La kafala, mesure de protection et de prise en charge d’enfants de filiation connue ou inconnue dans les pays musulmans qui interdisent l’adoption en raison d’un impératif religieux, a confronté le droit français à de sérieux défis tant d’un point de vue conceptuel que technique. Essentiellement pratiquée dans les pays du Maghreb, elle a été introduite en France dans le cadre du regroupement familial, d’abord, et dans celui de l’adoption internationale, ensuite. Mais, si le droit international privé français a depuis longtemps appris à gérer l’accueil d’institutions et de lois étrangères dans l’ordre interne, la kafala, a remis en lumière bon nombre de problématiques liées aux méthodes et objectifs poursuivis par la discipline. Précisément, elle a reposé avec acuité les interrogations en rapport avec la place des droits fondamentaux dans le conflit de lois, d’une part, et la politique de tolérance dans la réception d’institutions ou l’application de normes à fort référent religieux, d’autre part. Et c’est ce cadre qui a servi a délimiter les contours du travail mené sur la question. Ainsi, l’approche comparatiste a été privilégiée pour la partie consacrée à la compréhension et à l’étude du dispositif de la kafala dans deux pays témoins : l’Algérie et le Maroc, d’où proviennent la plupart des enfants recueillis. Après des éclairages historico-juridiques destinés à saisir les origines de cette institution et la conception de la famille qui prévaut dans les deux sociétés considérées, la démarche s’est poursuivie par l’inscription de l’objet d’étude dans le contexte qui l’a fait naître et fait évoluer avant de procéder à sa comparaison avec les institutions françaises proches. A cet effet, plusieurs matières ressources et leurs travaux respectifs ont été mobilisés. Le second volet du travail a porté sur la question pratique de la réception de la kafala par les juridictions françaises depuis les années 1990 qui a révélé des incohérences, des lacunes et des positionnements discutables. En particulier, la prise en compte de l’intérêt de l’enfant recueilli, lequel est souvent abandonné et de parents inconnus, prescrite par la Convention internationale des droits de l’enfant, a fait l’objet d’une évaluation insuffisante. Et, depuis la loi du 06 février 2001, la kafala ne pouvant valoir adoption, son effectivité actuellement en France demeure non seulement limitée mais aussi porteuse d’insécurité et de difficultés pour les parties concernées, nécessitant, par conséquent, une réforme urgente.