Martial Manet

Enseignant-chercheur contractuel
Docteur, Droit public.
Qualifié aux fonctions de maître de conférences
(2024, Droit public).
Faculté de Droit et de Science politique

Centre de Recherche Versailles Saint Quentin Institutions Publiques
Institut de Recherche en Droit International et Européen de la Sorbonne
Les figurations du peuple dans la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Examen contextualiste d'une subjectivité collective, soutenue le 16 juin 2022 à Paris (Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne), sous la direction de Jean Matringe.
Le jury était composé de Laurence Burgorgue-Larsen, Raphaëlle Nollez Goldbach, Rafâa Ben Achour, Souleymane Bachir Diagne, Philippe Lagrange et Jean Matringe.

L’indétermination intrinsèque de la notion de « peuple » conjuguée à l’ampleur normative de la subjectivation de cette entité collective dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples appelle nécessairement la formulation d’une question simple : qu’est-ce que le sujet « peuple » de la Charte de Nairobi ? Plus précisément, quelles sont les figurations qu’en ont proposé les différents acteurs du droit africain des droits de la personne humaine ? L’ambition de cette thèse est ainsi de décrypter le sens et le contenu qu’a pris cette subjectivité, tant en fonction des acteurs qui s’en sont saisis que des moments socio-historiques dans laquelle elle fut mobilisée.

Une analyse contextualiste attentive aux relations qu’entretient le droit avec son environnement – historique, politique, social – permet de distinguer deux figurations. L’une, dé-coloniale, portée par les rédacteurs de la Charte, identifie le sujet « peuple » à la collectivité constituée par le territoire colonial et lui reconnait le droit de devenir indépendant et de se constituer en État dans les limites de cette territorialité. L’autre, post-coloniale, portée par les interprètes de la Charte, identifie le sujet « peuple » à des collectivités non étatiques, ayant des formes d’identité et d’allégeance disjonctives de celles de la collectivité étatique-nationale, et leur reconnait un droit à l’autonomie (politique, juridique, linguistique) respectueux de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États qui les englobent.

Ces deux figurations cohabitent et sont complémentaires car elles ne s’adressent pas aux mêmes entités collectives. Dans des temporalités différentes et selon des enjeux divergents, elles ont toutes deux participé à l’enrichissement de la protection des droits de la personne humaine sur le continent africain.

Mots-clefs : Peuple – peuple autochtone – autodétermination – autonomie – Charte africaine des droits de l’homme et des peuples – colonisation – décolonisation – droit international des droits de l’homme – Etat – ethnoculturel – frontières – indépendance – intégrité territoriale– Nations Unies – Organisation de l’unité africaine – Union africaine

Prix Suzanne Bastid (SFDI), Prix Jacques Mourgeon (SFDI), Prix de thèse de la Branche française de l’International Law Association, Prix de thèse des Éditions Dalloz, Prix Léon Bourgeois remis par le Groupement de recherche sur l’action multilatérale (CNRS), Prix « Action humanitaire – Droits de l’homme » (3ème prix) remis par l’Association française des docteurs en droit, Accessit au Prix de thèse Paris 1 – Institut de recherche juridique de la Sorbonne

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The intrinsic indeterminacy of the notion of “people” combined with the normative scope of the subjectification of this collective entity in the African Charter on Human and Peoples’ Rights necessarily calls for the formulation of a question: what is the subject “people” in the Nairobi Charter? More precisely, what are the figurations of this subject proposed by the different actors of African human rights law? The ambition of this thesis is to decipher the meaning and content of this subjectivity, both in terms of the actors who have used it and the socio-historical moments in which it was mobilised.

A contextualist analysis that pays attention to the relationship between the law and its historical, political and social environment allows us to distinguish between two different representations. One, de-colonial, carried by the drafters of the Charter, identifies the subject “people” with the collectivity constituted by the colonial territory and recognises its right to become independent and to constitute itself as a state within the limits of this territoriality. The other, post-colonial, supported by the interpreters of the Charter, identifies the subject “people” with non-state collectivities, with forms of identity and allegiance disjunctive to those of the state-national collectivity, and recognises their right to autonomy (political, legal, linguistic) respectful of the sovereignty of the states that encompass them. These two representations coexist and are complementary because they do not address the same collective entities. In different temporalities and according to divergent stakes, they have both participated in the enrichment of the protection of human rights on the African continent.

Keywords: People - indigenous people - self-determination - autonomy - African Charter on Human and Peoples’ Rights - colonisation - decolonisation - international human rights law - State - ethnocultural - borders - independence - territorial integrity - United Nations - Organisation of African Unity - African Union