Les doctorants et jeunes docteurs de l'École doctorale des sciences juridiques (ED 101) de l'Université de Strasbourg, en collaboration avec la direction de l'École doctorale, la direction de la Fédération de recherche L'Europe en mutation et l'Association des doctorants et jeunes docteurs en Droit, Histoire et Science politique de l'Université de Strasbourg (DEHSPUS), organisent la XIIe édition du Colloque des doctorants et jeunes docteurs de l'École doctorale.
Ce colloque, dans la lignée des éditions précédentes, a pour vocation de valoriser les travaux des doctorants et jeunes docteurs. Les communications des contributeurs feront l’objet d'une publication. La visée du colloque est également d’ouvrir un espace de discussions entre jeunes chercheurs issus de différentes disciplines juridiques et, plus largement, des sciences humaines et sociales. Dans cette optique, une large place sera laissée aux temps d'échanges afin d'encourager une réflexion commune sur le thème étudié, la Nature.
Argumentaire :
Depuis une vingtaine d’années, de nombreux travaux en sciences sociales et humaines contribuent à redéfinir la notion de Nature[1], en remettant en question la division classique entre Nature et société. Ils soulignent les imbrications, les échanges et les liaisons entre les différentes modalités d’existence et de développement des espèces vivantes. Ainsi, la théorie suivant laquelle l’Occident chrétien aurait été le théâtre d’une grande rupture entre la Nature et l’humanité[2], est aujourd’hui débattue[3].
De tels changements de perspective, qui correspondent à des mutations culturelles et sociologiques plus larges, ne semblent pas encore avoir fait l’objet d’une synthèse dans le domaine juridique. D’autant plus que, durant le XXe siècle, alors même que la question de la protection de la Nature agite les controverses politiques, le champ juridique semble paradoxalement avoir délaissé l’usage de ce terme, au bénéfice d’approches sectorielles passant par le truchement de notions telles que le bien-être animal[4], la préservation des arbres[5] ou la biodiversité[6]. Il faudrait aussi citer l’absence d’entrées sur la Nature dans les dictionnaires juridiques, toute aussi surprenante au regard du contexte intellectuel et politique.
À première vue, si l’intérêt des juristes pour la notion de Nature paraît surtout être provoqué par des sollicitations extérieures – comme le constat de la dégradation de l’environnement et la prise de conscience collective de celle-ci – depuis l’Antiquité, la Nature constitue un argument central dans le raisonnement juridique[7]. Les juristes, les théoriciens politiques, les économistes, se sont appuyés sur la notion de Nature pour définir normes et modèles de société. Au-delà de cette version hypostasiée, la Nature est également ce grand autre qui se conçoit en opposition à l’art, à la culture, mais aussi, dans le domaine du droit, à des notions aussi fondamentales que celles de l’artifice, de la fiction ou encore de l’institution.
À la lueur du contraste entre cette importance passée et le malaise apparent de la doctrine actuelle, qui aborde la Nature de façon casuistique, il semblait utile de réaliser un état des lieux de la manière dont les jeunes chercheurs en droit se saisissent de cette notion dans leurs travaux. Estelle pour eux un obstacle ou un appui ? Constitue-t-elle le fruit de l’imagination des juristes médiévaux ou représente-t-elle encore un fondement théorique solide ? S’apparente-t-elle à une idée ou à une chose ? Comment peut se nouer aujourd’hui le dialogue avec l’anthropologie de la Nature et le droit ? De ce point de vue, le colloque ambitionne d’illustrer que le rapport entre l’Homme et la Nature, étudié par les anthropologues, s’opère aussi sur le terrain juridique. Il ne peut se réduire, au prisme des travaux actuels, ni au désir d’une relation symbiotique avec une Nature fantasmée, ni à l’abusus d’une Nature réifiée et domestiquée.
Consignes scientifiques :
Cet appel à communications s'adresse exclusivement aux doctorants et jeunes docteurs.
Bien qu'il propose certaines pistes de réflexion, celles-ci ne sont ni exhaustives, ni exclusives. Plus encore, si ce colloque s'inscrit dans le champ du droit, le comité invite les contributions qui mobiliseront les approches d’autres disciplines des sciences humaines et sociales.
Une seule proposition de contribution sera examinée par personne. La proposition comporte un maximum de 800 mots (hors bibliographie), au format Word, et sera accompagnée d'une bibliographie et d'un curriculum vitae. L'ensemble doit être adressé avant le 23 mars à l'adresse suivante : colloque.ed101.2025@gmail.com
Les doctorants et jeunes docteurs dont les communications auront été sélectionnées en seront informés par courriel début avril.
Les contributions peuvent être réalisées en français ou en anglais. Les versions définitives devront être transmises au comité scientifique avant le jour du colloque. Ces contributions seront valorisées par la publication des actes du colloque.
Les frais afférents au voyage et au séjour à Strasbourg sont pris en charge par les organisateurs du colloque pour les doctorants et docteurs qui ne sont pas inscrits à l’Université de Strasbourg.
Comité scientifique :
- Mme Marina Cabada, doctorante en droit, CEIPI.
- M. Samuel Fulli-Lemaire, Professeur à l'Université de Strasbourg, Directeur de l'école doctorale 101.
- Mme Clara Garnier, doctorante en droit, CDPF. - Mme. Ayda Guner, doctorante en droit, CDPF.
- M. Joseph Mann, docteur en droit, UMR DRES.
- M. Félicien Massebieau, doctorant en droit, IRCM.
- Mme Marion Maurer, docteure en droit, CEIE.
- M. Jules Nyobe, doctorant en droit, IRCM.
- Mme Céline Pauthier, Professeur à l'Université de Strasbourg, Directrice adjointe de l'école doctorale 101.
- Mme Delphine Porcheron, Maître de conférences à l'Université de Strasbourg, Directrice adjointe de la Fédération de recherche.
- M. Tamerlan Quliyev, docteur en sciences politiques, UMR DRES, ITI MAKErS.
- M. Bruno Trescher, Professeur à l'Université de Strasbourg, Directeur de la Fédération de recherche.
[1] P. Charbonnier, La fin d’un grand partage, Nature et société, de Durkheim à Descola, Paris, CNRS Editions, 2015.
[2] L. White, Les racines historiques de notre crise écologique, Paris, Presses Universitaires de France, (1967) 2019.
[3] C. Stépanoff, Attachements. Enquête sur nos liens au-delà de l’humain, Paris, La Découverte, 2024.
[4] Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages, Conseil de l’Europe, 1978. Article 13 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne. En droit national, voir la loi n°2015-177 du 16 février 2015 qui introduit l’article 515-14 du Code civil. Voir également la loi n°2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.
[5] Règlement (UE) 2023/1115 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union et à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts, et abrogeant le règlement (UE) no 995/2010.
[6] Règlement (UE) 2022/869 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 relatif à la restauration de la nature et modifiant le règlement.
[7] Y. Thomas, « Imago naturae. Note sur l’institutionnalité de la nature à Rome. Actes de la table ronde de Rome (12-14 novembre 1987) », Publications de l’École française de Rome, 1991, p. 201-227 ; « Le sujet de droit, la personne et la nature. Sur la critique contemporaine du sujet de droit », Le Débat, 1998, p. 85-107 ; D. Mantovani, Droit de nature, nature sans droits. Les implicites romains de la pensée moderne, Cours au Collège de France, 2023.
Douzième colloque des doctorants et jeunes docteurs de l’École doctorale 101