Administrer le privilège : la Ferme générale dans l’espace français et européen 1664-1794

Appel à communication

Administrer le privilège : la Ferme générale dans l’espace français et européen 1664-1794

Colloque, Ministère de l’Economie et des Finances, 6-7 juin 2024

Date limite le mardi 31 oct. 2023

Le Ministère de l’Economie et des Finances accueillera les 6 et 7 juin 2024 la première rencontre scientifique portant sur un acteur majeur de l’Ancien régime : la Ferme générale. Organisation fiscale, financière, administrative, économique, industrielle, composite et mouvante, la Ferme générale fut organisée par Jean-Baptiste Colbert et démantelée en 1791.

Son historiographie a été initiée dans les années 1950 (George T. Matthews, 1958) par une réflexion sur le rendement de l’entreprise, le calcul des baux, le taux de profit. En France, deux approches ont été privilégiées : une approche sociale et culturelle des Fermiers généraux (Yves Durand, 1971) et une approche judiciaire du phénomène de la contrebande. Les décennies 1980-2000 ne sont que très partiellement revenues sur cette historiographie. La contrebande et la rébellion constituent encore de nos jours le principal champ d’investigation pour apprécier l’interface fisc/société, laissant de côté la connaissance effective des droits indirects d’une part (que sait-on de la « gabelle » du vin, de la viande, du poisson, de la fiscalisation du sucre, du café, des cuirs, des cartes, du papier, des sols pour livre, droits réservés, droits réunis, traite d’Arzac, traite de Charente, traite d’Anjou, Convoi et comptablie, droit d’Impariage, droits de rivière, droits de ports et havres, etc…) d’une part, et la dimension transactionnelle de ce rapport d’autre part. Or, la Ferme générale, située au cœur du système fisco-financier de la monarchie, appelle des études complémentaires intégrant les avancées épistémologiques de ces trois dernières décennies tant sur la mondialisation de l’économie que sur les sciences de gestion, les sciences de l’Etat et de l’administration.     

Les attentes de cet appel portent sur :

  1. La Ferme générale et la globalisation des échanges : Associée à la « révolution de la consommation », la mondialisation a généré une activité illégale qui répondait aux besoins nouveaux et concernait toutes les strates sociales (M. Kwass, 2000 et 2014). Comment les modalités de contrôle (économie de la saisie, militarisation des brigades, conventions transfrontalières par exemple) tentèrent d’encadrer cette activité ? Au-delà de la répression de la fraude et de la contrebande, il importe d’apprécier les adaptations organisationnelles du système fisco-financier aux changements d’échelle du trafic commercial, tant dans les ports (développement de l’économie d’entrepôt et de sa fiscalisation), dans les territoires frontaliers, que dans les colonies où la Ferme générale agit en collaboration avec les compagnies. Les communications sur la Ferme générale comme acteur des relations internationales seront également bienvenues.

 

  1. La Ferme générale et les enjeux de gestion et d’administration. Il s’agit de comprendre non seulement les techniques de gestion, c’est-à-dire les circuits d’argent, les modes de recouvrement de l’impôt (sous-ferme, régie, administration domaniale), d’organisation de la dépense, du contrôle comptable, le rapport financier entre les impôts directs et indirects, mais aussi d’apprécier un savoir-faire qui participe du processus bureaucratique pressenti par Vida Azimi (1987) et du développement de l’Etat (François Monnier, 1997). De ce point de vue, la Ferme générale a mis en oeuvre des pratiques transactionnelles dont certaines, comme l’accommodement, ont récemment été mises en évidence (T. Boullu, 2019), tandis que d’autres (conventions avec les corps de métiers, les corps de villes, les corps provinciaux) sont restées dans l’ombre et mériteraient un éclairage scientifique. De même, l’exportation du savoir-faire administratif et financier à l’étranger (Jean-Claude Waquet, 1977) a été étudiée pour certains pays européens seulement. Les spécialistes des sciences de gestion, les historiens du droit (droits des « aides », droit du commerce, droit administratif) comme les historiens du politique sont par ailleurs en mesure de cerner l’environnement théorique dans lequel la Ferme générale a évolué.

  

  1. La Ferme générale et le privilège. Cette organisation se trouvait ancrée dans une culture administrative éclairée, mais tout autant dans une culture du privilège et donc de l’inégalité. Celle-ci s’appréhende notamment à partir de la connaissance des territoires et de leurs identités géographiques et politiques. Il est peu de représentations plus stéréotypées que celle du territoire français et de ses régimes de fiscalité indirecte. Ces représentations cartographiques ne permettent pas de connaître la réalité du prélèvement fiscal, ses évolutions, ni de saisir les effets de barrière des éléments naturels ou artificiels (lieues limitrophes). L’étude du privilège territorial lié aux productions agricoles dessine une géographie morcelée à l’extrême sur laquelle l’administration inclusive de la Ferme générale est revenue. Fondamentalement politique, cette histoire vise également à rendre compte des controverses politico-judiciaires qui ont édifié la fin de l’Ancien régime.   

 

Calendrier et modalités de soumission

L’organisation du colloque est assurée par l’équipe ANR éponyme https://dicofg.hypotheses.org/ .  

Elle prend en charge les frais de déplacement, d’hébergement et de restauration.

Le colloque se tiendra au Ministère de l’Economie et des Finances à Paris les 6 et 7 juin 2024. Les propositions de communications (1500 caractères) accompagnées d’un bref curriculum vitae sont à adresser avant le 31 octobre 2023 par voie électronique à anrfermge@gmail.com 

 

Comité scientifique :

Thomas Boullu (université de Strasbourg), Benjamin Furst (université de Haute-Alsace), Cédric Glineur (université de Picardie), Marie-Laure Legay (université de Lille), Anne Montenach (université d’Aix-Marseille), Mathieu Soula (université de Nanterre).