vendredi17nov.2023
08:3017:00
Le constitutionnalisme numérique

Colloque

Le constitutionnalisme numérique


Présentation

Traditionnellement, au cœur du droit constitutionnel et de la science politique se pose la question du pouvoir. Le pouvoir est en effet le concept central de ces deux disciplines. Si la science politique appréhende le phénomène du pouvoir (et de la légitimité de celui-ci) dans sa globalité, le droit constitutionnel se focalise pour sa part plutôt sur le pouvoir politique, la puissance publique. Le droit constitutionnel vise d'abord, à travers un ensemble de règles et de procédures, à organiser le pouvoir politique et à le limiter afin de garantir un certain équilibre (checks and balances) entre les différentes institutions. Le droit constitutionnel vise ensuite à éviter que chaque institution prise isolément (ou, a fortiori, collectivement) puisse prendre des décisions de nature à violer les droits fondamentaux des individus. Séparation des pouvoirs et garantie des droits autrement dit, à l'image de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Dans les deux cas, c'est seulement le pouvoir politique que le droit constitutionnel a classiquement en ligne de mire.

Avec la numérisation du monde, on assiste cependant au déplacement du coeur du pouvoir des institutions politiques vers les entreprises, autrement dit du public vers le privé, des Etats (mais aussi des organisations internationales) vers les plateformes numériques et les fournisseurs d'accès. Si ce phénomène n'est pas nouveau, la mondialisation ayant généré le développement de grandes entreprises multinationales, il a cependant pris une ampleur inégalée compte tenu à la fois de l'ubiquité d'internet et de l'explosion de l'intermédiation. Il en résulte que les menaces pour la séparation des pouvoirs et les libertés individuelles viennent non seulement des Etats et autres entités publiques mais également, de manière exponentielle, des grands acteurs du numérique.

Dans un tel contexte, le droit constitutionnel et, plus largement, le droit public peinent à répondre à ces nouveaux défis. Ils sont nécessairement appelés à se renouveler dans leurs concepts et approches afin de tenir compte du fait que, en matière de numérique, les autorités publiques tendent à être éclipsées par les autorités privées et les forces du marché mondial. De fait, une parcelle conséquente du pouvoir politique est en effet aujourd'hui entre les mains des acteurs privés du numérique. Ces acteurs façonnent largement la société en influençant les préférences et les choix individuels en tant que consommateurs mais aussi en tant que citoyens. Ils contribuent désormais eux-mêmes à la définition de l'intérêt général qui, dans les démocraties modernes, était l'apanage de « Nous, le peuple ».

Si le numérique était jusqu'alors avant tout un objet de régulation, il est aujourd'hui de plus en plus question, notamment dans la littérature scientifique anglo-saxonne, de « digital constitutionalism », de « constitutionnalisme numérique ». L'objet de ce colloque international est d'examiner les caractéristiques de ce constitutionnalisme numérique sous trois angles : l'émergence d'un droit constitutionnel du numérique ; le rôle des acteurs privés du numérique dans l'exercice des fonctions publiques et les transformations corrélatives du droit administratif ; le respect des droits fondamentaux dans le contexte du numérique, notamment à la faveur de l'accélération des développements de l'intelligence artificielle.

 

Programme

 

 

8h30 | Allocution de bienvenue
Alain Maurin, Doyen de la faculté des sciences juridiques et économiques

8h45 | Introduction du colloque
François-Xavier Millet, Université des Antilles Chaire Jean Monnet CRI

 

Vers un droit constitutionnel du numérique ?

Sous la présidence de Mme Aude Bouveresse, Université de Strasbourg

9h | De la régulation d'Internet au constitutionnalisme numérique
Guillaume Tusseau, Sciences Po Paris

9h20 | Les chartes du numérique : un moment constitutionnel ?
Edoardo Celeste, Dublin City University

9h40 | Les chartes du numérique en France et dans l'Union européenne
Brunessen Bertrand, Université de Rennes I Chaire Jean Monnet DataGov

10h | Discussion

10h45 | Pause

 

Les acteurs privés du numérique

Sous la présidence de M. Loïc Vatna, Université des Antilles

11h30 | From freedoms to powers : the rise of private actors in the realisation of the common good
Giovanni De Gregorio, Université catholique de Lisbonne

11h50 | Les fonctions publiques des acteurs privés du numérique : remise en cause ou actualisation des notions de service public et de police ?
Timothée Paris, Conseil d'Etat

12h10 | L'abus de position dominante des plateformes : du droit de la concurrence au droit constitutionnel ?
Sven Frisch, Autorité de la concurrence luxembourgeoise

12h30 | Discussion

13h15 | Pause

 

La garantie des droits

Sous la présidence de Mme Sandrine Turgis, Université de Rennes 1

14h30 | The protection of fundamental rights and constitutional reactions to private powers: digital constitutionalism in action
Oreste Pollicino, Université Bocconi

14h50 | Le principe de non-discrimination
Céline Castets-Renard, Université d'Ottawa

15h10 | La vie privée
Florian Martin-Bariteau, Université d'Ottawa

15h30 | Discussion

 

Conclusions

16h15 | The new shape of power and the challenges for digital constitutionalism
Oreste Pollicino, Université Bocconi


Colloque organisé sous la direction scientifique de M. François-Xavier MILLET, Professeur de droit public à l'Université des Antilles, Laboratoire caribéen de sciences sociales (LC2S-CAGI).



Université des Antilles Pôle Guadeloupe
Faculté des sciences juridiques et économiques
Campus de Fouillole - Amphithéâtre Lepointe
97157 Pointe-à-Pitre

Université des Antilles
UFR des Sciences Juridiques et Economiques
Laboratoire caribéen de sciences sociales
Centre d'analyse géopolitique et internationale