Présentation
Cet atelier fait suite au premier atelier organisé à Grenoble en mai dernier « Quand la photographie fait œuvre ». Il réunira, entre autres, conservateurs, historiens de l'art, universitaires et ayants-droit de fonds photographiques, qui échangeront autour de l'authenticité des œuvres photographiques et des conflits de droit susceptibles de naître autour de l'image.
Cet atelier s'inscrit dans le cadre d'un programme de recherche mené par l'Institut des sciences sociales du politique (CNRS/ENS Paris-Saclay/Université Paris-Saclay), avec le soutien du département recherche de la direction générale des patrimoines du ministère de la Culture. Ce programme, intitulé « La photographie et le droit, perspectives contemporaines et historiques », entend étudier la façon dont la photographie est saisie par le droit.
L'objectif est d'inscrire cette étude dans une double-perspective, à la fois historique et contemporaine. L'évolution des techniques photographiques a en effet considérablement modifié les usages en la matière. Une telle perspective permettra de comprendre l'impact de l'évolution des pratiques et des usages sur le cadre juridique, notamment depuis l'apparition du numérique.
Afin de saisir la photographie dans ses différentes dimensions, trois axes de travail ont été retenus par le programme : la photographie dans le champ de la création, la photographie et le marché de l'art, et la photographie et les institutions publiques patrimoniales.
Ce projet conduira à la rédaction d'un rapport de recherche consacré à la photographie et au droit ainsi qu'à l'organisation de trois ateliers scientifiques associant professionnels de la photographie, chercheurs et responsables d'institutions. Un premier atelier, intitulé « Quand la photographie « fait » œuvre ? », s'est tenu le 24 mai 2022 à Grenoble (Observatoires des politiques culturelles). Cet événement scientifique a permis de s'interroger sur la notion d'acte de création en matière photographique. Le second atelier entend saisir les photographies dans leur dimension matérielle cette fois, en interrogeant plus particulièrement les notions d'authenticité et d'original, et la manière dont s'articulent les droits sur les supports et les contenus.
Enfin, le troisième sera consacré aux photographies en tant qu'elles appartiennent aux collections des institutions publiques et aux règles juridiques auxquelles elles sont soumises du fait des missions culturelles et patrimoniales de ces institutions.
L'objet photographique, de quels droits ?
Issu du second axe de travail du projet de recherche, le présent atelier est consacré à l'articulation des droits autour de l'objet photographique. L'atelier s'intéressera tout d'abord au rapport qu'entretient chaque objet photographique avec la notion d'original. La matérialité de ces objets sera questionnée. La photographie se caractérise par une capacité infinie d'incarnation. Médium de nature protéiforme, la photographie s'incarne ainsi dans des objets aux caractéristiques techniques et esthétiques différentes, se matérialisant sur différents supports (négatifs, contacts, diapositives, tirages de lecture, de diffusion, d'exposition…), et se rééditant dans le temps à travers plusieurs individus. L'auteur d'une prise de vue n'est pas nécessairement l'auteur des tirages d'après le négatif qu'il a initialement créé. Les tirages peuvent aussi avoir été réalisés à différents moments, par l'auteur des prises de vue ou par des tireurs, sous le contrôle de l'auteur ou pas, de son vivant ou après sa mort.
C'est pourquoi, dans un même fonds, plusieurs épreuves d'un même négatif peuvent coexister. A ne les considérer que pour ce qu'ils représentent, ces items peuvent être assimilés à des multiples identiques et faire redondance, mais derrière une apparente similitude, ces tirages restent pourtant uniques comme le montre l'étude de leurs caractères singuliers. Cette déclinaison possible d'après une matrice interroge la notion d'authenticité et le statut juridique de ces différents objets. Au sein du Code général des impôts ((98 A, annexe 3), les tirages originaux sont entendus comme les photographies prises par l'artiste, tirées par lui ou sous son contrôle, signées et numérotées dans la limite de trente exemplaires, tous formats et supports confondus. L'authenticité semble en particulier liée à la fidélité du tirage à l'œuvre telle que pensée et voulue par le photographe. La question de l'authenticité est en ce sens intrinsèquement liée à celle de l'originalité en droit d'auteur (qui questionne également l'attribution de l'œuvre) et du droit moral. Ce dernier a pour objet de protéger la personnalité de l'auteur telle qu'elle est exprimée dans sa création et contribue, ce faisant, à garantir l'authenticité de l'œuvre. Par ailleurs, l'atelier entend consacrer des échanges aux conflits de droits susceptibles de naître autour de l'image, et plus spécifiquement à l'articulation des droits sur les supports photographiques et les contenus.
Une seconde session s'intéressera notamment aux relations qu'entretiennent les photographes avec les agences, et aux litiges qui naissent parfois autour de la propriété des supports matériels. Des développements seront également consacrés au statut des fichiers numériques et aux revendications de droits dont ils font parfois l'objet
Programme
Première Session - Original et multiples dans le marché de la photographie : questions de vocabulaire, questions de droits
Présidence : Michel Melot, conservateur des bibliothèques et historien de l'art
10h00 : Pierre de Fenoÿl - La question des multiples chez Pierre de Fenoÿl
Aliette de Fenoÿl, ayant-droit du fonds
Des mots pour la photographie, questions de vocabulaire
Elise Hudelle, Ministère de la culture
Questions de vocabulaire juridique : reproduction, reproductibilité, droit moral
Emilie Terrier, maître de conférences en droit privé, Université Grenoble Alpes
12h30 : Pause médiane
Seconde Session - Supports et contenus, conflits de droits
L'image, au croisement des droits, supports et contenus, conflits de droits ?
Présidence : Jorge Alvarez, photo[1]graphe, chargé de mission au Syndicat National des Photographes - SNP
14h00 : Enjeux du droit moral
Anne de Mondenard, responsable du département photographie et images numériques, Musée Carnavalet histoire de Paris
Une recherche de jurisprudence autour du droit et de la photographie
Matteo Karsenti, chargé d'études, projet La photographie et le droit, perspectives contemporaines et historiques, ISP, ENS Paris-Saclay
Le cas particulier des fichiers numériques
Valérie-Laure Benabou, professeure de droit privé, Université Versailles St Quentin
Questions de droits sur les supports et contenus
David Pouchard, adjoint à la cheffe de bureau de la propriété intellectuelle du ministère de la culture
17h00 : Clôture
Contact : crj@univ-grenoble-alpes.fr
Entrée libre
Organisé dans le cadre du programme de recherche "La photographie et le droit, perspectives contemporaines et historiques" porté par Emilie Terrier, MCF / CRJ et Marie Cornu, Directrice de recherches au CNRS, ISP