Colloque organisé par le LexFEIM (Laboratoire d’études en droits fondamentaux, des échanges internationaux et de la mer), avec le soutien de la Fondation Anthony Mainguené et le patronage de la section Nord de la SFDE (Société Française pour le droit de l’environnement).
Dir. Marie ROTA (MCF HDR à l’Université du Havre Normandie)
Présentation générale, objectifs visés et retombées attendues :
Comme le constate Olivier Clerc, « en réaction à l’urgence écologique, la notion de "communs" connaît un impressionnant regain d’intérêt », en particulier en droit de l’environnement[1]. La reconnaissance de l’existence de communs naturels, définis par Marie-Pierre Camproux Duffrène comme « une entité, un ensemble composé d’une communauté regroupant humains et non humains, d’un objet de taille et de nature variable (une planète, un écosystème forestier, l’eau, une espèce) et des relations entre les différents éléments »[2] peut également avoir des répercussions en droit des droits humains. Aboutissant à la reconnaissance de droits collectifs, ils peuvent tout d’abord entrer directement en contradiction avec l’universalisme des droits tel qu’il a été pensé lors de la révolution française[3]. Appelant à un dépassement de la philosophie libérale qui les sous-tend, la « pensée du commun »[4] pousse également à une redéfinition de certains droits tels que le droit de propriété (envisagé comme faisceau de droits), le droit à un environnement sain (envisagé comme droit collectif) ou encore les droits politiques (s’inscrivant dans le volet participatif de la démocratie). Aussi, et à l’heure où la pensée du commun est parfois mobilisée dans le cadre d’affaires dites « environnementales » qui arrivent au prétoire des juridictions protégeant les droits et libertés[5], il est proposé d’initier des pistes de réflexion sur ces différents aspects. Peu de spécialistes des droits humains se sont en effet, pour l’heure, penchés sur cette question et ceci alors même que le droit comparé nous y invite[6]. L’objectif de ce colloque est alors d’y remédier.
Quatre axes de recherche sont envisagés :
Axe 1 - Communs naturels et universalisme des droits humains (première demi-journée introductive)
L’élargissement du titulaire des droits humains : la personne en relation ou le commun ?
Un universalisme étendu aux générations futures ?
Un universalisme étendu à aux éléments de la Nature ?
Axe 2 - Communs naturels et droit de propriété (2e demi-journée)
Communs naturels, biens communs et droit de propriété
Communs naturels et propriété publique / privée
Communs naturels et droit à la terre
Axe 3 – Communs de la Nature et droit à un environnement sain (3e demi-journée)
Communs naturels et droit à un environnement sain tel qu’envisagé en droit constitutionnel
Communs naturels et droit à un environnement sain tel qu’envisagé en droit administratif
Communs naturels et droit à un environnement sain tel qu’envisagé en droit international et régional des droits humains
Axe 4 - Communs de la Nature et droits politiques (4e demi-journée)
Communs naturels et droit à la participation
Communs naturels et prise de décision collective
Communs naturels et autogouvernement
Cet appel à communications a vocation à accueillir toutes celles qui s'inscrivent dans l’un des axes évoqués (les éléments mentionnés à leur suite ne sont que des pistes de réflexion esquissées à titre d’exemples ; d’autres peuvent tout à fait être suggérées). L'objet principal de ce projet est le droit de l’environnement (et en particulier la théorie des communs) et la théorie générale des droits et libertés, ainsi que les droits positifs français, européen et international, mais des contributions en droit comparé sont également les bienvenues, de même que des points de vue de non-juristes. Les personnes intéressées sont invitées à y répondre par courriel (marie.rota@univ-lehavre.fr), en y joignant une proposition de contribution (un titre et un résumé de 3000 signes maximum) dès que possible et au plus tard jusqu'au vendredi 25 avril 2025 inclus. Une publication des actes est aura lieu en 2026.
[1] Olivier Clerc, « "Communs" ou "droits de la nature" : la fin justifie les moyens ! », Revue juridique de l’environnement, volume 48, hors série n° 22, 2023, p. 50. Ça l’est aussi le cas dans de nombreux autres pays. Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld le soulignaient déjà en 2017 dans la première édition du Dictionnaire des communs : « la notion de "communs" ne cesse d’être mobilisée aujourd’hui en France, en Europe et dans une grande partie des pays occidentaux », Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld, « Introduction », in Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld (dir.), Dictionnaire des communs, PUF, 2017, p. VII.
[2] Marie-Pierre Camproux-Duffrène, « Les communs naturels, de l’intérêt à l’action en défense », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement, Hors-série 37, décembre 2022, mis en ligne le 05 décembre 2022, consulté le 28 mai 2024 [URL : http://journals.openedition.org/vertigo/38348].
[3] Le terme « universalisme » vise ici d’applicabilité des droits à tout être humain, indistinctement de ses origines, notamment sociales. Il se réfère à la conception libérale des droits de l’homme, qui entend lutter contre le corporatisme et les privilèges de l’Ancien régime. Elle traduit la volonté de libérer l'individu des déterminations sociales dans lesquelles il est enfermé par ce système, ce qui à la fois repose et débouche sur la construction d'un individu abstrait dans la philosophie des Lumières.
[4] Jean-Marc Stébé, Hervé Marchal, « Les chercheurs en sciences humaines et sociales et les communs : définitions protéiformes et controverses abondantes », Territoires contemporains, 2021, p. 8.
[5] Voir, à ce sujet, le prochain dossier thématique de la Revue Droit et Culture : Céline Jouin et Marie Rota (dir.), « Du social au commun : un changement de paradigme ? Regards croisés en droit, économie et philosophie », Droit et culture, n° 88 - 2024/22023, 2024 (sous presse).
[6] On songe ici à la proposition faite par la Commission Rodotà, en Italie, d’ajouter dans le code civil la notion de « bien commun » entendue comme « les choses qui sont nécessaires à l’exercice des droits fondamentaux et au libre développement des êtres humains » et qui doivent « également être protégés par le système juridique au profit des générations futures ». Voir, sur ce point, Daniela Mone, « Commission Rodotà (Italie) », in Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, PUF, 2e édition, 2021, p. 197.