Présentation
Le temps est loin ou les atteintes aux principes d'instantanéité et d'immutabilité du contrat n'étaient qu'exceptionnelles. Elles semblent aujourd'hui suffisamment généralisées pour faire chanceler le cadre habituel : la théorie générale. Celle-ci doit accueillir des solutions qui remettent en cause « l'atemporalité » sur laquelle repose l'analyse volontariste. Le choix des contrats imparfaits comme terrain de démonstration de cette évolution s'imposait. Lorsqu’on dit que le contrat est imparfait, cela a une double signification. Cela veut dire, d'une part, que les parties ont entendu se débarrasser du mythe de l'instantanéité en préférant maitriser la date de prise d'effet du contrat. « En contractant sciemment a l'imparfait », elles abandonnent l'idée d'une action contractuelle définie dès son intention au profit d'une action dont le sens est forge en cours d'exécution. Tout se passe comme si elles s'étaient obligées en un instant, le contrat étant désormais porteur de tous ses effets juridiques sans pouvoir les réaliser dans l'immédiat. C’est concevoir provisoirement le contrat indépendamment de son effet obligatoire ou translatif. Cela signifie, d'autre part, que l'imprécision des intentions de départ, l'ambiguïté des mots, ainsi que l'opacité de l'instrument présidant à la conception du contrat l'empêchent de produire immédiatement son effet tel quel. Cet état défectueux rend indispensable l'immixtion du juge dans le contrat. Celle-ci n'est plus vécue comme une intrusion d'un tiers, synonyme d'imprévisibilité. Elle contribue, au contraire, à préserver la force obligatoire du contrat en imposant aux parties l'esprit de celui-ci, tout en faisant observer aux tiers le respect de cette « norme ». L’imparfait traduit fidèlement la mutabilité de la lettre au profit de l'intangibilité de l'esprit, telles qu'elles ressortent du droit positif. Il indique qu'à la place du rapport d'obligation classiquement indépendant du contrat générateur, cet acte-source continue a en configurer la substance bien au-delà de sa naissance. Cette évolution que représentent les contrats imparfaits démontre toute la vitalité de la matière contractuelle. Mais il reste à convaincre que la réhabilitation de l'action et de l'état contractuel, dans la durée concrète, ne laisse pas le contrat à jamais imparfait