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jeudi23nov.2023
jeudi11avril2024
Prison et philanthropie (XVIII-XXIème siècle)
Sur place et en ligne

Conférence et cycle

Prison et philanthropie (XVIII-XXIème siècle)


Présentation

Dans l'histoire des prisons, la philanthropie est ce mouvement qui a saisi des réformateurs, à diverses périodes, de la forte volonté d'améliorer, voire de transformer le régime de punition et de détention. Il est indissociable de l'avènement des prisons en tant que peine, qui s'impose en Occident de la fin du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle. Dès lors que la privation de liberté remplace les châtiments qui avaient cours dans les anciens systèmes pénaux, la fonction même de la peine est repensée. La priorité d'expiation, d'intimidation ou de neutralisation qui prévalait depuis des siècles est mise en retrait, bousculée par l'espoir de régénérer le délinquant. L'enfermement, pense-t-on alors, offre l'opportunité de transformer le détenu en lui inculquant des valeurs morales et sociales, et de le restituer à la société. En France, cette idée est mise en avant sous la Révolution, lors de l'élaboration du premier code pénal de 1791. Les innovations proposées sont nombreuses : pas de peine perpétuelle qui ôterait tout espoir aux condamnés, rôle essentiel du travail conçu non comme un tourment, mais comme un moyen de donner aux détenus le goût du labeur et la régularité des habitudes, respect de la loi qui assure l'égalité de tous, exclusion des châtiments corporels. L'architecture, l'organisation des lieux de détention étaient également intégrés à la réflexion, comme un moyen d'aménager la peine et de parvenir au but poursuivi.

En France, aux XIXe et XXe siècles, on peut relever deux autres moments forts marqués par cette volonté d'œuvrer en faveur des détenus et des établissements de détention : La Seconde Restauration, avec la création en 1819 de la société royale pour l'amélioration des prisons composée d'hommes fortunés et influents, très actifs pour cette cause. Plus d'un siècle après, à l'issue de la seconde guerre mondiale, Paul Amor et Pierre Cannat, à l'origine de la réforme pénitentiaire, sont également animés de la volonté de faire prévaloir la réinsertion. A l'échelle internationale, la succession ininterrompue de congrès pénaux et pénitentiaires internationaux, dès le milieu du XIXe siècle, témoigne de l'intérêt de la communauté internationale pour la question pénitentiaire. La consultation des discours d'ouverture, des thèmes abordés et des débats permet de les inscrire dans la mouvance des idées philanthropes, à quelques exceptions près comme le congrès de Berlin 1930. Elle a également mû des initiatives à l'égard des jeunes délinquants, telle la volonté de favoriser leur réhabilitation par le travail et l'éducation religieuse qui a guidé Frédéric-Auguste Demetz lorsqu'il a créé la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray en 1839.

A travers le temps, la philanthropie a donné matière à une multitude d'initiatives tant au niveau de l'architecture pénitentiaire, que de la mise en place d'institutions, de règlements ou de directives. L'amélioration du sort des détenus, leur prise en charge après la peine, aux XIXe et XXe siècles, est entre les mains de bonnes âmes. Certes, on ne peut nier, aujourd'hui encore, l'existence d'organisations privées dévouées à leur cause, mais force est de constater, depuis la seconde moitié du XXe siècle, une reprise en main hégémonique par les organisations étatiques et supra nationales, qui ont investi tous les champs d'action.

Dans le même temps, le droit, la jurisprudence, les codes ont pris le pas sur les actions privées et demeurent, semble-t-il, les instruments les plus efficaces pour garantir ou améliorer les conditions de détention. Les droits de l'homme et les lois pénitentiaires (du 24 novembre 2009 ou du 15 août 2014 par exemple) ont-ils remplacé utilement, avec efficacité la philanthropie ? Il est évident que les deux ne se situent pas sur le même plan, mais ils sont mus par un état d'esprit convergent.

Le thème de la philanthropie, de son passé et de son actualité mérite d'être questionné et débattu en privilégiant une approche pluridisciplinaire. L'organisation d'un cycle de conférences est projetée à l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire du mois de septembre 2023 jusqu'au mois de mars 2024.

 

Programme

 

23 novembre 2023

Conférence inaugurale

17h30 : La philanthropie pénale au cœur de la réforme des prisons
Martine Kaluszynski Directrice de recherche CNRS

18h30 : Indépassable prison. Une défaite des philanthropes ?
Jean-Pierre Allinne Professeur émérite d'histoire du droit à l'Université de Pau

19h30 : Fin

 

11 Janvier 2024

 

17h30 : L'architecture : un enjeu de connaissance et d'action pour les réseaux philanthropiques réformateurs en Europe (fin XVIIIe siècle - 1830)
Elsa Besson, Architecte, Docteur en histoire de l'architecture, MCFA Ecole Nationale d'Architecture de Marseille, Membre associé du laboratoire INAMA

Après le temps des philanthropes, l'administration pénitentiaire sous la monarchie de Juillet
Nicolas Leblanc, Docteur en histoire du droit

19h00 : Fin

 

31 Janvier 2024

 

17h30 : 1959 : le « livre pénitentiaire » du Code de procédure pénale
Jean-Lucien Sanchez, Chargé d'études en histoire au bureau de la donnée, de la recherche et de l'évaluation de la direction de l'administration pénitentiaire

2009-2022 : droit pénitentiaire : de l'ombre à la lumière
François Février, Chef du département Droit et Service public, Ecole nationale d'administration pénitentiaire

19h00 : Fin

 

12 Mars 2024

 

17h30 : Dignité en prison : que peuvent les juges ?
Véronique Champeil-Desplats, Professeure de droit public à l'Université de Paris Nanterre

Les récits de détention dans le langage de la Cour européenne des droits de l'homme
Eric Paillissé, Docteur en droit public, Ecole nationale d'administration pénitentiaire

19h00 : Fin

 

18 Mars 2024

 

Table Ronde - Les institutions de contrôle des lieux de privation de liberté. De nouveaux acteurs de la philanthropie ? (Défenseur des droits et Contrôleur général des lieux de privation de liberté)

Modérateur : Denis Salas, Magistrat, secrétaire général de l'Association française pour l'histoire de la justice

17h30 : Contextualisation historique de l'inspection et du contrôle des prisons
Laurence Soula, ISCJ, Université de Bordeaux

Marie Lieberherr, Magistrate, Directrice du pôle "Protection des droits et Affaires judiciaires" représentante de la Défenseure des droits

André Ferragne, Secrétaire général du Contrôleur général des lieux de privation de liberté

19h30 : Fin des débats

 

11 Avril 2024

 

17h30 : Réinventer la justice : vers une nouvelle approche de la sanction pénale (Les conditions de la philanthropie en matière pénale)
Tony Ferry, Docteur en philosophie, Chercheur au laboratoire Gerphau, Chargé d'enseignements à l'UCL, Conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation

19h00 : Fin

 

 

Entrée gratuite

Réservation obligatoire auprès de : magalie.cazanobes@justice.fr

-pour suivre en présentiel (pièce d'identité obligatoire le jour de la conférence)
-pour suivre en distanciel (avec Teams, réception du lien de connexion le jour de la conférence)


Conférences organisées par l'Institut d'études judiciaires et de la justice de l'Université de Bordeaux, l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire et l'Association française pour l'Histoire de la justice dans le cadre du cycle de conférences "Prison et philanthropie" sous la direction scientifique de Fabienne Huard-Hardy, Chargée de mission Histoire et Patrimoine, CRHCP, ENAP - Laurence Soula, MCF en histoire du droit, ISCJ/Université de Bordeaux.



Ecole nationale d'administration pénitentiaire
Amphithéâtre Fallières
440 Avenue Michel Serres
47900 Agen

Université de Bordeaux
Institut de Sciences Criminelles et de la Justice
Association Française pour l’Histoire de la Justice
Ecole nationale d'administration pénitentiaire