Présentation
En 2016, le candidat Trump a su convaincre 80 % des évangéliques et suffisamment d’électeurs de voter pour lui en citant des noms de conservateurs (anti avortement) qu’il s’engageait à nommer à la Cour suprême des États-Unis s’il était élu. La Cour devrait en principe être à nouveau au cœur des élections de 2020, du moins si les démocrates comprennent enfin la priorité de cet enjeu capital. Grâce à la complicité du leader républicain au Sénat, Mitch McConnell, le Président a pu nommer deux juges à la cour suprême, Gorsuch en 2017 et Kavanaugh en 2018, mais aussi près de 150 juges dans les juridictions inférieures, ce qui a déjà permis le basculement à droite de deux cours d’appel.
Or, les États-Unis sont un pays de droit jurisprudentiel où règne la règle du précédent et où les juges font le droit. C’est à eux qu’il incombe, ainsi que l’a écrit le Chief Justice Marshall dans la décision fondatrice Marbury v. Madisonde 1803 de « dire ce qu’est le droit ». Ce rôle incombe certes à la Cour suprême mais aussi aux cours d’appel puisqu’ elles sont dans 99 % des cas les juridictions en dernier recours, la Cour suprême n’acceptant que 80 affaires par an sur les 8000 qui lui sont soumises.
C’est dans ce contexte que nous nous interrogeons sur les pouvoirs de la Cour, son rôle politique, les facteurs de sa puissance mais également les contraintes qui pèsent sur elle, contraintes externes qui tiennent aux relations qu’elle doit entretenir avec les deux autres branches, le Président et le congrès ; et contraintes internes à l’organisation judiciaire.
Nous verrons que selon les périodes la cour suprême a permis l’étoffement de l’État-providence et a ouvert ses portes à davantage de justiciables, et qu’à d’autres périodes elle a favorisé et amplifié la dérégulation et rendu plus difficile l’accès aux juridictions. Nous sommes actuellement dans le deuxième cas de figure.
Les éléments de cette réflexion seront illustrés par des décisions rendues par la Cour et nous conclurons sur les dangers que courent les droits civiques et politiques ainsi que les droits économiques et sociaux dans un pays devenu très conservateur avec une Cour suprême au sein de laquelle les conservateurs depuis 2018 comptent cinq voix sur les neuf.
Pour le moment, le Chief Justice a fait en sorte que la Cour n’apparaisse pas trop partisane mais qu’en serait-il après 2020 si le Président était réélu ?
Programme
17h30 : Intervention de Anne Deysine, juriste, américaniste et diplômée de l’Institut d’études politiques de Paris.
Spécialiste des questions politiques et juridiques aux États-Unis, elle est professeur émérite de l’Université Paris Nanterre où elle a créé et dirigé pendant 20 ans un Master d’affaires internationales. Elle a été Vice-Présidente chargée des relations internationales de 1998 à 2003 et a présidé le consortium Micefa de 2002 à 2014.
Parmi ses nombreux ouvrages, citons : Les Etats-Unis aujourd’hui : permanence et changements (La Documentation française, 2006), Les États-Unis : Une nouvelle Donne (La Documentation française, sept. 2010) et ses deux derniers : La Cour suprême : Droit, Politique et Démocratie (Dalloz, 2015) et Les États-Unis et la Démocratie (L’Harmattan, 2019).
Anne Deysine enseigne et donne régulièrement des conférences en France et à l’étranger. Elle intervient régulièrement sur France Culture, France Inter, France 24 (en français et anglais), France 5 (C’est dans l’Air), LCP, Public Sénat.
Entrée libre
Organisée dans le cadre du cycle « Le Libéralisme dans tous ses E/états » proposés par ICD (Laboratoire Interactions culturelles et discursives - EA 6297) et l'IRJI (Institut de Recherche Juridique Interdisciplinaire - EA 7496) de l'Université de Tours