La théorie des vices du consentement offre une protection générique des contractants contre tout risque d'altération du consentement. Constatant son insuffisance, les droits de la consommation et de la concurrence ont, pour leur part, choisi d'adopter un ensemble de règles spécifiques visant à protéger, d'une part, les consommateurs et d'autre part, les professionnels en situation de faiblesse, contre ces mêmes risques. Au sein du droit de la consommation, cela s'est fait sous l'impulsion du droit européen, la directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales ayant largement dicté le contenu des dispositions protectrices aujourd'hui applicables aux consommateurs. Ainsi, le Titre II du Livre Ier du Code de la consommation, consacré aux pratiques commerciales, comprend un Chapitre préliminaire consacré aux pratiques commerciales déloyales, suivi d'un Chapitre Ier, dont la Section 1 traite des pratiques commerciales trompeuses, puis d'un Chapitre II, dont la Section 5 traite des pratiques commerciales agressives. Le droit de la concurrence a, quant à lui, recouru spontanément à cette option. Son Livre IV comprend ainsi un Titre IV, dont le Chapitre II est relatif à la prohibition des pratiques restrictives de concurrence. Celles-ci, prohibées per se, n'ont a priori pas de lien apparent avec la théorie des vices du consentement. Pourtant, à y regarder de plus près, certaines d'entre elles s'attachent, de manière très indirecte, à rééquilibrer l'équilibre des forces en présence au stade de la négociation d'un contrat de distribution entre professionnels. Celles-ci vont en effet s'attacher à prohiber les comportements de certains professionnels qui, disposant d'un avantage économique certain, pourraient être tentés d'en jouer afin d'obtenir de leurs partenaires contractuels, économiquement dépendants, des avantages contractuels injustifiés. Ce faisant, c'est bien le consentement de ces derniers qui se trouve être préservé.En développant une telle législation, les droits spéciaux se sont écartés de leurs finalités réciproques. Ainsi, s'il est vrai que le droit de la consommation offre un ensemble de dispositions visant à prévenir la survenance de vices du consentement – approche inédite au sein de la théorie des vices du consentement de droit commun, qui ne s'attache qu'à réprimer les abus ayant effectivement altéré le consentement des contractants –, il propose également une abondance de dispositions curatives à la maniabilité souvent délicate. Leur compréhension ainsi que leur mise en œuvre nécessite donc une certaine habileté, au point de mettre en péril l'effectivité de la protection qu'elles visent à garantir. Quant au droit de la concurrence, le développement de dispositions visant à prohiber per se des comportements susceptibles de ne nuire qu'aux intérêts particuliers des professionnels en situation de faiblesse et non à l'ensemble du marché tend manifestement à détourner la matière de sa finalité première.Remédier à de telles constatations implique d'envisager la possibilité de délester les droits spéciaux d'une partie des dispositions légales visant à protéger le consentement des contractants y étant soumis, au profit de la théorie des vices du consentement. Une telle solution conduirait à recentrer les droits de la consommation et de la concurrence autour de leurs finalités respectives que sont, pour l'un, la protection des intérêts personnels des consommateurs et, pour l'autre, la protection du marché. Encore faudrait-il que les contractants, aujourd'hui protégés par ces dispositions spéciales, ne voient pas la qualité de leur protection diminuer. S'en assurer nécessitera de déterminer la nature des améliorations que devra subir la théorie des vices du consentement afin de pouvoir assimiler une part du contentieux de droit spécial. Ces améliorations, inspirées par l'étude des droits spéciaux, pourront ainsi bénéficier à l'ensemble des contractants soumis au droit commun.