Présentation
La peine, définie au sens large de « mal infligé à titre de sanction d'un acte que la loi défend » (Cass. belge, 14 janvier 2004), fait l'objet d'une littérature abondante, relevant de disciplines diverses. L'objectif de ce colloque est de dépasser les entreprises de définition et de justification pour réinterroger la pluralité de(s) sens de la peine : qu'on se concentre sur ceux qui condamnent ou sur les condamnés, « quel sens y a-t-il à punir/à être puni ? » ne semble synonyme ni d'« est-il utile et/ou efficace de punir ? » ni de « « comment justifier la peine ? ».
Trois axes structurent ce travail collectif, chacun entendant le « sens » de façon particulière et ouvrant des questions que les contributeurs ont resserré autour de problématiques plus précises (voy. programme). On distinguera ainsi, ici, le sens comme sens social et/ou civique (1), comme vécu physique, moral, psychologique et sensoriel (2) et comme direction (3).
Le premier axe porte sur l'articulation entre l'idée même de peine (qu'elle soit imposée ou vécue) avec le contrat social, dans son ensemble, et la citoyenneté, à titre individuel ou conceptuel : la peine constitue-elle une forme particulière du sens commun, nécessaire au lien social ? L'Etat de droit engendre-t-il un discours pénal particulier, au-delà des exigences procédurales du « procès équitable » ? Quel rôle la peine joue-t-elle à l'égard de notre statut de « sujets de droit » ? Y aurait-il, comme on parle d'un sens de la famille ou des responsabilités, un sens civique de et à la peine ?
Le deuxième axe est centré sur le vécu physique, moral, psychologique et sensoriel de la peine : cette dernière est prévue par la loi, infligée par un juge, mais également vécue -par le condamné au premier chef ainsi que, plus indirectement, par les victimes, leurs proches et ceux des accusés, le public voire les autorités.
Physiquement et psychologiquement, les sens sont mobilisés par la peine - de l'émotion (collective ?) à la souffrance (individuelle ?), de la jouissance du pouvoir à la castration. Y a-t-il un sens à souffrir ? Pourrait-on penser une peine non pénible ?
Le troisième et dernier axe vise l'orientation de la peine, ce qu'elle vise ou ce vers quoi elle nous conduit. Au-delà d'une interrogation sur ce que peuvent viser celui qui subit la peine et ceux qui l'imposent (où les conduit-elle ?), avons-nous des raisons d'estimer que les récentes mesures pénales vont dans le bon sens, comme on dit d'une mesure qu'elle va dans le sens (ou à contre-courant) de l'histoire ?
De ces trois axes découlent d'autres interrogations, que les contributeurs se sont parfois engagés à mettre au travail : les questions du « pour qui » faire sens et, peut-être plus accessoirement, du « comment » faire sens, viennent en effet étayer le questionnement esquissé dans les trois axes susmentionnés.
Programme
Jeudi 16 Novembre 2017
(Auditoire 300 en matinée, puis local P61)
Présidence : Christine Guillain
9h30 : Accueil
10h00 : Introduction générale - Questions de sens
Diane Bernard et Kevin Ladd
10h50 : Infliger/subir une peine : une analyse grammaticale
Kevin Ladd
11h10 : Châtiment ou sanctification ? Punir l'hérésie en France (1520-1560)
David El Kenz
11h30 : Face au radicalisme, faut-il avoir une confiance radicale dans la peine ?
Paul Dhaeyer
11h50 : Débat
Pause déjeuner
14h00 : Les peines, entre préservation du lien social et attention au vécu des condamnés et victimes. Une approche par entretiens collectifs
Virginie Gautron et Cécile Vigour
14h20 : Punir en situation (le sens particulier des sanctions fondées sur un contrôle en milieu ouvert)
Marie-Sophie Devresse
14h40 : Débat
Pause
15h20 : Les sens du terme réinsertion en droit pénitentiaire belge
Olivia Nederlandt et Thibaut Slingeneyer
15h40 : Eprouver le sens de la peine : les probationnaires face à l'éclectisme
Olivier Razac
16h00 : Débat
Vendredi 17 Novembre 2017
(Local P61)
10h00 : Un temps pour juger, un temps pour laisser souffrir, un temps pour sortir ?
Aude Leroy Couderc
10h20 : Les représentations sur la peine des enfants de la rue incarcérés à la prison centrale de Bukavu
Charles Kakule Kinombe
10h40 : Création collective dans l'enfermement : le jeu sensible des comédiens incarcérés
Chloé Branders
11h00 : Débat
Pause
11h45 : Sens et non-sens de la peine infligée à l'entourage des personnes détenues
Sandra Lehalle
12h05 : Les « autres » victimes : les parents du condamné et le caractère collectif de la peine
Frédéric Mégret
12h25 : Débat
Pause déjeuner
14h00 : D'une peine rétributrice à une peine correctrice : la positivisation du discours pénal en contexte musulman
Baudouin Dupret
14h20 : Le rôle de la peine dans l'idéal réconciliateur de la justice transitionnelle
Célia Carette
14h40 : Débat
Pause
15h20 : Le (bon) sens pénal
Diane Bernard
15h40 : Pérégrinations sur le sens-tiers de la peine
Jérôme Ferrand
16h00 : Débat et conclusions
Contact : Mme Diane Bernard +32 (0)2 211 79 62
Organisé par l'Université Saint-Louis de Bruxelles avec le soutien du FNRS, du RIS, du GREPEC, du SIEJ et de la Mission de Recherche Droit & Justice sous la direction de D. Bernard et K. Ladd