Présentation
La surprise pourrait être la première réaction à l’idée d’associer l’amitié et le droit. L’amitié est plutôt du fait, une relation informelle, par essence peu juridique. Pourtant, le droit ne l’ignore pas. Ce duo inattendu s’exprime notamment par le nombre d’occurrences des termes amitié et ami relevées dans différents codes, ou encore en jurisprudence, en reconnaissant le préjudice d’affection de la perte du meilleur ami ou en refusant d’assimiler la rupture de l’amitié à une faute contractuelle. L’amitié en droit peut aussi apparaître plus indirectement, notamment lorsqu’il y est fait référence au travers d’un lien affectif étroit et stable, incluant l’ami dans le vocable toute personne. Pourtant, aucune définition juridique de l’amitié n’apparaît, malgré l’intérêt qu’a pu lui porter la Doctrine. L’amitié en droit privé semble de prime abord ne pas offrir de cohérence apparente, se distinguant des autres modèles de contingence des relations interpersonnelles, réglés par des définitions, notions et régimes. L’amitié a-t-elle vocation à rejoindre ce mode d’appréhension classique, ou suit-elle un modèle différent ? Face aux difficultés particulières soulevées par l’amitié, le droit privé contourne l’écueil de sa définition en ayant recours à des qualificatifs juridiques existants, pour limiter ses effets néfastes, tout en protégeant ses aspects bénéfiques. C’est ainsi que l’amitié trouve sa place en droit privé et peut prétendre à la consécration d’une juridicité autonome.
Préface de Philippe Bonfils et Emmanuel Putman, Professeurs à Aix-Marseille Université