Clara Amsallem, L'imputabilité des infractions à la personne morale, thèse en cours depuis 2022 en co-direction avec Didier Rebut
La question de l’imputabilité des infractions à la personne morale semblait réglée. La personne morale est responsable des infractions commises pour son compte par son organe ou ses représentants. Toutefois, les décisions jurisprudentielles récentes semblent augurer une évolution. Le domaine de l’imputabilité des infractions paraît s’étendre peu à peu. Aussi, la jurisprudence s’est-elle affranchie du respect des principes du droit pénal, au nom d’impératifs pratiques et économiques ? Une évolution législative est-elle nécessaire, pour permettre de répondre à une réalité pratique et criminologique ? A l’aune de ces développements et pour répondre à ces interrogations, il était nécessaire de revenir sur ce mécanisme d’imputabilité afin de le questionner.
Victor Vaillaud, La gouvernance des grandes sociétés et la responsabilité sociétale des entreprises, thèse en cours depuis 2022
L’intérêt de l’actionnaire occupe une place particulière dans la société commerciale et la finalité de celle-ci est centrée sur le profit. La primauté actionnariale est notamment garantie par la représentation, qui place l’administrateur en situation de conflit entre son intérêt personnel et l’intérêt dont il a la charge. Les dispositifs de la responsabilité sociétale des entreprises intègrent cependant de façon croissante d’autres considérations dans la vie sociale, particulièrement dans les sociétés cotées. Une partie de la doctrine en vient à parler de « changement de paradigme », quand l’autre pointe du doigt l’inefficacité des régimes qui le soutiennent. Cette évolution et ses limites imposent-t-elles de créer de nouveaux rapports de représentation, ou d’adopter de nouveaux outils, de nouvelles méthodes de délibération ? Cela permettrait-il de prévenir et gérer les nouveaux conflits susceptibles de naître entre l’intérêt social et les autres enjeux que le conseil d’administration est tenu de prendre en considération ? Intérêts et enjeux doivent-ils être traités de la même manière ou sont-ils de nature substantiellement différente ? Ces questions seront examinées à l’aune de récents développements, la bataille boursière entre Scor et Covéa, l’accentuation du phénomène d’activisme actionnarial, qui soulignent en outre les limites de l’approche française de la gestion des conflits d’intérêts par le droit souple et la prévention.
Laetitia Ballout, L'adaptation du droit des sociétés aux établissements bancaires et financiers, thèse en cours depuis 2022
Le domaine financier occupe une place particulièrement importante dans l’économie mondiale. Le droit régissant tant l’activité que ses acteurs est donc de première importance. Ces acteurs économiques sont d’abord des entités juridiques régies par le droit commun. Mais ce droit doit être adapté ponctuellement afin de prévenir certains risques de marché. Il est possible de citer à titre d’exemple la difficile adaptation des règles de gouvernance de droit commun à la gestion d’un établissement bancaire qui se caractérise par différents principes notamment par la règle des « quatre yeux » qui exige la présence de deux dirigeants effectifs ou encore par les exigences de diversité au sein des organes d’administration. Le travail a pour objet d’identifier et d’analyser les aménagements apportés au droit des sociétés dans la réglementation bancaire et financière. Il s’agit de déterminer si ces aménagements doivent relever du domaine de l’exception, ou s’il conviendrait de constituer un corps de règles propre à ces établissements de sorte qu’il devienne le droit commun les régissant et s’interprétant à ce titre, une sorte de droit spécial des sociétés
Monica Rodriguez, Les dérivés financiers au lendemain de la crise financière de 2008, thèse soutenue en 2021 à Paris 2, membres du jury : Alban Caillemer du Ferrage, Pauline Pailler, Arnaud Reygrobellet et Anne-Claire Rouaud
La crise financière de 2008 a profondément bouleversé le marché des dérivés financiers. En effet, si avant la crise ces instruments étaient peu régulés, ils font à présent l’objet d’une régulation précise et détaillée, conçue pour prévenir le risque systémique. Ainsi, les dérivés ont été régulés principalement par le règlement EMIR en Europe et par la loi « Dodd-Frank » aux États-Unis. Ces dispositifs ont mis en place un régime contraignant pour les dérivés financiers ; un régime dans lequel la liberté contractuelle des parties est notablement restreinte. En particulier, le régime des dérivés financiers oblige à la compensation de ces contrats, ce qui implique l’intervention d’une chambre de compensation. Pour les dérivés non compensés le régime contient l’obligation d’échanger des marges initiales et de variation. Le déploiement d’un tel régime contraignant a poussé les autorités à perfectionner les méthodes permettant d’identifier les dérivés financiers. En effet, l’efficacité du régime est conditionnée par la qualification correcte des contrats en tant que dérivés financiers et cela même si les législateurs des États-Unis et d’Europe se sont refusés à identifier formellement les dérivés financiers à travers une notion abstraite. Le règlement EMIR et la loi « Dodd-Frank » - et les règlementations associées - prévoient néanmoins des règles détaillées pour permettre aux parties et aux autorités de marché l’identification correcte des dérivés financiers. Les autorités sont par ailleurs investies des pouvoirs permettant de procéder à la qualification des contrats lorsque les parties ont eu des doutes sur celle-ci ou lorsqu’elles ont cherché à contourner le régime en évitant la qualification du contrat en tant que dérivé financier.
Clément Comis, The Integration of International Financial Regulation and Supervision , thèse en cours depuis 2020
Lynn Talouzian, Régulation des FinTech dans les secteurs bancaire et financier, thèse en cours depuis 2020
Le sujet portera sur le développement rapide des FinTechs et de l'environnement favorable qui leur permet de proposer des offres bancaires et financières innovantes et diversifiées ainsi que sur les risques qui accompagnent cette évolution en s'arrêtant surtout sur les risques liés à la cybercriminalité et à l'argent occulte. Enfin, le sujet s'attardera particulièrement sur la réglementation des FinTechs en comparant le droit européen au droit libanais. Si le développement de services numérisés proposés par les FinTechs répond aux besoins des consommateurs et des entreprises et permettent de réaliser des gains de productivité, il recèle également des risques. Du fait des risques que les FinTechs peuvent représenter, la mise en place d'un dispositif réglementaire adéquat est nécessaire afin de protéger les agents économiques qui réalisent des transactions via les FinTechs, assurer autant que possible une égalité de traitement avec les acteurs déjà existants, et favoriser l'innovation en accompagnant les FinTechs face à la réglementation. Depuis quelques années le débat en Europe est de savoir quelle est la meilleure approche pour le régulateur par rapport aux FinTechs. En effet, deux approches européennes distinctes existent : le système de sandbox et le système du Soundbox. Quant au Liban, si les banques semblent enclines à jouer le jeu de la révolution numérique, le cadre juridique et réglementaire libanais actuel laisse peu de marge de man'uvre aux FinTechs.
Matthieu LE BIVIC, L'intégrité des marchés financiers, thèse en cours depuis 2020
Les manifestations de la notion d?intégrité des marchés financiers se multiplient au sein de la réglementation financière. Elle y est parfois présentée comme un objectif à atteindre, d?autres fois comme un principe à respecter sous peine de s?exposer à une sanction, ou d?autres fois encore comme une justification à l?intervention de tel ou tel acteur du marché. Une question fondamentale apparaît alors : que signifie, en droit, l?intégrité des marchés financiers ? Malgré les nombreuses occurrences de ce terme dans les textes, ni le législateur français ni le législateur européen n?ont pris le soin d?en donner une quelconque définition. La thèse envisagée a donc pour ambition d?apporter des éclaircissements sur les contours et le contenu de la notion d?intégrité des marchés. Il paraît également nécessaire de passer en revue chacun des grands principes du droit financier auxquels l?intégrité des marchés semble se rattacher (liquidité, transparence, bon fonctionnement du marché, efficacité du marché, etc.) afin d?en proposer une articulation logique. Plus largement, à travers la compréhension du rôle de ces grands principes du droit financier, il s?agit de mener une analyse critique de la norme financière elle-même en cherchant à en déterminer la qualité et à en apprécier la légitimité. La question de l'instrumentalisation de la norme financière devra en particulier être traitée. A cet égard, il s'agit de savoir si, aujourd'hui, cette norme ne tend pas plus à maximiser le fonctionnement du marché qu'à en encadrer certains des effets.
Sabrina Ouaddani, Les modèles de supervision financière en droit français et américain, thèse en cours depuis 2019
Aux Etats-Unis, l’architecture de supervision de l’industrie financière est sur le plan institutionnel particulièrement complexe et fragmenté. Les normes de régulation sont mises en œuvre par les agences fédérales, mais aussi par les régulateurs des Etats fédérés. Depuis la crise, elles se sont notablement renforcées par la mise en œuvre des principaux standards internationaux et l’adoption du Dodd-Frank Act. Le Dodd-Frank Act promulgué le 21 juillet 2010, est présenté comme la plus vaste réforme financière depuis le Glass Steagall Act (1993). Cette loi a vocation à promouvoir la stabilité financière du pays, à limiter l’aléa moral inhérent au caractère too big to fail de certaines institutions financières et à protéger les contribuables et les consommateurs de produits financiers. Le cadre de la régulation financière américaine est dual, c’est-à-dire que les institutions financières doivent appliquer des normes fédérales ainsi que des règles définies au niveau des Etats fédérés dans lesquelles elles opèrent. Alors, la dispersion des compétences et les difficultés de coordination entre régulateurs pourraient être, source de dysfonctionnements avec des organes dont les prérogatives se croisent souvent et des possibilités de vide juridique.Ainsi, un organe de coordination des différents régulateurs a été introduit par le Dodd-Frank Act. Le Financial Stability Oversight Council (FSOC) déclaré compétent pour arbitrer les conflits entre régulateurs, est chargé de la supervision des risques sur la stabilité financière et de désigner les institutions financières à l’importance systémique mais n’est doté d’aucun pouvoir coercitif réel. Il est composé de quinze membres, dont le Secretary of the Treasury, le Chairman de la Fed, les directeurs des régulateurs fédéraux (SEC, CFTC, OCC, FDIC, CFPB, FHFA, NCUA), et un expert en assurance. Le Comité européen de supervision du risque systémique (ESRB, créé en décembre 2010), placé sous l’égide de la Banque centrale européenne et épaulé par trois autorités (EBA, ESMA, EIOPA), est le pendant européen du FSOC.En France, la supervision du système bancaire et financier est organisée sur le modèle de deux autorités distinctes couvrant l’ensemble des activités à superviser (l’ACPR pour les banques et les compagnies d’assurance, et l’AMF s’agissant de la surveillance des marchés financiers). Ces deux entités sont indépendantes du pouvoir politique, et sont sous la supervision d’une autorité supranationale (l’EBA et l’EIOPA pour l’ACPR, l’ESMA à propos de l’AMF). Récemment, l’AMF et l’ACPR ont exprimé la nécessité d’une convergence renforcée de la supervision dans l’Union. Elles ont soutenu une réforme ambitieuse des autorités européennes de supervision, dont l’ESMA, permettant une supervision plus homogène et plus efficace. Les innovations constantes sur les marchés nécessitent de s’interroger sur le champ de compétence et de contrôle des modèles de supervision financière français et américain.
Théodore Sapoval, Le fonds actionnaire, thèse en cours depuis 2019
A la faveur de la financiarisation de l'économie, les fonds d'investissement deviennent une figure habituelle de l'actionnariat. La régulation financière leur fait l'obligation d'agir dans le seul intérêt de l'organisme de placement collectif et de ses porteurs de parts ou actionnaires. Cet arbitrage délaisse la relation entre le fonds et la société dans laquelle il investit. De plus, il existe une différence importante de moyens et de pouvoirs entre le fonds et les autres figures de l'actionnariat. Ces constats conduisent à s'interroger sur le statut du fonds ainsi que sur sa relation avec la société et les autres membres de l'ordre sociétaire. Le fonds est-il un actionnaire comme les autres ? Faut-il un régime particulier du fonds actionnaire ?
Julien Nivot, L' impact du développement des crypto-actifs sur le droit financier, thèse en cours depuis 2018
L'émergence de cette nouvelle classe d'actifs et de ses technologies sous-jacentes (technologies DLT, IOTA, Lightning etc.) s'inscrit dans le prolongement de plusieurs phénomènes : (1) La démutualisation des bourses (2) L'internationalisation des places financières;(3) Les évolutions technologiques (systèmes ESES et UTP, THF, robotadvisors etc.). Or, le cadre juridique existant est dans une large mesure inadapté à ce nouvel environnement qui, à ce jour, est largement composé de jeunes entreprises et ne dispose pas des infrastructures ni des garanties appropriées pour protéger de manière adéquate les investisseurs. Par ailleurs, cet environnement reste encore très peu régulé et conduit à de nombreuses formes de fraudes aussi bien au niveau du marché primaire (émetteurs de crypto-actifs) que secondaire (plateformes, tenue de compte-conservation etc.). Face à ce constat, la mise en place d'un régime ad hoc et/ou une révision des textes UE (MiFID/MiFIR, EMIR, MAR, CRD IV, AIFM, UCITS etc.) semble être envisagée par les régulateurs financiers européens. Ainsi, ce travail d'étude et d'analyse comparées des différentes juridictions, se propose de répondre à la question de savoir si le système financier se dirige vers un nouveau modèle désintermédié/décentralisé ou si ces nouvelles technologies ne sont qu' une révolution organisationnelle.
Joséphine Hage Chahine, Les contrats de transfert de risque : essai d'une nouvelle catégorie, thèse soutenue en 2016 à Paris 2, membres du jury : Jean-Jacques Daigre, Antoine Gaudemet, Yves-Marie Laithier et Pierre-Grégoire Marly
Le législateur français a formellement prévu des contrats de transfert de risque de crédit sans pour autant en donner une définition. Partant de ce visa exprès, il est possible d’identifier substantiellement des contrats de transfert de risque, de les distinguer de contrats voisins et de les systématiser malgré leur diversité, en une catégorie autonome. Ayant posé la définition d’un contrat de transfert de risque et analysé ses éléments constitutifs, un régime juridique commun ressort clairement, pour régir aussi bien la formation que les effets d’un tel contrat. L’existence d’une notion de contrat de transfert de risque, qui va de pair avec un régime particulier ouvrira la voie aux praticiens à la conclusion de contrats innommés de transfert de risque, répondant à un besoin grandissant : celui de couverture des conséquences dommageables issues de la réalisation d’un évènement incertain
Nasser Wahbi, L'autorité de régulation des marchés financiers : étude comparative France - Moyen-Orient, thèse soutenue en 2015 à Paris 2, membres du jury : Jean-Jacques Daigre, Camille Broyelle, Régis Vabres et Amal Abdallah
L’existence d’un « régulateur financier » ayant pour mission d’encadrer les marchés financiers est un phénomène répandu qui confronte les systèmes juridiques à une question délicate : celle de l’intégration de ce régulateur dans le paysage institutionnel classique. C’est cette question qui est au coeur de la recherche menée en droit comparé, en France et au Moyen-Orient. D’origine anglo-saxonne, la formule frappe par son originalité fonctionnelle et structurelle. L'appréciation du phénomène passe d'abord par l’étude de la spécificité de la fonction de régulation. Comment appréhender le fait que le régulateur financier cumule des compétences normatives, contentieuses et administratives ? Ne dessaisit -il pas le législateur, le juge et l’exécutif d'une partie de leur activité? L’analyse révèle que la raison d'être du régulateur financier est de fonctionner en complémentarité avec les pouvoirs de l’État. Ne constituant pas un quatrième pouvoir, le régulateur financier diffuse l’art de la régulation résultant de son statut de gendarme de la Bourse et de magistère moral. L’approche fonctionnelle est complétée par une analyse du statut du régulateur financier. Quel positionnement occupe-t-il, alors qu'il combine des éléments privés et publics ? L’étude montre que le régulateur financier résiste aux distinctions classiques. Dépassant les frontières public/privé, il est à mi-chemin entre l'Etat et le marché. Il se nourrit des valeurs du privé par l’association des professionnels dans la régulation, le recours à des mécanismes contractuels pour régler les différends et la soumission au contrôle du juge judiciaire. Mais il maintient en même temps un statut public spécifique en vue d’assurer son indépendance. Il en résulte l'émergence d'un nouveau mode d’action de troisième voie ayant pour objet la mise en oeuvre d'une nouvelle fonction de l'Etat qui est la régulation dont l'avènement nécessite la conception d'une formule institutionnelle inédite.
Patrick Barban, Les entreprises de marché : contribution à l'étude d'un modèle d'infrastructure de marché, thèse soutenue en 2014 à Paris 2, membres du jury : Camille Broyelle, Thierry Granier, Anne-Valérie Le Fur et Philippe Neau-Leduc
L’entreprise de marché est une société commerciale qui dispose de prérogatives dérogatoires au droit commun, qui lui sont confiées par la loi afin d’organiser et d’exploiter un ou plusieurs marchés d’instruments financiers. Ces prérogatives, de nature normative et décisionnelle, sont exerçables à la fois contre ses cocontractants et les tiers. Ce modèle de l’entreprise de marché déroute en raison de ses limites. Outre la question des conflits d’intérêts qu’une régulation par l’AMF parvient à contenir, c’est bien la question de la qualification juridique de ses prérogatives qui reste sans réponse. La sortie de l’ambiguïté ne peut se réaliser que par l’exacte compréhension de la portée de la notion d’intérêt du marché. Cet intérêt collectif qui structure le modèle légal d’entreprise de marché peut être qualifié de deux manières. Il sera intérêt commun aux cocontractants dans un modèle de droit privé pur, fondé sur des prérogatives manifestant l’exercice d’un pouvoir privé. Ces dernières permettront à l’entreprise de marché de prendre des décisions privées et un règlement de droit privé opposables à la seule collectivité de ses cocontractants. À l’inverse, reconnaître que l’intérêt du marché est une composante de l’intérêt général permet la construction d’un modèle de droit public. Les prérogatives de puissance publique que l’entreprise de marché recevra dans un tel modèle pourront être exercées en vue de l’édiction d’actes réglementaires administratifs opposables à la fois à ses cocontractants et aux tiers.
Jérôme Chacornac, Essai sur les fonctions de l'information en droit des instruments financiers, thèse soutenue en 2012 à Paris 2, membres du jury : Jean-Jacques Daigre, Bertrand Fages, Agathe Lepage et Alain Pietrancosta
L’information constitue l’élément ou l’enjeu de nombreuses règles juridiques en droit financier. Ces règles imposent des obligations d’information aux émetteurs, aux intermédiaires financiers et aux investisseurs. Elles sanctionnent en outre les abus de marché en ce qu’ils constituent des atteintes aux qualités de l’information, et encadrent l’élaboration des opinions émises par les analystes financiers et les agences de notation. Dans un ensemble aussi hétérogène de règles, l’information reçoit diverses qualifications juridiques. La cohérence en la matière provient de la nécessité d’informer l’ensemble des acteurs du risque inhérent aux instruments financiers. L’information peut être étudiée à partir de ses fonctions intellectuelles, comme savoir communicable permettant de connaître le risque attaché aux instruments financiers. Alors que certaines données permettent de décrire le risque d’investissement, d’autres en servent l’appréciation dans la durée en vue de la réalisation de prédictions. Le droit positif évolue ainsi en s’appuyant sur ces deux fonctions intellectuelles de l’information : sa fonction descriptive et sa fonction prédictive. Cette analyse permet de renforcer l’intelligibilité d’un dispositif en évolution constante, qui suppose l’articulation du droit des sociétés, du droit des contrats et du droit répressif. Le droit des instruments financiers peut ainsi faire l’objet d’une analyse ordonnée à partir de l’information comme exigence permettant la prise d’un risque d’investissement.
Wassim Abou Nader, L'obligation de mise en garde du banquier dispensateur de crédit, thèse soutenue en 2009 à Paris 2
Inspirée par le droit financier, la jurisprudence bancaire a réussi à imposer l’obligation de mise en garde, autonome et singulière, au sein de l’activité de distribution de crédit. Une telle obligation s’articule avec les différents devoirs du banquier. Elle préserve le devoir de non-ingérence sans se confondre avec de celui de vigilance. Longtemps occultée par l’information et le conseil, la mise en garde, par son contenu et ses sources, s’en distingue nettement. La mise en garde, qui suppose un risque et se traduit par un avertissement, se situe au-delà de l’information, neutre et abstraite. Toutefois, le banquier en mettant en garde son client, se limite à attirer son attention, sans s’ingérer dans ses affaires en le poussant à prendre une décision opportune, ce que suppose le conseil. D’emploi récent dans le secteur de la distribution du crédit, l’obligation de mise en garde induit des nouvelles pratiques professionnelles. Le banquier, faisant l’objet d’une demande de crédit, doit segmenter sa clientèle en averti ou non averti, pour évaluer par la suite l’intensité du risque d’endettement issu de cette demande. Il est tenu de mettre en garde son emprunteur non averti, dès lors que le crédit demandé s’avère être risqué. Le banquier qui exécute son obligation doit répondre à deux diligences successives : s’informer pour pouvoir avertir. Il interroge son client et collecte des informations relatives à sa capacité financière, pour attirer son attention d’une façon pertinente et utile. S’il ne le met pas en garde, il sera reconnu comme responsable. La réparation de sa faute varie selon l’intensité du risque qu’il a fait encourir à son client.
Stéphane Blemus, Blockchain et droit de la tokenisation : étude des règles relatives à l'inscription, la conservation et l'échange d'actifs dans un registre distribué, thèse soutenue en 2022 à Paris 1 sous la direction de Alain Pietrancosta, membres du jury : Dominique Legeais (Rapp.), Florence G'Sell (Rapp.), Anne-Claire Rouaud
Le développement de nouveaux modèles économiques fondés sur le numérique, les échanges de pair-à-pair et l’open source sont en train de bouleverser profondément l’activité des intermédiaires financiers régulés. Cette étude s’attache à décrire les principaux projets réglementaires et consultations de place discutés, proposés et/ou adoptés relatifs aux registres distribués aux États-Unis, dans l’Union européenne, en France et en Suisse. En quelques années à peine, la technologie des registres distribués est devenue un sujet majeur des décideurs publics à l’échelle internationale. Étant interpellés par l’émergence de cette technologie disruptive et décentralisée par entrepreneurs, start-ups et acteurs de marché, les législateurs, les autorités de régulation comme les banques centrales ont dû modifier leur position sur le sujet, notamment aux États-Unis et au sein de l’UE, depuis une position initialement hostile à un intérêt au pire conservateur et au mieux market-friendly. La présente thèse couvre et compare les textes applicables et les tendances réglementaires à l’œuvre sur les différentes problématiques soulevées en droit financier par les registres distribués, que ce soit la qualification juridique des registres distribués et des smart contracts, la problématique monétaire, et la réglementation de l’émission, de la conservation et du transfert des actifs numériques et instruments financiers au moyen de registres distribués. Trois principaux champs sont distingués et analysés séparément : (I) la reconnaissance légale de la technologie des registres distribués et des smart contracts ; (II) la régulation des monnaies virtuelles (notion entendue au sens large) et des actifs numériques ; et (III) la régulation des instruments financiers émis sur un registre distribué.
Émilie Dussau, Le droit fiscal des entreprises à l'épreuve de la diversification des instruments financiers : étude en matière d'impôts directs, thèse soutenue en 2020 à Paris 1 sous la direction de Daniel Gutmann, membres du jury : Alexandre Maitrot de La Motte (Rapp.), Florence Deboissy (Rapp.), Claire Acard
L'objectif de notre recherche était de déterminer si face à la diversification des instruments financiers, le législateur fiscal avait su trouver le juste équilibre entre accompagnement de l'innovation financière et mitigation du risque qu'elle soit source d'évitement de l'impôt. Le droit fiscal présente des biais structurels en matière d'imposition des revenus du capital ou de l'emprunt, auxquels certains d'entre eux - hybrides financiers, «depositary receipts», produits structurés et contrats financiers portant sur des actifs financiers, des intérêts ou des dividendes - nous ont semblé lancer d'importants défis. Une fois leur nature juridique et leurs nombreuses particularités clairement définies, le manque de cohérence, de pertinence et de clarté des mesures de droit fiscal interne qui leurs sont applicables nous a amenés à conclure qu'un certain nombre de réformes devraient ou pourraient être envisagées pour atteindre l'équilibre recherché. Dans un contexte international, trouver le juste équilibre pour s'assurer qu'ils ne soient pas malicieusement utilisés nécessite une action coordonnée des différents États concernés. L'étude des mesures identifiées à l'échelle supranationale afin de neutraliser l'hybridité fiscale de certains hybrides financiers, fruit du frottement des souverainetés, nous a permis de conclure que la lutte est loin d'être achevée compte tenu de leur manque de proportionnalité. Celle contre l'évitement de la retenue à la source sur dividendes par le truchement de contrats financiers mériterait quant à elle d'être engagée, en s'inspirant sans en reproduire les écueils les plus importants de la solution adoptée par le législateur américain.
Anne Rivière, La régulation des gestionnaires de hedge funds en droit européen et américain : Enjeux et perspectives. Une étude comparée des régimes juridiques issus de la directive AIFM et du Dodd Franck Act, thèse soutenue en 2017 à Tours sous la direction de Bénédicte François, membres du jury : Isabelle Riassetto (Rapp.), Filippo Annunziata (Rapp.), Hadi Slim
Plusieurs trillions de dollars d’actifs sous gestion : tel est le poids de l’industrie des hedge funds dans le système financier. Acteurs indispensables des marchés, les hedge funds sont pourtant des créatures méconnues. Réservés aux investisseurs professionnels ou qualifiés, ils ont longtemps tiré partie d’exemptions et échappé à une trop forte contrainte réglementaire. La crise financière de 2008 a bouleversé ce schéma et fait apparaître, en Europe et aux États-Unis, une même volonté d’encadrer davantage ces structures, par le biais de leurs gestionnaires. Aussi cette étude propose-t-elle une analyse comparée des dispositions introduites en la matière par la directive AIFM et par le Dodd Frank Act. Après un nécessaire éclairage sur cette industrie de l’ombre, elle examine les apports des deux textes, les confronte avant d’en dégager forces et faiblesses. Le traumatisme de la crise a fait émerger un double impératif : mieux protéger les investisseurs et prévenir le risque systémique. C’est à la lumière de ces deux objectifs que la seconde partie s’attarde sur le bien-fondé des réformes, leur portée réelle ainsi que leurs limites. Cette vue d’ensemble de la régulation applicable aux gestionnaires de hedge funds est également prétexte à une réflexion plus large sur la régulation financière, ses finalités, ses contours et ses défis. Nous concluons sur une feuille de route pour un acte II de la directive AIFM et formulons plusieurs propositions, en particulier l’interdiction totale de commercialisation auprès d’investisseurs de détail et la création d’une base de données mondiale du risque systémique.
Houda Alhoussari, La SAS : Essai sur la notion du modèle en droit des sociétés, thèse soutenue en 2019 à Rennes 1 sous la direction de Catherine Barreau, membres du jury : Jean-Christophe Pagnucco (Rapp.), Estelle Scholastique, Nicolas Thomassin et Bruno Dondero
La notion de « modèle » n’a jamais été définie en droit français des sociétés. Le législateur n’utilise pas cette notion, la jurisprudence non plus. Les travaux doctrinaux permettent toutefois de considérer que le terme de « modèle » suppose la réunion de deux critères cumulatifs : l’existence d’une référence et l’imitation de cette référence. De ce point de vue, les traits du « modèle » sont bien présents en droit des sociétés. L’objet de cette étude consiste à s’interroger sur l’applicabilité de la notion de modèle à la société par action simplifiée (SAS). À première vue, le régime juridique de la SAS conduit à en douter. En effet, lors de l’élaboration du régime juridique de la SAS, le législateur a utilisé la technique de la législation par référence qui consiste à se référer explicitement au régime juridique de la SA. Ce dernier a ainsi constitué un modèle pour la SAS. Le rattachement de ces deux régimes pose actuellement un certain nombre de difficultés pour la vie de la SAS qui était initialement conçue comme une société distincte des autres formes sociétaires du fait de sa souplesse. En d’autres termes, alors que la SAS renferme des atouts incontestables liés à sa flexibilité et pourrait, de ce fait, être une référence pour l’élaboration d’autres formes sociétaires, le rattachement de son régime juridique à celui de la SA constitue à l’heure actuelle un obstacle à l’affirmation de la SAS comme modèle. Afin de résoudre cette difficulté, une approche plus créative du régime de la SAS permet de proposer une solution : détacher législativement le régime de la SAS de celui de la SA. L’autonomisation du régime juridique de la SAS constitue alors la condition essentielle qui permettra à la SAS de s’affirmer comme modèle, au sein du système juridique français comme au-delà des frontières nationales.
Suzie Bradburn, Les systèmes d'échanges locaux, thèse soutenue en 2015 à Bordeaux sous la direction de Florence Deboissy, membres du jury : Rémy Libchaber (Rapp.), Guillaume Wicker
Nés en France en 1994 dans les milieux ruraux en réponse à une conjoncture difficile, les systèmesd’échanges locaux s’inscrivent dans une logique en marge du modèle économique dominant, en permettant àleurs membres d’échanger des biens, des services et des savoir-faire au moyen d’une monnaie conventionnellebasée sur le temps, concurrente, mais licite, de la monnaie légale.La crainte de voir des personnes trouver dans le SEL le moyen de dissimuler une activité économiquerémunératrice est écartée dès lors que l’on distingue les sélistes-particuliers qui participent aux échanges demanière occasionnelle, de sorte qu’ils n’en tirent qu’un complément de revenu modeste, et les sélistesprofessionnelsexerçant une activité économique permanente et rémunératrice dans les conditions analogues àcelles d’un professionnel. Ces derniers doivent être soumis aux mêmes règlementations que celles applicablesaux professionnels, sous peine de sanctions.Le recours à une structure juridique permet d’organiser les échanges en leur apportant les moyens nécessaires àleur développement, spécialement par l’édition d’un catalogue des offres et des demandes et la mise en placed’un compte courant multilatéral. Même si la forme sociale est envisageable, l’association est la structure lamieux adaptée pour répondre aux besoins en organisation juridique des SEL. Elle correspond tant à leur but nonlucratif qu’à leur philosophie fondée sur des valeurs humaines et la solidarité.
Abdelkarim Osman, La fusion des sociétés commerciales en droit français et syrien (étude comparative), thèse soutenue en 2015 à Rennes 1 sous la direction de Catherine Barreau, membres du jury : Hawash Shahin (Rapp.), Alexis Constantin et Afif Daher
La fusion peut être définie comme une technique permettant l’absorption, et donc la disparition, d’une ou plusieurs sociétés au profit d’une société existante ou d’une société nouvelle. La fusion peut résulter soit de la fusion-absorption soit de la fusion par création d’une société nouvelle. Dans les deux cas, les sociétés absorbées transmettent leur patrimoine à la société absorbante. En France, le régime juridique qui gouverne la fusion des sociétés a subi plusieurs modifications dont les dernières le décret du 25 mars 2007 et la loi du 3 juillet 2008. Les articles L. 236-1 à L. 236-24 et R. 236-1 à R. 236-12 du Code de commerce définissent le régime juridique applicable aux fusions des sociétés. De même, l'article 1844-4 du Code civil pose la règle générale des fusions des sociétés. En revanche, la Syrie a connu récemment ce type de concentration. La loi n° 29 du 14 février 2011 a mis en œuvre un nouveau Code de sociétés régissant les opérations de fusion. Les articles 218 à 222 du Code des sociétés ont institué un régime spécifique réservé aux opérations de fusion. L’insuffisance de dispositions juridiques applicables à la fusion a donné lieu au recours au droit français pour combler les carences législatives du droit syrien. Cette étude met en évidence une comparaison entre le droit français et le droit syrien d’une manière qui permet de proposer à ce dernier des solutions en prenant en compte l’évolution du premier en matière de fusion.
Géraldine Darmon Kestenberg, La refonte de l'abus de marché en droit financier européen, thèse soutenue en 2014 à Paris 1 sous la direction de Alain Pietrancosta, membres du jury : Pauline Pailler (Rapp.)
À la suite de scandales financiers notoires, et au vu de l’évolution des marchés financiers et des nouvelles technologies, l’Union européenne vient renforcer le cadre législatif européen des abus de marché, au nom de l’intégrité des marchés. Loin de constituer un simple regroupement d’infractions boursières, le concept d’abus de marché pourrait être analysé comme une véritable notion juridique. Dès lors, l’essai d’une définition générique de l’abus de marché permettrait d’en clarifier le domaine et d’en guider sa mise en œuvre. L’étude du sens de la notion d’abus de marché permettrait d’éviter les révisions successives de la norme nationale et européenne afin de conférer à l’abus de marché des règles propices à l’intégrité et à l’efficience du marché. Une fois la notion d’abus de marché définie avec précision, sa lutte préventive ou répressive ne pourra être que renforcée. Pour autant, la nouvelle coexistence de la répression administrative et de la répression criminelle de l’abus de marché en droit financier européen conduit à s’interroger sur l’application du principe non bis in idem en la matière. Afin de rendre effective cette refonte, il est ainsi primordial que le droit de la responsabilité civile vienne soutenir le droit de la répression de l’abus de marché. Finalement, pour maintenir la place financière européenne comme une place concurrentielle, il est essentiel que la refonte de l’abus de marché ne se fasse pas de manière déséquilibrée en faveur de l’impératif d’intégrité et au détriment de l’efficience du marché. On ne doit pas omettre que le droit des abus de marché est un droit économique au service de l’efficience du marché.
Hugo Nadjar, Les principes du droit des offres publiques d'acquisition, thèse soutenue en 2023 à Université ParisPanthéonAssas sous la direction de Stéphane Torck, membres du jury : Olympe Dexant-de Bailliencourt (Rapp.), Alain Pietrancosta (Rapp.), Hervé Le Nabasque
Opérations financières controversées, les offres publiques semblent a priori régies par des règles dénuées de cohérence, introduites au gré des batailles boursières et des tendances politiques. Pourtant, aucune matière ne se réduit à de la pure technique. Toute réglementation exige, pour dépasser le stade d’amas réglementaire, d’être régie par des principes qui la dotent d’une logique interne. La présente étude révèle que deux catégories de principes encadrent le droit des offres publiques d’acquisition. La première est celle des principes directeurs, qui améliorent la compréhension du droit positif et dévoilent ce que pourrait être la réglementation de demain si les tendances actuelles venaient à se prolonger. Dénués d’effet direct au contentieux, les principes directeurs permettent aux autorités de marché de réaliser une interprétation téléologique des règles qu’elles mobilisent. La seconde catégorie est celle des principes généraux du droit. Aptes à saisir l’inattendu, les principes généraux comblent les lacunes de la loi et tempèrent la rigueur des expressions écrites délibérément figées. Ils encadrent les conduites lors du déroulement des offres et assurent ainsi la complétude du système juridique. L’examen des décisions rendues montre que derrière l’abstraction de leur énoncé, les principes produisent des conséquences inédites qu’il est possible de systématiser. Si certaines incohérences entourent encore le jeu des principes, l’étude propose plusieurs solutions pour résoudre ou dépasser chacune des difficultés rencontrées.
Augustin Gridel, Marchés et instruments financiers en droit international privé, thèse soutenue en 2021 à Paris 2 sous la direction de Louis d' Avout, membres du jury : Sylvain Bollée, Dominique Bureau, Matthias Lehmann et Anne-Catherine Muller
L'internationalisation des marchés financiers et le développement sans précédent de la législation qui les régit rendent paradoxalement difficile l'exposé critique de leur traitement en droit international privé. Le rattachement des marchés financiers à l'ordre juridique est doublement original : tout d'abord, il présente deux facettes, législative et administrative; ensuite, il concerne à la fois les gestionnaires de ces marchés, et les infrastructures qui les sous-tendent. Ces données constituent la source du déploiement de la loi du marché financier, laquelle ne possède pas le même fondement selon qu'elle s'applique aux émetteurs ou aux investisseurs. Dans le premier cas, la loi du marché financier a pour finalité la protection des investisseurs et agit unilatéralement comme loi du lieu de sollicitation ; elle est susceptible de s'autolimiter, dans certaines hypothèses, lorsque la loi de l'émetteur offre une protection équivalente. Lorsqu'elle s'applique aux investisseurs, la loi du marché financier a alors pour objectif le bon fonctionnement de la plate-forme de négociation; les règles qui y concourent peuvent être inscrites dans une règle bilatérale de conflit de lois, la lex mercatus. Ces observations se poursuivent sur le terrain du statut des instruments financiers que les marchés permettent d'échanger. Le statut patrimonial des titres admis à la négociation gagnerait ainsi à être soumis à une loi unique, tant le rattachement plural dont ils font le plus souvent l'objet est une impasse. Le statut international des contrats financiers obéit quant à lui aux tensions propres à l'ordre civil, entre liberté contractuelle et ordre public.
Thiphaine Saupin, Les sources du droit des sociétés, thèse soutenue en 2021 à Paris 2 sous la direction de Hervé Synvet, membres du jury : Olympe Dexant-de Bailliencourt, Julien Granotier et Hervé Le Nabasque
Les sources du droit des sociétés renvoient tant aux émetteurs du droit, c’est-à-dire aux entités créant des règles de droit, qu’aux instruments normatifs utilisés par ces émetteurs. Étudier les sources du droit des sociétés permet ainsi d’analyser comment l’activité normative des émetteurs du droit façonne la matière et comment la diversification des instruments normatifs menace son unité. Les émetteurs du droit des sociétés regroupent des émetteurs classiques, l’État et l’Union européenne, et des émetteurs nouveaux, comme les autorités de régulation (H3C et AMF), les associations représentatives des entreprises ou encore la Compagnie nationale des commissaires aux comptes. Sous l’influence des émetteurs classiques, le droit des sociétés apparaît instrumentalisé et mis en concurrence. Au-delà de la question de leur légitimité, l’intervention parcellaire des émetteurs nouveaux souligne les grandes divisions qui traversent la matière. La répartition entre sociétés cotées et non cotées est ainsi confortée et une nouvelle opposition entre sociétés exploitant une grande entreprise et autres sociétés apparaît. Le pluralisme des sources du droit des sociétés est aussi illustré par la diversité des instruments normatifs utilisés par les émetteurs du droit des sociétés. Aux côtés de la loi, des règlements, des directives et règlements européens, l’émergence de nouveaux instruments normatifs menace l’unité de la matière. Des conflits de règles mais également de systèmes naissent de l’articulation de tous ces instruments normatifs. L’unité du droit des sociétés ne pourra être retrouvée que par une meilleure appréhension des nouveaux instruments normatifs par l’ordre juridique.
Hélène Gourdy, La couverture sur les marchés financiers, thèse soutenue en 2019 à Paris 2 sous la direction de Alain Ghozi, membres du jury : Maxime Julienne, Dominique Legeais et Anne-Claire Rouaud
Depuis la crise de 2008, les acteurs des marchés cherchent à accroître l’efficacité de leur protection contre les risques spécifiques nés des opérations financières auxquels ils s’exposent quotidiennement. Parallèlement, le législateur doit assurer l'objectif de stabilité financière. La couverture, instrument singulier, fruit de l’imagination des praticiens, s’inscrit depuis quelques années au confluent de ces deux finalités distinctes. Cette double utilisation opacifie cette notion et soulève de nombreuses interrogations.Initialement conçue comme un simple dépôt de garantie complété par des versements de marge en fonction de l’évolution de la valeur des opérations en cours, la couverture a depuis lors fortement évolué. Ses usages se sont multipliés, et ses contours sont devenus incertains, au point d’apparaître comme une notion éclatée. Répondant à diverses appellations, tantôt obligatoire, tantôt facultative, utilisée sur les marchés réglementés comme de gré à gré, la couverture prend désormais des formes si variées que l’on peine à en saisir l’essence. Le recours accru à cet instrument et l’ampleur des enjeux financiers imposent pourtant d’en clarifier le régime en levant les insécurités juridiques qu’il comporte.À travers l’étude de l’ensemble des manifestations de la couverture sur les marchés financiers, la présente thèse tend à mettre en lumière la nature juridique de cette garantie, afin d’apporter un éclairage sur les conditions de sa mise en œuvre.
Thiébald Cremers, Les contrats dans le très ancien droit des Pays-Bas méridionaux : étude du droit contractuel de l'an 1000 à 1300, thèse soutenue en 2017 à Paris 2 sous la direction de Olivier Descamps, membres du jury : André Castaldo, Robert Jacob, Nicolas Laurent-Bonne et David Deroussin
Cette thèse comporte une étude sur les contrats dans le droit coutumier et la pratique contractuelle du Nord de la France et de la Belgique entre l’an 1000 et 1300. D’abord, l’auteur cerne qui concluaient alors quels contrats pour quelle raison. Les sources de cette étude sont constituées des chartes de libertés que les villes se font octroyer dès le 12e siècle ; des actes de la pratique émanant des seigneurs territoriaux et des échevins urbains dont les chirographes enregistraient les opérations commerciales les plus diverses. Seulement à compter des années 1280, s’y ajoutent des coutumiers qui confirment les conclusions tirées des milliers d’actes de la pratique. Du fait des mutations sociales et économiques qui affectaient l’Europe aux 12e et 13e siècles, l’on constate une naissance du droit contractuel autour du renouveau urbain, de la renaissance commerciale et de l’affermissement du pouvoir, notamment juridictionnel, des princes territoriaux.La question centrale du droit des obligations est de savoir comment contraindre le débiteur à respecter ses engagements. Pour y répondre, encore faut-il être certain que le débiteur se soit engagé. Pour cela, le droit du 12e siècle a recours aux techniques déjà connues en matière de droit des biens, à savoir conférer légitimité et sécurité en faisant conclure les opérations les plus importantes devant les puissants d’abord, devant les juges ensuite. La pratique du record de cour est ainsi née. Aussi, le formalisme dans la conclusion des contrats a toujours été souple et la question de la naissance du consensualisme, abordée dans certaines coutumes, semblait causer un désarroi tant elle était étrangère au droit coutumier. Ensuite la contrainte s’exerçait par l’emprisonnement pour dette ; par l’exécution sur les meubles et sur les immeubles. Pour améliorer les chances du créancier, le droit coutumier a recours à la plévine coutumière, sûreté personnelle par excellent.
Agnès Ryo-Hon Koh, La société familiale cotée : l'exemple des sociétés chaebol coréennes, thèse soutenue en 2015 à Paris 2 sous la direction de Jean-Christophe Galloux, membres du jury : Véronique Magnier et Gilbert Parleani
Les sociétés familiales sont les plus anciennes, les plus nombreuses et les plus importantes de notre économie. Pourtant, elles ne font l’objet d’aucune définition légale et n’ont que rarement suscité l’intérêt du juriste. Nous avons donc cherché à caractériser la société familiale en nous intéressant plus particulièrement à certaines d’entre elles, les sociétés cotées sur le marché financier. La société cotée familiale combine deux univers, la famille et le marché, qui sont fondés sur des valeurs et des modes de fonctionnement diamétralement opposés. Cette opposition nous permet de mieux distinguer les spécificités, mais également les risques attachés aux sociétés familiales. C’est à travers l’exemple des chaebol, des conglomérats familiaux coréens, que cette étude a été menée. L’analyse emprunte une méthode comparative où les sociétés chaebol sont opposées aux sociétés familiales françaises. Notre étude a permis de mettre en évidence l’impact du contrôle familial sur le fonctionnement de la société cotée. Elle souligne également l’échec relatif du transfert des normes américaines dans l’environnement coréen, confirmant ainsi la théorie de la dépendance au sentier. Parallèlement, cette étude invite à réfléchir sur la réception possible du droit français, plus proche de la réalité coréenne
Vincent Malassigné, Les titres représentatifs : essai sur la représentation juridique des biens par des titres en droit privé, thèse soutenue en 2014 à Paris 2 sous la direction de Alain Ghozi, membres du jury : Philippe Delebecque, Philippe Didier, Arnaud Reygrobellet et Hervé Synvet
Il est fréquent d’affirmer qu’un titre représenterait un bien : une lettre de change représenterait une créance de somme d’argent, un connaissement représenterait une marchandise, une inscription en compte représenterait une valeur mobilière, un « depositary receipt» représenterait une action étrangère … Il s’agirait donc de « titres représentatifs ». Mais que recouvre cette formule ? Traduit-elle l’existence d’un véritable mécanisme de représentation des biens par des titres en droit privé ou s’agit-il d’un abus de langage ? Dans un premier temps, l’étude des titres représentatifs permet d’établir l’existence de la représentation juridique des biens par des titres en droit privé, qui constitue alors le pendant de la représentation des personnes. Il apparaît toutefois que ce mécanisme n’est pas unitaire et c’est pourquoi il convient de distinguer deux techniques de représentation juridique des biens par des titres : la représentation parfaite d’un bien par un titre et la représentation imparfaite d’un ensemble de biens réunis au sein d’un patrimoine d’affectation par des titres. Dans un second temps, l’analyse de la mise en oeuvre de la représentation juridique des biens par des titres en droit privé, réalisée en vue d’éprouver la pertinence de la théorie dégagée, montre qu’il n’est pas toujours possible de créer librement tout type de titres représentatifs concernant des biens de toute nature. La liberté ne joue que pour les titres représentatifs parfaits de certains biens. L’étude de la mise en oeuvre de ce mécanisme souligne par ailleurs que la création d’un titre représentatif induit des difficultés auxquelles il convient de pallier en édictant un certain nombre de règles.
Boubou Keita, La répression administrative, source de normativité : essai sur la contribution de la commission des sanctions de l'AMF à la régulation financière, thèse soutenue en 2014 à Paris 1 sous la direction de Alain Couret, membres du jury : Anne-Catherine Muller (Rapp.), Stéphane Torck (Rapp.)
En France, la régulation des marchés financiers est assurée par l'Autorité des marchés financiers (désignée ci-après l'AMF). Autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, l'AMF se compose d'un Collège et d'une Commission des sanctions et dispose d'un pouvoir de sanction à l'encontre d'auteurs de manquements boursiers. Ce pouvoir de sanction est exercé par la Commission des sanctions. Le laconisme des textes et la nécessité de doter les acteurs des marchés financiers d'un code de conduite en matière répressive ont conduit la Commission des sanctions, sous le contrôle des juges, à faire œuvre créatrice au fil de sa jurisprudence. Des principes directeurs ont ainsi émergé relativement à la définition des grands principes du droit financier. Ce droit financier prétorien repose sur une politique jurisprudentielle clairement définie et vise à assurer l'intégrité du marché financier et la protection des investisseurs. La Commission des sanctions est ainsi devenue un acteur incontournable du système de régulation financière et une source du droit financier. La présente thèse vise à décrire ce nouveau droit prétorien dans sa double dimension pénale et économique.
Jean-Baptiste Galvin, Les conflits d'intérêts en droit financier, thèse soutenue en 2013 à Paris 1 sous la direction de Alain Couret, membres du jury : Bruno Dondero, Thierry Bonneau et Dominique Schmidt
Les conflits d'intérêts sont une menace pour la confiance inhérente aux marchés financiers. Leur fonctionnement fait naître des situations conflictuelles aussi nombreuses qu'originales menaçant tant l'intérêt des intervenants que l'intégrité du marché. Longtemps reléguée dans la sphère de l'autorégulation, cette question est devenue une préoccupation politique majeure. Face à la diversité des situations et à l'insuffisance des réponses traditionnelles, le marché s'est doté de règles en vue de prévenir et de résoudre les conflits d'intérêts tout en essayant de concilier les impératifs de sécurité et d'efficacité. La thèse répond, sous l'angle du droit financier, à deux types d'interrogations : d'une part, l'identification des situations conflictuelles et, d'autre part, leur traitement juridique. La complexité des conflits d'intérêts naît de leur diversité. L'identification suppose de définir le cadre juridique, personnel et matériel des conflits d'intérêts. Celle-ci répond au besoin de dépasser l'analyse casuistique en dégageant les éléments caractéristiques, dans la perspective d'une approche juridique opérationnelle. Le régime des conflits d'intérêts et leur maîtrise par le droit financier révèlent ses spécificités par rapport au droit commun. Ce particularisme tient aux impératifs de protection de l'intérêt des investisseurs et de l'intégrité du marché mais également d'efficacité, à la méthode empruntée, tournée principalement vers la prévention et la gestion des conflits d'intérêts, enfin, aux instruments utilisés. L'étude du régime montre que la voie d'une approche juridique unitaire des conflits d'intérêts, aussi séduisante soit-elle, demeure encore incertaine.
Salam H. Abdel Samad, Les rigidités et faiblesses du droit libanais des sociétés, thèse soutenue en 2013 à Paris 2 sous la direction de Hervé Lécuyer et Didier Poracchia, membres du jury : Georges Naffah, Safaa Mougharbel et François-Xavier Lucas
Les évolutions du monde économique ont bouleversé l'organisation des entreprises. Désormais, les dirigeants, les actionnaires, les marchés et plus largement l'ensemble des acteurs économiques exigent des structures managériales plus souples, plus réactives, plus transparentes et plus sûres. Ainsi, pour s'adapter, les entreprises ont dû subir, dans les dernières années plus de réformes qu'elles en avaient, sans doute, supportées au cours de la deuxième moitié du XX éme siècle. Mais les enjeux sont de taille : ils engagent la crédibilité, la croissance, la rentabilité et, à terme, la survie de l'entreprise et la prospérité des nations. Qu'en est-il au niveau du droit libanais des sociétés? Ce droit est mal adapté aux besoins des entreprises, car sa rigidité fait souvent obstacle à l'adoption de structures qui correspondent aux besoins souvent très spécifiques des associés. Certes, la pratique a imaginé des palliatifs. Mais leur efficacité est limitée et leur validité n'est pas toujours indiscutable. Cette situation est regrettable, car elle incite les entreprises à constituer à l'étranger leurs structures de collaboration, afin d'échapper à une législation trop contraignante. A l'heure où le droit comparé gagne en importance et les règles internationales du commerce penchent vers l'intégration, il serait grand temps au Liban -pour le législateur, les juristes et les praticiens - de surmonter cet handicap juridique.
Marine Michineau, La protection des porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital en droit français, thèse soutenue en 2013 à Paris 1 sous la direction de Hervé Le Nabasque, membres du jury : Alain Pietrancosta, Antoine Gaudemet et Arnaud Reygrobellet
Bien que présentant des caractéristiques variées, les valeurs mobilières donnant accès au capital reposent sur un mécanisme commun : une promesse de contrat. Singulièrement, les valeurs mobilières complexes déployant leurs effets dans le temps (les promesses s'échelonnant ordinairement sur plusieurs années), l'investisseur est susceptible de supporter une dépréciation du patrimoine de la société, manifestée par une baisse de la valeur des actions escomptées. Dès lors, au risque de maltraiter les droits des porteurs, sur décision unilatérale de la société, leur protection s'impose. La recherche d'une protection cohérente (conciliant l'attractivité du régime à l'égard des investisseurs et une certaine souplesse pour les émetteurs) invite alors à identifier les faits générateurs de la protection. Or, il apparaît que l'énumération légale présente des lacunes. En outre, à cet écueil s'ajoutent les subtilités liées à la mise en œuvre des instruments de protection, notamment en cas de réduction du capital à zéro. Il est donc apparu que le régime de protection, issu de l'ordonnance du 24 juin 2004, est imparfait à divers égards, parfois dirimants en pratique. Face à ce constat, sont donc présentées tour à tour les opérations susceptibles de porter atteinte aux prérogatives d'accès au capital. Cet examen nous a conduit à la conviction de la nécessité de perfectionner le dispositif afin d'en améliorer la lisibilité, la sécurité et par voie de conséquence, l'attractivité. Les propositions formulées dans l'ouvrage visent ainsi à lever les obstacles identifiés, dans le respect de l'esprit de modernisation, d'unification et de simplification qui ont pu guider les précédentes réformes.
Caroline Coupet, L'attribution du droit de vote dans les sociétés, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Hervé Synvet, membres du jury : Jean-Jacques Daigre, Hervé Le Nabasque et Yann Paclot
L’article 1844 C. civ. suggère que seuls les associés sont titulaires du droit de vote. Une telle affirmation suscite cependant des interrogations. Elle laisse insatisfait, de prime abord, au vu de l’imprécision des contours de la notion d’associé. Elle invite, en outre, à s’interroger sur sa justification. Une analyse attentive des textes montre que pour déterminer le titulaire du droit de vote, ceux-ci se réfèrent indifféremment, à la qualité d’associé ou à la qualité de propriétaire de parts sociales ou d’actions – les deux étant censées se confondre. Et cela s’explique par le fait que les associés sont supposés supporter l’aléa social, aléa inhérent à la propriété de parts sociales ou d’actions. Mais seule la propriété dotée de l’absolutisme que les rédacteurs du Code civil voulaient lui conférer permet de présumer l’aléa social. Or le développement de propriétés temporaires ou pour autrui a conduit à attribuer le droit de vote à des associés ne le supportant pas, ébranlant ainsi la construction sociétaire. A cela, s’ajoutent des pratiques permettant à un non-associé de voter, sans garantie qu’il agisse pour le compte d’un associé. La recherche d’une solution cohérente et complète invite à redéfinir la notion d’associé en la fondant sur l’aléa social. Le droit de vote bénéficierait ainsi aux seuls acteurs courant un tel aléa. Cette solution peut être aisément mise en oeuvre moyennant quelques aménagements des modalités de reconnaissance de la qualité d’associé et des prérogatives sociales. Un encadrement spécifique des mécanismes d’accès au vote par un non-associé reste cependant nécessaire.
Maya Affeich, La relation entre le capital et le pouvoir dans la société anonyme libanaise, thèse soutenue en 2012 à Paris 2 sous la direction de Hervé Lécuyer et Fady Nammour, membres du jury : Nada G. Nassar, François-Xavier Lucas et Didier Poracchia
La relation entre le capital et le pouvoir dans la société anonyme libanaise est régie par le principe de proportionnalité qui veut que chaque actionnaire puisse exercer un pouvoir dans la société proportionnel à sa participation au capital. Ce principe est expressément consacré par la loi, et résulte de cette relation entre l’action et le droit de vote. Sa préservation est aussi assurée par des dispositions législatives. A travers cette construction, le législateur fait de la société anonyme le fief d’une démocratie actionnariale. Cette règle de principe n’est, toutefois, pas absolue. Elle connaît des limites. Cependant, ces limites n’entraînent pas une remise en cause de ce lien de proportionnalité, d’autant plus qu’elles sont justifiées. Or, l’apparence est parfois trompeuse. La société anonyme est bien loin de constituer une véritable démocratie, et le législateur qui a adopté ce principe n’a pas réussi à le préserver complètement. En effet, à examiner de plus près les dispositions du droit libanais, l’on se rend compte de l’ampleur des atteintes dues, pour l’essentiel, à de nombreuses lacunes de la loi, qui ôtent aux actionnaires leur pouvoir, ou font obstacle à son exercice, entraînant le déséquilibre de ce lien, voire sa rupture totale. Aujourd’hui, le rétablissement de la relation entre le capital et le pouvoir devient une exigence pour le développement des sociétés anonymes. Ceci ne peut se réaliser qu’à travers la participation des actionnaires à la vie sociale. Cette participation devra être adaptée à la taille de la société, pour redonner au pouvoir actionnarial toute son efficacité. Le droit libanais offre, en principe, les moyens nécessaires pour opérer le rétablissement.
Anne Vignon-Belliard, L'apport du droit pénal à la moralisation du marché boursier, thèse soutenue en 2011 à Paris 2 sous la direction de Philippe Conte, membres du jury : Frédéric Stasiak (Rapp.), Bernard Bouloc, Michel Germain et Valérie Malabat
Dans les matières dites techniques, auxquelles se rattachent les règles d'organisation et de fonctionnement du marché boursier, le droit pénal est utilisé comme une discipline accessoire, garantissant l'efficacité de ces réglementations. Cette approche emporte une déformation du droit pénal de fond et un recul de la protection normalement garantie par celui-ci, essentiellement par des atteintes au principe de la légalité criminelle et une instrumentalisation du mécanisme de la responsabilité pénale. Il en résulte que l'apport du droit pénal à la moralisation du marché boursier est limité aux exigences du procès équitable, l'assimilation des sanctions pécuniaires administratives à des peines ayant emporté leur soumission aux principes généraux qui gouvernent la matière pénale. Pourtant, quel que soit le champ de son intervention, le droit pénal demeure porteur de valeurs morales fondamentales. Il ne peut d'ailleurs contribuer à moraliser le marché boursier que dans la mesure où il est normatif. Le recours à la sanction pénale doit dès lors être limité à la répression de la ruse, matérialisée par la création ou l'exploitation d'une situation de déséquilibre entre les individus. Le droit pénal ne doit plus être au service de la régulation des marchés, mais voir son efficacité garantie par celle-ci. Loin d'être étrangère aux préoccupations de concurrence inhérentes au fonctionnement des marchés, cette approche contribuerait à la conciliation de la morale et de l'économie sur ceux-ci.