Dans le paradigme de l'extinction forcée de l'obligation, sans se restreindre à l'exécution de la sentence du juge, la notion d' « exécution civile », plus que de « voie d'exécution », amène une redéfinition. Elle pourrait commencer, en effet, au moment où le défendeur choisit d'avouer plutôt que d'avoir à fournir la charge de la preuve dans le cadre d'un procès. De ce postulat, la juridiction gracieuse, dont l'usage se généralisera à partir du XIIIe siècle, se fera le relais de la juridiction contentieuse, dont le parachèvement sera le praeceptum guarentigiatum : l'un des premiers titres exécutoires dans sa forme que le droit positif connaît aujourd'hui, où l'exécution coïncide avec le moment même de la naissance de l'obligation, par l'apposition d'une formule exécutoire dès la conclusion de l'acte. Quant à la la litis contestatio, déjà quelque peu dénaturée, depuis la fin du XIIe siècle, par la dimension de subjectivité inédite que les canonistes lui avaient conférée dans le choix laissé au défendeur d'attester ou de contester, elle ne survivra pas aux procédures sommaires. La plus éclatante consécration de ces dernières est assurément la clémentine Saepe contingit (ca. 1312-1314), qui fournira un véritable modus operandi des procédures « sans apparence de procès », sans litis contestatio ni libellus, où les exceptions opposables sont réduites drastiquement, mais où l'imperium du juge vient combler le défaut de preuves des parties. Car le juge, dont l'office est loin d'avoir été annihilé par ces procédures extraordinaires, demeure au contraire omniprésent : il est cette « main sûre », selon l'expression consacrée d'Edmond Seligman, un juge de tribunal civil ayant vécu au XIXe, dont l'office oscille entre sommaire et ordinaire, entre nobilis et mercenarium, entre simple orientation des parties et contentieux. Sous l'Ancien Régime, les castillans de l'École de Salamanque reprendront cette dialectique afin de délimiter les contours de la « via ejecutiva », offrant un nouvel éclairage et une systématisation des plus complètes sur l'institution du pignus ex causa judicati captum, qui n'avait, jusqu'alors, que peu fait l'objet de commentaires doctrinaux exhaustifs. La cessio bonorum, elle, servira leurs développements relatifs au concours de créanciers dans l'étape de la distribution du prix. Le royaume de France, en revanche, est régi par un autre paradigme, que l'on situe aux ordonnances de Villers-Cotterêts (1539) et de l'édit des criées (1551) : la summa divisio entre biens meubles et immeubles, dont le droit positif est toujours animé aujourd'hui, amène à un encadrement considérable de la saisie réelle, sous la main du juge, et dont la législation royale a fait une procédure essentiellement judiciaire, si ce n'est une véritable instance. Cette profusion législative coïncide avec les attaques doctrinales, concomitantes aux théories de la souveraineté, qui conduisent à une victoire progressive de la propriété utile sur la propriété éminente, et à la fin de l'Ancien Régime, à celle de la saisie réelle roturière sur l'ensaisinement seigneurial. La Tabula rasa du droit intermédiaire balaiera considérablement son office en la matière, exposant le justiciable à la violence d'expropriations expéditives : la nécessité de restaurer une « main sûre » afin de maintenir les garanties les plus élémentaires du justiciable, sera finalement pleinement reconnue par la doctrine, dont le lent et pénible rétablissement sera finalement couronné par l'ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006, qui réintroduira l'instance au sein de la saisie immobilière.