Corinne Leveleux-Teixeira

Professeure
Histoire du droit et des institutions.
Ecole pratique des Hautes Etudes

Pouvoirs, Lettres, Normes
Centre de Recherche Juridique Pothier
Laboratoire de Médiévistique Occidentale de Paris

Agrégée d’histoire et de droit, je suis aussi diplômée en théologie. A ce titre, je m’efforce d’avoir une approche ouverte des systèmes juridiques médiévaux considérés dans la longue durée (XIIè-XVIè s.), en analysant le droit dans sa dimension technique mais aussi politique, sociale et culturelle. Mes recherches portent plus particulièrement sur les relations entre droit et langage (blasphème, serment), droit et savoir (opinion, vérité, expertise), droit et pouvoir (institué ou informel).

Spécialités :
Droit coutumier ; Droits anciens ; Histoire de la pensée juridique.

Responsabilités administratives et scientifiques :

  • Directrice de la Revue Historique de droit français et étranger
  • vice présidente de l'EPHE (budget, moyens)
  • Directrice d'Etudes à l'EPHE (section des sciences religieuses)
  • Présidente du jury d'agrégation d'histoire du droit (2021-2022)
  • THESE

    Le blasphème entre l'Église et l'État (XIIIe-XVIe siècles), soutenue en 1997 à Orléans sous la direction de Albert Rigaudière 

  • Corinne Leveleux-Teixeira, Corinne Leveleux-Teixeira, Fulvio Delle Donne (dir.), Gli spazi del potere : Stratégies et marqueurs de l'impérialité, Basilicata University Press, 2023, Imperialiter        

    Sur l’écran d’accueil : «La vastità del territorio è attributo necessario di imperialità? Un impero è solo un regno più grande? Rielaborando gli interventi al convegno scientifico tenutosi alla Maison Française di Oxford nel giugno del 2018, questo libro mette in discussione i legami sviluppati a partire dal Medioevo tra l’idea di impero e la sua espressione geografica. Più precisamente, riflette sul rapporto tra razionalità politica imperiale e configurazione territoriale attraverso alcuni casi di studio tratti dai regni di Sicilia, Francia, Ungheria, Spagna e Inghilterra.»

    Corinne Leveleux-Teixeira, Bernard Ribémont (dir.), Le crime de l'ombre: complots, conjurations et conspirations au Moyen âge, Klincksieck et Numérique Premium, 2021, Collection Circare ( Jus & litterae ) 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Martine Charageat (dir.), Consulter, délibérer, décider : (France-Espagne, VIIe-XVIe siècles), Presses universitaires du Midi et OpenEdition, 2020, Méridiennes (en ligne)  

    Ce volume propose une réflexion collective autour de l’avis et de son expression au Moyen Âge. Littéraires, sociologues, juristes et historiens se sont rassemblés pour éprouver la notion d’avis et l’acte de le donner en France et en Espagne, du VIIe au XVIe siècles, tout en vérifiant si cet acte de langage se distingue ou non, au même moment, de l’opinion et du conseil. L’enquête a été menée dans le cadre d’un projet de recherche A.C.I., depuis la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, et intitulé « Donner son avis au Moyen Âge en France et en Espagne : entre acteurs, stratégies rhétoriques et processus d’acculturation ». Les spécialistes de ces disciplines différentes ont réfléchi ensemble à partir de trois registres principaux de questions concernant d’abord les moyens de repérer la formulation de l’avis dans les sources, la production et l’émission des avis, leur réception et leur caractère contraignant ou non sur les processus décisionnels en matière politique, diplomatique ou juridique. Dans un deuxième temps, des chercheurs proposent une analyse pragmatique de l’avis au travers d’une activité complexe, la deliberatio, en particulier au sein des assemblées délibératives de diverses natures, municipales, universitaires et conciliaires. Ce deuxième pan de l’enquête a permis de s’interroger sur les correspondances entre avis collectif et consensus politique.

    Corinne Leveleux-Teixeira, Jean-Patrice Boudet, Alain Boureau, Michelle Bubenicek, Anna Caiozzo [et alii], Experts et expertise au Moyen Âge: consilium quaeritur a perito, Éditions de la Sorbonne, Publications de la Sorbonne et OpenEdition, 2019  

    Le XLIIe Congrès de la Société des historiens médiévistes de l'Enseignement supérieur public, qui s'est tenu à Oxford en mars-avril 2011, a consacré ses travaux à une figure longtemps mal connue et mal identifiée, une figure dont la dénomination semble à ce point sortie de la technocratie moderne qu'on peine à l'imaginer pour les époques plus anciennes, et pour le Moyen Âge en particulier : l'expert. À la charnière de la pratique et de la doctrine, l'expert sert de raccord entre des expériences sociales aussi complexes que diversifiées. Seul ou en petit comité, il est requis pour donner son avis, valider une hypothèse, dire sa vérité nourrie – du moins, le suppose-t-on – d'objectivité et de connaissances savantes, dans les lieux les plus divers : le tribunal évidemment, mais aussi le chantier de construction, le lit du malade, devant des reliques ou lors d'une discussion savante. Ce qui qualifie l'expert à agir, c'est à la fois un savoir reconnu et une position sociale : la compétence technique ne suffit pas toujours ; il y faut en plus une reconnaissance qui n'est pas souvent explicitée, mais qui est pourtant indispensable pour que les parties requérantes s'en remettent à l'avis d'une tierce personne. C'est à cet entre-deux social et fonctionnel, entre savoir et faire savoir, que se situe la fonction de l'expert. En en faisant le sujet de son congrès, la Société des médiévistes a voulu attirer l'attention sur cette fonction qui n'est ni un métier, ni un statut permanent, mais qui présuppose à la fois la maîtrise savante et la capacité de la faire reconnaître dans des situations nécessairement délicates ou incertaines. La multiplicité des cas ici examinés, qui balaient tout le millénaire médiéval, de l'Orient à l'Occident, témoigne de la place qu'a su conquérir ce technicien – le métier étant très majoritairement masculin, comme tous les espaces de domination – qui vient aider à la prise de décision, sans être lui-même décisionnaire. C'est qu'en effet l'expertise…

    Corinne Leveleux-Teixeira (dir.), Gouverner les hommes, gouverner les âmes, 144e éd., Éditions de la Sorbonne, Publications de la Sorbonne et OpenEdition, 2019, Histoire ancienne et médiévale, 365 p.    

    La quatrième de couverture indique : Le thème du gouvernement médiéval, entendu comme l'ensemble des conditions dans lesquelles un pouvoir s'exerce sur une population, la domine, la contrôle, organise sa vie, a pris une importance nouvelle dans l'historiographie depuis une dizaine d'années. Les actes du congrès de la SHMESP, qui s'est tenu à Montpellier en 2015, visent à mettre en valeur l'intérêt de cette tendance récente, qui réside non seulement dans le dépassement d'une opposition souvent trop mécanique entre norme et pratique ou entre institutions et société, mais aussi dans un changement de perspective pour l'analyse de la formation et de l'évolution des grands cadres politiques. Car, s'il n'y a pas toujours eu d'« État » moderne ou pré-moderne, il y a toujours eu, semble-t-il, des formes de gouvernement caractérisées par la mise en œuvre plus ou moins souple de lois ou de règles. Dans cette perspective, les auteurs ont étudié les champs lexicaux de la pratique du gouvernement, les diverses techniques et procédures administratives mises en œuvre dans les formations politiques médiévales en tout genre. Sont également abordés les liens idéologiques ou idéels qui existaient entre les détenteurs des pouvoirs et les groupes et individus qui leur ont été soumis, fidèles, obéissants. Dans le cadre des pratiques de gouvernement, certains thèmes ayant fait l'objet d'un renouvellement historiographique ces dernières années ont été privilégiés, comme les enquêtes, le contrôle des agents du pouvoir, les pratiques de dénombrement des populations ou les moyens de coercition. En outre, il n'est pas de pouvoir ou d'autorité durablement efficace sans le consentement des gouvernés. Ce consentement, qui vaut parfois délégation de pouvoir, passe par des formes de participation et/ou d'adhésion active ou passive. Le thème proposé invitait également à réfléchir aux liens, aux interactions et aux porosités entre les formes de gouvernement laïc et religieux dans les sociétés occidentale, byzantine et islamique

    Corinne Leveleux-Teixeira, Anne Rousselet-Pimont, Pierre Bonin, Florent Garnier, Jacques Le Goff (dir.), Le gouvernement des communautés politiques à la fin du Moyen Âge. Entre puissance et négociation , Éditions Panthéon-Assas, 2011, Colloques, 580 p.   

    Corinne Leveleux-Teixeira, Anne Rousselet-Pimont, Pierre Bonin, Florent Garnier, Jacques Le Goff, Le gouvernement des communautés politiques à la fin du Moyen Âge. Entre puissance et négociation , {\'E}ditions Panth{\'e}on-Assas, 2011  

    Ensemble de contributions sur les trois axes majeurs de la réflexion d'Albert Rigaudière sur cette période : la ville, les finances et l'État. Définition de la ville avec ses contours géographiques, sociaux et juridiques, ses revendications et prérogatives ; questions liées à l'établissement de l'impôt et à l'administration des finances ; affirmation progressive d'une souveraineté longtemps négociée.

    Corinne Leveleux-Teixeira, Bernard Ribémont (dir.), Le crime de l'ombre: complots, conjurations et conspirations au Moyen âge, Klincksieck, 2010, Collection Circare ( Jus & litterae ), 238 p. 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Martine Charageat (dir.), Consulter, délibérer, décider, CNRS-Université de Toulouse-Le Mirail-, 2010, Méridiennes ( Études médiévales ibériques ), 355 p.   

    Corinne Leveleux-Teixeira (dir.), Normes et normativité. Études d'histoire du droit rassemblées en l'honneur d'Albert Rigaudière, Economica, 2009 

    Corinne Leveleux-Teixeira (dir.), Daniel Jousse. Un juriste au temps des Lumières (1704-1781), 16e éd., Pulim, 2007, Cahiers de l'Institut d'anthropologie juridique, 191 p. 

    Corinne Leveleux-Teixeira, La parole interdite , De Boccard, 2001, Romanité et modernité du droit, 559 p.  

    Puni de mort dès l'Antiquité par la loi juive et le droit romain, le blasphème fit l'objet au Moyen-Age d'un riche mais tardif travail d'élaboration théorique. Longtemps confondu avec le parjure, il conquit au XIIIe siècle une autonomie conceptuelle fondée sur les réflexions des théologiens et des juristes. Si les docteurs de la foi en firent un " péché de langue " ou le signe d'une possible déviance hérétique, les docteurs de la loi le décrivirent comme un crime au contenu flou, à l'extension incertaine mais à la gravité manifeste. Les moralistes contribuèrent à diffuser ce schéma, tandis que maintes dispositions normatives rappelaient aux blasphémateurs l'horreur de leur vice et la promesse de leur châtiment. A bien des égards, l'histoire médiévale du blasphème fut aussi celle d'une pré-modernité du droit et de l'Etat, qu'illustre l'attitude de la monarchie capétienne à partir de Philippe Auguste et de Saint Louis. Au rebours d'une " opinion publique " qui semble être restée assez indifférente à la question, celle-ci ne cessa de réprimer l'impiété verbale, usant à son endroit d'une législation à la fois abondante, homogène et inhabituellement précise. Plus qu'un délit ordinaire, le blasphème s'affirmait comme un " crime de majesté ", une infraction construite par et pour la puissance monarchique. Au demeurant, la plasticité de ses contours et l'ambivalence de son contenu le rendaient spécialement apte à magnifier l'éclat des liturgies politiques dépourvu de signification préalable, il offrait sa vacuité à la manifestation d'un sens délivré par l'autorité en charge de sa répression. Ainsi, du cœur du Moyen-Age aux guerres de Religion, la lutte contre le blasphème ne constitua. pas seulement l'un des modes privilégiés du contrôle des comportements sociaux et des croyances individuelles ; elle fut aussi l'une des incarnations de la souveraineté et comme l'ombre portée d'une majesté en actes.

    Corinne Leveleux-Teixeira, Serment et constitution dans la doctrine canonique médiévale aux XIIème- XVème siècles, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2001, Association française des historiens des idées politiques 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Des prêtresses déchues, Université Panthéon-Assas et LGDJ, 1996, Travaux et recherches ( Histoire du droit )   

    Corinne Leveleux-Teixeira, Des prêtresses déchues. L'image des Vestales chez les Pères de l’Église latine (fin IIè-début Vè siècles), LGDJ, 1995 

    Corinne Leveleux-Teixeira, "Les Vierges folles: l'image des vestales chez les auteurs chrétiens latins (fin IIe - début Ve siècles), l'auteur, 1992, 174 p. 

  • Corinne Leveleux-Teixeira, « Daniel Jousse et l'appel comme d'abus, p. 303-314 », in Anne Bonzon et Caroline Galland (dir.), Justices croisées. Histoire et enjeux de l'appel comme d'abus (XIVè-XVIIIè siècles), Presses universitaires, 2021 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit canonique et les signes religieux. »: Entre protection et scandale (XIVè-XVIè), p. 203-221, in Elise Boillet et Gael Rideau (dir.), La visibilité du religieux dans l'espace urbain de l'Europe moderne, Presses universitaires, 2021 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit canonique et les signes religieux. », Presses universitaires, 2021 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Traduire le droit savant en français au XIIIe siècle », Justement traduire, Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole, 2020, pp. 131-150 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Aux frontières de la dissidence. Censurer le blasphème au XVIè siècle », in G. Rideau, A. Roncaccia (dir.), Identités religieuses dans le contexte politique, culturel et littéraire des villes de l'Europe moderne, Francesco Cesati, 2020, pp. 65-83 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La procédure criminelle dans les Assises de Jérusalem », in Bernard Ribémont; Jérome Devard (dir.), Autour des assises de Jérusalem, Ganier, 2018    

    Le Livre des Assises de Jean d’Ibelin a été rédigé à un moment décisif dans l’évolution du droit pénal occidental : alors que la procédure inquisitoire était en train de s’imposer dans le reste de l’Occident, Jean d’Ibelin présente une procédure criminelle encore fortement accusatoire. Ce décalage peut être expliqué par le projet d’écriture de l’auteur qui révèle à la fois des enjeux politiques et idéologiques.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Préface », in Pierre-Anne Forcadet (dir.), Conquestus fuit domino regi. Le recours au roi d'après les arrêts du parlement (1223-1285), De Boccard, 2018, pp. 11-15 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Quelques considérations en guise d’introduction », XLVIe Congrès de la SHMESP (Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public), Montpellier, 28-31 mai 2015, Gouverner les hommes, gouverner les âmes, Presses de la Sorbonne, 2016, pp. 11   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « En guise d'envoi », in Anne-Blandine Caire (dir.) (dir.), Les fictions en droit, {\'E}cole de droit-Universit{\'e} d'Auvergne, 2015, pp. 183-191 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Prêter serment au Moyen-Âge. La virtus verborum au risque du droit (XIIe-XVe s.) », in Études réunies par Nicole Bériou, Jean-Patrice Boudet et Irène Rosier-Catach (dir.), Le pouvoir des mots au Moyen Âge, Br{\'e}pols, 2014, pp. 171-188   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Conclusions », in Marie Bassano, Esther Dehoux, Catherine Vincent (éd.) (dir.), Le pèlerinage de l'âme de Guillaume de Digulleville (1355-1358). Regards croisés, Br{\'e}pols, 2014, pp. 211-214 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Conseiller, aviser, contrôler ? Le rôle ambigu du recours à l’expertise dans les procédures inquisitoriales (XIVe siècle) », Conseiller les juges au Moyen Âge, Presses universitaires du Midi, 2014, pp. 25-46 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Savoirs techniques et opinion commune. L'expertise dans la doctrine juridique médiévale (XIIIe- XVe siècles) », in Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public (France) (dir.), Experts et expertise au Moyen-Âge. Consilium quæritur a perito , Publications de la Sorbonne, 2012, pp. 117-131 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Une subversion douce : la déconstruction de l’autorité canonique chez Calvin », in Jacques Varet (dir.) (dir.), Calvin, naissance d'une pensée, Presses universitaires de Rennes, 2012, pp. 91-106   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « L'ancien droit et le règlement non judiciaire des conflits de la vengeance à la grâce », in Olivera Boskovic (dir.) (dir.), La déjudiciarisation, Mare \& Martin, 2012, pp. 111-136 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Fabrique et réception de la norme. Brèves remarques sur l’effectivité en droit médiéval », La fabrique de la norme, Presses universitaires de Rennes, 2012, pp. 17-30  

    La notion de « fabrique de la norme » est porteuse d’interrogations multiples. L’une d’entre elles consiste à se demander comment la norme juridique est reçue et appliquée. Le droit médiéval fournit apparemment un premier élément de réponse à cette question, au travers de la formule « interpretari debet ut res potius valeat quam pereat ». Cet adage, souvent utilisé, caractérise a priori le principe actif de la règle de droit, en soulignant que la norme ne saurait être « inutile » mais requiert toujours, au contraire, une interprétation opératoire, qui lui permette de « valoir » plutôt que de « périr ». Il s’agit là, pourtant, d’une fausse piste. L’analyse des occurrences de cette formule montre en effet clairement qu’elle n’est pas d’application automatique, mais sert plutôt à légitimer un choix herméneutique antérieur posé par l’autorité qualifiée qu’est le juriste. Ainsi, aux cas douteux où la maxime s’applique et où la norme est interprétée de façon « efficace », répondent les cas douteux où la maxime est ignorée et où il apparaît plus expédient d’oublier la norme, plutôt que de l’appliquer.Second élément de réflexion, l’examen de la réception sociale de certaines ordonnances monarchiques permet de nuancer le schéma d’une réussite ou d’un échec de la norme en fonction de la mise en œuvre des points essentiel de son dispositif. Plus précisément, le discours tenu dans le préambule des ordonnances (notamment pour les textes punissant les blasphémateurs) mérite d’être pris en considération, jusque dans la dimension performative et métajuridique qu’il assume parfois, la loi n’opérant pas seulement de façon matérielle, mais aussi comme texte et comme outil de communication sociale.Ainsi, du choix de l’interprète appliquant ou écartant la norme soumise à son examen, à la portée partiellement extra-juridique des textes de loi, les enseignements du droit médiéval invitent l’historien à dépasser la distinction classiquement admise entre émission et réception du droit ou entre production et application de la norme, au profit d’une vision plus large de la règle, saisie dans un processus complexe d’interactions fait de réception, d’interprétation, de négociation, d’acculturation et de réélaboration.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Une subversion douce : la déconstruction de l’autorité canonique chez Calvin », Calvin, 2012  

    L’Institution de la religion chrétienne synthétise, dans les 4 livres de sa dernière édition (version latine de 1559 et traduction française de 1560), l’effort de Jean Calvin pour penser à frais nouveaux la foi chrétienne, mais aussi pour poser les fondements d’un rapport inédit du réformateur à l’institution ecclésiale. Conscient de la dimension sociale et politique de la religion, Calvin écrit en effet autant en juriste qu’en théologien. Outre la méthode suivie et le vocabulaire utilisé, les sources sur lesquelles il fonde sa démonstration suffirait amplement à montrer cette prégnance du paradigme juridique. Les emprunts que fait Calvin au droit canonique sont ainsi particulièrement nombreux, des constitutions apostoliques aux écrits des Pères de l’Église, en passant par les canons des conciles, et, de manière plus surprenante, par les décrétales pontificales, sans oublier de larges références au décret de Gratien (plus d’une centaine de mentions), ce bréviaire de la papauté grégorienne. Loin d’ignorer la tradition canonique de l’Église romaine, Calvin s’en est au contraire emparé, moins pour la répéter que pour la dépasser en lui assignant un horizon nouveau : non plus l’affirmation de l’autorité pontificale, mais l’accomplissement de la vérité scripturaire, elle-même décrite comme « Loi ». L’objet de la présente communication consiste à montrer concrètement, à partir d’un ou deux exemples, comment s’opère ce déplacement décisif des sources de l’autorité dans l’Église, à partir d’un fonds canonique demeuré parfaitement classique dans sa forme et dans ses sources.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Savoirs techniques et opinion commune : l’expertise dans la doctrine juridique médiévale (xiiie-xve siècle) », Experts et expertises au Moyen Âge. Consilium quaeritur a perito, 2012  

    La doctrine juridique médiévale caractérise l’avis de l’expert par sa nature et sa portée. L’expertise y apparaît comme un savoir singulier, distinct de l’opinion commune, dont la force tient autant à ses qualités propres de clarté, de technicité, voire de neutralité, qu’à la personne de son auteur et à sa réputation. En outre, aux yeux des juristes médiévaux, le savoir expert, loin d’être gratuit, s’articule toujours à une décision qu’il entend éclairer et préparer. Il s’inscrit dans une pragmatique qui vise à anticiper les choix à arrêter, sans pour autant s’agréger à eux, puisque l’expert n’est pas un juge. Pour autant, si le champ de l’expertise n’est pas celui des certitudes indubitables, il se confond avec l’espace du probable et des vérités provisoires, dans un effort pour muer la confusion du réel en un discours juridiquement opératoire. Medieval legal doctrine characterizes expert opinion by its nature and its impact. Expertise is seen as a singular form of knowledge, distinct from common opinion, whose effectiveness springs as much from its intrinsic quality of clarity and its technical even neutral nature as from the expert himself and his reputation. Furthermore, in the view of the medieval jurists, expert knowledge is never gratuitous: it is always oriented towards a decision and the preparation and clarification thereof. The expert’s approach is pragmatic, he aims to anticipate the choices that will be made without being fully committed to that decision, since he is not a judge. For all that the expert cannot claim absolute certainty. He must accommodate probabilities and provisionary truths, doing his best to transform often confusing reality into a discourse that works from the legal point of view.

    Corinne Leveleux-Teixeira, Marie Bassano, « Alciat, le De verborum significatione et la morphologie du droit », in Stéphan Geonget (dir.), Bourges à la Renaissance, hommes de lettres, hommes de lois, Klincksieck, 2011, pp. 283-309 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Construire le crime de blasphème. Les juges entre inapplication et dépassement de la norme (XIVe-XVIe siècles) », in Bruno Lemesle et Michel Nassiet (dir.) (dir.), Valeurs et justice. Écarts et proximités entre société et monde judiciaire du Moyen Âge au XVIIIe siècle, Presses universitaires de Rennes, 2011, pp. 85-101 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Juger le faux pour croire le vrai le discours de consilia juridiques sur les pratiques de falsification (XIVe-XVIe siècle) », in olivier Poncet (dir.), Juger le faux, 2011  

    Les consultations rendues par des juristes des XIVe-XVIe siècles sur la question du faux montrent que cette qualification – qu’elle renvoie au faux témoignage ou au faux documentaire – comporte un coût social élevé. En effet, le faux, lorsqu’il est « avéré », mine la stabilité des échanges, altère la sécurité du droit et affaiblit la confiance que les membres du corps social sont sensés se porter les uns aux autres. Si les auteurs médiévaux de consilia s’accordent à reconnaître à la qualification de fausseté une assise théoriquement très large, couvrant une multitude de situations et de critères, ils inclinent également à n’en faire qu’un usage pratique des plus parcimonieux. Plus que d’une exigence morale, le jugement sur le faux relève de considérations d’opportunité destinées avant tout à protéger les institutions (le tribunal, le notariat, le pouvoir politique…) et à préserver leur vocation d’instances de véridiction.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Des serments collectifs au contrat politique ? », Avant le contrat social, Éditions de la Sorbonne, 2011, pp. 269-289 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Controverses juridiques et désarmement herméneutique, ou la brève histoire d’un espace public doctrinal chez les juristes (xiie-xiiie siècles) », L’espace public au Moyen Âge, Presses Universitaires de France, 2011, pp. 263 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Construire le crime de blasphème. Les juges entre inapplication et dépassement de la norme (XIVe-XVIe siècle) », Valeurs et justice, 2011 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Conclusion. La trahison au Moyen Âge ou ambivalence du signe », La trahison au Moyen Âge, Presses universitaires de Rennes, 2010, pp. 385-394 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Remarques introductives », Consulter, délibérer, décider : donner son avis au Moyen-Âge, Presses universitaires du Midi, 2010, pp. 197-200 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Du crime atroce à la qualification impossible. Les débats doctrinaux autour de l'assassinat du duc d'Orléans (1408-1418) », in C. Barralis, F. Foronda, B. Sere (dir.), Violences souveraines au Moyen Age. D'une tradition universitaire à un objet historique, PUF, 2010, pp. 261-270   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Pensée canonique et rupture du lien de fidélité jurée (XIIIè-XVè siècles) », in M-H. Allirot, M. Gaude-Ferragu, G. Lecuppre... (dir.), Une histoire pour un royaume (XIIè-XVè siècles), Perrin, 2010, pp. 197-217 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Préface », in Frédéric F. Martin (dir.), Justice et législation sous le règne de Louis XI. La norme juridique royale à la veille des Temps modernes, LGDJ, 2010, pp. - 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Lex inutilis. Brèves remarques sur l'operabilitas dans la doctrine juridique médiévale (XIIIè-XVè siècles) », in P. Bonin, C. Leveleux-Teixeira, A. Rousselet-Pimont (dir.), Normes et normativité. Études d'histoire du droit rassemblées en l'honneur d'Albert Rigaudière, Economica, 2009, pp. 77-96 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Parole jurée et construction du lien social. Le droit savant médiéval et l'émergence d'une institutionnalité du serment (XIIè-XIIXè siècles) », Études à la mémoire du professeur François Burdeau, Litec, 2008, pp. 315-332 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Les serments collectifs (conjurationes) dans le droit canonique pré-classique (Vè-XIIIè) », in M-F Auzepy et G. Saint-Guillain (dir.), Oralité et lien social au Moyen Age (Occident, Islam, Byzance), ACHCByz, 2008, pp. 247-263 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Injure à Dieu, outrage au roi. Le blasphème à la fin du Moyen Age et au début de l'époque moderne. Un crime limite », in E. Desmons et M-A. Paveau (dir.), Outrages, insultes, blasphèmes et injures. Violence du langage et police du discours, L'harmattan, 2008, pp. 31-51 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Bernard Gui », in P. Arabeyre, J-L. Halperin, J. Krynen (dir.), Dictionnaire des juristes français, PUF, 2007 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Longa memoria rei publicae pro veritate tenetur. La valorisation du temps dans la pensée juridique médiévale. », in Michel Ganzin (dir.), L'histoire institutionnelle et juridique dans la pensée politique, PUAM, 2006, pp. 135-150 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Sacramenta puberum. Le serment des mineurs dans le droit savant médiéval (XIIè-XVè siècles) », in Martin Aurell, Thomas Deswarte (dir.), Famille, violence et christianisation au Moyen Age. Mélanges offerts à Michel Rouche, Presses universitaires de Paris Sorbonne, 2005, pp. 91-102 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La référence à l'opinion commune dans la pensée romano-canonique (XIIè-XVIè siècles) », in Christiane Villain-Gandossi (dir.), L’Europe à la recherche de son identité, CTHS, 2002, pp. 171-184 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Blasphème », in C. Gauvard, A. de Libera, M. Zink (dir.), Dictionnaire du Moyen Age, PUF, 2002 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La référence à l'opinion commune dans la doctrine romano-canonique », L'Europe à la recherche de son identité Actes du 125è congrès des sociétés historiques et scientifiques (Lille, Avril 2000), CTHS, 2002, pp. 171-184 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Serment et constitution dans la doctrine canonique médiévale », in Michel Ganzin (dir.), La constitution dans la pensée politique, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2001, pp. 43-63 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La répression du blasphème et les métamorphoses de la vérité (Moyen Age- début de l'époque moderne) », Au cloitre et dans le monde. Femmes, hommes et sociétés (IXè-XVè siècles). Mélanges en l'honneur de Paulette L'hermite-Leclerq, Presses de l'univerité Paris-Sorbonne, 2000, pp. 323-336 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Blasphème et sexualité (XIIIè-XVè siècles) », in Michel Rouche (dir.), Mariage et sexualité au Moyen-Age. Accord ou crise?, Presses de l'université de Paris-Sorbonne, 2000, pp. 301-315 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Blasphème et sexualité (XIIIè-XVIè siècles) », dir. Michel Rouche, Mariage et sexualité au Moyen-Age, PUPS, 2000, pp. 301-315 

  • Corinne Leveleux-Teixeira, « Doctrines juridiques et tradition canonique », 2023  

    L’esprit de la chaire Le séminaire de l’année 2021-2022 a inauguré la chaire « Doctrines juridiques et tradition canonique ». À ce titre, il peut être utile de préciser dans quel esprit et selon quelles perspectives on entend travailler dans les années qui viennent. Commençons par l’intitulé de la chaire elle-même : « Doctrines juridiques et tradition canonique ». Cela signifie que le champ couvert concerne au premier chef les productions savantes du droit (doctrine) entendues dans la plurali...

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Bénédicte Sère (dir.), Les régimes de polémicité au Moyen Âge. Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2019, 214 p. », Archives de Sciences Sociales des Religions, 2020, n°192, pp. 293-296 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Un conflit des interprétations ? Vérité judiciaire et expertise médicale (xiiie-xive siècles) », Clio@Thémis : Revue électronique d'histoire du droit, 2020, n°19 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Irène Rosier-Catach, « Le blasphème – Perspectives historiques, théoriques, comparatistes », Annuaire de l’École pratique des hautes études. Section des sciences religieuses, 2020, n°127, pp. 535-550 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Fons justitiae. La justice médiévale et ses sources (XIIIè-XVè). Nouvelles approches, nouveaux regards, nouvelles lectures. », Revue historique de droit français et étranger, 2020 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Pierre-Anne Forcadet, « Fons Justitiae. La justice médiévale et ses sources. Nouvelles lectures, nouveaux regards, nouvelles approches », Revue historique de droit français et étranger, 2020, n°3, pp. 258-358 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Configuré au Christ ? Le corps des prêtres dans le droit canonique médiéval », Revue des langues romanes, 2019, n°2, pp. 289-309  

    Le corps n’est pas un objet juridique simple. En témoigne à l’envi l’instabilité actuelle du droit. Avec le développement des biotechnologies et des avancées médicales, la science ne cesse en effet d’interroger les définitions juridiques de la personne humaine et du corps. Plus ou moins éclairé par des rapports, des comités d’éthique, des consultations publiques, des auditions d’experts, le législateur est régulièrement sommé d’intervenir pour réguler, encadrer, préciser ce qu’il est désormai...

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le sexe des anges. L’Église, les fiançailles et le mariage des enfants. Le point de vue de quelques canonistes méridionaux (XIIIè-XIVè siècles) », Cahiers de Fanjeaux, 2019, n°52, pp. 237-259   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Incarner l'autorité ? Serments politiques et loyauté des sujets sous le règne de Charles VI », Comptes-rendus des séances de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 2016  

    Alors que les violences terroristes et les déchirements de l’identité française ravivent aujourd’hui les débats sur l’intégration et la déchéance de la nationalité, il peut être pertinent d’interroger, en historien, la question de la loyauté politique et d’examiner par quels processus et par quels moyens elle a concouru à construire, dans le passé, une autorité publique incontestée. Dans cette perspective, la communication se propose d’examiner la situation du règne de Charles VI, époque troublée s’il en fut, au travers du recours massif au serment des sujets, régulièrement requis par les officiers du roi dans les zones de conflits ou les phases de crise. L’hypothèse de ce travail est que, sous couvert d’une formalisation apparemment archaïque, le serment politique, revisité par les légistes royaux, participa pleinement du processus de construction de la souveraineté étatique. Plus précisément, il semble en avoir accompagné une phase intermédiaire, entre l’affirmation d’une pure naturalité du pouvoir et l’achèvement du processus d’institutionnalisation de l’autorité par la médiation du droit. Ainsi, avec le serment, l’Etat avançait caché. Mais le bénéfice de l’opération ne s’arrêtait pas là : grâce à une parole jurée qui confortait l’obéissance au roi, la monarchie bénéficiait de la force sacrale d’un puissant geste d’incorporation sociale. A la lumière de cet exemple, on peut, au demeurant, se demander si la canalisation des énergies collectives produite par un tel rituel n’est pas l’un des éléments qui fait le plus défaut aux formes contemporaines du pouvoir politique.

    Corinne Leveleux-Teixeira, Corinne Leveleux-Texeira, « Robert Jacob, La grâce des juges. L’institution judiciaire et le sacré en Occident », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes = Journal of Medieval and Humanistic Studies, 2015 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit canonique médiéval et l’horreur du scandale », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes = Journal of Medieval and Humanistic Studies, 2013, n°25, pp. 193-211    

    Chez les canonistes médiévaux, l’analyse du scandale apparaît délibérément floue. Elle renvoie à une réalité multiforme, dont il n’est possible ni de préciser la nature (paroles, gestes, actes), ni de déterminer la qualité (bonne ou mauvaise). Surtout, plus qu’à l’objet lui-même, le propos des juristes s’attache à l’évaluation et à la gestion des effets du scandale, souvent ambivalents, selon qu’ils incitent les observateurs au péché ou qu’ils agissent comme des instruments prophétiques de conversion. Les rapports entre scandale et vérité sont particulièrement interrogés : vaut-il mieux éviter un scandale funeste en occultant la vérité ou prendre le risque d’un scandale salutaire en faisant éclater la vérité ? Quelle que soit l’hypothèse retenue, le scandale est dangereux, car il produit une crise sociale, susceptible d’ébranler les consciences chrétiennes. L’institution ecclésiastique doit donc s’efforcer de le dépasser, soit en l’étouffant, soit en le criminalisant. Elle passe ainsi d’une approche morale de son contenu à une gestion politique de ses conséquences. The medieval analysis of scandal by the canonists is deliberately vague. It refers to a multiform reality. It is impossible either to specify the nature (words, gestures, actions), or to determine the quality (good or bad) of such an ambiguous reality. More than on the object itself, the canonists focus on the evaluation and on the management of the effects of scandal. These effects are often ambivalent, depending on whether they encourage people to sin or they serve prophetically to bring about a conversion. The relationship between truth and scandal is particularly highlighted : is it better to avoid a disastrous scandal by concealing the truth or risk a scandal by revealing a salutary truth ? Whichever answer is arrived at, scandal is dangerous because it leads to social crisis, which could necessarily threaten the consciences of Christians. It is for this the reason that the Church sought to gain control of this issue, either by means of silencing a scandal or by bringing the matter to a trial. In acting in this way, the Church shifted from a moral approach to scandal to the political management of its effects.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le serment, une parole sacrée ? », Cahiers de Fanjeaux, 2013, n°47, pp. 175-192  

    L'acte verbal, entendu dans son sens le plus large (parole, chant, voire écriture), peut revêtir des formes diverses lorsqu'il est "sacré" (qu'il s'adresse à Dieu ou à ses représentants, qu'il les prenne à témoin, ou encore qu'il soit de leur fait). Il est alors investi d'une ou de plusieurs fonctions qu'il convient de décrypter dans un contexte historique particulier, en même temps qu'il est chargé d'un sens implicite ou explicite. Le présent volume traite donc de la "parole sacrée" sous trois angles différents (formes, fonctions et sens) dans le cadre habituel de Fanjeaux, le monde méridional entre XIe et XVe siècle. Sont abordées des questions telles que les rapports entre parole et image, entre parole et texte, entre parole et musique ou encore entre parole et exégèse, l'utilisation du latin ou de la langue d'oc, la prière, le serment, la prédication, les lectures lors de l'office, la mystique.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Entre droit et religion : le blasphème, du péché de la langue au crime sans victime », Revue de l’histoire des religions, 2011, n°4, pp. 587-602  

    C’est à partir du treizième siècle que le droit canonique entérine la catégorisation juridique du blasphème en le dotant d’un régime pénal propre. Le blasphème, avec l’affirmation du pouvoir royal, passe d’une transgression religieuse à un crime politique et le blasphémateur est dénoncé comme menace sociale. À partir du seizième siècle, l’assimilation du blasphème à l’hérésie participe de la répression religieuse contre la Réforme protestante. Le blasphème se mue alors en un redoutable marqueur religieux. By the thirteenth century, canon law confirmed the legal classification of blasphemy and gave it a clear criminal status. With the assertion of royal power, blasphemy became not only a religious transgression but a political crime. The blasphemer was denounced as a social menace. From the sixteenth century on, the religious repression against the Protestant Reformation assimilated blasphemy to heresy. Blasphemy then turned into a formidable religious category.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « L'utilitas publica des canonistes. Un outil de régulation de l'ordre juridique », Revue Française d'Histoire des Idées Politiques, 2010, n°32, pp. 259-276 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Corinne Leveleux-Texeira, « La construction canonique du serment aux XIIe-XIIIe siècles. De l’interdit à la norme », Comptes-rendus des séances de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 2007, n°2, pp. 821-844    

    Leveleux-Texeira Corinne. La construction canonique du serment aux XIIe-XIIIe siècles. De l’interdit à la norme. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 151ᵉ année, N. 2, 2007. pp. 821-844.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La pratique du conseil devant les tribunaux d'inquisition, XIIIè-XIVè siècles », Cahiers de Fanjeaux, 2007, n°42, pp. 165-198 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La construction médiévale de la lèse majesté », Cahiers poitevins d'Histoire du droit, 2006, n°1, pp. 7-27 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Droit et vérité. Le point de vue de la doctrine médiévale (XIIè-XVè) »: La vérité entre opinion et fiction, Bien dire et bien aprandre - Revue de médiévistique, 2005, pp. 333-349   

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Droit et vérité. Le point de vue de la doctrine médiévale (XIIè-XVè) », Bien dire et bien aprandre - Revue de médiévistique, 2005  

    La vérité occupe une place paradoxale dans le discours juridique savant du Moyen-Age D'un côté, en effet, il semble établi dès les premiers Glossateurs que le droit doit être interprété « selon la vérité» et qu'il peut être assimilé à une entreprise de vérité. Pourtant, les développements que consacre la doctrine médiévale à la question de la vérité sont loin de revêtir la cohérence logique et l'importance matérielle que laissait présager son apparent caractère paradigmatique. L'article se propose de répondre à ce paradoxe, en s'attachant à montrer en quoi l'approche juridique de la vérité comporte avant tout une dimension fonctionnelle.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La répression du blasphème (XIIè-XVIè siècles) : péché ou crime? », Essais de philosophie pénale et de criminologie, 2001, n°3, pp. 19-37 

    Corinne Leveleux-Teixeira, Corinne Leveleux-Texeira, « Dire et interdire. Le discours juridique entre omission et action. L’exemple du blasphème (XIIe-XVIe siècles) », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes = Journal of Medieval and Humanistic Studies, 2000, n°7 

  • Corinne Leveleux-Teixeira, « Femmes, genres et droit(s) au Moyen-Age », le 26 juin 2024  

    Journée d’étude organisée par le Laboratoire Polen, le CRJ Pothier, Université d'Orléans sous la direction scientifique de Pierre-Anne Forcadet et Corinne Leveleux-Teixeira

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Ecclesia / Iustitia », le 30 mai 2024  

    Colloque organized by Lidia Zanetti Domingues and Héléna D.M. Lagréou, RMBLF - Réseau des médiévistes belges de langue française avec le soutien du FNRS, du CRHiDI (UCLouvain – Saint-Louis, Bruxelles), d'INCAL (UCLouvain), de PraME (UNamur), de sociAMM (ULB) et de Transitions (ULiège)

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Bien commun ou bien d’utilité publique ? », le 07 mai 2024  

    Journée d'étude organisée par les départements d'Histoire et de Philosophie de l'Université de Namur, sous la responsabilité scientifique de Nicolas Michel et Laura Rizzerio.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Intention, imputation, responsabilité », le 07 décembre 2023  

    Journée d’études organisée par le Laboratoire d’études sur les monothéismes - LEM - UMR 8584, Campus Condorcet, sous la direction de I. Catach, R. Eckert, C. Grellard, C. Leveleux-Texeira.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Sortir de la perplexité », le 30 novembre 2023  

    Séminaire organisé par l'Ecole Pratique des Hautes Etudes (Sciences religieuses) dans le cadre de la chaire "Doctrines juridiques et tradition canonique" (Corinne Leveleux-Teixeira, Directrice d'études).

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Lectures de... n° 16 : André Tournon, Montaigne, la glose et l’essai », le 20 novembre 2023  

    Colloque organisé dans le Cadre du Moi(s) Montaigne 2023, avec le soutien de la Société pour l’histoire des facultés de droit (SHFD).

    Corinne Leveleux-Teixeira, « L'infamie, histoire et métamorphoses », le 19 octobre 2023  

    Colloque organisé par l'Association française pour l'Histoire de la justice - AFHJ, en partenariat avec la Bibliothèque de l’Arsenal - BnF

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le Régime juridique des reliques à la période actuelle et dans l’histoire », le 22 juin 2023  

    Colloque organisé à l’occasion du dixième anniversaire de l’inscription des ostensions septennales limousines au Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO et dans le cadre des Ostensions de 2023

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Langues et paroles du droit », le 01 juin 2023  

    Journées Internationales de la Société d’Histoire du Droit organisées par le Centre de droit privé de l’Université de Lausanne

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Histoire politique et constitutionnelle », le 14 avril 2023  

    Organisée par le laboratoire Droit et changement social, Nantes Université / CNRS.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Circulation des savoirs médiévaux au XIIe siècle », le 20 mars 2023  

    Colloque de lancement de l'ANR CisaMe, organisé sous la direction de Raphaël Eckert - DRES, Strasbourg, Christophe Grellard - LEM, EPHE/PSL et Corinne Leveleux-Teixeira - POLEN, Orléans

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Droit et nature au Moyen-Age. Entre savoir et norme (II) », le 16 mars 2023  

    4e rencontre orléanaise d'histoire du droit et d'anthropologie du Moyen Âge organisée par Pierre-Anne Forcadet, CESFiMA et Corinne Leveleux-Teixeira, CESFiMA, Orléans

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit médiéval. Sources et méthodes », le 07 février 2023  

    Organisé dans le cadre du projet Erasmus + FoNTES (Fostering Innovative Training in the use of European Legal Sources) porté par les universités de Palerme, de Genève, de Cracovie (Jagellonne) et par l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La nature et le droit médiéval (I) », le 18 novembre 2022  

    1ère session du cycle Nature et droit, organisée par Pierre-Anne Forcadet et Corinne Leveleux-Teixeira, sous la présidence de Jean-Pierre Poly, professeur émérite de l'Université de Nanterre.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Se lier par la parole », le 17 novembre 2022  

    Séminaire EPHE organisé par Corinne Leveleux-Teixeira, Direction d'étude Doctrines juridiques et tradition canonique, Ecole Pratique des Hautes Etudes, PSL

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Jacques Cujas 1522 - 2022 », le 28 mars 2022  

    Organisé sous la coordination de Dario Mantovani, Collège de France ; Alexandra Gottely, Bibliothèque Cujas et Xavier Prévost, Université de Bordeaux/IUF

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Femmes, genres et droit au Moyen Âge », le 16 décembre 2021  

    Journée d'études organisée par Pierre-Anne Forcadet et Corinne Leveleux-Teixeira.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Divination, magie et répression à la fin du Moyen Age II », le 17 novembre 2021  

    Journée d’études de l’APR IA DIMAGIR organisée par Julien Véronèse, Université d’Orléans

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Gouverner le corps et sauver les âmes », le 15 novembre 2021  

    Séminaire de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes - EPHE, PSL, en partenariat avec l'Université d'Orléans, organisé sous la responsabilité de Corinne Leveleux-Teixeira, Professeure à l'Université d'Orléans.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Religion et prééminence du droit dans le judaïsme antique », le 01 juillet 2021  

    Organisée dans le cadre du cycle « Les religions et la prééminence du Droit » par le CRJP, Université d'Orléans, sous la direction scientifique de Nicolas Haupais, Corinne Leveleux-Teixeira et Tristan Pouthier

    Corinne Leveleux-Teixeira, « L’émergence du pénal (XIIe-XIIIe siècle) », le 02 avril 2021  

    Journée d'études organisée par Corinne Leveleux et Pierre-Anne Forcadet, Université d'Orléans.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Diffusion des normes dans l’Église de la fin du Moyen Age », le 13 juin 2019  

    Organisé par Christine Barralis, Université de Lorraine, CRULH et Rowan Dorin, Stanford University, History Dpt.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « L'insulte et le droit », le 15 mars 2019  

    Journée d’histoire et d’anthropologie du droit.

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La justice médiévale et ses sources », le 14 mars 2019  

    Journée d’étude Fons Justitiae, organisée par Corinne Leveleux-Teixeira et Pierre Anne Forcadet (Université d’Orléans), avec le soutien du laboratoire Polen (EA 4710) et du CRJ Pothier (EA1212).

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La Pourpre et la Croix », le 08 février 2019  

    Conférence organisée dans le cadre du cycle "Les religions et la prééminence du Droit"

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Les religions à l'origine de la prééminence du droit ? », le 16 janvier 2019 

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le souverain et l’Église », le 16 octobre 2017  

    Organisé par Annick Peters-Custot, Université de Nantes en collaboration avec la Casa de Velázquez, dans le cadre du réseau des Écoles françaises à l'étranger

    Corinne Leveleux-Teixeira, « La notion d'intérêt(s) en droit », le 12 octobre 2017  

    Organisé par le Centre de Recherche Juridique Pothier

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Justement traduire : L’enjeu de la traduction juridique », le 11 mai 2017  

    Colloque international

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Le blasphème », le 27 janvier 2017  

    Responsable : Irène Rosier-Catach, chaire "Arts du langage et théologie au Moyen âge", EPHE (5e section)

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Faut-il rethéoriser le droit pénal ? », le 13 octobre 2016  

    Colloque organisé par le Centre de Recherche Juridique Pothier de l'Université d'Orléans

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Autour des Assises de Jérusalem », le 22 mai 2015  

    Journée organisée dans le cadre du Programme Juslittera - Polen

    Corinne Leveleux-Teixeira, « De l'Utopie au droit. Histoire des idées, droit privé, droit social, droit du travail, enseignement du droit », le 15 janvier 2010  

    From Utopia to Law. Political Ideologies, Private Law, Social Law, Law Schools In honor of Nicole Dockes

    Corinne Leveleux-Teixeira, « Fama et mémoire de la peine dans la doctrine romano-canonique (XIIIè-XVè siècles) », La peine, discours, pratiques et représentations., Limoges, le 01 janvier 2004   

  • Corinne Leveleux-Teixeira, ThéoDrIC : Théologie et Droit au Moyen-Age. Entre interactions et concurrence (Corinne LEVELEUX-TEIXEIRA, POLEN) 

Actualités Publications ENCADREMENT DOCTORAL
  • John Hickey, La justice dans la pensée théologique et juridique de l'espace anglo-normand (1150-1215), thèse en cours depuis 2024 en co-direction avec Christophe Grellard  

    La thèse aura pour objet la question de la justice dans les productions intellectuelles de l'espace anglo-normand au XIIe siècle (écrits exégétiques, théologiques, gloses, traités juridiques) dont elle s'efforcera d'identifier les auteurs, les réseaux, les circulations et les influences. Le thème de la justice sera abordé dans ses dimensions théorique, morale, pénitentielle et procédurale. Il sera éclairé par la lecture des manuscrits à teneur théologique et juridique identifiés et transcrits dans le cadre du projet CiSaMe. L'espace anglo-normand, défini de façon large comme une interface d'échanges intellectuels et non comme un territoire politique, offre en effet un point de vue privilégié pour saisir des évolutions décisives de la pensée occidentale. Deux temps forts pourraient être privilégiés pour les dépouillements de sources : les années 1120-1130, autour de la réception des méthodes, des commentaires exégétiques et des réflexions de l'École de Laon ; le règne d'Henri II et notamment les années 1150-1180 marqués par les écrits produits dans l'entourage de l'archevêque de Canterbury, Thomas Becket.

    Valentin Potier, La notion de parjure en France et en Angleterre (XIIe-XIIIe siècles), thèse en cours depuis 2021 en co-direction avec Véronique Beaulande-barraud  

    Au Moyen Âge, la prestation de serments permettait de lier efficacement les individus comme les communautés. La sanction du parjure était donc indispensable pour la sauvegarde du lien social. Aux XIIe et XIIIe siècles, les définitions du parjure se font plus précises. À la même époque, les ordalies sont moins nombreuses, et les procédures d'enquête se développent. C'est le cas en Angleterre avec la common law qui instaure des jurys. C'est aussi le cas en France avec des jurés locaux. L'objectif de cette recherche vise à comprendre la place du parjure dans la pensée canonique et scolastique mais aussi dans la procédure judiciaire médiévale, en France et en Angleterre, aux XIIe et XIIIe siècles. Il s'agit d'abord de comprendre les différentes définitions données au parjure que ce soit par les théologiens ou encore les juristes. Ce corpus de définitions ne pourra pas se limiter aux écrits des XIIe et XIIIe siècles : pour bien cerner les évolutions de la notion, il faut revenir à des textes antérieurs, comme les Écritures, la Patristique ou les capitulaires carolingiens. Le contexte d'écriture et la diffusion de ces textes sur le parjure sont également à questionner. Ensuite, il s'agit d'étudier la criminalisation du parjure au travers des sources judiciaires. Avec les procédures d'enquête, les témoins mais aussi les jurys sont amenés à prêter serment, et donc à risquer un parjure. En Angleterre et en France, la façon de traiter ces parjures judiciaires peut suivre des modalités différentes. Par ailleurs, il faut s'intéresser aux modes de sanctions du parjure. Ils peuvent être de deux natures : temporelle, puisque les pouvoirs publics cherchaient à limiter les risques de parjure dans la société ; ecclésiastique, puisque se parjurer, c'est avant tout offenser Dieu.

    Pierre-Anne Forcadet, Conquestus fuit Domino regi : Etude sur le recours au roi de France d'après les arrêts du Parlement (1223-1285), thèse soutenue en 2012 à Orléans, membres du jury : Louis de Carbonnières (Rapp.), Jean Hilaire (Rapp.), Claude Gauvard, Gilduin Davy et Katia Weidenfeld    

    Le riche et complexe « siècle de saint Louis » est celui du déploiement d’une justice royale hiérarchisée et professionnelle employant des centaines de maîtres formés dans les universités. La Cour du roi se réunit à Paris à intervalles réguliers lors de sessions en parlement. La monarchie adopte plusieurs réformes qui permettent aux justiciables d’avoir accès à la justice. Les recours sont alors portés, pour une large part, contre le roi lui-même et les exactions de ses agents. Tant de recours différents peuvent être formés qu’une forme de responsabilité de l’administration royale paraît se mettre en place.Un important contentieux est par ailleurs soulevé par les hommes contre leurs seigneurs laïcs ou ecclésiastiques. La justice royale apparaît alors comme un régulateur des relations féodales. L’appel judiciaire au Parlement, qui se systématise contre les jugements des justices concurrentes, ouvre la voie à la concrétisation de la supériorité de la justice royale, que l’on commence à appeler en français : « souveraineté ».Par acculturation, l’offre et la demande de justice se rencontrent et tendent à consacrer les institutions royales en justice de « droit commun ». Les résistances sont nombreuses de la part des justices concurrentes, mais la Cour du roi reçoit aussi leurs plaintes et, tout en étendant son influence, statue dessus en toute impartialité, ce qui contribue également à légitimer la mise en place d’un État de droit.

    Marie Bassano, "Dominus domini mei dixit. . . "; Enseignement du droit et construction d'une identité des juristes et de la science juridique , thèse soutenue en 2008 à Paris 2 en co-direction avec Albert Rigaudière  

    Entre 1235 et 1320, le studium de droit d’Orléans vit l’un des moments les plus brillants de son histoire. Tout au long de cette période, les idées produites dans l’école se répandent dans les milieux juridiques, les hommes formés à Orléans se retrouvent dans la haute administration publique. Comment expliquer ce phénomène ? La dispersion et la diffusion tant des doctrines que des suppôts de la formation orléanaise sont la marque d’une conception renouvelée de la science du droit qui trouve naissance dans le studium ligérien tout au long du XIIIe siècle. L’enseignement orléanais s’appuie sur des outils pédagogiques repensés qui transcrivent ce renouvellement des concepts juridiques. Leur étude permet ainsi d’appréhender les particularismes intellectuels de l’école, nés de la combinaison d’utilisations originales de doctrines plus anciennes et d’apports neufs et rafraîchissants, produits des réflexions hétérodoxes des docteurs orléanais. L’identité scolaire orléanaise réside, en outre, dans le lien existant entre la formation reçue dans les écoles de droit d’Orléans et la compétence des étudiants à exercer efficacement des fonctions élevées dans l’administration royale et le gouvernement de l’Eglise. Cette dimension professionnelle de la formation est le résultat conjoint d’une doctrine ébauchant une pensée publiciste construite et d’un apprentissage fournissant aux étudiants des méthodes de travail et d’utilisation du droit réutilisables dans la pratique de la haute administration publique.

    Frédéric F. Martin, Justice et législation sous le règne de Louis XI , thèse soutenue en 2008 à Paris 2 en co-direction avec Albert Rigaudière  

    L’avènement de la souveraineté moderne s’ancre dans l’histoire de la loi et de la justice. Dans cette optique, le règne de Louis XI, roi critiqué pour son autoritarisme, fournit une unité historique et politique adéquate pour comprendre, par l’étude des actes royaux, comment la transformation de ces notions s’articule à celle des pratiques normatives. À la veille des Temps modernes, la norme juridique royale reste imprégnée de la vocation justicière du pouvoir. Les institutions comme les actes juridiques doivent être envisagés sous l'angle de la juridiction lato sensu. Ni les unes ni les autres ne sont spécifiquement identifiables à la loi ou à la justice. Le roi n’exerce pas un monopole, quoiqu’il s’affirme comme l’instance normative par excellence. Quant aux actes royaux, leur variété correspond non à des typologies précises de fond (généralité, permanence, unilatéralité) ou de forme (diplomatique et structure discursive), mais à une somme de modèles souples adaptés aux diverses fonctions qu’ils remplissent. La norme juridique royale procède d’un acte issu de la volonté du roi, sans que leurs validités respectives se confondent. Le modèle normal d’édiction se déduit donc de la régularité de pratiques répétées, non d’une définition de principe. Il est précisé lors de situations exceptionnelles qui le contredisent : dérogation du souverain ou vérification et interprétation de ses décisions par les cours. Peu à peu s’établissent des critères de la norme par le travail de la forme des actes (textes et notions) ; la loi est spécifiée par la distinction fonctionnelle du roi et de ses officiers, moins comme norme positive que comme mode spéculaire d’institution du collectif.

  • Jonathan Pezzetta, Édifier une justice souveraine au sein d'une principauté médiane : le tribunal du Change de Nancy (1508-1633), thèse soutenue en 2023 à Université de Lorraine sous la direction de Stefano Simiz et Julien Lapointe, membres du jury : Marie Houllemare (Rapp.), Xavier Rousseaux (Rapp.), Diane Roussel    

    Dans le dogme chrétien, Dieu établit les rois pour faire régner la justice sur Terre. Il s'agit de l'un des fondements de la souveraineté des monarques ; leur force politique se mesure d'ailleurs à leur capacité de juger. Lorsque le prince Antoine de Lorraine (1508-1544) monte sur le trône des duchés de Lorraine et de Bar, il est loin de correspondre à la définition chrétienne du souverain. Les jugements rendus par ses tribunaux sont susceptibles d'appel vers des cours qui échappent totalement à son contrôle. En effet, les duchés lorrains forment une principauté médiane, enserrée entre le royaume de France, à l'ouest, et le Saint-Empire Romain Germanique à l'est. La partie lorraine relève juridiquement de l'Empereur, les sentences prononcées par les juges ducaux sont donc susceptibles d'appel devant la Chambre impériale. À l'ouest, la situation n'est guère plus favorable. Depuis le traité de Bruges de 1301, le duc est contraint rendre hommage au roi pour la jouissance du Barrois mouvant, et les sentences des justices barroises relèvent en second ressort du Parlement de Paris. Au sein même de ses terres, le duc fait face à l'Ancienne Chevalerie, caste qui rassemble les plus puissantes et prestigieuses familles de la noblesse lorraine. Ces dernières estiment devoir gouverner aux côtés du prince, à qui elles disputent son pouvoir de justice par la tenue de leurs Assises. Les cours de la noblesse sont compétentes pour recevoir la quasi-totalité des appels émanant des juridictions inférieures. Néanmoins, en dépit de ces entraves, la souveraine justice du duc de Lorraine connaît un essor continu à partir du règne d'Antoine de Lorraine et jusqu'à l'occupation des duchés par le Royaume en 1633.Dans la partie lorraine des duchés, l'affirmation du pouvoir de justice du prince passe par différentes instances centrales, dont le tribunal des échevins de Nancy, surnommé tribunal du « Change ». L'échevinage a autorité sur quatre échelles géographiques différentes : le duché de Lorraine, la prévôté, la gruerie et le bailliage de la capitale. Au début du XVIe siècle, le duc dote l'instance de compétences souveraines, puis les élargit au fil des décennies. Plusieurs éléments favorisent cette excroissance. Premièrement, les contraintes extérieures s'amenuisent par la signature de traités avec le Roi et l'Empereur. Deuxièmement, par l'action des officiers savants, qui établissent l'assise théorique d'une souveraineté plus affirmée de leur prince. Ils contribuent à la mise par écrit des coutumes du pays et en influencent le contenu de façon favorable au duc. De son côté, le duc légifère abondamment. Il densifie l'administration de sa justice, impose ses normes délictuelles et donne des règlements toujours plus précis à l'attention de ses tribunaux. Le Change accompagne ces changements. La cour acquiert de nouvelles compétences tandis que son organisation interne et matérielle est bouleversée par les réformes engagées par le prince. Dans leur exercice de la justice, les échevins agissent comme des vecteurs de souveraineté. Au criminel, grâce à la procédure inquisitoire, les magistrats poursuivent et portent aux yeux de tous les actes jugés répréhensibles par le pouvoir ducal. Au civil, ils véhiculent auprès des justiciables leur justice savante, très éloignée des pratiques orales des sièges villageois.L'objectif de ce présent travail sera d'étudier ces différents aspects, c'est-à-dire la vie au Change (les justiciables, les procès), l'organisation de l'institution (les compétences, le matériel et les membres du personnel) ainsi que la production théorique et législative autour du pouvoir de justice du prince de Lorraine, afin d'entrevoir les mécanismes constituant l'essor de la souveraineté judiciaire de celui-ci.

    Karol Skrzypczak, Occire le tyran. Présentation et édition critique des textes sur la « Justification du duc de Bourgogne » (1408-1410), thèse soutenue en 2022 à Orléans sous la direction de Jean-Patrice Boudet, membres du jury : Olivier Mattéoni (Rapp.), Sebastian Provvidente (Rapp.), Hélène Biu et Jacques Chiffoleau    

    Cette thèse consiste en une édition scientifique de sept œuvres issues de la polémique entre Orléanais et Bourguignons au début du XVe siècle, parmi lesquelles se trouvent cinq textes du théologien Jean Petit et de ses collaborateurs - la première et la seconde Justification du duc de Bourgogne, accompagnées de trois opuscules attribués au même auteur : la « Partie seconde », la Response sur la demande faicte par feue la duchesse d'Orleans et le Traitiet encontre les edifieurs des sepulcres -, ainsi que de deux œuvres de la partie orléanaise : la Proposition (ou Réplique) attribuée à l'abbé de Cerisy, Thomas du Bourg, et les Conclusions de l'avocat de la duchesse d'Orléans, Guillaume Cousinot. La thèse se compose de deux parties : une présentation et une série d'éditions critiques. Dans le cadre de la présentation, le premier chapitre se propose d'examiner l'ensemble du corpus d'un point de vue codicologique et historique. Il commence par la description codicologique de tous les manuscrits subistants des œuvres éditées, accompagnée d'une étude de leur diffusion. Le deuxième chapitre se penche sur les auteurs potentiels des textes du corpus en étudiant les différentes attributions proposées dans l'historiographie. Le troisième et dernier chapitre est consacré à une triple étude portant sur la composition et l'argumentaire de la Justification, sur la construction de la narration orléanaise autour du meurtre de Louis d'Orléans, et enfin sur la miniature allégorique ornant les manuscrits ducaux de la première Justification, en tant qu'expression de l'imaginaire politique bourguignon.La deuxième partie de la thèse consiste en une édition critique des sept textes polémiques du corpus de la Justification du duc de Bourgogne, dont quatre textes principaux : la première Justification par Jean Petit dont le texte est établi par la collation de quatre manuscrits parmi les dix-neuf codices conservés isolément en prenant celui de Paris, BnF, fr. 5733 comme manuscrit de base ; la seconde Justification du même auteur qui est éditée en fonction des deux seuls exemplaires connus ; et la Réplique de la partie orléanaise par l'abbé de Cerisy, conservée dans quatre manuscrits isolés, dont celui de Paris, BnF, fr. 10185, a été retenu comme base. Les textes établis de la première Justification, de la Réplique et des Conclusions sont également comparés à leurs versions données par la Chronique de Monstrelet. Ces quatre œuvres principales sont accompagnées de trois courts traités de Jean Petit : la « Partie seconde », la Response et le Traitiet qui, conservés dans des copies uniques (ADCO, B 11614 et 11892), témoignent de la dynamique de composition du dossier et de l'adaptabilité de son argumentaire. Tous les textes édités sont accompagnés d'un apparat critique répertoriant les différentes leçons, indiquant les sources et mettant en contexte les passages difficiles.

  • Johanne Zachara, La puissance paternelle au XIXe siècle (1804-1889), thèse soutenue en 2019 à Nantes sous la direction de Grégoire Bigot, membres du jury : Karen Fiorentino (Rapp.)  

    Le Code civil de 1804 est réputé avoir renoué avec une puissance paternelle proche de la patria potestas romaine.Exercée principalement par le mari sur les enfants, elle avait pour objet la juste obéissance des mineurs à leurs parents.Son objet est politique : l’ordre dans les familles contribue à l’ordre autoritaire dans l’État.Qu’en est-il en pratique ?À travers une étude exhaustive de la jurisprudence relative à la puissance paternelle, il s’agit de mettre en lumière l’irréductible tension entre les prescriptions législatives et la vie du droit, qui exige que les lois soient interprétées, complétées, voire contournées en faveur des mineurs non émancipés.

    Laurence Silvestre, Jean Bréhal : inquisiteur d'exception ou inquisiteur exemplaire de la fin du Moyen Age, thèse soutenue en 2017 à Paris 1 sous la direction de Dominique Iogna-Prat, Olivier Mattéoni et Olivier Mattéoni, membres du jury : Bénédicte Sère (Rapp.), Martine Ostorero  

    Jean Bréhal est un dominicain normand, docteur en théologie, qui s’est fait un nom en tant qu’inquisiteur du royaume de France, non pas en traquant l’hérésie, ou en poursuivant des sorcières, mais en annulant des condamnations, et plus particulièrement celle de la Pucelle d’Orléans, vingt-cinq ans après le bûcher de Rouen. Sa longévité dans l’officio inquisitionis (de 1452 à 1474), sous les règnes de Charles VII et de Louis XI, contraste avec le nombre réduit d’affaires qu’il a instruites, d’après les sources. Aussi on peut se demander s’il fait figure d’exception, ou s’il est inquisiteur exemplaire de la fin du Moyen Âge. Le «cas Bréhal» invite à examiner la charge d’inquisiteur après le Concile de Vienne, dans le contexte particulier, à la fois d’un territoire encore marqué par les antagonismes de la guerre de Cent ans, et d’une Église éprouvée par le Grand Schisme et ses séquelles. Sur la base d’un corpus composé principalement des écrits du dominicain, dont certains éléments sont des manuscrits inédits, mais dont le noyau est constitué par la procédure en nullité de la condamnation de Jeanne d’Arc, cette thèse se propose non seulement d’appréhender l’homme et son parcours, mais aussi et surtout sa pensée, d’analyser son écriture scolastique, de saisir le sens de son action, percer ses motivations, et peut-être comprendre la nature du «pouvoir» qu’il a incarné pendant plusieurs décennies. Au final, c’est une époque, des milieux, et la situation d’un office, que cette étude centrée sur Jean Bréhal éclaire, tout autant que la spécificité d’un individu. Elle a surtout pour but de faire connaître une œuvre qui embrasse des champs variés et des centres d’intérêts divers.

    Ahmed Djelida, Définition de l'institution monarchique dans le royaume siculo-normand, thèse soutenue en 2017 à La Rochelle sous la direction de Jacques Bouineau, membres du jury : Gilduin Davy (Rapp.), Florent Garnier, Orazio Condorelli et Jacques Péricard  

    Notre étude vise à dégager deux phases successives dans la construction de la royauté normande de Sicile. La première est entamée par Roger II. Le pouvoir est personnel, non défini juridiquement ; il dépend essentiellement de la capacité du roi à l’imposer. Le roi muselle l’aristocratie féodale et préfère s’entourer de l’aristocratie orientale, plus habituée à un pouvoir fort, qu’il utilise dans son administration. La seconde advient durant le règne de Guillaume Ier. Autour de 1161, la pression seigneuriale rompt la dynamique antérieure. L’émir des émirs, symbole de la domination administrative orientale, est assassiné et remplacé par un conseil de familiares regis. Ces poussées aristocratiques contraignent le pouvoir royal à s’institutionnaliser. Les contours juridiques de la fonction royale se définissent et s’occidentalisent.

    Jérôme Devard, Parenté et Pouvoir(s) dans la matière de France et le roman de Renart : approche socio-juridique de la représentation familiale aux XIIe-XIIIe siècles, thèse soutenue en 2014 à Poitiers sous la direction de Stéphane Boissellier et Claudio Galderisi, membres du jury : Roger Bellon (Rapp.), Martin Aurell  

    Malgré les apports de l'anthropologie juridique, l'étude de la norme au travers des sources narratives médiévales est encore de nos jours à l'état embryonnaire. Les historiens du droit restent attachés, très logiquement, à l'étude de la norme formalisée et coercitive, tandis que les historiens des faits sociaux restent circonspects quant à la capacité informative des sources littéraires. Souhaitant dépasser ce clivage culturel, cette thèse renouvelle les sources de l'analyse juridique, en recourant aux fictions médiévales du XIIe-XIIIe siècle. Les processus normatifs étudiés au travers le prisme de la parenté dans la Matière de France et le Roman de Renart révèlent une représentation cohérente de l'organisation sociale, s'appuyant à la fois sur les réalités séculières du système judiciaire des XIIe-XIIIe siècles, mais également sur une anastylose poétique de pratiques et de normes héritées des temps mérovingiens et carolingiens. En fait, le système normatif fictionnel repose sur les normes contemporaines, sur le souvenir imparfait des normes antérieures, mais également sur une pluralité de valeurs et de comportements codifiés. Ainsi, les fictions médiévales ne sont pas seulement des « machines judiciaires », mais bien des « machines normatives », qui englobent non seulement la norme reconnue ou la règle admise, autrement dit la « juridicité » de la pratique judiciaire antérieure et contemporaine aux XIIe-XIIIe siècles, ainsi que ses représentations ou reconstructions, mais également un système de références morales et comportementales. Par ailleurs, si dans les récits, les deux sources matricielles de normativité sont incontestablement la vassalité et la parenté, les règles juridiques qui en découlent, apparaissent bien souvent comme étant supplétives de volonté : leur respect ou leur défiance dépend à la fois des intérêts, des aspirations et des postures d'un individu, mais également des contraintes fictionnelles que les récits déterminent entre eux.

    Élisabeth Lusset, Non monachus, sed demoniacus : recherches sur la criminalité au sein des communautés régulières en Occident (France et Angleterre principalement), XIIe-XVe siècle, thèse soutenue en 2011 à Paris 10 sous la direction de Franck Collard, membres du jury : Claude Gauvard (Rapp.), Catherine Vincent, Martin Heale et Franz J. Felten    

    Ce doctorat croise les apports de deux champs historiographiques distincts : l’histoire de la criminalité et de la justice et l’histoire des communautés régulières au Moyen Âge. Il analyse la criminalité interne au cloître, commise par des religieux à l’encontre de leurs confrères du XIIe siècle à la fin du XVe siècle (violence, homicide, vol...). Dans une perspective comparatiste, il s’intéresse aux communautés d’hommes et de femmes, qu’elles appartiennent à un ordre (Cluny, Cîteaux, Prémontré, Chartreux), ou à une nébuleuse moins définie sur le plan juridique, comme les moines adoptant la règle de saint Benoît ou les chanoines réguliers vivant sous la règle de saint Augustin. L’étude embrasse l’ensemble de l’Occident, mais la majorité des cas criminels recensés concernent les royaumes de France et d’Angleterre. L’analyse des pratiques criminelles, du profil des coupables et des victimes, des circonstances et des motivations du crime invite, tout d’abord, à interroger la porosité du cloître aux valeurs de la société laïque médiévale. Cette analyse révèle que les idéaux monastiques exaltant l’humilité, la maîtrise de soi et le primat du pardon entrent parfois en conflit avec la nécessité de défendre son honneur en recourant à la vengeance. Le doctorat étudie, par ailleurs, le fonctionnement d’une justice régulière, qui est à la fois disciplinaire et administrative, pénitentielle et pénale. À partir du XIIe siècle, la correction des criminels dépasse la sphère interne du monastère pour être prise en charge par les instances supérieures des nouvelles structures d’ordre, comme le chapitre général, ou de l’Église (évêques, offices pontificaux). Entre le XIIe et le XVe siècle, se met en place un véritable système judiciaire et pénal. Dans le même temps, si la correction vise à préserver l’intégrité de l’Eglise en évitant le scandale, elle recherche aussi l’amendement du coupable, toujours susceptible d’être absous et réconcilié.

  • Romain Chevalier, Papes, rois et bâtards : Normes et discours autour de la filiation illégitime (Papauté et royaume de France, XIIIe-XIVe siècles), thèse soutenue en 2023 à Avignon sous la direction de Guido Castelnuovo, membres du jury : Olivier Mattéoni (Rapp.), Charles de Miramon (Rapp.), Carole Avignon et Sylvie Steinberg  

    Cette thèse se propose de faire l’analyse de la construction des compétences royales et pontificales en matière de bâtardise, mais aussi de faire l’histoire du discours qui justifie la réhabilitation des enfants illégitimes au travers des actes pontificaux et de ceux du roi de France. Il s’agit d’explorer le décalage entre, d’une part, une réalité normative marquée par un discours dont les effets cumulés sont l’instauration d’une discrimination légale envers les bâtards sans cesse rappelée par le monde social, et, d’autre part, la possibilité de leur réhabilitation. L’objectif est ainsi de remettre en perspective différentes temporalités. Tout d’abord, la temporalité du droit qui puise ses racines dans l’Antiquité et établit une terminologie et un cadre normatif qui s’appliquent aux filiations illégitimes. Ce mouvement de fond connaît une évolution importante à partir du XIIe siècle lorsque les juristes s’approprient le corpus justinien et en exhument des moyens de réhabilitation des bâtards en leur donnant de nouveaux fondements. La temporalité politique connaît des moments d’intensité soudaine autour des règnes de Philippe Auguste et de Philippe le Bel, tout en demeurant marquée par une trame de fond qui fait de la gestion de la bâtardise un point d’achoppement entre l’Église et la royauté. Enfin, la temporalité socio-culturelle maintient la stigmatisation des enfants nés hors mariage mais dans le même temps met en valeur le discours – élaboré dans les actes pontificaux puis repris dans les actes royaux – qui justifie la réhabilitation à titre individuel dès lors que certaines conditions sont respectées.

    Julien Lepot, Un miroir enluminé du milieu du XIVème siècle : l'Avis aus roys, thèse soutenue en 2014 à Orléans sous la direction de Jean-Patrice Boudet, membres du jury : Frédérique Lachaud (Rapp.), Olivier Mattéoni (Rapp.), Michel Pastoureau et Lydwine Scordia    

    Contenu dans cinq manuscrits repérés à ce jour, l’Avis aus roys est un texte méconnu qui appartient augenre littéraire des « miroirs au prince » renvoyant à leur(s) destinataire(s) l’image idéale, exemplaire, dugouvernant. Librement inspirée du De regimine principum de Gilles de Rome et du Liber de informationeprincipum, l’oeuvre semble avoir été adressée à un jeune prince Valois, vers 1347, afin de répondre auxpréoccupations du temps. Des incertitudes planent quant à l’identité de l’auteur et du commanditaire, lesmanuscrits restant discrets sur leur origine. Le futur Jean II le Bon confia peut-être la rédaction de cetraité au confesseur royal bourguignon Pierre de Treigny afin que ses jeunes fils se conforment à l’imaged’un prince idéal. Le moment semble choisi : en plus d’être contestée, la dynastie Valois est alors en proieaux difficultés militaires. En réponse à la défaite de Crécy et suivant les réformateurs, l’auteur de l’Avisaus roys propose de mieux sélectionner les officiers de l’Hôtel, de renforcer la dignité du prince en mêmetemps que son rapport à Dieu. Parmi les exemplaires de l’Avis aus roys, le manuscrit M. 456 de la Pierpont Morgan Library, datable du milieu du XIVe siècle, est le plus proche de la rédaction initiale et ilest exceptionnel par sa richesse iconographique inégalée dans le genre littéraire des « miroirs ». Dans cecodex, des artistes parisiens ont constamment cherché à mettre le corps royal en valeur, renforçant lecaractère pédagogique du texte tout en donnant un écho à l’actualité politique et militaire.

    Dominique Messineo, La Jeunesse irrégulière (1830-1912), thèse soutenue en 2010 à Paris 10 sous la direction de Jean-Pierre Baud, membres du jury : Christian Bruschi (Rapp.), Marie-Sylvie Dupont-Bouchat (Rapp.), Jean-Pierre Poly et Laura Lee Downs    

    La thèse se propose de revenir sur les traces de l’histoire de l’éducation correctionnelle et sur celles de la jeunesse coupable, malheureuse et irrégulière. Comprise entre 1830 et 1912, cette étude s’attache à montrer comment à partir de l’émergence de la question sociale et de la réforme pénitentiaire et jusqu’au vote de la loi sur les tribunaux pour enfants et adolescents, des dispositifs contraignants de correction, de rééducation et d’assistance à l’égard des mineurs de seize ans ont été justifiés, mis en place et ont fonctionnés. En marge des écrits historiques déjà nombreux sur la question, la thèse entend s’illustrer par la volonté de décrire et d’expliquer les rouages juridiques et administratifs au coeur du système spécifique de répression des infractions de la jeunesse irrégulière.Ce faisant, elle envisage l’éducation correctionnelle comme un cas limite de la répression préfigurant l’évolution du droit pénal vers un système de défense sociale et de prévention des comportements irréguliers porteurs de désordre, de troubles et d’une délinquance d’habitude. Héritière des anciennes mesures de police propres au pouvoir royal, l’éducation correctionnelle dérive, à mesure qu’elle se confronte à une population d’enfants urbains, misérables et pitoyables (I), vers un système individualisé de surveillance et de bienveillance qui forme à partir du foisonnement des sciences sociales de la fin du XIXe siècle les savoirs, les discours et les pratiques administratives et judiciaires permettant d’agir efficacement à l’encontre d’une jeunesse socialement inadaptée. L’ancien Code pénal qui retenait par le fil de la responsabilité morale les mineurs de seize ans est progressivement amendé par une série de lois civiles et pénales ainsi que par des pratiques administratives qui ont pour but de rejeter le jeune enfant ou adolescent hors des sanctions du droit pénal tout en le maintenant dans l’auréole d’un nouveau pouvoir répressif fondé sur un juridisme pénal qui s’ignore (II)