Présentation
L'émergence d'une société de l'information est porteuse d'opportunités tout autant que de risques nouveaux. Les données relatives à l'organisation de l'entreprise, à son mode de production, à sa situation financière ou à ses relations commerciales sont actuellement d'une importance telle que certains y voient le « capital immatériel » d'une firme, autrement dit le cœur de son avantage concurrentiel. Un renforcement de la confidentialité de ces données est donc souhaité, ce que traduit la récente directive européenne du 8 juin 2016 sur la protection des secrets d'affaires.
Cette évolution soulève cependant d'importantes interrogations. A quelles conditions peut-on qualifier un élément de « confidentiel » ?
Comment concilier le droit d'expression reconnu aux individus et la confidentialité réclamée par les entreprises ? Comment permettre aux salariés de mieux participer à la vie de leurs entreprises tout en garantissant le secret de certaines données ?
Afin d'appréhender au mieux ces questions, le colloque cherchera à croiser différentes formes de savoirs. Interventions de praticiens et d'universitaires se succéderont pour mettre en évidence les enjeux et difficultés pratiques tout en discutant des solutions fournies par le droit.
Responsable scientifique : Benjamin Dabosville, UMR 7354 DRES (Droit, religion, entreprise, société)
Programme
9h00 : Accueil des participants
Propos introductifs
9h15 : Ouverture du colloque
9h30 : Le Service de l'Information Stratégique et de la Sécurité Economiques : enjeux de la protection des données
M. Philippe Lorec, Chef du département information, synthèse et analyse des risques du Commissariat à l'Information Stratégique et à la Sécurité Economiques – CISSE
L'adoption de la directive 2016/943 du 8 juin 2016 relative au secret des affaires montre la volonté des Etats membres d'engager l'Union européenne dans la voie d'une meilleure protection des données de l'entreprise. Annonce-t-elle également un nouvel équilibre entre conservation du secret et droits des travailleurs ? Quels sont, plus généralement, les enjeux actuels de la protection des données de l'entreprise ?
10h00 : Géographie de la confidentialité
M. Nicolas Moizard, Professeur, Université de Strasbourg
S'il existe une exigence de confidence en droit du travail, ses contours restent mal identifiés. L'exigence s'applique-t-elle à des « données », à des « communications » ou à des « zones » de l'entreprise ? En vertu de quels critères applique-t-on cette exigence de confidentialité ?
Partie I. Protection Des Données De L'entreprise Et Liberté D'expression Individuelle
10h30 : L'espionnage économique à l'heure du numérique : nouvelles pratiques, nouveaux risques
Michel Rochelet, Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d'Information – ANSSI
L'espionnage économique en entreprise connaît une mutation importante. Il s'effectue parfois à l'insu des salariés, en exploitant les commentaires faits sur les réseaux sociaux ou les forums de discussion, en utilisant le contenu des boites mail professionnelles ou encore en étudiant les données contenues dans les téléphones ou les ordinateurs. Quels sont les nouveaux risques pesant sur les entreprises et les travailleurs ?
11h00 : Pause café
11h30 : Les outils juridiques de prévention de l'espionnage économique
Maître Aurélie Klein, Avocat, Responsable droit des Technologies de l'Information, Cabinet Fidal
Les mutations technologiques appliquées à l'espionnage économique posent la question de la pertinence des outils juridiques utilisés pour y faire face. Les entreprises ont longtemps cherché à encadrer la liberté d'expression des salariés en leur imposant des clauses de confidentialité. Comment répondre aujourd'hui aux mutations de l'espionnage économique ?
12h00 Le lanceur d'alerte professionnelle
M. René de Quenaudon, Professeur, Université de Strasbourg
Discuté depuis de nombreuses années, le statut du lanceur d'alerte professionnelle est au cœur du conflit entre liberté d'expression individuelle et protection du secret. Tandis que le législateur et la jurisprudence dessinent progressivement les contours d'une protection juridique du lanceur d'alerte, certaines entreprises élaborent également des chartes d'alerte. A quelles règles obéit le lancement d'une alerte professionnelle ?
12h30 : Déjeuner libre
Partie II. Protection Des Données De L'entreprise Et Représentation Des Travailleurs
14h15 : Café d'accueil
14h30 : La base de données économiques et sociales
M. Arnaud Martinon, Professeur, Université Paris I La Sorbonne
Mise en place progressivement depuis 2013, la base de données économiques et sociales (BDES) témoigne de l'ambition du législateur de renouveler les relations sociales en entreprise via une refonte de l'accès à l'information. La mise en place des BDES s'accompagne cependant d'une forte attention portée à la confidentialité des données mises à disposition des représentants des travailleurs. De quelle manière la BDES modifie-t-elle l'articulation entre protection des données de l'entreprise et représentation des travailleurs ?
15h00 : La participation des travailleurs face au secret des affaires - Quelles pratiques ?
Table ronde
Participants :
Mme Aline Eysseric, Délégué syndical central chez Sanofi-Aventis recherche & développement
Eric Chalaye, Administrateur salarié de la Compagnie Nationale du Rhône 1 responsable de ressources humaines
Animateur :
Benjamin Dabosville, Maître de conférences, Université de Strasbourg
La recherche du secret concernant les données de l'entreprise se heurte à l'exigence de transparence nécessaire à l'approfondissement du dialogue social et au renforcement de la négociation collective. Comment les acteurs tentent-ils de conjuguer ces deux impératifs ? Côté employeur, la délivrance d'informations aux représentants du personnel doit tenir compte de la confidentialité que demandent les partenaires commerciaux, les actionnaires ou les créanciers de l'entreprise. Côté salarié, la confidentialité peut faire obstacle à l'action des élus ou acteurs syndicaux auprès des travailleurs qu'ils représentent.
16h00 : La participation des travailleurs face au secret des affaires - Quelles réponses juridiques?
M. Quentin Urban, Maître de conférences, Université de Strasbourg
Loin d'être figées, les règles entourant la confidentialité des données communiquées aux représentants du personnel connaissent d'importantes modifications. La Cour de cassation a apporté des précisions importantes en 2014, tandis que plusieurs projets, notamment européens, prévoient de renforcer les règles générales relatives au secret des affaires. Pour quelles raisons aucune solution de compromis n'a encore réussi à émerger ? L'examen critique du droit positif et de son évolution est ici nécessaire, afin de mettre en lumière les difficultés soulevées par cette question et tracer des pistes de solutions pour l'avenir.
16h30 : Fin du colloque
(Bulletin d'inscription téléchargeable sur : www.europa-cnrs.unistra.fr)
Tarif normal : 60 € - Gratuit pour les professeurs, maîtres de conférences, étudiants, jeunes chercheurs , magistrats, responsables syndicaux et élus du personnel, membres de la Direccte
Organisé par l'UMR 7354 DRES - Equipe de droit social