Olivia Giordano, La protection du patrimoine culturel des peuples autochtones au Pérou : limites de la propriété intellectuelle et essai d'une protection sui generis. Le cas d'étude du peuple Shipibo-Conibo, thèse soutenue en 2023 à Université Côte dAzur présidée par Jean-Michel Bruguière, membres du jury : Michel Vivant (Rapp.), Clotilde Jourdain-Fortier (Rapp.), Sarah Vanuxem et Julien Dellaux
Un patrimoine culturel autochtone est un héritage matériel et immatériel singulier, propre à chaque peuple autochtone. Sa particularité tient au fait qu'il existe et évolue dans un contexte autochtone qui répond à une certaine vision du monde, à des règles coutumières et à un milieu naturel spécifique. Les membres d'une communauté autochtone sont dépositaires de cet héritage collectif et assurent la fonction de transmetteurs. Or, ce patrimoine transgénérationnel se confronte aux risques - non nouveaux mais grandissants - d'extinction culturelle progressive et d'appropriation illégitime par des acteurs non autochtones. C'est ce qu'il se passe pour le peuple Shipibo-Conibo en Amazonie péruvienne.Par quels moyens juridiques pouvons-nous à la fois protéger ce type de patrimoine, assurer une meilleure conservation et en faire bénéficier les dépositaires autochtones ? La recherche d'un cadre juridique spécifique est une problématique à laquelle de nombreux pays tentent de répondre. Pour ce défi, les droits de propriété intellectuelle se sont rapidement hissés comme des candidats indubitables : le droit d'auteur pour les arts autochtones et les droits de propriété industrielle pour les innovations et savoir-faire traditionnels. Or, la propriété intellectuelle a ses limites : la protection offerte semble être inappropriée aux éléments d'un patrimoine culturel autochtone et nous remarquons un grand contraste entre deux systèmes de valeurs. La voie d'un régime sui generis est alors favorisée. En 2002, le Pérou, l'un des précurseurs de cette alternative, a mis en place une loi sui generis prometteuse, mais qui n'a guère rapporté les résultats escomptés. Pourtant, l'enjeu n'est pas seulement juridique : il est immensément politique, socioculturel et environnemental. La protection des patrimoines culturels autochtones au Pérou nécessiterait la coexistence de mesures légales qui règlementent l'accès (une loi de protection et d'accès) et des mesures extra légales et locales, qui renforcent les pouvoirs culturel, économique et institutionnel des communautés comme celles du peuple Shipibo-Conibo (des ateliers de récupération de savoirs et de gouvernance autochtone). Garantir une autonomie de gestion ainsi qu'un droit de décision de la communauté sur son patrimoine culturel, tout en coopérant avec les acteurs extérieurs, demeurerait une solution de protection appropriée.
Banu Kav Goseberg, Nanotechnologie(s), propriété intellectuelle et droits de l'homme, thèse soutenue en 2022 à Université Côte dAzur présidée par María Pilar Montero García, membres du jury : Clotilde Jourdain-Fortier (Rapp.), Thierry Marteu
Le monde de la nanotechnologie, le monde de l’infiniment petit, évolue rapidement. Cette branche relativement nouvelle des sciences attire de plus en plus l’intérêt de scientifiques, des entreprises, des Etats mais aussi celui de tout le monde. Il y a des nouveautés tous les ans et énormément d’argent et de temps de recherche est investi dans ce domaine. Le marché de la nanotechnologie en 2020 est estimé à plus de 70 milliards de dollars et grandit rapidement tous les ans. Le droit de la propriété est plus ancien. Les principes de base et les instruments de protection ont été mis en place bien avant l’arrivée de la nanotechnologie. Le droit de la propriété intellectuelle se veut universel et neutre et a été développé sans se concentrer sur certaines inventions, technologies ou œuvres en particulier. Dans ce contexte, il faut se demander comment protéger les nouveaux développements nanotechnologiques et les investissements et si le droit de la propriété intellectuelle propose suffisamment d’instruments. La question se pose si le droit existant peut être appliqué aux inventions de la nanotechnologie et comment le faire. Il faut rechercher comment le droit de la propriété intellectuelle peut à la fois protéger les intérêts des propriétaires et en même temps faire bénéficier la société du progrès scientifique. Également, vu que la nanotechnologie concerne en grande partie le développement des médicaments et d’autres dispositions médicales, l’environnement, la surveillance, le développement durable et les intérêts et risques pour les générations futures, la question de l’éthique et des droits de l’homme se pose. Il faut arriver à trouver un équilibre entre les intérêts financiers des investisseurs et le progrès scientifique et technique qui doit bénéficier sans distinctions aux riches et aux pauvres. Ici, le droit joue un rôle fondamental pour arriver à des solutions justes pour tout le monde.
Harry Aba'a Megne, Lex loci protectionis et droit d'auteur, thèse soutenue en 2020 à Université Côte dAzur présidée par Jean-Sylvestre Bergé, membres du jury : Edouard Treppoz (Rapp.), Nicolas Bouche (Rapp.)
Le principe de territorialité domine la matière de la propriété intellectuelle et en particulier celle du droit d’auteur. Si ce principe et la règle de conflit qu’il inspire, la lex loci protectionis, constituaient de véritables avancées à la fin du XIXème s., de nos jours, ils peinent à convaincre. En effet, le principe de territorialité qui est rattachable au principe de souveraineté dans sa dimension de régulation de l’ordre juridique interne subit de multiples remises en cause. Or, en raison de l’intensification des échanges transnationaux, de l’extension des marchés, de la montée des pouvoirs privés économiques, de l’exploitation dématérialisée des œuvres et notamment, la possibilité de les diffuser sur des réseaux mondiaux comme internet, la souveraineté tend à perdre en puissance. Cela oblige à questionner la pertinence d’un rattachement territorial vis-à-vis de réalités a-territoriales. Le maintien tel quel du principe de territorialité, en termes de conflit de lois, atteint alors la sécurité juridique et les attentes légitimes des parties. Le parti pris de ces travaux est celui d’une réévaluation. Il ressort en effet que le recul dans les relations transnationales du principe de souveraineté - qui sous-tend le principe de territorialité - devrait se traduire sur le plan de la règle de conflit, par un recul de ladite territorialité. A rebours de la tendance générale qui consacre l’hégémonie de la lex loci protectionis, les présents travaux proposent d’une part, d’en circonscrire la compétence dans les domaines où le principe de territorialité ne s’impose pas comme une nécessité, et d’autre part de réorienter le rattachement de manière à limiter la concurrence des lois applicables. Il s’agit, en d’autres termes, de réserver une place à l’universalisme compris comme un rempart contre la variabilité du droit applicable et l’insécurité juridique que cette variabilité pourrait emporter.
Bernard Perbal, Les données personnelles et la propriété du soi, thèse soutenue en 2018 à Université Côte dAzur ComUE présidée par Eva Mouial-Bassilana, membres du jury : Christophe Alleaume (Rapp.), Jacques Larrieu (Rapp.)
La progression fulgurante des sciences biologiques, dont les impacts sociétaux n’avaient peut être pas été suffisamment anticipés par le droit international, a créé des conflits conceptuels qu’il est souhaitable d’appréhender dans des débats constructifs respectueux de la richesse des différences individuelles, afin d’éviter des cloisonnements idéologiques qui ne seront d’aucun bénéfice pour l’Humanité. L’analyse des sources du concept de données personnelles et de l’évolution de son acception, renvoie au très long et difficile chemin parcouru depuis les premiers textes fondateurs européens jusqu’à la consécration de la notion de respect du droit à la vie privée que l’on doit à l’opiniâtreté de ses deux défenseurs qu’étaient Samuel Warren et Louis Brandeis, dont l’œuvre séminale a impacté le droit international dans son ensemble. Les données personnelles, maintenant identifiées à des data, sont devenues des ressources convoitées par les mondes de l’économie, du commerce électronique, de la biomédecine et de la criminologie. La dématérialisation des caractéristiques individuelles qui en a découlé a provoqué une immense vague de problèmes et différends relatifs aux modalités de collecte, traitement, diffusion et conservation de ces données, surtout quand elles concernaient des identifiants sensibles tels que les données génétiques. Les secrets de la vie et de l’hérédité s’ouvrent maintenant à un grand public souvent désarmé face aux entreprises qui souhaitent exploiter la richesse du soi intime des individus. Les potentialités nouvellement révélées du génie génétique humain, ont mis en exergue la faiblesse et l’inefficacité de textes juridiques et normatifs ayant mal vieilli qui conduisent à des clivages de principe rigides face à des technologies génétiques visant à améliorer le bien-être des peuples. Il est aujourd’hui nécessaire de dépassionner les débats et de redéfinir au plus tôt, sur des bases scientifiques objectives, le statut juridique des données génétiques et de l’information que leur exploitation peut livrer.
Nadia Ben Merad, Le règlement des différends relatifs a la propriété intellectuelle dans le cadre de l'OMC, thèse soutenue en 2017 à Université Côte dAzur ComUE présidée par Bernard Remiche, membres du jury : Clotilde Jourdain-Fortier (Rapp.), Edouard Treppoz (Rapp.), Jean-Christophe Martin et Jean-Baptiste Racine
Les négociations de l’Uruguay Round ont été l’occasion d’introduire la propriété intellectuelle dans le cadre du GATT avec la conclusion de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) et l’application du système renforcé de règlement des différends de l’OMC aux différends découlant de ce nouvel accord. La présente thèse vise à analyser comment ce système administré par l’ORD organise, traite et règle les différends relatifs au respect des obligations découlant de l’Accord sur les ADPIC. La question est d’une grande importance en raison des singularités de l’Accord sur les ADPIC. Les études menées tout au long de cette thèse ont permis de faire état des règles et procédures encadrant le règlement des différends ADPIC ; de révéler certaines spécificités, en ce qui concerne le type de plaintes pouvant être portées devant l’ORD, et certaines difficultés spécifiques soulevées par l’application de son système de rétorsion à l’Accord sur les ADPIC ; de mettre en avant le rôle central que joue l’ORD, lequel s’est révélé crédible et efficace, non seulement en traitant les différends ADPIC par le truchement des Groupes spéciaux et l’Organe d’appel, mais encore en contribuant à en régler un nombre appréciable au stade des consultations ; et enfin de souligner la manière prudente dont ont fait preuve les Groupes spéciaux et l’Organe d’appel dans leur mission.
Katia Bouchoul, Le Règlement SE, un outil européen au confluent des intérêts nationaux et du droit de l’Union européenne, thèse soutenue en 2015 à Nice présidée par Irina Parachkévova-Racine, membres du jury : Géraldine Goffaux-Callebaut (Rapp.), Nicolas Borga (Rapp.)
Le Règlement SE est un outil européen au confluent des intérêts nationaux et du droit de l’Union européenne. Il est un instrument juridique novateur permettant aux entreprises d’envergure européenne d’élaborer des restructurations transfrontalières par voie de constitution d’une SE et du transfert du siège social de celle-ci ; tout en préservant les intérêts des créanciers, des salariés et des actionnaires minoritaires de ces entreprises. Pour y parvenir, le Règlement SE ne se suffit pas à lui-même : il est pluraliste. Il coordonne les règles applicables à la SE. En outre, il procède lui-même aux renvois vers les droits nationaux qui permettent de préserver les particularités nationales des Etats membres. Ainsi, la SE est rattachée d’une part à un ordre juridique européen et d’autre part à un ordre juridique étatique à titre subsidiaire. Par ailleurs, le Règlement SE n’est pas uniquement bénéfique aux entreprises. En effet, il permet de favoriser l’adoption d’autres outils européens parmi lesquels la directive relative à la fusion transfrontalière entre sociétés de capitaux.
Alexandre Tourette, Responsabilité civile et neutralité de l'internet. Essai de conciliation, thèse soutenue en 2015 à Nice présidée par Michel Vivant, membres du jury : Philippe Brun (Rapp.), Jacques Larrieu (Rapp.), Jean-Baptiste Racine et Yves Strickler
Il est bien connu que la responsabilité civile appliquée aux intermédiaires techniques de l’internet gouverne bien au-delà de ses destinataires directs. Par le biais de sa fonction normative, elle peut inciter les fournisseurs d’accès et les hébergeurs à restreindre la liberté des utilisateurs du réseau. Pour cette raison, la loi a limité leur responsabilité dès le début des années 2000. Alors que le régime de responsabilité qui en découle est régulièrement au cœur de l’actualité juridique, la neutralité de l’internet fait aujourd’hui l’objet de toutes les attentions. Ce concept émergeant est présenté, tour à tour, comme la condition de la liberté sur le réseau et comme le complice des pires excès. À l’heure où sa consécration légale est proposée avec insistance, il apparaît indispensable de s’enquérir de ses interactions avec une responsabilité civile qui s’inscrit, depuis les origines, au cœur du « droit de l’internet ». La présente recherche illustre, qu’au-delà d’une opposition apparente, les deux concepts peuvent s’enrichir l’un l’autre, pour peu que l’on en fasse une lecture raisonnable. Dans cette optique, les limitations de responsabilité dont bénéficient les intermédiaires techniques épousent les contours de la neutralité. La responsabilité civile appliquée à l’internet s’en trouve éclairée d’un nouveau jour. En retour, la neutralité acquiert une considération pour les dommages qu’elle cause. Elle y gagne un caractère raisonnable qui lui était, jusqu’ici, inconnu. L’espoir est alors permis que, loin du concept destructeur parfois dénoncé, la neutralité de l’internet contribue à équilibrer les relations tumultueuses entre libertés et responsabilité sur le réseau.
Alexandre-Guillaume Tollinchi, La capitalisation contractuelle de l'image du footballeur professionnel : aspects de droit comparé France – Italie et de droit de l'Union européenne, thèse soutenue en 2015 à Nice présidée par Pierre Collomb, membres du jury : Nicolas Binctin (Rapp.), Massimo Coccia (Rapp.), Margareta Baddeley, Leandro Cantamessa et Yves Strickler
Longtemps, le sport, pratique physique à l'opposé de toute activité intellectuelle, fut regardé avec dédain et si peu de considération par les juristes. C'était commettre une erreur au regard de la place qu'il a pris dans la vie économique et des affaires, à l'échelle internationale. Les années quatre-vingt-dix ont vu éclore des thèses en droit du sport. L'exploitation économique de l'image sportive, notamment celle du footballeur professionnel, a commencé à se sentir à l'étroit dans le cadre du droit commun. L'inadaptation fiscale pose en outre une véritable problématique au regard des enjeux de compétitivité sportive et économique. L'étude comparée des droits français et italien de la capitalisation contractuelle de l'image footballistique permet, à la lumière et sous les auspices du droit européen, de dégager les prémices d'un droit spécial de l'image sportive, un droit plus pragmatique que théorique, dont l'ambition est tant de préserver la sécurité juridique de la situation des sportifs professionnels que de poursuivre l'harmonisation juridique européenne dans une discipline d'actualité, le droit du sport. Dans le respect des grandes libertés fondamentales et des droits de la personnalité, pouvons-nous, devons-nous, capitaliser l'image footballistique ? Autrement dit, le sportif professionnel peut-il disposer d'un droit de propriété sur son image sportive et, partant, jouir d'un droit sui generis de propriété intellectuelle ? C'est là toute l'ambition de cette thèse. Pris ici en exemple, le football pourrait alors devenir le fer de lance d'autres sports-spectacles, comme le rugby.
Isabelle Pignard, La liberte de création, thèse soutenue en 2013 à Nice présidée par Geneviève Gourdet, membres du jury : Carine Bernault (Rapp.), Emmanuel Dreyer (Rapp.)
La notion de liberté de création est difficile à appréhender. L’étendue même de cette liberté ne fait pas l’objet d’un consensus. Elle est le plus souvent considérée comme un sous-ensemble de la liberté d’expression - restreinte alors à la liberté de création artistique, voire comme un aspect de la liberté d’entreprendre. La liberté de création présente néanmoins des spécificités et est autonome. Elle peut dès lors être protégée en tant que telle par les juges, en amont de la création, comme c’est le cas pour les contrats de commande entre peintres et marchands de tableaux. Dans ce cas, elle est envisagée préalablement à l’octroi de droits. La liberté de création ne peut cependant être considérée sous ce seul angle. En effet, la liberté de création doit être protégée aux différents stades de la création et ses contours sont alors dessinés par la protection accordée à la création elle-même et aux acteurs de la création. Dès lors, la liberté de création est liée aux droits de propriété intellectuelle si l’on considère que ces droits protègent la création. La liberté de création est garantie par l’équilibre entre protection et liberté au sein de ces droits. Au-delà de cet équilibre, la liberté de création peut être confrontée à d’autres libertés et droits fondamentaux. L’ordre public et les bonnes mœurs, la liberté de religion, la vie privée peuvent ainsi limiter la liberté de création. Recourir à la notion de liberté de création peut alors permettre de faire prévaloir l’intérêt du créateur.
Eric Elabd, La répartition des fruits d'une activité inventive , thèse soutenue en 2009 à Nice
L’heure n’est plus à une recherche menée isolément, mais à une recherche inscrite dans un processus croissant de compétition internationale. L’activité de recherche ne s’envisage plus, dès lors, du seul point de vue individuel. Elle est aujourd’hui une réalité collective. Elle s’observe donc à travers une confluence d’intérêts. En effet, l’activité inventive, indissociable de la notion de recherche, est un centre vers lequel convergent l’intérêt individuel, collectif et l’intérêt général. L’importance de la recherche collective se retrouve dans les politiques actuelles ayant trait à l’innovation. Cela amène naturellement à s’interroger sur une étape cruciale du phénomène d’innovation, à savoir la répartition des fruits d’une activité inventive. La répartition des droits sur les résultats de la recherche au sein de l’entreprise constitue le premier volet de notre analyse. Il s’appuie notamment sur une comparaison avec les systèmes étrangers. Il s’agit au préalable de proposer une déconstruction du régime de l’invention salariale comme de la rémunération supplémentaire due au salarié inventeur, afin d’en simplifier la structure et d’améliorer la rétribution du salarié. Ensuite, l’étude s’enrichit lorsque la question de la répartition des fruits d’une recherche collective est abordée, à travers l’observation des rapports, tant contractuels que structurels, naissant dans le cadre d’une activité inventive. Enfin, dans une optique de régulation et de contrôle de l’activité de recherche et développement, est examiné l’encadrement des pratiques fondées sur une activité créatrice. Il en résulte une approche critique des interventions respectives de l’arsenal concurrentiel et de la propriété industrielle. La prise en compte de ces différents aspects de la répartition est une problématique incontournable d’une politique d’innovation prospective.
Eve Revel, Les rapports entre propriété et responsabilité dans la protection de l'immatériel, thèse soutenue en 2008 à Nice
L'immatériel n'a ni corps, ni frontières. De par sa nature, il suppose la liberté (liberté du commerce et de l'industrie principalement, mais aussi liberté de voir, de créer. . . ). Cette liberté est limitée par la responsabilité et la propriété, qui sont des exceptions à la liberté. L'équilibre entre ces trois notions assure l'existence d'un domaine public, d'une sécurité juridique, et d'une incitation à l'innovation. La valeur croissante de l'immatériel conduit à déstabiliser l'équilibre initial. Propriété et responsabilité sont aménagées pour protéger au maximum ces nouvelles valeurs qu'il peut sembler injuste de laisser " libres ". Cette évolution boulverse les frontières et détruit les équilibres. Pour lutter contre ce mouvement, il faut revenir à des bases juridiques strictes.
Gonzague Grave-Renaud, Contribution à l’étude de la réservation des utilités des données numériques, thèse soutenue en 2025 à Université de Lille 2022 sous la direction de Édith Blary-Clément présidée par William Dross, membres du jury : Jean-Michel Bruguière (Rapp.), Caroline Le Goffic, Marie Malaurie-Vignal et Pilar Montero García-Noblejas
La dématérialisation et la numérisation croissantes de notre économie ont élevé les données au rang de matière première indispensable. La valeur des données réside dans leurs exploitations potentielles. C’est pourquoi leurs détenteurs cherchent à maximiser leurs revenus en limitant l’accès. Ce constat souligne les enjeux de gouvernance des données. La problématique de la réservation des données a alors émergé. Le constat est que la propriété intellectuelle ne parvient pas à appréhender pleinement la donnée. Néanmoins, l’analyse du droit positif révèle l’existence de mécanismes du droit commun permettant une réservation des utilités des données, tels que le contrat, la concurrence déloyale et parasitaire et le secret des affaires. Bien que ces mécanismes offrent une réservation, ils ne sont pas exempts de lacunes. Aussi, la question de la propriété des données a émergé et a suscité un vif débat. Cette interrogation a engendré un renouvellement des approches théoriques et pratiques du droit de propriété. Dans une approche prospective, un droit exclusif d’exploitation sur les données a été esquissé sous la forme d’un droit sui generis. Cet exercice de conceptualisation a mis en exergue les difficultés que pourrait entraîner une telle reconnaissance. Par ailleurs, il est impératif de trouver un juste équilibre entre la volonté d’appropriation des données et le droit d’accès des tiers à celles-ci afin d’instaurer un régime de protection à la fois efficace et équitable.
Peingdewiende Jean Ouedraogo, Protection des œuvres littéraires et artistiques dans l'environnement numérique dans l'espace OAPI, thèse soutenue en 2024 à Lyon 2 sous la direction de Anne-Emmanuelle Kahn, membres du jury : Amélie Favreau (Rapp.), Edouard Treppoz et Windpagnangdé Dominique Kabré
Les technologies de l’information interrogent la propriété littéraire et artistique de façon permanente. Chaque changement technologique entraine d’importantes répercussions dans la manière de protéger les œuvres culturelles. C’est ainsi qu’avec le développement du numérique des années 2000, plusieurs législations ont été mises à jour en commençant par le droit international. L’accord de Marrakech adopté par l’OMC le 15 décembre 1994 et les deux traités de l’OMPI de 1996 à savoir le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur et le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes sont les fruits de ces mutations. Au niveau régional et national, on pourrait également citer le Digital Millénium Copyright Act de 1998 pour l’Amérique et la Directive européenne sur la société de l’information de 2001 pour ce qui est de l’Union Européenne. Tenant compte de ces changements au niveau international et dans les ordres juridiques voisins, le législateur africain a opéré une révision de l’Accord communautaire le 15 décembre 2015. Cette révision prend cependant insuffisamment en compte les préoccupations suscitées par la technologie numérique. L’exemple le plus emblématique est l’occultation des influences de l’Intelligence artificielle sur la propriété littéraire et artistique. Cette thèse vise donc à proposer des solutions pour parachever l’adaptation du droit OAPI de sorte qu’il soit à jour des standards internationaux et tienne compte des développements du droit régional dont la construction est initié par l’Union Africaine avec la mise en place de l’Organisation Panafricaine de la Propriété Intellectuelle. (OAPI). Cette étude touchant à la fois le droit matériel et le système institutionnel de l’OAPI a eu pour objectif de renforcer davantage la sécurité des intérêts des titulaires de droits et ceux des utilisateurs de leurs œuvres de sorte à rendre le cadre communautaire africain plus équilibré et sécurisé.
Audrey Pemzec, La contrefaçon en ligne : le traitement judiciaire des atteintes aux droits de propriété intellectuelle, thèse soutenue en 2019 à AixMarseille sous la direction de Dominique Velardocchio-Flores présidée par Isabelle Barrière-Brousse, membres du jury : Pascale Tréfigny (Rapp.)
La rencontre intervenue entre les biens protégés par le droit de la propriété intellectuelle et l'internet ne s'est pas faite sans heurts. Ubiquitaire, immatériel, anonyme et transfrontalier sont autant de spécificités de l'internet qui mettent en péril les prérogatives des titulaires de droit de propriété intellectuelle. Dans cette optique, l'identification des usages couverts par un droit de propriété intellectuelle est un enjeu essentiel pour déterminer le périmètre de la contrefaçon en ligne. Ainsi, la portée des droits de propriété intellectuelle sur l'internet détermine le périmètre de la contrefaçon en ligne. Dans cet environnement numérique, la portée des droits de propriété intellectuels ne peut être révélé qu'à l'étude de la masse des atteintes qu'ils endurent. Or, cette analyse ne souffre aucune ambiguïté. Il en résulte incontestablement le constat d'une limitation de la portée des droits exclusifs dans l'environnement numérique. Par ailleurs, la protection des droits de propriété intellectuelle est également affaiblie lors du traitement de la contrefaçon en ligne. En ce domaine, l'intervention du droit international privé est fréquente puisque les atteintes aux droits de la propriété intellectuelle présente souvent un élément d'extranéité. Toutefois, les critères de rattachement territoriaux prévus par la règle de conflit rendent difficile la détermination de la juridiction compétente dans un contentieux partiellement ou totalement dématérialisé. La responsabilité des acteurs de l'internet présente également de nombreuses faiblesses favorisant la diffusion de tout type de contenu
Dimitri Bélot, La durée de protection en droit d'auteur et droits voisins, thèse soutenue en 2017 à Lyon sous la direction de Edouard Treppoz présidée par Pascal Kamina, membres du jury : Nicolas Binctin (Rapp.), Laurent Pfister
Le modèle de protection des oeuvres de l’esprit, qu’il s’agisse du copyright ou du droit d’auteur, estaujourd’hui vivement critiqué. Notamment concernant sa durée. Pourquoi applique-t-on aujourd’huiune durée de protection de principe de soixante-dix ans post mortem auctoris aux oeuvres de l’espriten France, en Europe et aux Etats-Unis ? Et quels sont les enjeux actuels d’une telle durée de laprotection à l’heure d’internet et des contenus dématérialisés ?Pour répondre à ces questions, il est nécessaire de « déconstruire » historiquement et juridiquementle modèle, afin de comprendre l’application actuelle d’une durée de protection de principe desoixante-dix ans post mortem auctoris aux oeuvres de l’esprit.S’il est également primordial de comprendre les évolutions récentes des délais de computation etnotamment les différentes prorogations de la durée de protection, il est aussi fondamental d’étudierl’élargissement du champ d’application du copyright et du droit d’auteur à certains types d’oeuvrestels que le logiciel ou la base de données.La volonté des lobbyistes de la culture et de nombreux ayants droit de proroger la protection desoeuvres de l’esprit participe à la tendance actuelle d’une durée de protection toujours plus longue. Ily a donc urgence, et revaloriser de manière concrète le domaine public est aujourd’hui capital.L’analyse économique du modèle prouve que la durée de protection des oeuvres de l’esprit,aujourd’hui particulièrement longue au regard des outils technologiques actuels, freine la diffusiondu savoir sans toutefois augmenter l’incitation à la création Ainsi, le modèle de protection doit êtreanalysé et repensé, aussi bien juridiquement qu’économiquement, afin qu’une réforme concrète soitproposée.
Gabriel Kemje Bate Tazefack, Gestion collective du droit d'auteur et des droits voisins et pouvoirs publics, thèse soutenue en 2015 à Poitiers sous la direction de Philippe Gaudrat et Paul-Gérard Pougoué présidée par Marie-Eugénie Laporte-Legeais, membres du jury : Isiodre Léopold Miendjiem (Rapp.), Xavier Blanc
La découverte de l'art rupestre et des gravures pariétales a montré que l'art a accompagné l'homme tout au long de son existence. La jouissance de celui-ci à travers le temps a conduit au développement de diverses activités, liées à sa promotion et à son exploitation, dont découlent des avantages indéniables. Les gains matériels issus de l'activité artistique profitaient initialement aux exploitants, à l'exclusion des créateurs. La mobilisation de ces derniers, regroupés au sein de collectifs a permis de mener des revendications aboutissant à la reconnaissance et à la consécration des droits de propriété littéraire et artistique, à la fin du 18e siècle. Les organisations de revendication se sont muées en organismes de promotion de l'activité artistique, de défense des intérêts patrimoniaux et extrapatrimoniaux, de perception et de répartition des droits : les organismes de gestion collective ou sociétés de perception et de répartition des droits étaient nés. Les enjeux des droits de propriété littéraire et artistique pour la société toute entière ont poussé les pouvoirs publics à légitimer la gestion collective dans les missions d'intérêt général qu'elle est amenée à accomplir. Les organismes de gestion collective se sont vus investis de missions de service public, pour lesquelles d'importantes ressources sont mobilisées. En lui assurant les meilleures conditions d'accomplissement de ces missions, les pouvoirs publics se ménagent un droit de regard qui se traduit dans la maîtrise et le contrôle de la gestion collective.
Wladimir Soltmann, Association de la norme technique à l'innovation. Étude de droit de la propriété intellectuelle et de droit de la concurrence, thèse soutenue en 2015 à Lyon 3 sous la direction de Edouard Treppoz présidée par Cyril Nourissat, membres du jury : Anne Penneau (Rapp.), Jean-Michel Bruguière
La norme technique exige parfois de lui associer des innovations faisant l’objet de droits privatifs, au bénéfice de la réalisation de sa mission. De prime abord, la propriété intellectuelle apparaît comme étant un élément perturbateur, impliquant désormais d’examiner l’ « économie » de la norme au moment de son élaboration et de son utilisation et non plus uniquement la technique. Pour éviter la corruption de la norme par des droits privatifs trop contraignants, les organismes de normalisation exigent que seuls les droits privatifs « essentiels » soient associés à la norme. Les critères de l’adhérence réciproque de la norme et de l’innovation structurant leur association, justifient au nom de son « utilité sociale », une adaptation réciproque des régimes juridiques attachés à ses deux composantes. Ainsi l’ « utilité sociale » incarnée par la norme technique impose une adaptation du régime des droits de propriété intellectuelle. Symétriquement, l’innovation « essentielle » à la norme suppose une adaptation du régime de la norme technique à la propriété intellectuelle. Cela donne naissance à deux régimes juridiques substantiellement interpénétrés et structurellement interdépendants. D’une part, les droits privatifs étant « essentiels » à la norme, peuvent être considérés comme des « infrastructures essentielles », justifiant une érosion systémique de leur portée dans le cadre de leur association à la norme. Dans le cadre de l’application de règles de concurrence, cette érosion résulte d’une approche ex post à laquelle se conjugue une approche ex ante, conceptualisée par les conditions FRAND. D’autre part, l’association s’évalue également à l’aune de la propriété privée. Il apparaît que la norme technique devrait être considérée comme étant une chose commune imposant d’aménager, au bénéfice de ses utilisateurs, un accès et une utilisation libre. Cela suppose d’envisager alors l’émergence d’un droit d’utilisation de l’innovation associée à la norme technique.