La politique d’arabisation commune aux trois pays du Maghreb,a été beaucoup plus problématique en Algérie.En effet,le cas algérien attire particulièrement l’attention dans la mesure où l’équation sociolinguistique demeure irrésolue. Les récentes évolutions en matière linguistique à l’exemple de la reconnaissance de la langue berbère,Tamazight,comme langue officielle, montrent en effet que la question linguistique n’est pas un acquis, mais aussi que celle-ci est fortement liée au pouvoir politique.C’est dans ce cadre que nous avons choisi d’appréhender la politique d’arabisation algérienne de 1962 à 2000 en tant qu’enjeu multidimensionnel,avec pour exemple l’arabisation du système éducatif algérien afin d’en mesurer les conséquences sur l’ensemble du système algérien.Cette thèse s’articule autour de deux parties.La première partie pose les jalons de la construction de l’Etat algérien,à travers une rétrospective historique allant de l’Algérie précoloniale à l’Algérie contemporaine.Dans cette partie, deux chapitres sont abordés,le premier portant sur la genèse du système politique algérien à travers lequel sont analysés les principes et fondements de l’Etat algérien et sa formation nationale;et le second est consacré à la construction identitaire algérienne autour de la politique d’arabisation et particulièrement de la généralisation de l’utilisation de la langue arabe, et dans lequel a été questionné le rapport entre politique d’arabisation et édification nationale et identitaire.D’autre part, dans une deuxième partie traitant des usages politiques de l’arabisation en Algérie,un premier chapitre empirique a été traité afin de cerner la politique d’arabisation de façon plus pragmatique, notamment à travers son application dans l’enseignement algérien; et enfin dans un second et dernier chapitre,c’est la politique d’arabisation au cœur du pouvoir algérien et la mise en exergue des dynamiques, des enjeux et des luttes de pouvoir que cette politique a fait naître qui sont étudiés. Dans cette perspective, nous nous sommes interrogés sur le rôle et la fonction de la politique d’arabisation dans la construction nationale et étatique algérienne, et plus globalement dans l’édification du système politique algérien. En d’autres termes, il s’agit de déconstruire les liens entre une politique dite linguistique et le pouvoir qui l’a mise en place en retraçant l’évolution historique de la politique d’arabisation algérienne depuis l’indépendance du pays en 1962 jusqu’en 2000.L’on verra ainsi comment cette politique est présentée d’abord comme une politique linguistique, puis comme une politique identitaire et idéologique pour enfin se révéler être une politique de pouvoir et véritable enjeu de luttes entre les différentes factions au pouvoir.Ainsi,d’un point de vue strictement théorique,nous avons utilisé une approche constructiviste, de construction nationale mais aussi identitaire,en nous appuyant sur des théoriciens tels qu’Anthony D.Smith,Ernest Gellner,Benedict Anderson,Adrian Hastings,ou encore Juan Linz. Du point de vue idéologique,la politique d’arabisation relève clairement de l’idéologie arabo-musulmane dans laquelle s’inscrit explicitement l’aile conservatrice du parti unique FLN (Front de libération nationale) qui l’a instaurée.A partir de là,nous avons questionné le rapport de la politique d’arabisation à l’idéologie arabo-musulmane.Ce sont donc tous ces éléments, politiques, idéologiques et identitaires qui donnent naissance à la mise en place d’une succession importante de lois d’arabisations.Parmi elles,la principale est la loi n°91-05 portant généralisation de l’utilisation de la langue arabe qui a connu de nombreux bouleversements.Tout cela montre à quel point,la politique d’arabisation a été un processus lent,discontinu,parfois fragile,mais surtout qu’elle a été davantage au cœur de luttes de pouvoir,en servant ce dernier qu’une politique linguistique à proprement parler servant la langue arabe et la population arabophone.