Présentation
Ce colloque international entend contribuer au renouvellement des études électorales, et plus largement des sociologies du vote et de la politisation, et proposer un bilan critique des approches « contextuelles » du vote qui se sont développées depuis deux décennies aux Etats-Unis et en France. Celles-ci proposent de relire l'ancrage social des rapports au politique et des choix électoraux en prêtant une attention renouvelée à l'appartenance aux groupes primaires (famille, amis, collègues, groupes d'appartenance) et aux interactions, en particulier les conversations, sollicitations, rappel à l'ordre et micro-pressions, qui jalonnent les périodes électorales.
Analyser le contexte invite alors à observer l'insertion des électrices et électeurs dans un environnement social localisé, politiquement signifiant et potentiellement influent et permet ainsi de complexifier le lien entre les appartenances sociales et les rapports au politique. Si l'essor des approches contextuelles du vote a permis un renouveau de ce champ de recherche, l'un des défis est cependant aujourd'hui de normaliser cette sociologie du vote en en proposant un premier bilan critique.
L'objectif de ce colloque est ainsi d'identifier la place et les apports des approches françaises de l'analyse contextuelle, qui se distinguent notamment par leur originalité́ méthodologique (recours à des approches ethnographiques et à des entretiens biographiques approfondis, attention spécifique aux appartenances de classe et à la construction des identifications socio-politiques). Mais, il s'agit aussi d'établir un dialogue critique, théorique et méthodologique, avec d'autres courants de sciences sociales pour mieux saisir les effets du « contexte » et, plus largement, pour mieux structurer théoriquement cette notion.
En effet, la notion de contexte pose toute une série de problèmes qui tiennent à la définition, parfois fluctuante, de ce que sont les « contextes ». Ces derniers renvoient à la fois à un ancrage territorial et un environnement socio-économique local ou national, à une position sociale, à l'appartenance à des groupes (famille, amis, collègues, coreligionnaires), à des interactions concrètes avec ses proches, à l'effet d'institutions socialisatrices (comme l'école, l'usine, l'Eglise) ou encore aux caractéristiques de l'offre et de la structuration politiques sur un territoire.
On peut faire l'hypothèse que le contexte du vote est l'addition de tous ces contextes, mais reste néanmoins à hiérarchiser et articuler ces différents niveaux et l'analyse de leurs effets sur les processus de politisation.
Cette manifestation scientifique a donc pour ambition de constituer un carrefour de discussion et d'échange à propos des apports et des limites des analyses contextuelles du vote en ouvrant un dialogue entre la science politique et d'autres sciences sociales, comme la géographie, la sociologie de la socialisation, ou encore les sciences sociales du travail.
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Ce colloque s'inscrit dans le cadre d'un projet de recherche financé par ANR : le projet ALCoV (Analyse Localisée Comparative du Vote – ANR-16-CE41-0008, coordonné par E. Agrikoliansky), qui associe depuis 2016 une quarantaine de chercheuses et de chercheurs autour d'une enquête sur le vote, les électrices et les électeurs dans la France contemporaine. Il est organisé avec le soutien de l'Université Paris Dauphine-PSL et de 5 laboratoires de recherche en sciences sociales : IRISSO, UMR CNRS INRAE 7170-1427 Université́ Paris Dauphine– PSL- CESSP, UMR 8209, EHESS et Université́ de Paris 1 - MESOPOLHIS, UMR 7064, Sciences Po Aix et Aix-Marseille Université - CRESPPA, UMR 7217, Universités Paris 8 et Paris-Ouest Nanterre - CURAPP-ESS, UMR 6054, Université́ de Picardie Jules Verne
Programme
Jeudi 23 septembre
9h00 : Accueil des participant.es (salle A 709)
9h30 : Introduction générale du colloque - Présentation des enjeux et d'un bilan critique des analyses contextuelles
(équipe organisatrice, sur la base de l'enquête ALCOV)
Table ronde 1 --Contextes et territoires de la politisation : espaces, inégalités socio-économiques et structures des relations sociales
Animation/présidence : L. Barrault-Stella, P. Lehingue & A.-F. Taiclet
10h30 : Contexte social, contexte spatial
Discutante : V. Girard, Dysolab, chercheure affiliée à l'Ined
Respatialiser la survey research : premiers retours d'expérience d'une enquête par sondage localisé
Amaïa Courty & Vincent Tiberj, Sciences Po Bordeaux, Centre Emile Durkheim
La politique à la frontière. Mobilité spatiale, déplacements sociaux et immobilité électorale dans une société de travailleurs frontaliers
Stéphane Latte, Université de Haute-Alsace, SAGE
Changement urbain, changement social et changement électoral dans la Métropole nantaise (1974-2017). Eléments de socio-géographie électorale quantitative
Jean Riviere, Université de Nantes, UMR ESO
12h30 : Déjeuner sur place (Espace 7)
Comparer des contextes : espaces locaux, espaces nationaux
Discutante : N. Mayer, CEE, Sciences Po Paris
14h30 : What context(s) ? Learnings and debates from a « new » history of elections
Zoé Kergmard, Institut historique allemand, Paris
Sub-national Varieties of Voting. Mexico's Political Transitions in Socio-Territorial Context
Willibald Sonnlitner, El Colegio de México
17h00 : Keynote speakers. Contexte, interactions et politisation(s)
Animation, discussion : K. Geay & F. Faury
Avec : Nina Eliasoph, University of Southern California
Katherine J. Cramer, University of Wisconsin–Madison
18h30 : Fin de la 1ère journée
Vendredi 24 septembre
Table ronde 2 - Education, socialisations familiales, division sexuée des rôles politiques
Animation/présidence : K. Geay, C. Lagier & S. Leveque
Discutante : J. Pagis, IRIS
9h30 : La solitude est-elle un contexte ?
Pierre-Yves Baudot Université Paris Dauphine-PSL, IRISSO
Marie-Victoire Bouquet, Chaire Santé, Sciences Po Paris
Les logiques genrées et générationnelles de la socialisation politique au sein de familles d'origine populaire issues de l'immigration
Jeanne Boudoux Université Paris Dauphine-PSL, IRISSO
Contextualiser les influences contextuelles : familles et espaces sociaux
Céline Braconnier, Sciences Po-Saint-Germain
Jean-Yves Dormagen, Université de Montpellier
'Pour mes enfants'. Rôles familiaux et investissement électoral des femmes de classes populaires
Maeva Durand, Université Paris Dauphine-PSL, CESAER
Sur le vote d'électrices FN/RN : configurations familiales, sociabilités et respectabilité électorale
Félicien Faury Université Paris Dauphine-PSL, IRISSO
Voter en fonction de ses enfants ? Une enquête sur les influences politiques familiales entre les personnes LGBT et leurs parents
Camille Masclet, CESSP
12h30 : Déjeuner sur place (Espace 7)
Table ronde 3 - Politisations au travail. Collectifs de travail, socialisation politique et transformations du salariat
Animation/présidence : C. Achin & P. Aldrin
14h00 : Les relations entre participation au travail et comportements électoraux : quelques premiers résultats à partir d'enquêtes quantitatives
Tristan Haute, Université de Lille, CERAPS
Des indépendants en lutte contre l'uberisation. De la dégradation du travail à la politisation des chauffeurs de VTC
Sarah Abdelnour & Sophie Bernard, Université Paris Dauphine/PSL, IRISSO
Travailleuses du nettoyage et syndiquées à la CNT-SO : un vote de gauche ?
Saphia Doumenc, TRIANGLE
Représentations ouvrières des ordres usiniers, économiques et sociaux
Cédric Lomba, CRESPPA
16H15 : Débat - étudier la politisation au travail : faire dialoguer, sociologie des professions et sociologie des rapports au politique
Paul Bouffartigue, Aix-Marseille Université, LEST
Baptiste Giraud, Aix-Marseille Université, LEST
Muriel Surdez, Université de Fribourg
17h45 : Clôture
L'entrée est libre, mais l'accès à l'université pour les personnes extérieures nécessite la présentation d'un pass sanitaire (certifiant la vaccination ou un test négatif).
Organisé par l'Université Paris Dauphine -PSL