Présentation de l’éditeur
Cet ouvrage permet de restituer la vitalité et la diversité du monde associatif au tournant des XIXe et XXe siècles.
Dès les années 1870, les fondateurs de la République entendent consacrer la prétention de l'État à incarner et à mettre en œuvre l’intérêt général. Ils ont ainsi inscrit à leur programme le développement de services publics nombreux et accessibles. Mais, dans un contexte où les ressources fiscales sont limitées, les républicains au pouvoir ne peuvent, ni souvent ne souhaitent, se passer des services que les organisations non lucratives, religieuses ou non, rendent à la collectivité. S’ils confient en partie à l’initiative privée la réalisation de leurs projets sociaux, culturels et éducatifs, ils espèrent l’encadrer en la labellisant d’« utilité publique ».
L’étude des archives du Conseil d’État, maître d’œuvre de cette procédure d’accréditation, permet de restituer la vitalité et la diversité du monde associatif au tournant des XIXe et XXe siècles. Il donne surtout à voir une image plus contrastée de la IIIe République, qui a su remanier les frontières entre le public et le privé, offrant au second une place inédite, tout en consolidant l’État.
 
Sommaire
Introduction – La contribution des associations à l'intérêt général  
Limites de l'étatisme républicain  
 Le secteur non lucratif entre privé et public  
 L’intérêt général au prisme de l’utilité publique  
 La républicanisation inachevée de l’utilité publique
PARTIE I – LA RECONNAISSANCE D’UTILITÉ PUBLIQUE AUX MAINS DES CONSERVATEURS (1870-1879)
Chapitre 1 – Un cadre juridique restrictif  
 Les associations, une menace pour l’État  
 Un désintéressement qui inquiète les gouvernants  
 L’association contre la « chose publique »  
 L’engagement associatif sous contrôle  
 De l’autorisation à la reconnaissance d’utilité publique  
 Les insuffisances du droit associatif  
 Des associations en quête de reconnaissance
Chapitre 2 – Une reconnaissance d’utilité publique très politique : l’exemple de la Société Franklin  
 Au bon plaisir du gouvernement  
 Les déboires d’une association « éminemment utile »  
 La faute à l’ordre moral  
 La Société Franklin au Conseil d’État : éducation des masses ou propagande libérale ?  
 Itinéraire d’un dossier  
 La mesure de l’utilité publique  
 La reconnaissance d’utilité publique sous conditions  
 L’utilité publique en débat  
 Une solution paradoxalement libérale ?
Chapitre 3 – Une utilité publique d’ordre moral ?  
 Une définition conservatrice de l’intérêt général  
 Les critères impalpables de l’utilité publique  
 L’évidence de l’utilité publique  
 Un consensus conservateur 
 Un encouragement aux bonnes œuvres  
 État des lieux  
 L’assistance d’abord ?  
 Ambivalence du savoir  
 Une conception du désintéressement favorable aux anciens notables  
 Entraide et secours mutuels sous réserve de patronage  
 Les élites traditionnelles contre les nouvelles « corporations »
PARTIE II – DES ASSOCIATIONS AU SERVICE DE LA RÉPUBLIQUE ? (1879-1901)
Chapitre 4 – L’impossible libéralisation de la procédure  
 Un dispositif voué à disparaître ?  
 Des républicains favorables au maintien d’un certain contrôle  
 La légitimité de la loi contre l’arbitraire du décret  
 La transformation limitée des pratiques  
 L’épuration du Conseil d’État  
 Une « faveur » toujours aussi rare  
 Une procédure en quête d’impartialité  
 Un droit fondé sur des précédents non républicains  
 L’Ancien Régime au service de la République  
 Les droits réaffirmés du pouvoir exécutif
Chapitre 5 – Les incohérences de l’utilité publique  
 Des choix partisans ?  
 Le « vivier » républicain passé au crible  
 Reconnaissance à bas bruit de la charité catholique  
 La doctrine républicaine de l’utilité publique  
 La réinterprétation de critères hérités du passé  
 L’émergence de nouvelles règles  
 Des décisions à distance des principes affichés  
 Une jurisprudence à géométrie variable  
 Un groupe aux contours flous
Chapitre 6 – L’émergence d’un intérêt général d’origine privée  
 « Public » ou « d’utilité publique » ? Reclassements et déclassements  
 Des affaires trop sérieuses pour les confier au privé  
 La privatisation de la charité confessionnelle  
 Les sources privées de l’utilité publique  
 L’utilité publique à la mesure du privé 
 La désétatisation relative des établissements d’utilité publique  
 Une « haute faveur » concurrencée par de nouveaux droits  
 La complexification de la législation associative 
 Les faux-semblants du label
PARTIE III – LA RÉPUBLIQUE À L’ÉPREUVE DE LA PHILANTHROPIE (1901-1914)
Chapitre 7 – Loi de 1901 : la réaffirmation de l’essence publique du don  
 Le patrimoine associatif, un bien d’intérêt général  
 Une propriété sociale plutôt que collective  
 La générosité publique comme affaire d’État  
 Le retour à une conception restrictive de l’utilité publique  
 Les réajustements de la procédure  
 Le durcissement des critères de l’utilité publique  
 L’utilité publique au service de l’État social  
 Le don comme argent public  
 L’encouragement sous contrôle de la charité privée
Chapitre 8 – Les fondations hors la loi ?  
 La lente émergence d’une catégorie juridique  
 Un établissement d’utilité publique comme un autre  
 Nouvelles fondations, nouvelles règles ?  
 Les avantages d’un vide juridique  
 Des fondations sans utilité publique ?  
 La loi de 1901 ou la liberté par défaut  
 L’utilité publique sous réserve des intérêts privés  
 La hantise des biens sans maître  
 La propriété privée avant l’utilité publique
Chapitre 9 – Exceptions à la règle : de la « haute faveur » au favoritisme 
 L’utilité publique au-delà des critères affichés 
 Anatomie d’une décision  
 Les atouts qui comptent  
 La reconnaissance dans l’interconnaissance  
 Une opération de re-connaissance  
 L’entre-soi réformateur  
 Le féminisme et la coopération ouvrière aux marges de l’intérêt général  
 Le « bon féminisme »… et le mauvais  
 Les associations ouvrières hors champ
Conclusion – Réorienter la générosité publique vers l’État social : un semi-échec