Présentation
Au printemps 1974, il y a près de 50 ans, René Dumont est le premier candidat à l'élection présidentielle française à faire des enjeux environnementaux le fondement de sa campagne. Depuis cette période, l'écologie politique s'est installée dans la vie politique de certains pays européens – la France, l'Allemagne ou encore la Belgique– tandis qu'elle demeure particulièrement discrète dans d'autres territoires. Parallèlement, les forces politiques, de gauche comme de droite, sont amenées à évoquer la thématique environnementale, ajoutant à leur programme des propositions dans des proportions et selon des orientations très variables.
Au sein du champ politique, les enjeux environnementaux sont alors appréhendés, définis et appropriés sous des formes très diverses. Les pollutions et les débordements industriels, les conflits d'usage et les controverses autour de projets d'infrastructures, les débats autour des modèles de développement, la question des rapports à adopter à l'égard de l'ensemble du vivant ou encore des menaces qui pèsent de manière systémique sur les écosystèmes (au premier rang desquels le changement climatique) constituent, parmi d'autres, un kaléidoscope d'enjeux dont il n'est pas possible de donner une définition univoque. Mis en forme et publicisés par des entrepreneurs de cause, ils sont pris en compte de manière différenciée par les acteurs politiques en fonction de facteurs qui leur sont propres (calendrier électoral, idéologique, concurrence avec d'autres formations).
Ces dynamiques propres au champ politique permettent d'interroger sous un angle spécifique l'écologisation des sociétés européennes. Dans les études consacrées aux politiques publiques, le concept d'écologisation envisage la prise en compte progressive des enjeux environnementaux dans les pratiques, les réflexions et les normes (légales ou implicites) des acteurs.trices sociaux, irrigant les politiques publiques, au niveau local comme européen. Les expert.e.s, les fonctionnaires et les usagers sont alors au centre de l'analyse, l'écologisation étant perçue comme une forme spécifique de gouvernance plus souple voire plus efficace, adaptée aux nouveaux enjeux. Dans cette perspective, par ce processus d'écologisation, les sociétés européennes se montreraient à la hauteur des défis qui se posent à elles.
En déplaçant l'analyse vers le champ politique, aussi bien envisagé sous l'angle des idées, des pratiques ou de ses acteurs.trices, nous souhaitons inviter les chercheur.euses à adopter une autre perspective sur un processus d'écologisation non pas consensuel mais agonistique qui, à ce titre, peut susciter diverses formes de débats, de résistances et de réaffirmations d'approches des rapports des sociétés à leur environnement marqués par le productivisme. Il s'agit ainsi de mieux saisir dans toute sa diversité la vie politique à l'âge de l'anthropocène.
Notre approche entend ainsi se situer à la charnière de l'histoire politique et de l'histoire environnementale, des enjeux de pouvoir et de rapports entre humains et non-humains.
Programme
Mercredi 24 Avril
13h30 : Accueil – Mots de bienvenue
Session 1 - Nouvelles perspectives sur l'écologie politique en Europe
14h30 : Le Christliches Umweltseminar Rötha (CUR), un groupe écologiste indépendant d'Allemagne de l'Est (années 1980-2000)
Coline Perron, Université de Strasbourg
15h00 : La concurrence écologiste aux Grünen : une volonté de retour aux fondamentaux ? L'exemple des micropartis ÖDP et Ökolinx et des Klimalisten
Olivier Hanse, Université de Lorraine
15h30 : Ecolo en Belgique : un système d'action à l'épreuve (1990-2000)
Jonathan Piron, Etopia
16h00 : Pause
16h15 : Table-ronde - Les archives des mouvements écologistes en Europe
Avec :
Kevin Puisieux et Meixin Tambay, Fondation de l'Ecologie Politique – France
Barbara Proença, Archives nationales – France
Szymon Zareba et Jonathan Piron, Etopia - Belgique francophone
17h30 : Fin de la 1ère journée
Jeudi 25 Avril
Session 2 - La résistible écologisation de la gauche de gouvernement
9h00 : La bifurcation manquée des partis de gauche dans les années 1970
Christophe Batardy, ENS/PSL
9h30 : Vincent Labeyrie : l'écologue, le marxiste et le militant communiste
Philippe Kernaleguen, UVSQ
Hugo Melchior, Université de Rennes 2
10h00 : L'écologisation du PS, d'Epinay à la social-écologie
Noëlline Castagnez, Université d'Orléans
10h30 : Pause
Session 3 - Ecologie et lutte des classes
11h00 : Se mettre au vert : les conditions du passage de la lutte des classes à l'écologie en Italie, au tournant des années 1970-1980
Grégoire Le Quang, Institut Catholique de Paris
11h30 : De Marghera à Seveso : forces et limites de l'écologie ouvrière en Italie
Marie Thirion, Université Grenoble Alpes
12h00 : Pause déjeuner
Session 4 - L'écologie politique en France, les défis de l'institutionnalisation
14h00 : Le rôle de l'écologie politique et de la mobilisation citoyenne dans la politisation et l'écologisation du vélo durant les années 1970
Clément Dusong, Université de Paris-Est Créteil
14h30 : Positionner les Verts, définir l'écologie, composer avec les acteurs. Sur la résurgence de l'écologie politique dans le débat public en France (1988-1997)
Sébastien Repaire, Institut François-Mitterrand
15h00 : Les candidat.e.s écologistes aux élections législatives de 2022 : des candidats de gauche comme les autres ?
Frédéric Sawicki, Université de Paris-1
15h30 : Pause
Session 5 - Les écologistes dans l'espace public
16h00 : Inscrire le concept de "conversion écologique" dans l'histoire (récente) de l'analogie religieuse comme registre de (dé)légitimation de l'écologie politique
Gauthier Simon, Université de Bordeaux
16h30 : La mouvance écologiste à l'épreuve d'Internet : analyse comparative du déploiement de discours et de stratégies de communication d'organisations écologistes en ligne
Jules Dile-Toustou, Université de Toulouse
17h00 : Représentations, stigmatisation et dénigrement des écologistes et de l'écologie : une exploration à partir de la presse francophone
Michelle Lecolle, Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle, CLESTHIA
17h30 : Fin de la 2nde journée
Vendredi 26 Avril
Session 6 - Les partis de gouvernement et l'écologie au crépuscule des Trente Glorieuses
9h00 : La droite gaulliste et la question écologique (1958-1974)
Pierre Manenti, Ministère délégué aux Collectivités territoriales et à la ruralité
9h30 : "Le nucléaire ou la bougie". Le gaullisme face l'écologie politique dans les années 1970
Bryan Muller, Université Sorbonne Paris Nord
10h00 : L'écologisation de "l'économie sociale de marché" en République fédérale d'Allemagne dans les années 1970
Mathieu Dubois, IEP de Rennes
10h30 : Pause
Session 7 - Les droites à l'heure du changement climatique
11h00 : Hervé Juvin, le local avant le global : caution verte ou idéologue de l'écologie au sein du Rassemblement National
Adrien Champroux, Université de Sorbonne-Université -SIRICE
11h30 : "LR, climat, même combat !" – les tentatives d'écologisation de la droite française par ses jeunes acteurs (2019-2023)
Basile Imbert, Université de Montpellier
12h00 : Pause déjeuner
Session 8 - Exploiter des ressources : perspectives écologiques et politiques
13h30 : Restructuration du secteur nickel néo-calédonien au prisme du nationalisme kanak
Christine Demmer, CNRS. Centre Norbert Elias, Marseille (UMR8562)
14h00 : De l'usine au Parlement, ouvriers et riverains, militants et élus, des acteurs de la politisation des enjeux environnementaux de l'aménagement du bassin de Lacq (années 1950 – années 1960)
Julien Marchesi, Université de Pau
14h30 : Pause
Session 9 - Les grands projets, entre politique et écologie
14h45 : Serge Antoine (1927-2006), architecte de l'environnement – Ecologisation ou environnementalisation des politiques publiques ?
Arthur Delacquis (Université de Paris-Sorbonne
15h15 : Le PS et la centrale nucléaire de l'estuaire de la Loire : une histoire mouvementée (1974-1994)
Anaël Marrec, Nantes Université
15h45 : Des candidatures vertes ? L'écologisation relative des projets d'organisation des Jeux Olympiques d'été en Europe depuis les années 2000
Lionel Pabion, Université de Rennes 2
16h15 : Mots de conclusion
Christophe Bonneuil, CNRS – CRH
16h30 : Clôture
Contact : alexis.vrignon@univ-orleans.fr
Colloque organisé par la MSH Val de Loire, le laboratoire POLEN, Université d'Orléans sous la direction scientifique de Alexis Vrignon (POLEN), en partenariat avec le Réseau Universitaire de Chercheurs en Histoire Environnementale, la Société Française d'Histoire Politique et la Fondation de l'Ecologie Politique