élu et désigné, parce que le mécanisme de la représentation collective l’exige, doit également le pouvoir. Accorder au salarié une telle liberté peut s’avérer dangereux pour l’autorité de l’employeur ou la survie de l’entreprise. Des notions floues, complexes à circonscrire, telles que l’obligation de confidentialité ou l’abus, peuvent autoriser l’employeur à restreindre l’exercice par le salarié de la liberté d'expression et à le sanctionner. Face au mutisme du législateur et à l’indécision du juge, l’insécurité règne. S’impose alors de dégager une définition plus précise et une articulation plus cohérente des règles légitimant tant l’exercice par le salarié de cette liberté que sa limitation par l’employeur. Bien que périlleuse, cette quête d’équilibre mérite d’être entreprise afin que le caractère nécessaire de cette liberté au monde du travail se révèle. Salariat et liberté d'expression : la contradiction n’apparaîtra qu’apparente.
Sabine Izard, Les accords d'entreprise ou de groupe à caractère transnational, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Bernard Teyssié, membres du jury : Jean-François Cesaro et Pierre-Yves Verkindt
La mondialisation de l’économie modifie les rapports sociaux. Face au poids grandissant des firmes multinationales, les organisations syndicales s’organisent au niveau international. De nouvelles stratégies de contre-pouvoir émergent dont les accords transnationaux d’entreprise ou de groupe sont le fruit. Résultats d’une négociation spontanée entre des acteurs dont la légitimité reste à prouver, ces accords aménagent les rapports sociaux dans les entreprises et les groupes à caractère transnational et édictent des règles de travail pour les salariés qui les composent, voire au-delà. D’abord envisagés comme de simples déclarations d’intention assurant, par-delà les frontières, la promotion des droits fondamentaux au travail, leur contenu se précise et engage plus fermement leurs signataires. Un cadre juridique propre s’impose. A défaut, ils seront régis selon le cadre national de réception. Malgré ces incertitudes, les signataires s’organisent conventionnellement pour donner effets aux accords. Des clauses spécifiques assurent leur mise en oeuvre et leur suivi. Pourtant le silence demeure sur les effets juridiques réellement produits. Dès lors, une certaine insécurité questionne les parties qui appellent parfois à la définition d’un cadre international de réception pour en définir les règles de conclusion, la portée et les recours envisageables en cas de violation.
Lionel Charbonnel, La hiérarchie des normes conventionnelles : contribution à l'analyse normativiste du contrat, thèse soutenue en 2010 à Avignon sous la direction de Anne Pélissier, membres du jury : Didier Poracchia (Rapp.), Pascal Puig (Rapp.)
La hiérarchie des normes est une notion commune du langage juridique. Les conventions, à l’instar de la Constitution à l’égard de la loi, peuvent-elle entretenir entre elles des relations hiérarchiques ? Trois éléments feraient obstacle à cette hypothèse. L’effet relatif des conventions, l’identité de nature juridique de ces actes et, enfin, le fait que les conventions ne soient pas des règles de Droit mais des actes d’exécution du droit.Lever un à un ces obstacles qui ne sont pas rédhibitoires et démontrer que le contrat est une règle de Droit, autorise alors à admettre théoriquement cette hypothèse. L’étude du droit positif permet ensuite de confirmer que des conventions peuvent entretenir des rapports hiérarchiques. Tel est le cas du contrat de société à l’égard des conventions de la société contractante ou bien encore du mandat à l’égard du contrat projeté.Il est alors possible d’étudier les conditions dans lesquelles un lien de nature hiérarchique peut apparaître. Les conditions préalables à cette mise en ordre supposent une pluralité d’actes et la nature conventionnelle de ceux-ci. Les « éléments constitutifs » du lien hiérarchique supposent eux que la convention qui occupe la place de norme supérieure soit impérative à l’égard des parties à la seconde convention