Les mille et une facettes de la « personne vulnérable »

Appel à communication

Les mille et une facettes de la « personne vulnérable »

Colloque, Toulouse, 28 mars 2025

Date limite le lundi 24 fév. 2025

La « personne vulnérable » est devenue une notion acceptée en droit et dans le discours public, mais quelles en sont les implications ? Est-on face à un doublon, une superposition à des catégories existantes ? Un dégradé du droit des incapacités ? Ou bien l'appellation est-elle porteuse d'une dynamique propre favorable à une meilleure analyse, une meilleure gestion de dynamiques sociales, économiques et politiques, tout en mettant en lumière les besoins et les droits des personnes concernées ?

Cette prise en compte de la vulnérabilité par rapport à certaines situations plus ou moins pérennes interpelle, et semble ouvrir la voie à des modifications substantielles de la notion de personnalité juridique.

 

Argumentaire scientifique

Dans la lignée du colloque « Autisme et Droit(s) » organisé en septembre 2023 par la Chaire Vulnérabilités et mutations du Droit (UR Céres – ICT), notre interrogation s'étend à l'existence d'une catégorie « vulnérable », ses conséquences conceptuelles et son effectivité, dans le droit objectif. Elle questionne les rapports entre fragilités propres et situations de vulnérabilité, statut juridique ou état de la personne, droits et libertés, en nous focalisant sur la personnalité juridique des êtres vulnérables. Dans tout cela, le développement sémantique de cette expression dans de multiples branches du droit est tel que le phénomène rend « à l'heure actuelle difficile la recherche d'une ratio dans cette floraison de vulnérabilités »[1].

Ainsi, concernant la personne humaine vulnérable, si le droit classique des incapacités (minorité, protection des majeurs sous sauvegardes, tutelles et curatelles), se développe dans le droit français, européen et international pour reconnaître les fragilités nécessitant des niveaux de soutien des capacités existantes plutôt que leur substitution, la notion de « personne vulnérable » apparaît ainsi dans la législation comme dans la jurisprudence, relative aux personnes handicapées, aux personnes âgées, concernant les demandeurs d'asile et les réfugiés, ou encore en tenant compte de la standardisation de critères aidant à classer des troubles mentaux qui élargit le spectre de personne demandant un droit subjectif à un aménagement de leur situation sur le lieu de travail ou d'apprentissage (DSM-5-TR). De nombreuses questions se posent alors. Comment et à partir de quand le concept de vulnérabilité est-il entré dans le champ juridique et à quel endroit ? Quels en ont été les promoteurs ? Des concepts concurrents existent-ils ? Une vulnérabilité intrinsèque qui serait ontologique se distingue-t-elle d'une vulnérabilité extrinsèque tenant de traits extérieurs incapacitant le sujet ? Quels liens entre les deux ? Des étapes de fragilité sont-elles à distinguer dans la vie d'êtres vulnérables ? La vulnérabilité est-elle fonction de besoins insatisfaits, physiques, psychiques, sociaux, économiques ou spirituels ? Quelle fonction est assignée au droit quant à ce ? Par ailleurs, à côté de l'impact de la vulnérabilité dans l'exercice de droits patrimoniaux, encadrés par la protection d'un tiers, qu'en est-il vis-à-vis des droits de la personnalité et de la multiplication des personnes de confiance, des mandataires ? Enfin, plus largement, la « personne vulnérable » est-elle une création originale ayant des implications autonomes ou une superposition de statuts existants ? Doit-on considérer qu'une forme de « fragmentations » de la personnalité juridique, de ses droits, obligations et capacités, pourraient entamer l'unité même de la notion de personne ?

De plus, outre la personne humaine, des débats portent sur la reconnaissance de la personnalité juridique des animaux, celle des espaces naturels fragiles. Ceci entraîne aussi de nombreuses questions. Que savons-nous de ces innovations en droit comparé (Nouvelle-Zélande, Inde, Amérique du Sud, etc.) et en quoi peuvent-elles aider à repenser la vulnérabilité et la personnalité juridique dans la famille civiliste ? Comment à leur propos parler de « personne vulnérable » ? A l'instar de la personnalité morale reconnue à des groupements créés par l'homme (entreprises, administrations), la reconnaissance d'une forme de personnalité juridique à une entité incapable d'accomplir des droits et des obligations sera-t-elle le moyen en vue d'une meilleure protection ? Plus fondamentalement, la personnalité peut-elle naître d'un besoin, celui de la vulnérabilité ? Enfin, doit-on aborder la vulnérabilité des êtres vivants « doués de sensibilité » pour situer celle l'être humain vulnérable ?

A travers cette journée d'étude, nous invitons ainsi les chercheurs et praticiens intéressés à une réflexion globale sur le statut, les composantes et les implications de la vulnérabilité, et leur impact en droit.

 

Contenu des propositions

La proposition de communication indiquera le titre de l'intervention, le nom et les qualités de l'auteur, un résumé d'au maximum 250 mots et (éventuellement) une bibliographie sommaire jointe.

La proposition, si elle est acceptée par le comité d'organisation, donnera lieu à une communication de quinze à vingt minutes de temps de parole durant la journée d'étude.

La proposition doit être envoyée en format PDF ou Word aux adresses électroniques suivantes : blandine.richard@ict-toulouse.fr ; albert.evrard@ict-toulouse.fr ; enguerrand.serrurier@ict-toulouse.fr

 

Date de restitution

Des propositions de communications sont espérées pour le 24 février 2025 minuit dernier délai. Elles pourront porter sur le droit civil, les droits fondamentaux, le droit de la santé, le droit de l'environnement, le droit social, le droit public, le droit canonique, aussi bien dans une perspective française qu'internationale ou comparée. Tous les chercheurs, jeunes, actifs ou émérites, sont les bienvenus. Une réponse aux propositions sera transmise par le comité d'organisation le 28 février 2025.

 

Date et lieu de l'événement

28 mars 2025 à Toulouse. Le comité d'organisation précisera les modalités d'intervention aux candidats retenus.

 

Comité d'organisation

Albert Evrard, Laurent Quessette, Blandine Richard, Enguerrand Serrurier (ICT).

 

[1] Olivier ECHAPPE, « Les personnes vulnérables en droit français », L'Année canonique, 2023/1, p. 10.