Les droits de la nature. Protéger le système-Terre dans et par la Constitution

Appel à communication

Les droits de la nature. Protéger le système-Terre dans et par la Constitution

Université d’automne de l’Institut Louis Favoreu-GERJC, Aix-en-Provence, 19-21 octobre 2022

Date limite le lundi 20 juin 2022

 

Sous la responsabilité scientifique de Laurence Gay, Chargée de recherches au CNRS, Directrice-adjointe de l'ILF-GERJC, et Olivier Le Bot, Professeur, AMU

 

Dans une Constitution adoptée en 2008, l'Equateur était le premier pays au monde à proclamer des droits en faveur de la nature, également désignée comme Pacha Mama. Le texte consacre plus précisément le droit de cette dernière au respect intégral de son existence, à l'entretien, à la régénération de ses cycles vitaux, de sa structure, de ses fonctions et de ses processus évolutifs, ainsi que son droit à la restauration. Les reconnaissances du même type se sont depuis multipliées, par le biais de textes de loi (Bolivie, Nouvelle-Zélande), par voie prétorienne (Colombie, Inde, Bangladesh) ou par le biais de simples chartes ou résolutions (Québec, Charte des droits du lac Erie adoptée par une ville des Etats-Unis). Certes, à l'échelle planétaire, le corpus de droit positif reconnaissant des droits à la nature ou à certaines de ses composantes est encore limité. Cependant, l'idée rencontre une résonance mondiale de plus en plus forte et favorable. N'existe-t-il pas en France-même un projet de consécration des droits de la Loire ? La portée de cette évolution juridique reste largement incertaine, risquant d'osciller entre deux extrêmes : l'idée d'une solution miracle à la crise écologique d'un côté, la crainte d'une simple mode aux effets concrets limités de l'autre.

L'Université d'automne 2022 de l'Institut Louis Favoreu proposera un état des connaissances sur ce nouveau paradigme des droits de la nature. Elle laissera une large place à la réflexion, en particulier grâce aux interventions de chercheurs issus de disciplines diverses, auxquels s'adresse donc cet appel à contributions : juristes, politistes, anthropologues, philosophes, historiens…. Les projets de contribution devront porter un regard original sur le phénomène. Les thématiques suivantes pourront en particulier être abordées, sans qu'il s'agisse d'une liste fermée.

 

Quelles sont les racines intellectuelles des droits de la nature ?

Il est fréquemment allégué que l'idée de droits de la nature découlerait de cosmologies de peuples autochtones, qui recevraient ainsi l'aval du système juridique. Quelle sont les parts de vérité et de reconstruction dans cette vision des choses ? Comment certaines croyances autochtones ont-elles rencontré les préoccupations écologiques, aboutissant à inscrire dans le droit positif les droits de la nature ? Les droits de la nature servent-ils nécessairement les droits des peuples autochtones ou existent-ils des cas de conflit ? Comment le discours sur les droits de la nature réussit- il à s'implanter dans les pays sans minorités indigènes censées porter de telles cosmologies ? La justification des droits de la nature s'appuie-t-elle sur un registre de type jusnaturaliste (intérêts inhérents à la nature devant conduire à acter ses droits) ou technico-pragmatique (recours à la fiction juridique pour mieux protéger l'environnement) ?

 

Quelles sont les modalités de formalisation des droits de la nature et quelle est leur portée ?

Répondre à ces questions impliquera une analyse précise des expériences de droit positif existantes sur les droits de la nature (analyse d'une expérience donnée ou analyse comparative de plusieurs d'entre elles), afin de répondre en particulier aux interrogations suivantes.

Quel est le fondement formel des droits de la nature (texte et valeur du texte, précédé ou non d'un accord, adopté ou non par voie référendaire ; jurisprudence) ? Quels sont les droits reconnus et parmi eux, lesquels sont communs avec les droits de l'être humain et lesquels s'en distinguent ? Le sont-ils de manière générique à la nature en tant que telle et/ou à certains de ses éléments en particulier et lesquels (écosystèmes ; espèces animales et végétales ; zones protégées ; objets naturels tels que forêts, fleuves et glaciers…) ? Cette reconnaissance va-t-elle nécessairement de pair avec la reconnaissance de la personnalité juridique ? Est-il prévu des mécanismes de mise en œuvre spécifiques ? Quelles sont les modalités de représentation de la nature et/ou de ses éléments ? Le système de représentation privilégie-t-il l'actio popularis (comme en Equateur) ou un représentant/tuteur/gardien en particulier (comme en Nouvelle-Zélande) ? Quelles ont été les applications jurisprudentielles des droits de la nature et avec quelle portée ? Les décisions en faveur de la nature ont-elles été effectivement exécutées ?

 

Les conséquences de la reconnaissance des droits de la nature.

On pourra ici s'interroger sur les conséquences de la reconnaissance des droits de la nature sur le système de protection des droits et son équilibre, comme sur l'impact de cette reconnaissance sur les catégories conceptuelles du constitutionnalisme.

Par exemple, dans quelle mesure les droits de la nature sont-ils susceptibles de faire évoluer l'arbitrage du conflit entre les libertés économiques et la protection de l'environnement ? Doivent-ils amener à repenser l'office du juge, par exemple en le dotant d'outils de suivi de ses propres décisions quand de tels outils n'existent pas déjà ? Les droits de la nature peuvent-ils favoriser la reconnaissance de droits à d'autres sujets non humains et lesquels ? Quelle est la pertinence du concept de droits bioculturels ? Comment repenser les notions-mêmes de sujet de droit, personnalité juridique, titulaire et bénéficiaire de droits fondamentaux, représentants ? Les droits de la nature peuvent-ils donner naissance à un constitutionnalisme écocentrique ou biocentrique et comment définir ces notions ?

 

Les chercheurs et enseignants-chercheurs souhaitant participer à l'université d'automne adresseront un projet de 4 000 caractères maximum.

Le document mentionnera le nom du candidat, sa qualité et son institution d'appartenance, ses courriel et numéro de téléphone.

Les projets seront envoyés le 20 juin 2022 au plus tard au conseil scientifique à l'adresse : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.




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