Le séminaire se déroulera dans les locaux du ministère de l'Economie et des Finances, 139 rue de Bercy, Paris 12e.
Pensez à prendre votre pièce d'identité. ( contact sur place: 06 13 17 70 41 )
Programme du séminaire 2018-2019
Séance 1 – Les affaires budgétaires au miroir des secteurs de l'intervention publique. Réunion de lancement
Mardi 11 décembre 2018, 17h00-19h30 – Bâtiment Vauban – Salle 1068 Sud 1.
Enjeux, méthodes et objectifs du groupe de travail :
- Etat de la recherche / questionnement exploratoire
- Economie du séminaire
- Définition d'un projet éditorial
Séance 2 – Les dépenses de l'Etat à l'époque moderne : aspects techniques et enjeux politiques
Mardi 29 janvier 2019, 17h00-19h30 – Bâtiment Colbert – Salle 2290 M
Marie-Laure Legay, Université de Lille, UMR 8529 IRHIS, « La culture budgétaire de l'Ancien Régime ».
Anne Conchon, Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, UMR 8533 IDHES, « La comptabilité des Ponts et Chaussées au XVIIIe siècle ».
Séance 3 – Les politiques sectorielles au prisme des affaires budgétaires : le pouvoir des budgétaires en question
Mardi 12 mars 2019, 17h00-19h30 – Bâtiment Colbert – Salle 2290 M
Florence Descamps, EPHE, EA 7347 Histara, « Le pouvoir des budgétaires dans les années 1950 et 1960 »
Philippe Bezès, Sciences Po, UMR 8239 Centre d'études européennes et de politique comparée, discutant.
Séance 4. Les chiffres du budget en question : fabrique et usages de l'information financière
Mardi 14 mai 2019, 17h00-19h30– Bâtiment Colbert – Salle 2290 M
Sébastien Kott, Université de Poitiers, Institut de droit public, « Comment l'Etat tient-il ses comptes ? »
Béatrice Touchelay, Université de Lille, UMR 8529-IRHIS, « De la rentabilité des dépenses publiques ? L'exemple des pensions de guerre et celui des services de lutte contre la fraude (années 1920-années 1960 ».
Séance 5. Le budget, la dette et la monnaie : lectures croisées sur les mutations à l'oeuvre au XXe siècle
Mardi 18 juin 2019, 17h00-20h00 – Bâtiment Colbert – Salle 2290 M
Bertrand Blancheton, UMR 5113 GREThA, CNRS/Université de Bordeaux, titre à préciser.
Laure Quennouëlle-Corre, EHESS, UMR 8558 CRH – équipe GrHeco, « Le trésor, la dette et la croissance durant les Trente Glorieuses ».
Benjamin Lemoine, Université Paris Dauphine, UMR 7170 IRISSO, « Monnaie et financement du Trésor. Politiques de couplage et de découplage »
Présentation du GRAB
Responsables du projet :
Clémence Cardon-Quint, maître de conférences en histoire, Université de Bordeaux/ESPE d'Aquitaine, Centre d'études des mondes moderne et contemporain – CEMMC (EA 2958) - clemence.cardon-quint@u-bordeaux.fr
Thomas Hélie, maître de conférences en science politique, Université de Reims, Centre de Recherche Droit et Territoire - CRDT (EA 3312) - thomas.helie@univ-reims.fr
Enjeux
L'étude du financement fait souvent figure de parent pauvre dans l'étude des politiques publiques. L'univers du ministère des Finances est certes bien connu, notamment grâce aux recherches menées sous l'égide du Comité pour l'histoire économique et financière de la France (CHEFF)[1], mais les relations entre « budgétaires » et « dépensiers », le cheminement de la dépense publique après l'affectation des crédits à un chapitre du budget ont plus rarement fait l'objet d'investigations systématiques. Si la question a été posée pour des périodes critiques dans l'histoire de l'administration – la Grande Guerre[2], Vichy[3], les années 1950[4] – peu de travaux permettent toutefois d'appréhender sur le long terme le volet budgétaire d'une politique publique[5].
Plusieurs études, françaises et étrangères, ont pourtant illustré la fécondité d'une analyse de l'action publique au prisme des finances publiques. D'une part, la fabrique budgétaire met en lumière les intérêts concurrents des groupes socio-économiques, comme les relations de pouvoir au sein des élites dirigeantes ; d'autre part, l'étude des budgets, des instruments de financement et des modes d'allocation et de répartition des ressources apporte un éclairage indispensable sur le pilotage de l'action publique et l'évolution de ses modes de gouvernance[6].
Nous proposons donc la création d'un groupe de travail interdisciplinaire, conçu comme un espace d'échanges sur les sources, la méthodologie de la recherche et l'interprétation des données, ouvert à tous ceux qui s'intéressent – quel que soit leur horizon disciplinaire (science politique, histoire, droit, sociologie, économie etc.) – au financement des politiques sectorielles conduites par l'Etat. Ce groupe s'adresse aux spécialistes des finances publiques comme à ceux qui partent de l'analyse d'un secteur précis de l'action publique (culture, éducation, environnement, justice, santé, etc.). L'analyse des matériaux empiriques recueillis par les différents membres du groupe sera constamment au cœur des discussions.
Objectifs et méthode de travail
Le séminaire sur l'histoire de la gestion des finances publiques (organisé sous l'égide du CHEFF de 2005 à 2011) a mis en lumière la genèse et la transformation, du début du XIXe siècle jusqu'à nos jours, des modes de régulation des finances publiques, c'est-à-dire de « l'ensemble des obligations attachées aux nombreuses activités relatives aux deniers publics (prévision, autorisation, allocation, exécution)[7]». Dans les publications tirées de ce séminaire, la première place est donnée aux acteurs du ministère des Finances ou aux juristes dont l'activité principale est la gestion ou le contrôle de l'emploi des deniers publics.
On propose ici de déplacer le regard vers les ministères dépensiers et les budgets sectoriels. En effet, les pratiques budgétaires des administrations sont façonnées par les discours, les représentations, les instruments transversaux portés par les responsables du ministère de l'Economie et des Finances. Mais elles se construisent également au sein des ministères « dépensiers », à partir des dynamiques sectorielles, entre contraintes techniques et enjeux politiques (le calcul controversé du forfait d'externat, après l'adoption de la loi Debré de 1959 sur les relations entre l'Etat et les établissements privés, le recours aux niches fiscales dans la politique du logement[8], la mise en place de la tarification à l'activité dans les hôpitaux[9], en fournissent quelques exemples …).
Toute réflexion sur le financement des politiques sectorielles doit donc s'appuyer sur l'analyse de cette relation à double sens entre budgétaires et dépensiers où s'entremêlent des aspects techniques – l'élaboration et la circulation de discours et de dispositifs – et des aspects politiques (rapports de force entre ministères structurés par la position des « budgétaires » au sein du gouvernement, mais aussi par la position du ministre « dépensier » par rapport à Matignon et à l'Elysée). C'est sur cette base que peuvent être correctement appréciés les effets, sur les politiques sectorielles, d'une « contrainte budgétaire » liée aux grands équilibres économiques mais aussi façonnée par ce système complexe d'interactions. On peut alors repenser l'évolution des secteurs de l'action publique à l'aune d'une dépense publique dont les modes de régulation et les frontières évoluent (effets de la LOLF et des règles budgétaires définies au niveau européen, prise en considération des « dépenses fiscales » selon les domaines d'intervention publique considérés[10], évolutions et impacts de la dette publique sur les dépenses[11], etc.).
Pour décrire les mécanismes en jeu, il convient de mobiliser une expertise plurielle, croisant à la fois les approches disciplinaires et les secteurs de l'action publique. Le groupe vise donc, en premier lieu, à la constitution d'une culture partagée, d'un répertoire de références, d'outils, et de grilles d'analyse directement mobilisables dans les travaux de ses membres. Cet outillage intellectuel et méthodologique sera mis à disposition de la communauté plus large des chercheurs afin que le recours aux éléments budgétaires dans l'analyse des politiques publiques ne soit plus une exception, mais fasse partie des outils couramment mobilisables par les chercheurs.
Les membres du groupe de travail se retrouveront six fois par an, pendant quatre ans, pour des sessions de réflexion de deux heures et demie. Ces rencontres pourront prendre la forme :
- de séminaires : présentation de travaux en cours ou achevés, de membres du groupe ou extérieurs au groupe ; rencontres avec des acteurs
- d'ateliers de travail en vue de l'élaboration de publications collectives (numéros de revue et ouvrages).
Un blog de recherche, alimenté à chaque séance, reflètera l'avancée du travail et permettra de diffuser des indications bibliographiques, des billets méthodologiques et des comptes rendus de séance à l'intention des membres du groupe et de ceux qui pourraient le rejoindre ultérieurement.
Calendrier indicatif
Avril-septembre 2018
Circulation de l'appel à manifestation d'intérêt-constitution du réseau de chercheurs.
Année 1 [décembre 2018-juin 2019]
Les affaires budgétaires au miroir des secteurs de l'intervention publique : réflexion exploratoire
La première année vise, en priorité, à constituer une culture commune entre les participants du groupe, à partir d'une réflexion collective sur la littérature existante, réinterrogée, en séminaire, par ses auteurs et ses utilisateurs. Il s'agira notamment de replacer la question de la dépense publique dans une histoire longue, de réaliser une bibliographie des travaux produits en France et à l'étranger.
Après une séance de lancement, destinée à poser le cadre du groupe de travail et à identifier les centres d'intérêt et les approches de chaque participant, les questions traitées à chaque séance permettront de fixer le cadre de la réflexion menée au cours des années suivantes.
Année 2 [septembre 2019-juin 2020] Au cœur de la fabrique budgétaire
- Les acteurs : aux Finances et dans les ministères « dépensiers »
- Les processus : sélection, chiffrage, négociations, arbitrages.
On connaît, notamment grâce aux analyses d'Alexandre Siné pour la période la plus récente[12], le processus d'élaboration du budget vu du ministère de l'Economie et des Finances. Notre ambition est d'étudier ce processus sans se limiter à la phase finale des conférences budgétaires, clôturée par les arbitrages de Matignon et de l'Elysée, mais en élargissant l'enquête, en amont, du côté des cabinets et des administrations des ministères « dépensiers », et, en aval, pour saisir non seulement le travail de sélection et de chiffrage des dépenses prioritaires, mais aussi les négociations avec les différents acteurs concernés par la répartition de la charge des dépenses, entre Etat, collectivités territoriales, entreprises et ménages.
Année 3 [septembre 2020-juin 2021] Du budget à la dépense
A partir d'exemples précis, il s'agira de suivre la mise en œuvre de la dépense, du processus d'allocation des crédits vers les services concernés, jusqu'à l'engagement de la dépense par les services eux-mêmes. On formule ici l'hypothèse que se rejoue, au niveau local – dans le face à face entre administrations déconcentrées et collectivités locales – la question de la répartition des charges, notamment pour les nombreux domaines à compétence partagée. L'analyse de la mise en œuvre de la dépense devra donc, pour être menée correctement, prendre en considération le régime local dans lequel vient s'intégrer l'action de l'Etat ; elle pourra s'étendre, selon les cas étudiés, aux éventuels cofinancements européens.
Année 4 [septembre 2021-juin 2022] Synthèse et publications collectives.
Bibliographie sommaire
ASSELAIN Jean-Charles, L'argent de la justice : le budget de la justice en France de la Restauration au seuil du XXIe siècle, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2009, 551 p.
ASSELAIN Jean-Charles, Le budget de l'Education nationale : (1952-1967), Paris, PUF, 1969, viii+279 p.
BAUDU Aurélien, Contribution à l'étude des pouvoirs budgétaires du Parlement en France : éclairage historique et perspectives d'évolution, Thèse de doctorat, Université Toulouse 1 Capitole, France, 2008, 584 p.
BEZES Philippe, DESCAMPS Florence, KOTT Sébastien et TALLINEAU Lucile (eds.), L'invention de la gestion des finances publiques, volumes 1 et 2, Paris, IGPDE, 2010 et 2013.
BEZES Philippe et SINE Alexandre (eds.), Gouverner (par) les finances publiques, Paris, Sciences po, 2011, 523 p.
CARRE DE MALBERG Nathalie (éd.), La direction du budget entre doctrines et réalités, 1914- 1944: journée d'études tenue à Bercy, le 10 septembre 1999, Paris, Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2001, 591 p.
CARRE DE MALBERG Nathalie (éd.), La direction du budget face aux grandes mutations des années cinquante, acteur ou témoin ? journée d'études tenue à Bercy, le 10 janvier 1997, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 1998, 864 p.
DESCAMPS Florence et QUENNOUËLLE-CORRE Laure (eds.), La mobilisation financière pendant la Grande Guerre : le front financier, un troisième front, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2015, 280 p.
LEROY Marc et ORSONI Gilbert (eds.), Le financement des politiques publiques, Bruxelles, Belgique, Bruylant, 2014, 696 p.
LORD Guy, The French budgetary process, Berkeley, Los Angeles, London, 1973, 217 p. SINE Alexandre, L'ordre budgétaire : l'économie politique des dépenses de l'Etat, Paris, France, Economica, 2006, 405 p.
WILDAVSKY Aaron B., The politics of the budgetary process, Boston Mass. etc., Etats-Unis d'Amérique, Little, Brown, 1964, 216 p.
[1]. Parmi les nombreuses publications du Comité, Philippe Bezes, Florence Descamps, et al.(eds.), L'invention de la gestion des finances publiques, volumes 1 et 2, Vincennes, Institut de la gestion publique et du développement économique, 2010 et 2013, 684 p.
[2]. Florence Descamps et Laure Quennouëlle-Corre (eds.), La mobilisation financière pendant la Grande Guerre: le front financier, un troisième front, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2015, 280 p.
[3]. Voir les chapitres relatifs à la direction du budget dans Marc-Olivier Baruch, Servir l'Etat français: l'administration en France de 1940 à 1944, Paris, Fayard, 1997, 737 p.
[4]. Comité pour l'histoire économique et financière de la France (ed.), La direction du budget face aux grandes mutations des années cinquante, acteur ou témoin ?: journée d'études tenue à Bercy, le 10 janvier 1997, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 1998, xxiii+864 p.
[5]. Citons à titre d'exception Jean-Charles Asselain, Le budget de l'Education nationale: (1952-1967), Paris, PUF, 1969, viii+279 p. ; Jean-Charles Asselain, L'argent de la justice: le budget de la justice en France de la Restauration au seuil du XXIe siècle, Bordeaux, France, Presses universitaires de Bordeaux, 2009, 551 p.
[6]. Philippe Bezes et Alexandre Siné, "Introduction", dans Gouverner (par) les finances publiques, Paris, Presses de Sciences Po, 2012.
[7]. Bezès, Philippe, « Pour une histoire de la régulation des finances publiques. Le regard d'un politiste » dans Comité pour l'histoire économique et financière de la France (ed.), L'invention de la gestion des finances publiques : élaborations et pratiques du droit budgétaire et comptable au XIXe siècle, 1815-1914, Paris, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2010, p. 4
[8]. Julie Pollard, L'Etat, le promoteur et le maire: la fabrication des politiques du logement, Paris, Presses de Sciences Po, 2018, chapitre 4.
[9]. Pierre-André Juven, Une santé qui compte ?: les coûts et les tarifs controversés de l'hôpital public, Paris, Presses universitaires de France, 2016, ix+222 p.
[10]. Marc Leroy, Sociologie des finances publiques, La Découverte, Paris, 2007 ; Nicolas Delalande, Alexis Spire, Histoire sociale de l'impôt, La Découverte, Paris, 2010.
[11]. Laure Quenouëlle-Corre, « Dette publique et marchés de capitaux au XXè siècle », dans J. Andreau et al. (dir.), La dette publique dans l'histoire, Paris, CRH-CHEFF, 2006, p. 445-471 ; Benjamin Lemoine, L'ordre de la dette. Enquête sur les infortunes de l'Etat et la prospérité du marché, Paris, La Découverte, 2016.
[12]. Alexandre Siné, L'ordre budgétaire : l'économie politique des dépenses de l'Etat, Paris, Economica, 2006.
Séminaire organisé par Clémence Cardon-Quint, maître de conférences en histoire, Université de Bordeaux/ESPE d'Aquitaine, CEMMC (EA 2958), et Thomas Hélie, maître de conférences en science politique, Université de Reims, CRDT (EA 3312).