Louis Vogel

Professeur
Droit privé et sciences criminelles.
Université Paris Panthéon-Assas

Institut de Droit Comparé
ActualitésPublicationsENCADREMENT DOCTORAL
  • Elise Lhéritier, Les objectifs du droit de la faillite en droit comparé : France, Etats-Unis, Angleterre, Espagne, thèse soutenue en 2014 à Paris 2, membres du jury : Philippe Delebecque, Philippe Didier, Antonio Gambaro et Georges Khairallah    

    Les objectifs du droit de la faillite sont divers. Ils évoluent dans le temps et dans l’espace. Vouloir éliminer le mauvais débiteur qui ne paie pas ses dettes et le punir, garantir le règlement des créanciers, tels sont les objectifs traditionnels. Assurer la survie de l'entreprise et prévenir les difficultés, tels sont les objectifs modernes. La diversité entraîne la hiérarchie des objectifs. L’étude comparative oppose les systèmes pro-débiteur et pro-créancier en fonction de la finalité prioritaire retenue. Elle montre que les objectifs des législations convergent vers le sauvetage des entreprises. Le droit fédéral des Etats-Unis, fondé sur la philosophie du nouveau départ, inspire les législateurs européens. L’analyse économique du droit, renouvelle la question des objectifs du droit de la faillite au regard de l’efficience, critère de légalité. Elle explique la convergence. La recherche de l’efficacité procédurale et substantielle guide l’orientation de la Commission européenne dans l’optique de promouvoir le marché unique. Ainsi, le consensus sur l’objectif de sauvegarde de l’entreprise rend possible l’harmonisation des règles substantielles au niveau européen. La révision du règlement (CE) n°1346/2000 relatif aux procédures d’insolvabilité confirme l’adhésion générale à l’idée de seconde chance. L’opposition entre systèmes pro-débiteur et pro-créancier s’estompe et laisse place à un système mixte. Chaque législation essaye de tendre vers la conciliation des intérêts contradictoires, ce qui entraîne le déplacement de la valeur du respect de la parole donnée, vers le concept plus difficile à cerner, mais qui fonde la force obligatoire des obligations: la confiance.

    Aurélien Portuese, Le principe d'efficience dans la jurisprudence européenne, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 en co-direction avec Bruno Deffains, membres du jury : Jean-Sylvestre Bergé (Rapp.), Anne-Lise Sibony (Rapp.), Régis Lanneau      

    L’analyse de la jurisprudence de l’Union Européenne a trop longtemps fait l’objet de la seule attention des juristes. Mais, si des analyses jurisprudentielles successives ont jusqu’à présent appréhendé les principes structurant de cette jurisprudence et se sont tentés à des conceptualisations, il sera avancé que ces entreprises n’ont été que partielles. En effet, le principe principal, quoiqu’implicite, de l’évolution de la jurisprudence de l’Union Européenne est le principe d’efficience économique. Cette carence, ne rendant l’effort de conceptualisation de la jurisprudence européenne qu’imparfait, est due à l’absence d’analyse économique méthodique et systémique du droit européen et, plus particulièrement, de la jurisprudence européenne. Cette thèse entend combler cette lacune. Au-delà d’entreprendre une analyse économique approfondie de la jurisprudence européenne permettant une conceptualisation renouvelée et précisée de la figure du juge européen, notre étude permettra de s’inscrire dans le débat de la supériorité alléguée des systèmes de Common Law en termes d’efficience économique. De plus, notre thèse, par une grille d’analyse originale renouvelant l’analyse du droit (européen), mettra en exergue les points de convergence et de divergence entre lignes de jurisprudence. La systématisation de notre analyse jurisprudentielle par la perspective du principe d’efficience économique nous permettra, ainsi, d’élaborer une 10 véritable hypothèse scientifique falsifiable et falsifiée. Nous formulerons une hypothèse de l’efficience économique de la jurisprudence européenne.

    Marielle Martin, Le droit français de la transparence et des pratiques restrictives, thèse soutenue en 2009 à Paris 2  

    Dans son Livre IV consacré à la "liberté des prix et de la concurrence", le Code de commerce français comprend un Titre IV fait de curieuses dispositions dont, en particulier, celles applicables entre professionnels fournisseurs et distributeurs. En effet, ces dispositions relatives à la "transparence" (conditions générales de vente, accord de commercialisation, facturation,. . . ) et aux "pratiques restrictives de concurrence" (revente à perte, prix minima imposés, pratiques abusives,. . . ) sont complexes, contradictoires, en perpétuel changement et, le plus souvent, sans équivalent dans le droit des autres pays. L'analyse juridique de ces dispositions et la démonstration de leurs effets économiques pervers conduisent à proposer leur suppression, d'autant que d'autres règles de droit s'avèrent plus efficaces : droit pénal général, droit des pratiques anti-concurrentielles, droit commun des contrats, droit de la responsabilité civile et, plus spécialement, la théorie de la concurrence déloyale.

    Géraldine Demme, Le droit des restrictions verticales , thèse soutenue en 2008 à Paris 2  

    Quel que soit le système juridique concerné, les restrictions verticales ont toujours bénéficié d’un régime particulier, un régime de faveur. Les raisons de ce traitement de faveur s’expliquent par l’analyse économique qui fait ressortir la contribution de ce type de restriction à l’efficacité économique. En effet, les restrictions verticales peuvent se révéler bénéfiques à la concurrence : la limitation de l’autonomie commerciale individuelle préserve le bon fonctionnement de l’unité économique que constitue le réseau de distribution dans son ensemble et, de façon exponentielle, favorise la concurrence inter-marques sur le marché. Envisagées sous cet angle, restriction juridique et efficacité économique ne sont pas antinomiques. L’analyse comparative menée parallèlement en droits communautaire, français, allemand et américain permet de distinguer les éléments propres du raisonnement économique et les spécificités des systèmes juridiques qui influent directement sur le régime des restrictions verticales. L’étude comparée explique ainsi pourquoi les mêmes enseignements économiques n’ont pas abouti à une appréciation juridique analogue des restrictions verticales dans les différents ordres juridiques. Elle constitue un cadre idéal pour évaluer la pertinence du maintien d’une telle différence d’appréciation ou la nécessité de faire évoluer le régime juridique applicable aux restrictions verticales.

    Anne Chareyre de Beaumont, Droit de la concurrence et globalisation, thèse soutenue en 2006 à Paris 2  

    La loi du marché, tenue pour le meilleur arbitre du fonctionnement de l'économie, n'est plus guère contestée. La politique de la concurrence, qui assure le bon fonctionnement de l'économie, a acquis un rôle majeur dans la plupart des pays développés et, de fil en aiguille, dans les pays émergents. La concurrence semble désormais servir de règle de conduite indispensable de la nouvelle économie-monde. Pourtant, un état des lieux précis des législations existantes montrera que les systèmes en vigueur interprètent chacun la concurrence de manière différente, l'affirmation de la concurrence pouvant cacher la défense des positions acquises dans l'ordre interne comme vis-à-vis de l'extérieur. La globalisation rend la réalité encore plus complexe. Les droits de la concurrence nationaux peuvent ainsi être utilisés à l'encontre de pratiques mises en œuvre à l'étranger, afin de protéger le marché interne. L'inclusion au sein de l'Organisation mondiale du commerce d'un groupe de travail en charge de la concurrence atteste que l'essor du commerce international implique nécessairement celui de la concurrence. Un bilan doit donc être dressé. Montrer comment la législation de la concurrence est interprétée dans la diversité des États de droit et comment, paradoxalement, la variété des systèmes, des objectifs et des intérêts peut faire éclater une contradiction implicite entre droit efficient du marché global et mondialisation de l'économie, justifiant l'adoption de règles du jeu de la concurrence multilatérales. Cette dernière est non seulement possible, mais elle est surtout nécessaire. L'analyse des travaux entrepris en ce sens jusqu'à présent démontrera enfin qu'elle est faisable.

    Isabelle Kerjouan, Concentration d'achat dans la grande distribution et droit de la concurrence, thèse soutenue en 1998 à Paris 2  

    La concentration d'achat constitue le phenomene marquant de la grande distribution contemporaine. Elle explique l'evolution des relations producteurs/distributeurs, qui s'est traduite dans les annees recentes par une veritable inversion du rapport des forces, au detriment des vendeurs. La reglementation economique francaise a non seulement ignore cette tendance de fond, mais a meme pendant longtemps conforte le desequilibre. Les rares cas d'application du droit de la transparence et des pratiques restrictives a des distributeurs attestent de l'immunite relative dont ont beneficie les abus de puissance d'achat (1ere partie). Les regles generales du droit de la concurrence relatives aux ententes et a la concentration se sont revelees globalement inefficaces pour retablir la situation (2eme partie). Ce n'est qu'au milieu des annees 80 (ordonnance du 1er decembre 1986) et surtout 90 (loi du 1er juillet 1996) que le legislateur decidera, en creant l'incrimination d'abus de dependance economique, de concevoir des regles specifiques, destinees a donner aux fournisseurs les moyens de se defendre face aux grands distributeurs (3eme partie). On peut s'interroger sur les raisons qui expliquent l'absence ou l'echec des tentatives de controle. La puissance d'achat constitue un phenomene que le droit de la concurrence ne cerne qu'avec difficulte : soit les regles repondent a des conditions strictes, fondees sur la situation du marche, et elles sont alors completement inadaptees pour apprecier l'exercice de leur puissance par les distributeurs a l'egard de certains offreurs determines (pratiques anticoncurrentielles ; controle des concentrations) ; soit les conditions posees, bien que plus souples, n'ont pas ete appliquees, par manque de volonte des autorites de controle qui ont longtemps erige la baisse des prix a la consommation en objectif majeur de la politique de la concurrence (pratiques restrictives ; transparence). Dans ces conditions, la reforme de 1996, qui consacre de nouvelles regles de dependance ne faisant plus reference au marche, semble traduire la volonte des pouvoirs publics de reequilibrer les relations producteurs/distributeurs en mettant fin aux abus de puissance d'achat impunis.

    Catherine Vincent, Comportement unilatéral et concours de volontés en droit de la concurrence, thèse soutenue en 1997 à Paris 2  

    L'entente anticoncurrentielle, reprimee par les articles 7 de l'ordonnance du 1er decembre 1986 et 85 du traite de rome, requiert, a titre d'element constitutif, un concours de volontes. Soucieuses de l'efficacite du controle dont elles ont la charge, les autorites competentes apprehendent, paradoxalement, des comportements unilateraux sous la qualification d'entente. Le phenomene se constate tant dans les relations horizontales que dans les relations verticales. Cette distinction s'impose car la restriction de concurrence, appreciee en fonction de cette differenciation, compense, dans l'operation de qualification, la faiblesse ou l'inexistence de la rencontre de volontes. Ainsi, le controle devient-il objectif et une simple adhesion permet-elle de conclure a la realite d'un concours de volontes. Des lors, des comportements purement unilateraux peuvent etre prohibes au titre du droit des ententes. Cette jurisprudence, protectrice de l'ordre public economique, est dangereuse pour la securite juridique des entreprises. Il convient d'admettre que des preuves contraires puissent renverser la presomption de concertation. En outre, d'autres qualifications paraissent plus adaptees pour la sanction de comportements unilateraux. Il en est ainsi, dans les rapports horizontaux, de l'abus de position dominante collective, interdit par les articles 8-1 de l'ordonnance et 86 du traite. Cependant, la notion necessite egalement un accord de volontes et ne permet pas de reprimer une action individuelle. Dans les relations verticales, l'incrimination d'entente est retenue lorsque l'un des partenaires commerciaux est en etat de dependance economique alors que cette situation est exclusive d'une rencontre de volontes autonomes. L'abus de dependance economique, prohibe par l'article 8-2 de l'ordonnance, permettrait pourtant de sanctionner ce comportement unilateral anticoncurrentiel.

  • Réka Papp, Le fonctionnement du Réseau européen de la concurrence : détermination et exercice de compétence par les autorités de concurrence, thèse soutenue en 2013 à Université de Lorraine sous la direction de Olivier Cachard présidée par Peter-Christian Müller-Graff, membres du jury : Wouter Wils (Rapp.)    

    L'adoption du règlement n° 1/2003 a décentralisé la mise en oeuvre des articles 101 et 102 TFUE et a entraîné la création du Réseau européen de la concurrence. Désormais, les autorités nationales et la Commission partagent la responsabilité de l'application des règles de concurrence de l'Union européenne au sein du Réseau. Le fonctionnement de celui-ci obéit à la logique de la méthode du conflit d'autorités. Ainsi, la question de la compétence des autorités pour traiter une affaire a une importance primordiale dans le contexte du Réseau. Elle détermine la loi applicable à l'inégralité de l'affaire et exerce une influence sur les effets extraterritoriaux des décisions. Les autorités de concurrence emploient une grande variété de méthodes de coopération et de coordination afin d'éviter des conflits de compétence et les solutions contradictoires au sein du Réseau. Malgré la coopération étroite des autorités, les divergences des règles de procédure sont susceptibles de miner l'efficacité de la mise en oeuvre des articles 101 et 102 TFUE ainsi qu'éroder la protection des droits fondamentaux.

  • Sarah Dormont, Le conflit entre le droit d'auteur et le droit de la concurrence, thèse soutenue en 2011 à Paris 11 sous la direction de Pierre Sirinelli présidée par Michel Vivant, membres du jury : Valérie-Laure Benabou (Rapp.), Catherine Prieto (Rapp.)  

    Les rapports entre le droit d’auteur et le droit de la concurrence sont conflictuels. Ce conflit s’observe aussi bien pour la gestion individuelle du droit que pour sa gestion collective. Et c’est le droit de la concurrence qui parvient à imposer sa logique, au détriment de la logique intellectualiste. Dans la gestion individuelle de l’auteur, la prohibition de l’abus de position dominante a pour effet d’imposer l’octroi d’une licence forcée sur l’œuvre de l’auteur au bénéfice d’un concurrent, ce qui constitue une atteinte au droit exclusif de l’auteur. Pour la gestion collective, la logique concurrentielle a pour conséquences de bouleverser les équilibres traditionnels de ce mode de gestion et notamment le principe de mutualisation entre les membres des sociétés. Outre ces atteintes au droit d’auteur, la logique concurrentielle n’est au final pas toujours elle-même préservée dès lors que l’atteinte au droit exclusif de l’auteur, dans la gestion individuelle comme dans la gestion collective, a pour conséquence, indirectement, de porter atteinte aux incitations à créer. Le conflit peut néanmoins être dépassé, via un raisonnement en termes de finalités des intérêts qui conduit à proposer un test de proportionnalité de ces derniers.

    Walid Abdelgawad, Arbitrage et droit de la concurrence , thèse soutenue en 1998 à Dijon sous la direction de Éric Loquin  

    Cette étude part du constat de l'existence de rapports antinomiques entre l'arbitrage et le droit de la concurrence, non seulement en raison de la confrontation entre la liberté contractuelle et l'ordre public économique, mais aussi plus largement, du fait du contexte global conflictuel entre ordre spontané et ordre organisé dans lequel s'insèrent ces rapports. Au-delà de ces antinomies cette thèse tente de démontrer que la rencontre entre l'arbitrage et le droit de la concurrence révèle un processus dialectique d'influences réciproques. La première partie est consacrée à l'examen des manifestations de l'évolution du droit de la concurrence provoquées par l'arbitrage. Le passage d'une conception moniste à une conception pluraliste de l'ordre public s'est traduit par l'affirmation de l'arbitrabilité. Ce phénomène prouve tant le renoncement de l'Etat au monopole de la sanction civile du droit de la concurrence qu'une tendance à la privatisation du droit de la concurrence. L'arbitrabilité connait néanmoins des obstacles lies à la résistance du noyau dur du droit de la concurrence. Dans la deuxième partie, l'accent est mis sur les transformations de l'arbitrage international par le droit de la concurrence. L’arbitrabilité admise, on constate en contrepartie, d'une part au stade de l'application du droit de la concurrence par l'arbitre, une tendance à la juridictionnalisation de l'arbitrage et au renouvellement de la méthode des lois de police, ce qui atteste du rapprochement entre justice arbitrale et justice étatique. D’autre part, au stade post- arbitral, le contrôle de la sentence arbitrale se trouve renforce à la fois par le juge étatique et par les autorités administratives spécialisées.