Les vagues : réflexions juridiques sur la gestion d’une « ressource » singulière

Appel à communication

Les vagues : réflexions juridiques sur la gestion d’une « ressource » singulière

Journée d’étude, Les Sables d’Olonne, 14 juin 2024

Date limite le dimanche 31 mars 2024

Puisque chacun sait bien ce que sont les vagues, de longs développements ne sont sans doute pas nécessaires pour introduire ce dont il est ici question. Rappelons simplement que les vagues – phénomène physique naturel – se définissent comme des oscillations (ou perturbations) de la surface de l'eau, que ces oscillations de surface peuvent se manifester sur tous les types de masses d'eau (rivières, lacs, mers ou océans) et qu'elles sont généralement produites par des forces naturelles telles que le vent, les séismes, la pression atmosphérique ou la force gravitationnelle entre la terre, le soleil et la lune. Sur une planète dont 72 % de la surface est recouverte d'eau, le phénomène est évidemment omniprésent.

Ce qui interroge peut-être davantage est le lien que l'on peut établir entre les vagues et le droit, et les raisons qui poussent à s'y intéresser. A cet égard, on commencera par relever que le droit se préoccupe déjà des vagues.

D'une part, tant en droit international que national, il existe diverses règles en matière de communication et de standardisation d'informations relatives aux vagues (ex : obligation d'émettre des bulletins météo contenant des informations sur les vagues, normes techniques pour échanger des données concernant les vagues). D'autre part, si le droit s'intéresse aux vagues, c'est aussi en raison du risque qu'elles représentent pour les communautés humaines. Les règles relatives à l'occupation du territoire terrestre sont par exemple revues pour prévenir ce risque; des dispositions techniques sont élaborées par les services de sécurité civile pour alerter les populations en cas d'inondations; la construction de murs anti-vagues peut même être considérée comme une obligation au titre des droits de la personne lorsque ces ouvrages sont les seuls remparts pour préserver des droits (notamment culturels) de communautés particulièrement vulnérables à la montée du niveau de la mer.

Dans un cas comme dans l'autre, c'est donc sous l'angle du risque, du danger et de la menace que le droit appréhende les vagues. L'image renvoyée par le droit est celle de cette célèbre estampe japonaise – la Grande Vague de Kanagawa d'Hokusai – représentant une vague « monstre », une vague scélérate (tant redoutée des marins) prête à engloutir les gens de mer et à submerger les territoires.

Pourtant, les vagues ne sauraient être réduites au potentiel danger qu'elles représentent, car elles sont en réalité bien plus pour les sociétés humaines. Elles occupent une place centrale dans les cultures et l'histoire de nombreux peuples, notamment dans le Pacifique. Elles ont des fonctions écologiques importantes. Par les sentiments qu'elles peuvent inspirer aux êtres humains, et les opportunités d'épanouissement personnel qu'elles offrent (pensons aux amateurs de sport de glisse comme le surf), les vagues sont une richesse, laquelle peut aussi être économique, puisque certaines régions du monde se sont spécialisées dans le tourisme lié au surf, mais aussi parce que les vagues sont une source d'énergie renouvelable. Il existe ainsi bien des raisons de concevoir les vagues non plus comme un danger, mais comme une « ressource » (naturelle, culturelle, personnelle, économique…) à protéger.

Ce changement de paradigme ouvre alors la voie à une réflexion sur la façon dont le droit gère, ou devrait gérer, cette ressource dont la singularité est à la fois due à sa nature en tant qu'élément imprévisible et non permanent dont l'existence dépend de nombreux aléas et varie en fonction des saisons, mais aussi due à la diversité de ses manifestations (houle/vagues déferlantes) ou encore au fait que les vagues traversent des zones au statut juridique différent (espaces sous juridiction étatique ou non).

Dans ce contexte, plusieurs questions émergent : les régimes juridiques relatifs à la protection des ressources naturelles qui existent en droit international et national peuvent-ils s'appliquer aux vagues ? Si oui, sont-ils adaptés à la complexité des vagues et offrent-ils des cadres juridiques de protection appropriés ? Dans quelle mesure, à quel prix, le droit doit-il permettre l'accès aux vagues, lorsque cet accès devient problématique pour la préservation de l'environnement et la préservation de la vie humaine, ou au contraire, lorsque cet accès est nécessaire à l'exercice de certains droits fondamentaux, comme les droits culturels des peuples autochtones et des communautés locales ? Et comment, dans un contexte marqué par l'impératif d'une transition hors des énergies fossiles, réglementer l'exploitation des vagues à des fins énergétiques ? Ce projet vise ainsi à réfléchir à la façon dont le droit peut être, ou devrait être, mobilisé pour protéger les vagues, encadrer leur accès et leur usage dans le respect des autres règles applicables.

 

Les propositions d'intervention (en français ou en anglais) peuvent porter sur toute question juridique en lien avec la protection des vagues, leur accès et/ou leur usage.

Les propositions d'intervention (1 page maximum), accompagnées d'un CV (2 pages maximum), peuvent être envoyées d'ici le 31 mars 2024 à l'adresse suivante : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

La journée d'étude se déroulera le 14 juin 2024 aux Sables d'Olonne. Les frais d'hébergement et de déplacement des intervenants n'ayant pas accès à des sources de financement leur permettant de couvrir leurs frais pourront être pris en charge.

A la suite de la journée d'étude, les intervenants seront invités à préparer un article sur le thème de leur communication qui sera publié dans un dossier spécial de la Revue Juridique de l'Environnement. Chaque article fera l'objet d'un processus de révision par les pairs.

 

Si toutes les propositions pertinentes seront considérées, sont notamment encouragées les propositions portant sur les thématiques suivantes :

  • L'applicabilité des régimes nationaux et internationaux de protection des ressources naturelles aux vagues (ex : régimes d'autorisation préalable, procédures d'évaluation environnementale, droits de la nature et personnalité juridique des ressources naturelles, régimes de protection établis par le droit international de l'environnement et les conventions culturelles de l'UNESCO…).
  • La protection des vagues au titre d'autres régimes du droit international (ex : droit de la mer, droits des conflits, droit des investissements…).
  • Les enjeux juridiques entourant la protection des vagues « mythiques », y compris du point de vue de la participation du public et du respect des droits culturels des peuples autochtones.
  • Les impacts environnementaux et culturels de l'usage récréatif des vagues (ex : organisation des épreuves olympiques de surf à Tahiti, installations des filets anti- requins à La Réunion, concentration de personnes et effets sur les écosystèmes...) et leurs implications juridiques.
  • Les règles encadrant la construction des vagues artificielles ou induites (ex : constructions dans les terres, travaux des sols marins…) et la gestion de leurs impacts.
  • Les liens entre l'exploitation des vagues à des fins énergétiques et le droit de l'énergie, y compris en ce qui concerne la protection des investissements.
  • L'usage récréatif et culturel des vagues sous l'angle des droits de la personne (ex : interdiction/restriction d'accès aux vagues lors de conditions dangereuses, accès/usage de la vague au titre du droit aux bienfaits de la culture ou du droit à l'utilisation des heures de loisirs…).
  • Les stratégies judiciaires et contentieuses en matière de protection des vagues et le rôle des ONG dans la mobilisation du droit pour la protection des vagues.

 

Comité scientifique :

  • Géraud de Lassus St-Geniès, professeur adjoint, Université Laval, Québec (co-directeur scientifique)
  • Géraldine Giraudeau, professeure de droit public, Université Paris-Saclay-UVSQ (co-directrice scientifique)
  • Agnès Michelot, Maître de Conférences, Université de La Rochelle
  • Alina Miron, professeure de droit public, Université d'Angers
  • Sabrina Robert, professeure de droit public, Université de Nantes