coll. Res Publica, 320 p.
Ouvrage publié avec le soutien de l’université Rennes 1, du CERAPS et de l’université Lille 2.
Présentation de l'éditeur
En s’imposant d’abord en 2006 sous une forme « fermée », puis dans un cadre résolument « ouvert » en 2011, la procédure des primaires n’a pas seulement désigné pour le PS une nouvelle profession de foi démocratique. En déplaçant près de 3 millions de sympathisants socialistes, elle a également inventé un système inédit de sélection des candidats qui irrigue désormais l’ensemble de la vie politique française. Longtemps considérées comme contraires à la culture politique hexagonale et à l’esprit des institutions de la Ve République, les primaires sont aujourd'hui érigées en modèle de participation par les partis politiques, d’EELV à LR.
Ce sont les enseignements des recherches proposées par cet ouvrage : la machinerie partisane et l’ingénierie électorale qui donnent le visage des primaires représentent plus qu’une solution procédurale choisie par des formations politiques en crise de leadership. Elles résultent aussi de l’adaptation de la pratique américaine à la culture française d’un fait majoritaire fragilisé depuis 2002 par l’émergence de la tripartition de l’espace politique. Par la rapidité et l’ampleur de leur transposition, elles consacrent également une offre militante, une pratique civique, un rituel de légitimation, un défi logistique et une mise en récit de la vie partisane qui encadrent de manière nouvelle les façons d’élire et de se faire élire.
Le choix des primaires ne saurait cependant se lire comme le simple résultat d’une adaptation mécanique d’un système d’investiture étranger. La perte du monopole de la désignation de leur candidat n’a été concédée par les élites et les adhérents de ces organisations qu’au prix de la conservation de la maîtrise des règles du jeu partisan. Les primaires constituent bien en cela un mode de régulation de la concurrence par-delà leur caractère démocratique.
L’objectif de cet ouvrage collectif est de revenir sur les processus qui ont conduit à l’adoption — de la pression réformiste à la délégitimation des modes de sélection traditionnels —, à l’organisation du scrutin — de la dimension matérielle du vote aux impacts médiatiques de la campagne — et la diffusion de la procédure au niveau local — de la contagion mimétique aux limites des effets d’entraînement dans les territoires — de cette nouvelle technologie de désignation des candidats en France.
Rémi Lefebvre est professeur de science politique à l’université Lille 2 et membre du CERAPS.
Éric Treille est chercheur associé au CRAPE-Arènes.
Sommaire
Rémi Lefebvre et Éric Treille, Introduction. Vers une primarisation de la vie politique française ?, p. 11
Première partie Adoption et règles du jeu
Eric Treille, La fabrication partisane des primaires socialistes ou la codification d’une nouvelle règle du jeu électoral, p. 41
Rémi Lefebvre, Les primaires à droite. Processus d’adoption et transformations du jeu partisan, p. 65
Vanessa Jérôme, Des primaires pour (ré)unir les écologistes ? Interrogations à partir d’une histoire raisonnée des candidatures des Verts-EELV, p. 105
Deuxième partie La mobilisation des primaires
Romain Rambaud, Le financement de la vie politique et les primaires ouvertes en France, p. 125
Éric Treille, La démocratie partisane en débats. La communication des primaires socialistes entre campagne à l’ancienne et modernité cathodique, p. 141
Rafaël Cos, Le projet socialiste (dés)saisi par les primaires. Procédures « rénovatrices » et production programmatique, p. 163
Rémi Lefebvre et Éric Treille, Les sympathisants de gauche dans les primaires. Une nouvelle offre de militance entre cible de conquête de suffrages et levier de mobilisation électorale, p. 181
Anaïs Theviot, Les primaires : terrain d’expérimentation de l’innovation politique ? Le cas de la campagne d’A. Juppé en 2016 : une mobilisation « scientifique » orchestrée par les data, p. 213
Troisième partie Sociologie électorale des primaires et approches locales
Laurent Olivier, La territorialisation des primaires socialistes en Meurthe-et-Moselle. Appropriations locales et traces temporelles d’une procédure nationale, p. 239
Julien Audemard et David Couard, Des primaires d’octobre 2011 à l’élection présidentielle d’avril-mai 2012 : les dynamiques sociologiques de la mobilisation électorale à gauche, p. 255
Pierre Mongaux, Rassembler « le peuple de gauche » : le rendez-vous manqué de la primaire socialiste de 2011, p. 273
Rémi Lefebvre, Les primaires domestiquées. Les élections municipales de 2014, p. 291
Christian Le Bart, Épilogue. Primaires ouvertes, déclin des partis et individualisation du champ politique, p. 309