Présentation de l’éditeur
Sept années après son adoption, la déclaration UE-Turquie soulève toujours de nombreuses interrogations, aussi bien du point de vue des intentions politiques ayant présidé à son adoption que de sa nature juridique même. Perçue comme un véritable « modèle » de gestion des flux migratoires, elle est, plus encore, source d’inquiétudes : non seulement parce qu’elle utilise et détourne le droit européen dans le but d’organiser un système d’éloignement des frontières, contraire au droit international, en particulier au droit de l’asile, mais aussi parce qu’elle instrumentalise le droit international, avec pour stratégie durable celle d’un évitement des responsabilités des États membres de l’Union européenne, contraire au droit européen.
Au-delà de l’analyse de la pratique liée à la mise en œuvre, depuis 2016, de la déclaration UETurquie, l’ouvrage a pour objet de souligner l’intérêt, les caractéristiques et les écueils d’une telle méthode de régulation des flux migratoires, ainsi que les jeux d’apparences qu’elle contribue à alimenter. Car pareille instrumentalisation des règles juridiques serait en effet impossible sans une stratégie régionale d’influence conduisant, dans les faits, à un affaiblissement des garanties internationales et européennes ordinairement reconnues aux individus en exil. C’est au regard de l’ensemble de ces éléments que doit être abordée la contribution de la déclaration de 2016 et de son approche gestionnaire des flux migratoires à la formation d’un « ordre des circulations ».
Préface de Frédérique Coulée, professeure de droit public à l’Université Paris-Saclay.