Lisa Poinsot, Contribution à l'étude de la contrainte du temps dans le contrat de travail, thèse soutenue en 2021 à Université de Lille 20182021 présidée par Bernard Bossu, membres du jury : Grégoire Loiseau (Rapp.), Pierre-Yves Verkindt (Rapp.), Isabelle Desbarats
La « Contribution à l’étude de la contrainte du temps dans le contrat de travail » propose de vérifier les effets de la représentation du temps par le Droit face aux difficultés qu’engendrent les évolutions impactant le travail salarié. Le Droit et le temps sont intrinsèquement liés : le Droit matérialise et objectivise le temps alors que ce dernier justifie notamment les innovations juridiques. Cette forte influence mutuelle du temps et du Droit amène à se questionner sur la pertinence de la représentation juridique du contrat de travail face à l’usage massif des algorithmes au sein du travail salarié. Pour répondre à cette problématique, cette étude entend démontrer la création d’une représentation juridique du contrat de travail du fait de la perception du temps par le Droit, ainsi que la transformation de la perception du travail salarié, en prenant appui sur l’intelligence artificielle et les plateformes numériques. Une réponse se profile dès lors : la représentation juridique du contrat de travail, résultat de l’action du Droit sur le temps, peut servir de socle de protection du travailleur face à l’importante utilisation de l’intelligence artificielle et des plateformes numériques. L’adaptation de la représentation juridique du contrat de travail permettrait de bénéficier des avantages de ces progrès technologiques tout en encadrant leur usage.
Cédric Mignard, Le crédit-bailleur mobilier face à la procédure collective du crédit-preneur, thèse soutenue en 2019 à Toulon en co-direction avec Anne-Marie Romani présidée par Lionel Andreu, membres du jury : Georges A. Cavalier (Rapp.), Laetitia Tranchant
Le contrat de crédit-bail est une technique de financement par laquelle le crédit-bailleur acquiert la propriété d’un bien en vue de le louer au crédit-preneur qui dispose d’une option d’achat au terme de la période irrévocable de location. Dans l’hypothèse où une procédure collective est ouverte à l’encontre du crédit-preneur, le crédit-bailleur se trouve nécessairement affecté. Le droit des entreprises en difficulté offre à l’organe compétent la possibilité d’exiger la continuation du contrat de crédit-bail, sans aucune autre contrepartie que l’exécution du contrat aux conditions initiales. Il est encore possible au tribunal d’imposer au crédit-bailleur la cession de son contrat lorsqu’un plan de cession est envisagé. Le crédit-bailleur devra par ailleurs veiller à la préservation de ses intérêts en procédant, comme tout créancier à la déclaration de ses créances nées antérieurement au jugement d’ouverture, alors qu’une seconde déclaration de créances pourra être nécessaire le cas échéant, lorsque le contrat est poursuivi au-delà du jugement d'ouverture. En sa qualité de propriétaire du bien objet de la convention de crédit, le crédit-bailleur dispose néanmoins d’une véritable possibilité d’être désintéressé d’une partie de ses créances. Il convient cependant que sa qualité de propriétaire soit opposable à la procédure collective. La propriété autant que le bail se trouvent, dans ce contexte, détournés de leurs rôles naturels. La propriété du crédit-bailleur n’a d’autre fin que la garantie de l’opération, ce qui conduit à établir un parallèle avec la clause de réserve de propriété et la fiducie-sûreté.
Elizaveta Volkova, Sànawuyaa et ráari : analyse comparative des relations à plaisanterie chez les Mandinka et les Joola de la Casamance, thèse soutenue en 2018 à Paris Sciences et Lettres ComUE présidée par Tal Tamari, membres du jury : Valentin Feodosʹevič Vydrin (Rapp.), Sten Hagberg (Rapp.)
Ce travail repose sur une analyse comparative de la pratique institutionnalisée des relations à plaisanterie dans deux populations de la Casamance (Sénégal) – les Mandinka et les Joola. Malgré leur proximité géographique, chacune de ces populations se distingue très fortement du point de vue de son organisation sociale et de ses pratiques rituelles et religieuses. Toutefois, les uns et les autres ont développé des modes particuliers de relations à plaisanterie, et ce, à plusieurs niveaux. Différents types de relations à plaisanterie ont été repérées et décrites : entre parents, clans, unités locales, groupes ethniques... Inégalement documentées dans la littérature existante, certaines sont communes aux deux sociétés, d'autres n'existent que dans une seule. À partir d'une ethnographie la plus fine possible de leur contexte et de leurs expressions, nous avons tenté de dégager les emprunts ou inter-influences entre ces différents modes, mais aussi de comprendre ce qu'ils révèlent dans chaque cas, de la manière dont sont pensées et aménagées les relations entre catégories sociales tout à la fois rivales et complémentaires. Nous avons mis l'accent sur le fait que, surgissant dans des « nœuds » de tension déterminés tout à la fois par l'organisation sociale et familiale et des éléments d’ordre symbolique et religieux, l'étude des relations à plaisanterie ne peut en être dissociée.
Icir Mimina Di Muro, Le pouvoir des femmes : étude du monde féminin Bassari à Ethiolo, thèse soutenue en 2017 à Paris Sciences et Lettres ComUE présidée par Charles-Édouard de Suremain, membres du jury : Michèle Coquet (Rapp.), Laurent Gabail et Stéphan Dugast
Le « pouvoir » des femmes (Étude du monde féminin Bassari à Ethiolo). Sous une apparence simple et réservée, le monde féminin bassari dissimule une grande complexité caractérisé par une façon d'être des femmes, tout à la fois mystérieuse et déterminée. Cette façon d'être constitue le pouvoir des femmes d'Ethiolo. Ce travail se propose d'étudier le monde féminin bassari à Ethiolo (un village situé à l'extrémité du Sénégal oriental à la frontière avec la Guinée Conakry). Un monde qui ne peut être compris si l'on n'observe pas conjointement le monde masculin bassari et l'imbrication entre ces deux univers. L'analyse du système d'âge, qui est à la base de l'organisation sociale de cette population, l'analyse de l'administration du pouvoir, qui se base sur la détention des secrets des masques (pour les hommes) et sur l'affinité particulière avec le monde des esprits (pour les femmes), l'analyse du rôle des femmes pendant l'initiation masculine sont les arguments principaux traités dans cette thèse. Les femmes bassari avec leur attachement aux traditions, leur conscience de la valeur de leur culture et, néanmoins leur capacité d'adaptation aux bouleversements inévitables du monde moderne contribuent à la préservation de l'avenir des Bassari.
Maud Marie Benoit, L'acte de rupture dans les relations individuelles de travail, thèse en cours depuis 2017
Sada-Mamadou Ba, Du signe au blason : description des robes et des marques distinctives du bétail chez les Peuls Fulaabe de l'est du Sénégal, thèse soutenue en 2016 à Paris EPHE présidée par André Bourgeot, membres du jury : Anne-Marie Brisebarre (Rapp.), Anne Fournier (Rapp.), Christiane Seydou et Olivier Kyburz
La capacité de reconnaître des différences, parfois extrêmement ténues, entre chacune des têtes de bétail qui compose son troupeau, implique pour le berger Peul un long apprentissage. D'un berger devenu "expert" dans l'art de savoir lire des différences qui échappent à d'autres bergers moins expérimentés, l'on peut dire qu'il a le ganndal, le savoir. L'aptitude à saisir de menues différences entre les unités du troupeau sur la base de plusieurs critères (couleurs et "marques" de la robe, formes et dimensions des cornes, etc..) relève d'un ganndal qui, certes est très valorisé mais qui ne suffit pas à faire de l'homme qui a une telle aptitude, un véritable "savant". En revanche, la capacité à découvrir sous l'ensemble des traits qui font de tel ou tel individu une entité singulière, des formes d’agencements de signes au travers desquelles peuvent se lire les marques d'un destin, vaut à ce découvreur une réputation d'une toute autre nature. L'homme qui jouit d'une telle réputation est considéré comme une sorte de visionnaire du monde invisible, un Siltigui, et se trouve tout à la fois craint et respecté. On dira de celui qui a atteint ce stade de ganndal qu’il sait le sifa. C'est le sifa comme mode spécifique de vision et de savoir qui constitue dans la culture peule l'idéal intellectuel et éthique. Cet idéal n'est pas à proprement parler un idéal individuel. Chaque famille, chaque segment de lignage, chaque groupe local, chaque tribu, cherche à se valoriser en se prévalant du patrimoine de richesse que détient son groupe en matière de ganndal. Ce patrimoine est jalousement gardé et l'on prend toutes sortes de mesures pour empêcher les groupes rivaux de se l'approprier.
Mathilde Laîné, Dans l' entre-deux du deuil , thèse soutenue en 2014 à Paris EPHE
L'importance et les singularités remarquables des rôles rituels confiés à l'imitatrice d'un défunt nawda (Nord-Togo) conduisent à réréexaminer les notions de deuil et d'ancestralisation par le prisme de ce personnage. Suivre les pas de l'imitatrice d'un défunt de sexe masculin - laquelle, en retour, sera par la suite imitée par une (autre) femme - permet d'entrevoir simultanément les destins croisés de l'homme et de la femme nawda, englobés dans une institution commune : celle de l'alliance matrimoniale. Dans ce temps et sur cette scène, jouée par l'imitatrice, de la «fabrication» de l'ancêtre (cet «entre-deuil» du deuil), s'opère un véritable vacillement des frontières et des identités (entre hommes et femmes, morts et vivants, alliés et parents), allant nde leur annulation à leur transgression. L'observation attentive des modalités de ces articulations, dont il est ici tenté de saisir la logique symbolique, amène à revisiter une série d'autres questions classiques en anthropologie : la distinction des sexes, la personne, le rituel et le théâtre, la symbolique du corps, de l'espace, et plus largement, du lien au territoire. Le manuscrit est accompagné d'un montage filmique
Maud Gauquelin, De la royauté sacrée à la pluralité religieuse des Moundang, du tchad au Nigéria, thèse soutenue en 2014 à Paris EPHE
Dans une perspective ethnologique, il s’agit de comprendre comment les Moundang du sud-ouest du Tchad, dont le dispositif rituel relève de la royauté sacrée, se convertissent aux Religions du Livre musulmanes et chrétiennes. De fait, deux territoires distincts sont mis en comparaison à travers la figure d’un migrant religieux, le Prophète Isaac. Du clan de la cour au sein de la constellation d’Eglises protestantes de la Sudan United Mission créée par le missionnaire allemand Karl Kumm, il chemine entre la commune de Léré au Tchad et Jos, « capitale » évangélique de la Middle Belt au Nigéria pour fonder sa propre Eglise « indigène » chez les siens. Du rejet des rites traditionnels des premiers protestants à l’inculturation catholique francophone puis à la « diabolisation » de la part des pentecôtistes, les différentes stratégies missionnaires européennes et américaines sont étudiées. Ce travail est ainsi construit suivant trois axes : en premier lieu, la pluralité religieuse en territoire tchadien montre la réappropriation des Moundang qui se convertissent tantôt dans l’ouverture aux horizons ecclésiastiques proposés par les missionnaires, tantôt dans le syncrétisme où l’espace et le temps sont réaménagés selon les rituels locaux. Le deuxième axe distingue certaines formes de résistance ou de permanence des cultes et pratiques moundang de la divination à la sorcellerie ainsi que la transformation des rituels royaux tels que les trois cérémonies agraires, et les funérailles. Enfin, dans une troisième partie, l’analyse de la recomposition ethnique du Mayo-Kebbi offre l’occasion de saisir pourquoi et comment la diaspora tchadienne se réfugie vers le Nigéria, le « Géant africain » en se modélisant sous la forme du communautarisme, de réseaux et/ou d’une forme de rhizome suivant les générations. Des premiers migrants de 1930 aux étudiants du XXIe siècle, des villages moundang recréés à Numan à l’Eglise tchadienne à Jos dans l’Etat du Plateau, nous tentons de montrer comment la violence symbolique rejetant les dogmes et pratiques de l’autre religion se transforme en affrontements meurtriers afin de conquérir les différents territoires, ainsi que les ressources économiques et politiques
Loïc Yboud, L'effectivité du droit à l'exécution, thèse en cours depuis 2012
Ioannis Kappopoulos, Un nouveau droit de la négociation collective : essai sur la négociation organisationnelle, thèse soutenue en 2010 à Lille 2, membres du jury : Michèle Bonnechère, Bernard Bossu, Alain Coeuret et Pierre-Yves Verkindt
La négociation collective est une pratique apparue, en France, à l’aube du XXe siècle. Elle compense au niveau collectif le déséquilibre entre employeur et salarié inhérent à tout contrat de travail individuel. L’essor de la pratique conventionnelle a conduit le législateur à élaborer un véritable droit de la négociation collective tendant à l’amélioration des conditions de vie et de travail des salariés.Depuis 1982, la négociation collective a également pour finalité l’amélioration de l’organisation de l’entreprise et des relations de travail. Les accords collectifs organisationnels défendent des intérêts plus généraux tels que l’intérêt de l’entreprise ou de la société et non plus uniquement l’intérêt catégoriel des salariés. Ils peuvent ainsi créer des obligations à la charge des salariés ou contenir des dispositions qui leurs sont moins favorables.Pour permettre aux accords organisationnels de développer pleinement leurs effets, le législateur a réformé les règles protectrices des salariés et autorisé les accords collectifs – notamment d’entreprise – à déroger, dans un sens moins favorable, à la loi ou à un accord supérieur.Cette étude a pour objet de démontrer qu’une autre voie était possible. En effet, la consécration des accords organisationnels pouvait se réaliser sans porter atteinte aux règles protectrices des salariés, traditionnellement inhérentes au droit du travail. Néanmoins, le caractère potentiellement dérogatoire ou « donnant-donnant » des accords organisationnels obligeait à réformer les règles relatives à leur légitimité.
Jean-Pierre Collos, Mami Wata, le miroir baroque , thèse soutenue en 2010 à Paris EPHE
« Mami Wata », entité connue sur une grande partie du continent africain, a fait l’objet de nombreux articles, de livres et de films qui donnent à voir une multiplicité de figures de la divinité. Notamment des historiens de l’art ont recherché, à partir des représentations de la Sirène, l’origine de ce culte ; ces auteurs qui pour beaucoup se sont inspirés mutuellement de leurs écrits réciproques, ont créé une « Mami Wata de littérature ». D’autres, principalement des anthropologues, ont tenté de comprendre le phénomène « Mami Wata » à partir de la question : « pourquoi les individus ont-ils recours à cette croyance » ? Plutôt que de construire un archétype ils se sont intéressés à la mise en présence de l’instance dans différents contextes. Dans cette perspective, cette thèse, écrite après une période d’enquête d’une décennie, dans le Sud-Bénin, analyse et discute la démarche idiosyncrasique d’un « vodunon » - Maître de « Mami Wata » - dans la construction rituelle qu’il propose. Les diverses manipulations qu’il fait subir aux rites ont pour objectif de permettre à l’entité de s’inscrire localement comme une inférence venant s’agréger à un schéma conceptuel préexistant. Une comparaison de cette démarche avec d’autres approches de pratiques rituelles liées à « Mami Wata » sur plusieurs territoires de la même région tente, notamment à partir des pratiques initiatiques et de la notion d’alliance matrimoniale comme représentation religieuse, de montrer comment l’action d’un « individu biographique » peut insuffler un mouvement qui, à terme, aboutit à une mutation des formes religieuses. « Mami Wata » - « instance de représentation » - apparaît comme un objet spéculaire, reflet d’une identité perdue, un miroir baroque permettant « de réinventer un accord entre l’individu et le monde ».