Présentation de l'éditeur
La promotion d’un droit du travail de plus en plus négocié conduit-elle le juge à se mettre en retrait ? Ce problème réfère à la dynamique promue par les pouvoirs publics depuis un certain nombre d’années déjà, qui confie un rôle majeur à la négociation collective – décentralisée en particulier – dans la production de la norme. Cette transformation implique-t-elle que le juge doive s’abstenir de s’immiscer – notamment par son contrôle – dans une convention ou un accord collectif de travail, signé par des acteurs réputés seuls légitimes à apprécier la teneur des normes applicables ? Voilà la question qui se pose aujourd’hui de façon aiguë.
Mais le sujet du juge et de l’accord collectif de travail ne doit pas être limité au carcan du débat contemporain. Le sujet se doit d’être appréhendé dans toutes ses dimensions. Le juge et l’accord collectif de travail est, en premier lieu, une question d’appréhension. Avec un objet : l’accord collectif. Et un acteur : le juge. Comment le juge traite-il l’accord collectif de travail ? Quelle conception s’en fait-il ? De la perspective qu’adopte le juge dépend la position de celui-ci par rapport à l’accord collectif. Quelle posture le juge se doit-il d’adopter dans un modèle de droit du travail qui se place sous la bannière du dialogue social ? La promotion de la négociation collective entraîne-elle (doit-elle entraîner) un retrait du juge par rapport à l’acte collectif négocié ? Seraient-ce là des mouvements irréductiblement liés, selon des dynamiques inversées ?
Pour aborder le sujet sous tous ces aspects dans toutes ses dimensions, c’est une confrontation qui mérite d’être orchestrée : celle du juge et de l’accord collectif. Se joue là une dimension essentielle du nouveau modèle de droit du travail qui émerge.
Prix de thèse Voltaire/Liaisons sociales 2020
Emmanuelle Filipetto est docteur en droit privé.