Le but de ce travail est d’étudier la transformation de la justice constitutionnelle italienne à la lumière de certaines nouveautés récemment introduites par la Cour constitutionnelle. Nous étudierons plus précisément les Norme integrative per i giudizi davanti alla Corte costituzionale, récemment exposées dans une délibération, formellement faite par la Présidente de la Cour mais fondamentalement collégiale puisqu’elle a été adoptée « Au vu de la proposition de la Commission pour les études et les réglementation » du 8 janvier 2020, publiée dans la Gazetta Ufficiale (G.U.) n°17 du 22 janvier 2020, qui contient parmi les changements les plus importants l’art. 4-ter, alinéa 1, qui introduit les amici curiae et l’art. 14-bis qui règlemente quant à lui l’audition des experts. Selon le communiqué de presse qui a annoncé la délibération, la Cour franchit ce pas afin de s’ouvrir le plus possible au dialogue avec la sphère sociale. Le texte commence par l’affirmation selon laquelle « dorénavant, la société civile aussi pourra faire entendre sa voix à propos des questions examinées devant la Cour constitutionnelle ».Afin de poursuivre notre étude, il semble nécessaire de (re)définir les concepts utilisés dans cette tentative de réforme, puisque dans les discours doctrinaux, ceux-ci présentent un éventail d'utilisations très variées et hétérogènes. Ajoutons que les juristes ont souvent l'habitude d'identifier leur signification sans tenir compte des théories et des thèses philosophiques que ceux-ci impliquent. Par exemple, pour expliquer leur ratio, l’on peut même aller jusqu’à parler de « participation » au processus, de « démocratisation » du contrôle de constitutionnalité ou d’« instrument de lutte politique par le biais du droit », sans jamais définir précisément sur quelle base culturelle de référence l’on s’appuie.En ce sens, notre enquête méta-doctrinale portera en particulier sur l'utilisation de deux concepts juridiques : l'amicus curiae et les experts, n'abordant ainsi qu'incidemment d'autres cas pertinents pour le raisonnement. Chaque moment de la discussion qui leur sera consacré s’articulera en deux parties : dans la première, un exposé de l'utilisation du concept dans le discours des juristes, et dans la seconde, les répercussions théoriques et philosophiques des résultats de notre analyse. Dans le cas de l'amicus curiae, cette solution est confirmée par la littérature qui identifie, dans le domaine des procédures judiciaires, le terrain privilégié pour oblitérer la frontière entre le militantisme politique et le droit. Ce thème, lu à travers le prisme de la dichotomie entre un point de vue interne et externe au monde juridique, nous a conduit à adopter une méthodologie utilisée pour éclairer de manière significative l'institution et le rôle de la Cour constitutionnelle. Les conclusions à tirer se fondent sur l'idée que l'amicus curiae sert à prévenir les dérives autoritaires dans la gouvernance du conflit social par la Cour, surtout à la lumière de l'utilisation de plus en plus évidente par le juge des lois de techniques non interprétatives du droit. Dans la troisième section consacrée aux experts, compte tenu de la même composante méthodologique, nous étudierons la description par les juristes de l'influence des différentes rationalités technico-scientifiques sur la théorie de l'argumentation. Nous arriverons à la conclusion différente que la Cour défend également sa position dans l'environnement social mais, contrairement à la situation résumée par l'amicus curiae, cela se fait non pas en ignorant volontairement ce pluralisme qui ne peut être apprivoisé par sa légitimation technique, mais plutôt en mimant les autres rationalités systémiques, par l'internalisation de leur point de vue dans son langage.