Présentation de l’éditeur
L'auteur d'un projet de loi a parfois recours à des prestataires privés pour l'accompagner dans la rédaction de ses travaux préparatoires. Cette sollicitation des cabinets de conseil, qui a donc lieu lors de la préparation de la loi, au moment de sa conception, avant même le stade de sa gestation au sein du circuit législatif, suscite de nombreuses interrogations et mérite d'y prêter attention. Plonger dans ces sources profondes du droit est toutefois un exercice périlleux, l'obscurité des lieux pouvant décourager tout explorateur. En effet, la détection de ces pratiques est confrontée à l'opacité des méthodes employées par l'administration pour confectionner la norme juridique.
L'enjeu d'une telle immersion est pourtant de taille, tant ces pratiques heurtent avec audace les conceptions héritées des Lumières. L'une d'elles en ressort particulièrement meurtrie : la loi ne doit-elle pas exprimer la volonté générale ? Une actualisation de ces approches séculaires s'impose néanmoins et le recours à des prestataires privés ne semble être que la simple illustration d'un changement de paradigme bien amorcé. Entamés, les principes que l'on croyait les plus ancrés sont alors repensés, la démarche redessinant, en contrepoint, le visage du droit, de la loi et de ses auteurs.
Youssef Guenzoui est maître de conférences en droit privé à l'Université de la Polynésie française.
Sommaire
I. L’identification du phénomène
A/ Le législateur, auteur officiel de la loi
B/ L’administration, rédactrice connue de la loi
C/ Les prestataires privés, co-auteurs nouveaux de la loi
II. Les causes du phénomène
A/ Une charge de travail ajoutée : les exigences de la légistique
B/ Des compétences sollicitées : les exigences de la technique
III. Les dangers du phénomène
A/ L’affront à la démocratie : le peuple dépossédé de son pouvoir ?
B/ L’affront à la déontologie : des cabinets de conseils animés par des conflits d’intérêts ?
IV. Les perspectives du phénomène
A/ Marchandisation de la loi et marchandisation du droit : les systèmes juridiques mis en concurrence
B/ Marchandisation de la loi et exception culturelle française : la relativisation par le droit comparé