• THESE

    Des hommes entre plusieurs mondes : étude sur une situation d'exil : intellectuels français réfugiés aux Etats-Unis pendant la deuxième guerre mondiale, soutenue en 2004 à Paris EHESS sous la direction de Jean-Louis Fabiani 

  • Laurent Jeanpierre, Baptiste Brun, Jean-Marc Chapoulie, Christophe David, Monique Jeudy-Ballini [et alii], Bertille Bak: faux et usage de faux, Presses universitaires de Rennes, 2024, Les arts à l'essai, 128 p. 

    Laurent Jeanpierre, Ludivine Bantigny, Quentin Deluermoz, Boris Gobille, Eugenia Palieraki (dir.), Une histoire globale des révolutions, La Découverte et Cairn, 2023, Histoire-Monde, 1197 p.  

    « La révolution est terminée. » À la fin du siècle dernier, la formule a fait date. Mais rien n'était plus faux. Il suffit, pour s'en convaincre, de déplacer le regard hors des régions occidentales, à Tunis, Alger, Hong Kong ou Téhéran. Étendre dans l'espace mais aussi dans le temps, bien avant le XVIIIe siècle, l'enquête sur les révolutions, en montrer les dynamiques transnationales, les échos, les reprises, les « modèles » comme les singularités, telle est l'ambition de cette histoire globale.Rédigés par des spécialistes du monde entier, ses chapitres explorent la richesse de l'histoire révolutionnaire, mettent en lumière des révolutions moins connues et arpentent des géographies inédites traversant tous les continents. La Révolution française, les révolutions atlantiques et le Printemps des peuples côtoient les révoltes anticoloniales indiennes, les mouvements populaires de Corée ou du Japon et les grands soulèvements latino-américains ; les Révolutions russe et chinoise ne font pas oublier les révolutions d'indépendance, notamment africaines, ni les rebellions multiples qui émaillent un monde en perpétuelle effervescence.Affranchie de ses bornes classiques, l'archive révolutionnaire livre des interrogations neuves et des recherches fructueuses. Le rôle de la spiritualité et de la religion, des empires et des nationalismes, de l'économie et de l'État, de l'environnement et du climat, est ainsi exposé à des lumières plus vives, tout comme les protagonistes, notamment les femmes, la paysannerie, le monde ouvrier... Et dès lors, comment passe-t-on à l'acte ? Comment vivent dans l'extraordinaire des jours de soulèvement, celles et ceux qui y participent ?Au terme du parcours, les jugements péremptoires et polarisés sur les vertus et les vices de la révolution ressortent fragilisés ; le bilan des révolutions acquiert des contours plus nets - et leur avenir même peut être mieux apprécié

    Laurent Jeanpierre, Haud Guéguen, La perspective du possible. Comment penser ce qui peut nous arriver, et ce que nous pouvons faire: Comment penser ce qui peut nous arriver, et ce que nous pouvons faire, La Découverte et Cairn, 2022, L'horizon des possibles, 325 p.    

    Le rapport ambivalent que nous entretenons à l'égard du possible est révélateur des difficultés à transformer en profondeur la société. Exalté par le capitalisme sous la forme du potentiel, confondu avec le désirable par ceux qui lui opposent des alternatives, le « possible » n'est, pour la plupart, qu'une chimère, quand il n'est pas le paravent de la destinée. Face à la délimitation et à la préemption des possibles qu'opère tout pouvoir, nous ne pourrons rouvrir l'horizon qu'en portant un autre regard sur les possibilités latentes qu'enferme le réel.Ni prophétie, ni programme, prévision calculée ou utopie de papier, la perspective du possible proposée dans cet ouvrage entend dénaturaliser l'avenir en prenant au sérieux les potentialités du présent. Haud Guéguen et Laurent Jeanpierre renouvellent ainsi une tradition de pensée qui, puisant dans les œuvres de Marx et de Weber, inspire la sociologie et la théorie critique depuis leurs origines. Ils montrent sa fécondité pour cartographier les possibles avec rigueur et penser stratégiquement la question de leur actualisation.Le dernier siècle a séparé et souvent opposé l'utopie, les sciences de la société, la critique sociale et l'émancipation, pourtant unies chez les socialistes révolutionnaires. Il s'agit de les rassembler à nouveau pour restaurer les conditions de l'espérance. Tel pourrait bien être, aujourd'hui, l'antidote à la fois savant et politique à l'impuissance de la critique et des gauches

    Laurent Jeanpierre, Anne Davidian (dir.), What makes an assembly?: stories, experiments, and inquiries, Evens Foundation et Sternberg Press, 2022, 407 p. 

    Laurent Jeanpierre, Alain Dubosclard, Laurent Grison, Pierre Journoud, Christine Okret, Dominique Trimbur (dir.), Entre rayonnement et réciprocité. Contributions à l'histoire de la diplomatie culturelle: contributions à l'histoire de la diplomatie culturelle, Éditions de la Sorbonne, Publications de la Sorbonne et OpenEdition, 2020, 197 p.  

    À l’heure actuelle, la culture est devenue un des principaux enjeux de circulation économique, les sphères culturelles sont le lieu de concurrence et de concentration transnationales inédites, les processus de mondialisation touchent désormais tous les continents : il paraît donc nécessaire d’interroger l’histoire des relations culturelles internationales au long du XXe siècle. Il semble qu’après la Première guerre mondiale, l’Occident ait inventé un nouvel instrument politique extérieur, une diplomatie d’un nouveau type où s’articulent autrement la volonté de puissance des États-nations et les champs de production symbolique. À côté d’initiatives privées, l’appareil d’État a ainsi tenu une place décisive dans l’exportation des cultures nationales, la mise en place de réseaux et d’institutions visant à internationaliser les sciences, la culture et la formation des élites culturelles. L’ouvrage s’intéresse à la montée en puissance de cette diplomatie culturelle occidentale jusqu’à la fin des années 1970 lorsqu’elle est contrainte de redéfinir ses tâches devant d’autres processus, plus massifs, d’internationalisation. En de brefs essais qui touchent aussi bien la politique culturelle française au Proche-Orient et aux États-Unis, que la présence britannique en France via les « British Council » ou la comparaison des politiques culturelles française et américaine au Vietnam, l’ouvrage rappelle qu’il y eut deux pôles majeurs, peut-être successifs, de la diplomatie culturelle au XXe siècle : des politiques du rayonnement et des politiques de la réciprocité entre lesquelles on n’a cessé d’osciller. Il permet aussi d’insister sur la multiplicité des outils institutionnels de l’action culturelle extérieure. A travers l’objet « diplomatie culturelle », il propose de s’interroger en retour sur les identités nationales, en particulier sur leurs crises. Une attention particulière est accordée à deux chantiers historiographiques brûlants dont l’écho est persistant dans l’actualité de ce début de XXIe siècle : la politique française pendant la Seconde guerre mondiale et l’attitude de la diplomatie française dans la Palestine mandataire. Entre rayonnement et réciprocité se présente comme une étape d’une généalogie de la mondialisation culturelle, qui est un des aspects les plus méconnus des politiques étrangères des États-nations au XXe siècle. L’ouvrage offre donc un aperçu de ce que pourrait être, à la jonction de l’histoire culturelle et de l’histoire des relations internationales, une histoire de la diplomatie culturelle, qui reste encore à élaborer.

    Laurent Jeanpierre, Christophe Charle (dir.), La vie intellectuelle en France, Éditions Points, 2019, Points ( Histoire ), 847 p. 

    Laurent Jeanpierre, In Girum: les leçons politiques des ronds-points, La Découverte, 2019, 189 p.   

    Laurent Jeanpierre, Laurent Bonelli, Vincent Gayon, Frédéric Lebaron, Yohann Morival [et alii], Terrains économiques: savoirs, acteurs, méthodes, L'Harmattan, 2018, 160 p. 

    Laurent Jeanpierre, Philippe Roger, Benjamin Joineau (dir.), La Corée , Les Éditions de Minuit, 2018, 191 p. 

    Laurent Jeanpierre, Pierre Birnbaum, Philippe Roger (dir.), Michelle Perrot: L'histoire ouverte, Éditions de Minuit, 2017, 768 p. 

    Laurent Jeanpierre, Choukri Hmed (dir.), Révolutions et crises politiques: Maghreb / Machrek, Seuil, 2016, 125 p. 

    Laurent Jeanpierre, Christophe Charle (dir.), La vie intellectuelle en France, Éditions du Seuil, 2016, 653 p.  

    La 4e de couverture indique : "Depuis deux siècles, la vie des idées en France s'est étendue et en partie "démocratisée". L'élévation du niveau d'éducation de la population, la croissance du nombre des producteurs intellectuels, les bouleversements des modes de circulation des idées et de l'espace public, l'évolution des hiérarchies entre les domaines de la pensée et les changements de rapports de force culturels, scientifiques et politiques entre nations ont modifié la physionomie du pays. Toutefois des tendances longues n'en continuent pas moins de produire leurs effets, qui expliquent le rapport particulier que la France entretient avec ses intellectuels et la forme qu'y prennent leurs interventions. C'est à rompre avec une conception étroite de la vie des idées que s'emploie cette nouvelle histoire intellectuelle de la France contemporaine, ouverte sur les échanges extérieurs avec le monde, la diversité des domaines d'exercice de la pensée, les institutions et les mouvements généralement négligés. Ce second volume s'étend de 1914 à nos jours. Les conflits qui se succèdent de la Première Guerre mondiale à la guerre d'Algérie consacrent la valeur de l'engagement politique des intellectuels dans un contexte d'institutionnalisation du travail de la pensée. La déploration actuelle de leur perte d'influence et de légitimité dans l'espace public masque quant à elle la vitalité, la nouveauté et les voies inédites d'expression des idées qui, jusqu'à aujourd'hui, ambitionnent de comprendre le monde, voire de le transformer".

    Laurent Jeanpierre, Christophe Kihm (dir.), Les expositions à l'ère de leur reproductibilité, Artpress2, 2015, 98 p. 

    Laurent Jeanpierre, Olivier Roueff (dir.), La culture et ses intermédiaires: dans les arts, le numérique et les industries créatives, Éditions des Archives contemporaines, 2014, 267 p. 

    Laurent Jeanpierre, Florian Nicodème, Pierre Saint-Germier (dir.), Réalité(s) du possible en sciences humaines et sociales, ENS éd., 2013, 248 p. 

    Laurent Jeanpierre, Christophe Kihm, Denys Riout, L'art contemporain et la Côte d'Azur, les Presses du réel, 2011, 375 p.   

    Laurent Jeanpierre, Didier Fassin: "On n'entend pas ce que les gens ont à dire sur eux-mêmes", Le Monde, 2010, 8 p. 

    Laurent Jeanpierre, Élie During, Christophe Kihm (dir.), In actu: de l'expérimental dans l'art, Publications des Marquisats, École supérieure d'art de l'agglomération d'Annecy et les Presses du réel, 2009, Fabula, 404 p.   

    Laurent Jeanpierre, Richard Monnier, Grégoire Bergeret, ADERA éd., 2007, 85 p.   

    Laurent Jeanpierre (dir.), Le spectre rôde toujours: actualité du Manifeste du parti communiste, Nautilus, 2002, 125 p. 

  • Laurent Jeanpierre, Thomas Brisson, Kil-Ho Lee, « Western References in Asian Social Sciences (Japan and South Korea) », in Johan Heilbron, Gustavo Sora, Thibaud Boncourt (dir.), The Social and Human Sciences in Global Power Relations, Palgrave Macmillan, 2018, pp. 333-364 

    Laurent Jeanpierre, Christophe Charle, « La vie intellectuelle, mode d'emploi », in Charles, Christophe and Jeanpierre, Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 9-19 

    Laurent Jeanpierre, « Tribunes et plateaux : logiques de la visibilité intellectuelle », in Charles, Christophe and Jeanpierre, Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 494-500 

    Laurent Jeanpierre, Christophe Charle, « L'ancien et le nouveau », in Charles, Christophe and Jeanpierre, Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 839-867 

    Laurent Jeanpierre, « L'aventure des sciences de l'homme », in Charles, Christophe and Jeanpierre, Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 139-166 

    Laurent Jeanpierre, Christophe Charle, « Ouvertures et turbulences », in Charles, Christophe and Jeanpierre, Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 425-435 

    Laurent Jeanpierre, « L’idée de postmodernisme », in Charles Christophe, Jeanpierre Laurent (dir.), La vie intellectuelle en France, Editions du Seuil, 2016, pp. 744-748 

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, Séverine Sofio, « Types et degrés de la réalité curatoriale : une approche sociologique », in Commissaires d'Exposition Associés (C.E.A) (dir.), Réalités du commissariat d'exposition, Editions Beaux-Arts de Paris, 2015, pp. 13-33   

    Laurent Jeanpierre, « Le format comme convention », in Zerbib, David (dir.), Des formats de l'art, Les Presses du Réel, Les Editions de l'ESAAA, 2015, pp. 327-337 

    Laurent Jeanpierre, « L'action de la France Libre aux États-Unis : une stratégie en réseaux », in Cornil-Frerrot, Sylvain and Oulmont, Philippe (dir.), Les Français Libres et le monde, Nouveau Monde Édition, 2015, pp. 185-201 

    Laurent Jeanpierre, « Géographie culturelle de la guerre », in Aglan, Alya and Franck, Robert (dir.), La guerre-monde, Gallimard, 2015, pp. 2103-2149 

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, « Un precariato frammentato. Il commissario d’esposizione d’arte contemporanea in Francia », in Silvia Contarini, Luca Marsi (dir.), Precariato. Forme e critica della condizione precaria, Ombre corte, 2015, pp. 80-91 

    Laurent Jeanpierre, Olivier Roueff, « Introduction. Les territoires de l’intermédiation. Division sociale du travail et luttes de frontières », La Culture et ses intermédiaires dans les arts, les industries culturelles et le numérique, Editions des Archives Contemporaines, 2014, pp. -   

    Laurent Jeanpierre, Séverine Sofio, « Chronique d'une "mort" différée : les conservateurs de musée face aux commissaires d'exposition dans l'art contemporain français », in Poulard, Frédéric and Tobelem, Jean-Michel (dir.), Les conservateurs de musées : atouts et faiblesses d'une profession, La Documentation Française, 2014, pp. 111-139   

    Laurent Jeanpierre, « Vies et morts de la biopolitique », in Bert, Jean-François and Lamy, Jérôme (dir.), Michel Foucault : un héritage critique, CNRS Éditions, 2014, pp. 207-217 

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, « Un précariat fragmenté : le commissariat d'exposition d'art contemporain en France », in Contarini Silvia, Luca Marsi (dir.), Précariat : pour une critique de la société de la précarité, Presses Universitaires de Paris Ouest, 2014, pp. 81-92   

    Laurent Jeanpierre, « Revues modernistes et champs littéraires : problèmes de frontières », in Benoît Tadié (dir.), Revues modernistes anglo-américaines. Lieux d'échanges, lieux d'exil., Ent'revues, 2006, pp. 157-175 

    Laurent Jeanpierre, « France Forever », in Claire Andrieu, Philippe Braud, Guillaume Piketty (dir.), Dictionnaire Charles de Gaulle, Robert Laffont, 2006 

  • Laurent Jeanpierre, Maxime Gaborit, Romane Rozencwajg, « Les frontières négociées des assemblées citoyennes. Le cas de la Convention citoyenne pour le climat (2019-2020) Une délibération ouverte à l’extérieur », Participations - Revue de sciences sociales sur la démocratie et la citoyenneté, De Boeck Supérieur, 2023, n°3, pp. 173-204 

    Laurent Jeanpierre, Haud Guéguen, « Une critique alternative (en sciences sociales) : enquêter sur le front des possibles », Astérion, École Normale Supérieure de Lyon, 2022, n°27    

    Ce qu’il est parfois d’usage d’appeler la crise de la critique en sciences sociales, particulièrement en sociologie, possède aujourd’hui de multiples facettes. D’abord, une partie des chercheurs actuels, en particulier hors de France, récusent toute ambition de critique sociale à des savoirs censés s’en tenir à l’enregistrement et à l’explication de l’existant. Pour eux, les théoriciens et savants critiques sombrent dans l’idéologie et font courir un danger à la raison. Cette manière d’envisa...

    Laurent Jeanpierre, Bénédicte Apouey, Hazem Arab, Simon Baeckelandt, Philippe Bégout [et alii], « Co-construction in Deliberative Democracy: Lessons from the French Citizens’ Convention for Climate », Humanities and Social Sciences Communications, Nature, 2022, n°207     

    Laurent Jeanpierre, « L’empreinte discrète de L’Année sociologique au Collège de France », L'Année Sociologique, Presses Universitaires de France, 2022, n°1, pp. 163-183 

    Laurent Jeanpierre, Nicolas Heimendinger, « Entretien avec Laurent Jeanpierre », Marges - Revue d’art contemporain, Presses universitaires de Vincennes, 2021, n°32, pp. 120-133 

    Laurent Jeanpierre, Grégory Daho, Antoine Vauchez, Didier Bigo, Afrânio Garcia [et alii], « Les ficelles de l’enquête globale. Lectures, usages et débats autour de la sociologie de l’international d’Yves Dezalay », Cultures & conflits, CECLS - Centre d'études sur les conflits - Liberté et sécurité, L’Harmattan, 2021, n°119120, pp. 115-149 

    Laurent Jeanpierre, « Commune de Paris et Commune des ronds-points », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, Association Paul Langevin, 2021, n°148, pp. 109-122  

    Sans être absente, la référence explicite à la Commune de Paris est restée plutôt rare dans le mouvement dit des « Gilets jaunes », qui s’est déployé en France pendant plusieurs mois à partir de novembre 2018 et qui s’est étiolé, par phases successives, à partir du printemps 2019. Certes, elle fait partie des événements du passé qui ont parfois été mobilisés dans le discours éclaté et polymorphe de la mobilisation. Elle est par exemple apparue subrepticement sur certains murs de Paris à parti...

    Laurent Jeanpierre, Didier Bigo, Afrânio Garcia, Ron Levi, Johanna Siméant-Germanos [et alii], « Les ficelles de l’enquête globale », Centre d'études sur les conflits - Liberté et sécurité, 2020  

    En clôture du colloque qui est à l’origine de ce dossier, nous avions demandé à des chercheurs d’horizons disciplinaires et de générations différentes de revenir sur leur rencontre avec les travaux d’Yves Dezalay et d’évoquer dans le cadre d’un échange retranscrit ci-dessous, la manière dont chacun d’entre eux avait pu mobiliser, prolonger, nuancer, parfois réfuter les pistes et façons de faire d’Yves Dezalay. On trouve là une occasion de partager des réflexions plus personnelles sur les prat...

    Laurent Jeanpierre, « Exils de Pascale Casanova », COnTEXTES. Revue de sociologie de la littérature , Groupe de contact F.N.R.S. COnTEXTES, 2020, n°28  

    C’est un honneur pour moi de prendre part au juste hommage rendu à Pascale Casanova : pour des raisons scientifiques, parce que son œuvre a été une source d’inspiration cardinale dans mon travail, et pour des raisons personnelles, parce que j’ai eu le privilège de la fréquenter depuis 2005. Avant notre rencontre, qui eut lieu à l’occasion d’un colloque en Suisse d’un réseau scientifique international (Pour un espace des sciences sociales européen) animé par Franz Schultheis, le nom de Pascale...

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, « Destinies of artistic activity: visual artists’ plural forms of employment and trade-offs in a French region », Sociologia del Lavoro, Franco Angeli, 2020, n°157, pp. 125-144   

    Laurent Jeanpierre, Laurent Bonelli, « L'économie, l'international et la sociologie : combinaisons et variations. Introduction », Cultures & conflits, CECLS - Centre d'études sur les conflits - Liberté et sécurité, L’Harmattan, 2018, n°108, pp. 7-14 

    Laurent Jeanpierre, Laurent Bonelli, « L’économie, l’international et la sociologie : combinaisons et variations », Centre d'études sur les conflits - Liberté et sécurité, 2017  

    Ce numéro de Cultures & Conflits part d’un constat simple : les multiples travaux – foisonnants sur les questions de migrations, de frontières, de réfugiés et de sécurité – qui se réclament d’une sociologie politique de l’international ou se reconnaissent dans ses postulats demeurent plus rares concernant les processus et les « objets » économiques, au sens restreint de ce qui est produit et circule dans la sphère économique mais aussi au sens très large avec lequel Max Weber les a définis. ...

    Laurent Jeanpierre, Christelle Dormoy-Rajramanan, « Maverick or naive?The positions of the Université de Vincennes in French political science in the 1970s », Revue Française de Science Politique, Presses de Sciences Po, 2017, n°1, p. 121   

    Laurent Jeanpierre, Christelle Dormoy-Rajramanan, « Excentrée ou excentrique ? Positions de l’Université de Vincennes dans la science politique française des années 1970 », Revue Française de Science Politique, Presses de Sciences Po, 2017, n°1, pp. 121-143   

    Laurent Jeanpierre, Choukri Hmed, « Révolutions et crises politiques au Maghreb et au Machrek », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, Editions du Seuil, 2016   

    Laurent Jeanpierre, Marc Joly, Bernard Lahire, « Sacralité de l'art et pouvoirs d'attribution. Entretien avec Bernard Lahire », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2015, pp. 914-927 

    Laurent Jeanpierre, « Présentation du dossier Art et sacré : le cas Poussin », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2015, p. 885 

    Laurent Jeanpierre, Philippe Roger, René Schérer, « En traînée de poudre... », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2015, pp. 142-158 

    Laurent Jeanpierre, « Art et sacré : le cas Poussin », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2015 

    Laurent Jeanpierre, Elie During, « Fourier revient », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2015 

    Laurent Jeanpierre, Pierre-Henri Castel, Elie During, « Contrainte intérieure et fragilité de l'agir », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2014, pp. 225-238 

    Laurent Jeanpierre, « L'art sans frontières : dernière frontière de l'art ? Réflexions sur Magiciens de la terre et ses critiques », Journal de l'Université d'été de la Bibliothèque Kandinsky, Centre George Pompidou, 2014, pp. 9-13 

    Laurent Jeanpierre, Elie During, « Pierre-Henri Castel, les vies de l'esprit », Critique : revue générale des publications françaises et étrangères, Éditions de Minuit, 2014 

    Laurent Jeanpierre, Florian Nicodème, Pierre Saint-Germier, « Possibilités réelles », ENS Éditions, 2013  

    La montée en puissance des programmes constructionnistes en sciences humaines et sociales a eu pour conséquence – sans doute secondaire, mais généralement non interrogée – de rouvrir dans plusieurs disciplines le territoire du possible (Hacking, 2001). D’un côté, en insistant sur la dimension de contingence radicale, de possibilité, voire de réversibilité des phénomènes sociaux – qui va de pair avec l’idée de leur « constructibilité » – le constructionnisme social a ouvert une double opportun...

    Laurent Jeanpierre, Éric Monnet, « Manières de dire l’avenir sans nier l’incertitude : de l’économie aux sciences du climat. Entretien avec Michel Armatte », ENS Éditions, 2013  

    Le réel et le probable Tracés : Comment s’exprime aujourd’hui la distinction entre statistiques et probabilités ? Comment pourriez-vous décrire à un profane les différences d’approche vis-à-vis du réel et du probable entre un statisticien et un théoricien des probabilités ? Michel Armatte : La réponse la plus intéressante à ce type de questions n’est pas épistémologique mais historique. Le calcul des probabilités et la statistique (sous ses deux formes de statistique descriptive allemande et ...

    Laurent Jeanpierre, Vincent Farnea, « Des utopies possibles aux utopies réelles. Entretien avec Erik Olin Wright », ENS Éditions, 2013  

    Tracés : Vous avez entamé au début des années 1990 une réflexion sur les utopies sociales et politiques et essayé de définir ce que vous appelez une « science sociale émancipatrice » dans le cadre d’un projet de recherche collectif (    The Real Utopias Project) que vous avez dirigé. Votre dernier livre, Envisioning Real Utopias, est pour le moment la dernière pierre de cet édifice. Vous écrivez qu’il visait avant tout à « redonner un sens à la possibilité » d’un changement social émancipateu...

    Laurent Jeanpierre, Laurent Martin, F. Osa, « 68/86 : un grand retournement ? Cerisy dans la vie intellectuelle française », Histoire@Politique : revue du Centre d'histoire de Sciences Po, Centre d'histoire de Sciences Po, 2013, n°20 

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, Séverine Sofio, « Représenter les commissaires d’exposition en France : une intermédiation collective impossible ? », Le Mouvement social, Presses de Sciences Po (Anciennenment : Éditions de l'Atelier, Éditions ouvrières, La Découverte), 2013, n°43     

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Drouet, Stéphanie Dupouy, Florian Nicodème, « Contrefactuels en histoire : du mot au mode d’emploi. Le moment de la new economic history », Editions Hermann, 2012  

    L’approche contrefactuelle désigne, pour les historiens, une forme particulière que peut prendre le récit historique ou la pratique de l’histoire. Raisonner contrefactuellement, dans ce cadre, c’est se demander ce qui se serait passé si la réalité avait été différente. Le plus souvent, il s’agit de supprimer en pensée un événement ou une réalité historique et de s’interroger sur les conséquences de cette suppression. Que se serait-il passé si Hitler était mort pendant la Première Guerre mondi...

    Laurent Jeanpierre, « Invention et réinventions transatlantiques de la Critical Theory », L'Homme - Revue française d'anthropologie, Éditions de l'EHESS , 2008, pp. 247-270 

    Laurent Jeanpierre, « Toward a Transnational History of the Social Sciences », Journal of the History of the Behavioral Sciences, Wiley, 2008, n°2, pp. 146-160 

    Laurent Jeanpierre, « Analyser les pratiques discursives en sciences sociales », Bulletin de Méthodologie Sociologique / Bulletin of Sociological Methodology, SAGE Publications, 2008, n°97, pp. 39-47 

    Laurent Jeanpierre, « Une sociologie foucaldienne du néolibéralisme est-elle possible ? », Sociologie et Sociétés, Presses de L'Universite (University of Montreal), 2006, n°2, pp. 87-111 

    Laurent Jeanpierre, « 'Tyrannie du national' et circulation sélective des réfugiés. Le cas des émigrations politiques françaises aux Etats-Unis », Pro-Asile, , 2005, n°12, pp. 29-31 

    Laurent Jeanpierre, « Par-delà la biopolitique », Critique: Studies in Contemporary Fiction, Taylor & Francis (Routledge), 2005, pp. 352-368 

    Laurent Jeanpierre, « Pierre Bourdieu par Pierre Bourdieu, ou la question du double », Critique: Studies in Contemporary Fiction, Taylor & Francis (Routledge), 2004, n°689, pp. 776-790 

    Laurent Jeanpierre, « Retournements du détournement », Critique: Studies in Contemporary Fiction, Taylor & Francis (Routledge), 2002, pp. 645-659 

    Laurent Jeanpierre, « Politiques de l'écrivain ou politiques de l'écriture ? », French Politics, Culture & Society, Berghahn, 2001, pp. 70-81 

    Laurent Jeanpierre, « Un dissident du trotskysme aux États-Unis : Meyer Schapiro (1904-1996) », Dissidences, Bord de l'eau, 2000, n°7, pp. 37-38 

    Laurent Jeanpierre, « Penser face à (la fin de) l'histoire. Kojève, Sartre, Bataille », Critique: Studies in Contemporary Fiction, Taylor & Francis (Routledge), 2000, n°636, pp. 415-425 

    Laurent Jeanpierre, « Paul Vignaux, inspirateur de la Deuxième gauche : récits d’un exil français aux États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale », Matériaux pour l'histoire de notre temps, La contemporaine, 2000, pp. 48-56   

  • Laurent Jeanpierre, « Fétiche », in Gisèle Sapiro (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, CNRS Editions, 2020 

    Laurent Jeanpierre, « Hégémonie », in Gisèle Sapiro (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, CNRS Editions, 2020 

    Laurent Jeanpierre, « Marxisme », in Gisèle Sapiro (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, CNRS Editions, 2020 

    Laurent Jeanpierre, « Totalisation », in Gisèle Sapiro (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, CNRS Editions, 2020 

  • Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, L’offre et la demande d’arts visuels en Grand Est. Un diagnostic sociologique, 2019, 254 p. 

    Laurent Jeanpierre, Isabelle Mayaud, Séverine Sofio, Sociohistoire des intermédiaires du marché de l’art (XVIIIe-XXIe s.), 2012, 38 p.   

  • Laurent Jeanpierre, « Vers une nouvelle théorie politique environnementale », le 12 décembre 2022  

    Organisé par le Centre d’études européennes et de politique comparée (CEE), le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), l'École de la recherche et l'Ecole de droit, Science Po

    Laurent Jeanpierre, « Localiser l’épreuve démocratique », le 14 novembre 2019  

    Colloque international du GIS Démocratie et Participation

ActualitésPublicationsENCADREMENT DOCTORAL
  • Daniil Volkovskii, Agreement and disagreement between citizens and authorities in social media discussions in Russia in the conditions of crisis COVID 19., thèse en cours depuis 2024 en co-direction avec Julien Boyadjian 

    Robin Grindard, La politisation de l'abstention sous la IIIème république , thèse en cours depuis 2023 

    Sarah Rougnant, Soutien à la création et aux carrières artistiques. Une enquête sociologique sur les dispositifs du Centre National des Arts Plastiques (CNAP), thèse en cours depuis 2022 

    Pierre Musseau, Politiques et controverses autour de la comptabilité socio-environnementale. Enquête sur un projet de "révolution comptable"., thèse en cours depuis 2022 en co-direction avec Alexandre Pierre Rambaud 

    Louis Bievelot- -fischer, Pour une étude mésosociologique des politisations plurielles du monde du vin nature., thèse en cours depuis 2022 

    Romain Aubert, (En)quête de légitimité. La réforme du CESE ou la conversion participative d’une institution marginalisée., thèse en cours depuis 2021 en co-direction avec Delphine Dulong  

    Face à la « crise de la représentation politique » mais également aux défis environnementaux et climatiques, ce travail à l’ambition d’apporter une contribution aux recherches sur l’activité réformatrice des institutions ainsi que sur la construction de leur légitimité. Pour ce faire, il a vocation à s'intéresser particulièrement à une institution peu connue et oubliée par la recherche universitaire : le CESE, troisième assemblée constitutionnelle. À l’occasion de son actualité (projet de réforme constitutionnelle, organisation de Conventions citoyennes …) elle constitue pourtant un terrain fécond, de par les caractéristiques qu’elle présente, pour approfondir les réflexions sur les conditions de conversion des institutions notamment vers la participation citoyenne ainsi que sur l’articulation et les luttes entre démocratie sociale, participative-délibérative (principalement par la pratique du tirage au sort) et élective. Plus largement, ce travail sera l’occasion de s’intéresser à l’essor et au déploiement d’une conversion participative de l’État ainsi qu’aux imaginaires et possibles autour de la question d’une troisième assemblée pour la réalisation d’une « représentation politique autrement ».

    Tallullah Frappier, La plateforme numérique de débat comme objet de design , thèse en cours depuis 2020 

    Nicolas Jara-Joly, le socialisme au XXIème siècle". La transformation du ,parti travailliste et la médiation intellectuelle de la période Cobyn, thèse en cours depuis 2019 en co-direction avec Cornelius Crowley  

    Le corbynisme est analysé en tant que cas d'étude d'un moment de transformation partisane. Nous développons notre analyse de points de vues divers, en particulier : de l'historiographie de l'organisation et de l'évolution de sa morphologie, des traditions et des ancrages sociaux des courants du parti;la médiation sociale des idées; des trajectoires individuelles et la dynamique du conflit intra-partisan.

    Isabelle Mayaud, Sciences de la musique sans frontières ? : Contribution à une sociologie du processus de primitivisation, thèse soutenue en 2018 à Paris 8, membres du jury : Esteban Buch (Rapp.), Vincent Dubois (Rapp.), Emmanuelle Sibeud et Arnaud Saint-Martin  

    Cette thèse analyse la division moderne des domaines des sciences de la musique et la hiérarchisation des répertoires musicaux qui lui est corrélative. La recherche s’appuie sur une enquête socio-historique menée à partir du cas français et sur plusieurs sources courant du début du XVIIème au milieu du XXème siècle. Elle mobilise des ressources manuscrites et imprimées (documents administratifs, archives savantes et muséales, actes de congrès et autres imprimés issus des Expositions universelles, archives du secteur de l’édition, pièces documentant la collecte et la conservation d’instruments de musique, de chansons et d’enregistrements sonores) qui sont traitées à l’aide de plusieurs méthodes (analyse lexicale, sociologie des textes, bases de données, ethnographie historique). L’enquête met en lumière une configuration de patrimonialisation de la musique pilotée par l’État-nation français, qui participe d’un processus de longue durée de différenciation du social par la musique. Des opérations de collecte et de conservation des objets de musique sont impulsées par le Second Empire et confortées par la Troisième République. Elles concourent à assigner certains répertoires, portés par des populations vivantes, à une anhistoricité – un en-deçà de l’histoire. Ce partage est analysé comme un système de domination symbolique institué par plusieurs administrations (Instruction publique, Commerce et Industrie, Beaux-Arts, Colonies), produit et reproduit par différent·e·s agent·e·s mandaté·e·s par l’État (Professeur·e·s, académicien·ne·s, conservateurs et conservatrices, dirigeant·e·s territoriaux).

    Abdoulaye Wane, Diaspora militante et Etat ethno-racial en Mauritanie (1987-2017), thèse soutenue en 2018 à Paris 8, membres du jury : Françoise Blum (Rapp.), Maria-Benedita Basto et Clemens Zobel  

    Cette thèse porte sur la politique transnationale des émigrés mauritaniens contre leur État depuis 1987 et constitue une contribution à l’étude des politiques d’exil. Elle restitue les moments les plus importants d’une lutte menée hors du territoire national en réaction à la discrimination sociale et politique des Négro-mauritaniens depuis l’indépendance du pays en 1960. La thèse part plus spécifiquement de la politique de répression de l’État mauritanien contre une partie de sa population après la publication du « Manifeste du Négro-mauritanien » en 1986 par l’organisation politique des Forces de libération africaines de Mauritanie (FLAM) créées le 14 mars 1983. En même temps qu’elle étudie une mobilisation politique transnationale, la recherche s’appuie sur une réflexion autour des spécificités de l’État mauritanien. Il s’agit de comprendre comment cet État, fonctionnant sur la base des solidarités tribales, a créé les conditions politiques de contestation de sa légitimité puis est parvenu à résister, malgré son instabilité, à la contestation en provenance de sa population exilée. L’enquête s’appuie sur une recherche documentaire dans la presse mauritanienne, sur des rapports d’organisations internationales, sur des observations ethnographiques et sur des entretiens (n=60) avec des acteurs politiques mauritaniens effectués sur trois terrains différents (France, Belgique, Mauritanie). La première partie de la thèse décrit les causes et les modes d’existence de l’émigration politique mauritanienne. Sont abordés la dimension ethno-raciale de l’État mauritanien, les phases et les lieux d’exil des opposants politiques ainsi que les problèmes qu’ils rencontrent dans la quête de reconnaissance de leur statut de réfugiés. Une deuxième partie porte sur les organisations politiques et les modalités de politisation de l’émigration et explique les raisons de la crise de légitimité progressive de leurs dirigeants. Un troisième et dernier moment de la thèse traite des causes et des effets de la politique du retour des réfugiés mauritaniens officialisée par le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi à partir de 2007. Après avoir interrogé l’évolution du discours politique de l’État mauritanien sur les réfugiés, le choix et les conséquences sociales et politiques du retour au pays d’une partie des réfugiés sont analysés. La thèse souligne que ce retour actuel des réfugiés et des opposants politiques mauritaniens dans leur pays d’origine, même dans un contexte de démocratisation relative, ne s’est pas traduit par une prise en compte de leurs revendications et par un recul des discriminations. Prise dans son ensemble, la thèse peut donc être lue comme l’analyse des raisons de l’échec d’une politique de contestation en situation d’exil.

    Georges Meyer, L'Etat, l'art et les moeurs : sociologie historique de la censure du cinéma (1961-1975), thèse soutenue en 2017 à Paris 8 sous la direction de Violaine Roussel, membres du jury : Brigitte Gaïti (Rapp.), Gisèle Sapiro (Rapp.), Emmanuel Taïeb et Philippe Bouquillion  

    Cette thèse a pour objet la transformation de l’institution de la censure d’État du cinéma en France, entre 1961, date d’une réforme qui la durcit, à 1975, année de la mise en place de la classification « X » et de l’octroi de la liberté d’expression au cinéma. Son enjeu principal est d’interroger, à travers cette institution et sa mutation, ce qui se joue dans-la bifurcation des années 1968. Pour cela, cette thèse est construite autour d’un cadre théorique spécifique articulant notamment la sociologie politique des institutions et la théorie de la « civilisation » de Norbert Elias. Ses matériaux sont essentiellement des archives étatiques, mais aussi des sources imprimées comme la presse.

    Luc Sigalo Santos, L'administration des vocations, ou la spécialisation d'une action publique généraliste. : enquête sur le traitement du chômage artistique en France., thèse soutenue en 2016 à Paris 8 sous la direction de Vincent Dubois, membres du jury : Pierre-Yves Baudot (Rapp.), Anne-Cécile Douillet (Rapp.), Thierry Berthet  

    Cette thèse analyse le traitement public du chômage artistique en France. Elle prend pour objet deux dispositifs publics spécialisés, qui visent le « retour à l’emploi » d’artistes demandeurs d’emploi et/ou allocataires du RSA : l’un relève de la politique nationale de l’emploi (ANPE puis Pôle emploi spectacle), l’autre de la politique sociale départementale (RMI puis RSA artiste). L’enquête, socio-historique et ethnographique, a été conduite à Paris et en Gironde entre 2010 et 2014. Elle a permis de récolter un matériau diversifié, composé d’archives administratives, d’entretiens et d’observations, à tous les niveaux de l’action publique – ministères et élus locaux, experts et partenaires institutionnels, cadres territoriaux, street-level bureaucrats et usagers. La spécialisation sectorielle d’une action publique généraliste accentue les tensions relatives à l’organisation institutionnelle, à la formalisation des rôles professionnels et au traitement ordinaire des usagers. D’un côté, les agents de l’administration des vocations tentent d’adapter des usagers suspectés d’onirisme à la « réalité » du marché de l’emploi. De l’autre côté, ils s’efforcent eux-mêmes de se conformer au fonctionnement d’un domaine d’activités peu porté vers l’intermédiation publique. L’incongruité du rapprochement entre logique bureaucratique standardisée et impératif artistique de singularisation permet de renouveler l’analyse de l’individualisation d’un traitement de masse, caractéristique structurante de la régulation politique des rapports sociaux.

  • Matthias Fringant, Les usages sociaux de la réflexivité : contribution à une sociologie historique du mot et de l'idée, thèse soutenue en 2023 à Paris EHESS sous la direction de Johan Heilbron, membres du jury : Stéphane Dufoix, Nathalie Richard et Gisèle Sapiro  

    En mobilisant diverses traditions de sciences sociales, cette thèse de doctorat propose d’étudier dans une perspective de sociologie historique l’idée de réflexivité, saisie par une reconstitution des emplois du mot. La première partie de la thèse tente par l’utilisation de bases de données numériques de reconstruire de manière systématique les principales séries d’usages des mots "reflexivity" et "réflexivité", depuis les premières utilisations d’un de ces termes repérées en Angleterre au XVIIe siècle jusqu’à la fin des années 1980. Ces occurrences sont mises en relation avec l’histoire et la structure des espaces anglophone et francophone dans lesquels elles s’inscrivent. En constatant empiriquement leur forte présence dans le lexique des sciences humaines et sociales à partir de la fin des années 1980, la deuxième partie du travail abandonne la reconstruction systématique des usages des termes. Deux séries importantes d’usages considérées comme cas du possible sont étudiées notamment à l’aide d’archives et d’entretiens. La première est l’utilisation faite par Ulrich Beck, Anthony Giddens et Scott Lash de "Reflexive Modernization" entre 1986 et 1994, la seconde celle faite par Pierre Bourdieu de "réflexivité" entre 1987 et 2001. Un chapitre conclusif reconstitue les interactions entretenues par ces utilisateurs du terme. Les principaux résultats de l’enquête sont synthétisés et mis en perspective dans la conclusion de la thèse.

    Paul Sanders, 21st Century Commons , thèse soutenue en 2022 à Paris 8 sous la direction de Yves Sintomer  

    Toute tentative d'appréciation du concept des communs du XXIe siècle est inondée d'une pléthore de revendications souvent très hétérogènes, sans outil évident pour les décrire, ni méthode pour un comparatif structuré. La première partie de la thèse cherche donc de construire une méthodologie appropriée pour entreprendre un tel exercice. Elle conclut que des descriptions harmonisées des communs devraient se concentrer sur cinq dimensions clés ; tandis que les comparaisons structurées peuvent être mieux faites en déterminant la position de chaque commun, relative à un concept-racine sur une échelle de généralité. La deuxième partie de la thèse cherche à utiliser ces outils afin de cartographier le paysage des différentes réclamations des communs. Afin d'être gérable, l'étude est limitée à 20 communs, sélectionnés afin d'inclure la plus grande variété possible de types de commun et de revendiquant. La dernière section présente les conclusions de la partie 2. Parmi celles-ci, la plus importante était qu'il n'y avait aucune caractéristique identifiable commune à toutes les réclamations des communs. Les communs globaux et de l’Internet ont formé des clusters, mais l'étude suggère qu'il existe de solides arguments pour les nommer biens communs plutôt que communs. De nombreuses revendications étant assez récentes, la question se pose de l'existence ou non d'un mouvement des communs. Après avoir étudié les preuves, la thèse conclut qu'un déclin d'intérêt semble possible, bien que cela nécessite d'être confirmé par des recherches supplémentaires. La thèse conclut en suggérant que ses découvertes pourraient constituer un élément constitutif d'une théorie plus générale des communs.

    Paul Sanders, 21st Century Commons, thèse soutenue en 2022 sous la direction de Yves Sintomer, membres du jury : Estelle Ferrarese (Rapp.), Mikhaïl Xifaras (Rapp.), Paula Cossart et Mélanie Dulong de Rosnay   

    Emeline Fourment, Théories en action : appropriations des théories féministes en milieu libertaire à Berlin et Montréal, thèse soutenue en 2021 à Paris Institut détudes politiques sous la direction de Florence Haegel, membres du jury : Pascale Dufour (Rapp.), Catherine Achin (Rapp.), Anne Kwaschik et Delphine Naudier  

    À la croisée de la sociologie du militantisme, de l’histoire sociale des idées politiques et des études de genre, cette thèse examine les appropriations des théories féministes dans les milieux libertaires berlinois et montréalais. La comparaison qu’elle propose repose sur deux enquêtes ethnographiques qui mêlent observations, entretiens biographiques et archives. Ce travail souligne le caractère intellectualisé du militantisme libertaire, mettant en évidence une imbrication entre monde universitaire et milieu libertaire. Il montre également que plus les libertaires sont isolés de la vie politique de leur pays, plus ils et elles développent des modes d’action préfiguratifs, centrés sur la création d’espaces autonomes du reste de la société. Se penchant ensuite sur la manière dont les féministes libertaires articulent théorie et pratique, cette thèse met en lumière trois appropriations possibles (hétéronormée, lesbienne, sexuelle-intersectionnelle) de la théorie queer. Elle soutient alors que les appropriations des théories féministes sont façonnées par des processus de différenciation de sous-milieux libertaires autant qu’elles y participent. Enfin, ce travail analyse les mobilisations féministes contre les violences sexuelles internes aux milieux libertaires, et la manière dont celles-ci font intervenir les théories féministes matérialistes, queer et/ou intersectionnelle. Dans ce cadre, il montre que les théories ne peuvent être considérées isolément : elles apparaissent surtout sous des formes cristallisées dans des modes d’organisation (mixité ou non) et d’action (offensive ou pédagogie).

    Antoine Aubert, Devenir(s) révolutionnaire(s) , thèse soutenue en 2020 à Paris 1 sous la direction de Frédérique Matonti  

    Comment expliquer que les idées « révolutionnaires » soient devenues si influentes dans les années ouvertes par la crise de Mai-Juin 1968 ? Et comment expliquer leur effondrement ? Qui furent les « intellectuels marxistes » en France au cours des années 1968-1981 ? Et que sont-ils devenus au cours des années 1980, traditionnellement décrites comme celles de la « crise » et du grand retournement ? Cette thèse, qui se revendique de l’histoire sociale des idées politiques, entend apporter des réponses à ces questions à travers une enquête reposant à la fois sur des entretiens, sur des archives (d’intellectuels, d’éditeurs, d’institutions, privées), sur l’analyse de nombreux ouvrages et sur des analyses statistiques. Plus précisément, le choix opéré a été d’étudier principalement trois éditeurs « marxistes » de la période : Maspero, Anthropos, et les Éditions Sociales. En prenant cette porte d’entrée pour saisir la réalité de la vie intellectuelle « révolutionnaire » entre les années 1968 et ses évolutions jusque dans les années 1990, cette thèse s’intéresse à la réalité de la production de 1700 ouvrages « marxistes », à la circulation et à la réception des idées « révolutionnaires » dans les années 1968-1981, à la sociologie de 813 intellectuels « révolutionnaires » et à leurs modalités d’engagements. Dans le même temps, en étudiant le « destin » de cette population d’intellectuels au cours des années 1980, ce travail se donne les moyens d’étudier précisément les devenirs révolutionnaires et les « vies ultérieures » des années 1968, à savoir les façons dont ces idées et ces engagements se transforment dans l’après-1981. En tenant ensemble ces deux décennies à partir de la même population de 813 intellectuels « révolutionnaires », ce travail contribue à écrire une histoire sociale des marxismes français.

    Antoine Aubert, Devenir(s) révolutionnaire(s), thèse soutenue en 2020 sous la direction de Frédérique Matonti, membres du jury : Annie Collovald (Rapp.), Jean-Numa Ducange (Rapp.), Gisèle Sapiro et Boris Gobille    

    Comment expliquer que les idées « révolutionnaires » soient devenues si influentes dans les années ouvertes par la crise de Mai-Juin 1968 ? Et comment expliquer leur effondrement ? Qui furent les « intellectuels marxistes » en France au cours des années 1968-1981 ? Et que sont-ils devenus au cours des années 1980, traditionnellement décrites comme celles de la « crise » et du grand retournement ? Cette thèse, qui se revendique de l’histoire sociale des idées politiques, entend apporter des réponses à ces questions à travers une enquête reposant à la fois sur des entretiens, sur des archives (d’intellectuels, d’éditeurs, d’institutions, privées), sur l’analyse de nombreux ouvrages et sur des analyses statistiques. Plus précisément, le choix opéré a été d’étudier principalement trois éditeurs « marxistes » de la période : Maspero, Anthropos, et les Éditions Sociales. En prenant cette porte d’entrée pour saisir la réalité de la vie intellectuelle « révolutionnaire » entre les années 1968 et ses évolutions jusque dans les années 1990, cette thèse s’intéresse à la réalité de la production de 1700 ouvrages « marxistes », à la circulation et à la réception des idées « révolutionnaires » dans les années 1968-1981, à la sociologie de 813 intellectuels « révolutionnaires » et à leurs modalités d’engagements. Dans le même temps, en étudiant le « destin » de cette population d’intellectuels au cours des années 1980, ce travail se donne les moyens d’étudier précisément les devenirs révolutionnaires et les « vies ultérieures » des années 1968, à savoir les façons dont ces idées et ces engagements se transforment dans l’après-1981. En tenant ensemble ces deux décennies à partir de la même population de 813 intellectuels « révolutionnaires », ce travail contribue à écrire une histoire sociale des marxismes français.

    Laurene Le Cozanet, La professionnalisation des études : Quand l'Université (s')adapte à l'économie, thèse soutenue en 2019 à Ecole doctorale SDOSE Paris sous la direction de Brigitte Le Grignou, membres du jury : François Sarfati (Rapp.), Christine Musselin (Rapp.), Emmanuelle Picard et Dominique Damamme  

    Cette thèse analyse comment les universités françaises relaient l’exigence de « professionnalisation des études ». Elle restitue le foisonnement de mobilisations, de conflits, de logiques institutionnelles et de dispositifs sur lesquels repose ce changement de régime universitaire. L’analyse est fondée sur des matériaux (archives, entretiens, observations) recueillis au cours d’une triple enquête : une recherche historique sur le succès de la professionnalisation comme catégorie du gouvernement des formations, une étude multi située de la politique de professionnalisation, au service d’une mise en relation optimale entre universités et économie, et une comparaison des usages de la professionnalisation dans les départements de lettres, de droit et de physique de trois établissements. Présentée comme une ressource pour les étudiants confrontés à un avenir incertain, et pour les personnels aux prises avec une remise en cause de leur "utilité sociale", la professionnalisation est aussi un moyen de gouverner les universités.

    Josselin Tricou, Des soutanes et des hommes : subjectivation genrée et politiques de la masculinité au sein du clergé catholique français depuis les années 1980, thèse soutenue en 2019 à Paris 8 sous la direction de Éric Fassin, membres du jury : Catherine Achin (Rapp.), Céline Béraud (Rapp.), Isabelle Clair et David Paternotte  

    Cette thèse se situe à la croisée de la sociologie du catholicisme et des études de genre. Elle prend pour objet la masculinité des prêtres à partir du modèle théorique de R. Connell. Dans un contexte de perte d’emprise de l’Église catholique au sein des sociétés occidentales, que redouble la démocratisation sexuelle qui s’y déploie, elle analyse les caractéristiques des masculinités cléricales à une triple échelle : les processus de subjectivation genrée des prêtres, les divers régimes locaux de genre dans un catholicisme fragmenté, et, enfin, les mobilisations émergentes autour des questions de masculinité au sein du pôle d’identité du catholicisme contemporain. La toile de fond de cette recherche est la bataille entre les différentes fractions du catholicisme dont le genre est devenu un terrain privilégié. La thèse analyse d’abord les effets d’une disqualification symbolique dans l’ordre du genre de la masculinité sacerdotale qui vient percuter un secret institutionnel bien gardé jusque-là, celui de la fonction de placard qu’avait l’institution cléricale. Or, loin que le discours actuel du Vatican contre l’homosexualité soit dissuasif, il a pour effet paradoxal d’attirer les candidats homosexuels au sacerdoce, alors même que la vocation a largement été désertée par les hétérosexuels après l’avoir été par les classes populaires. Elle analyse ensuite les efforts de l’appareil catholique pour contrer cette disqualification. Genre et sexualité sont ici pris dans une triple dimension : lieu d’expression du pouvoir au sein de l’institution, champ de luttes pour maintenir la position de l’institution au sein de la société et, enfin, objet de politiques mises en œuvre par ses agents.

    Constance Pâris de Bollardière, "La pérennité de notre peuple" : une aide socialiste juive américaine dans la diaspora yiddish, le Jewish Labor Committee en France (1944-1948), thèse soutenue en 2017 à Paris EHESS sous la direction de Nancy L. Green, membres du jury : Catherine Collomp, Michel Dreyfus, Audrey Kichelewski et Enzo Traverso  

    Après la Shoah, l'aide matérielle et le soutien moral des Juifs des Etats-Unis jouent un rôle considérable dans la reconstruction du monde juif en Europe. Cette vaste entreprise philanthropique se manifeste aussi bien de façon unifiée que par l’intermédiaire de réseaux plus ciblés, chaque pan du monde juif des Etats-Unis souhaitant secourir les siens et œuvrer de manière indépendante à la pérennité de sa vision particulière de la judaïcité. C’est dans ce cadre que les socialistes juifs américains du Jewish Labor Committee, organisation antinazie créée à New York en 1934, se tournent vers les rescapés du monde yiddish non-communiste et plus particulièrement vers ceux résidant en France, majoritairement concentrés dans et autour de la capitale. Paris, ville vers laquelle affluent à la fin des années 1940 des milliers de survivants de la Shoah, dont nombre de transitaires en route vers des destinations outre-mer, représente alors un des lieux d’espoir pour l’épanouissement de leur culture minoritaire. L’étude de cas de l’intervention du Jewish Labor Committee en France de 1944 à 1948 présente la singularité des préoccupations des bundistes et des socialistes de culture yiddish à la sortie du génocide et au début de la guerre froide. Elle observe l’évolution de leurs idées comme leurs efforts et doutes pour affronter les défis de l’après-guerre et perpétuer leur projet politique et culturel national hors de leur territoire d’origine en Europe orientale. Pour approfondir ces thématiques, cette recherche met en perspective le monde yiddish avec les mondes juif et non-juif, socialiste et syndical, qui l’environnent. Etant le cadre de vastes échanges de courriers, d’informations, d’hommes, de biens matériels et d'argent entre les Etats-Unis et la France, l’action du Jewish Labor Committee se prête à l’analyse de l’interaction entre des immigrés situés dans deux pôles d’une migration divergente. Inspirée par les recherches sur le transnationalisme des primo-immigrés, cette étude transpose les questions de circulations entre les frontières et de négociations entre deux environnements nationaux dans le cas d’acteurs se tournant non pas vers leur pays d’origine mais vers un autre centre de leur diaspora. Appréhendée via cette rencontre entre socialistes juifs aux Etats-Unis et en France, une telle approche transnationale amène à questionner les degrés de proximité entre deux centres de la « diaspora yiddish » au lendemain de la destruction.

    Ève Gianoncelli, La pensée conquise : contribution à une histoire intellectuelle transnationale des femmes et du genre au XXe siècle., thèse soutenue en 2016 à Paris 8 sous la direction de Eleni Varika, membres du jury : Frédérique Matonti (Rapp.), Brent Hayes Edwards (Rapp.), Martine Leibovici et Enzo Traverso  

    Cette thèse porte sur les processus de constitution – problématiques – de femmes comme intellectuelles au XXe siècle. Pour ce faire, trois cas, nés vers 1900, sont étudiés : l’artiste et écrivaine proche des avant-gardes en général et des surréalistes en particulier dans le Paris des années 1920-1930 Claude Cahun, la journaliste martiniquaise du Paris colonial de ces mêmes années et figure militante et intellectuelle importante de la Martinique d’après-guerre Paulette Nardal ; et enfin Viola Klein, juive tchèque exilée en Angleterre et pionnière oubliée de la sociologie féministe. Cette étude repose sur une analyse conjointe de la trajectoire et de la production culturelle de chacune de ces femmes. Il s’agit de comprendre comment leur expérience intellectuelle s’enracine dans des processus de prise de conscience de soi en tant que sujet renvoyé à l’altérité, femme, mais aussi sujet racialisé, qui déterminent les formes d’entrée dans la pensée. Cette thèse rend également compte du positionnement complexe, dedans/dehors, de ces femmes par rapport aux mouvements (le surréalisme pour Cahun, la culture noire en général et la négritude en particulier pour Nardal), et disciplines (la sociologie de la connaissance et du travail pour Klein) « dans » lesquels elles s’inscrivent et ce qu’elles y apportent ainsi que la pluralité des formes de pensée et d’engagement qu’une telle position liminale révèle. Il s’agit enfin d’interroger le processus de diffusion et de réception des oeuvres et des idées, dans lequel les logiques d’invisibilisation et d’oubli, mais aussi de redécouverte, jouent un rôle fondamental. Ce dernier point ouvre sur une réflexion relative aux logiques (nationales, disciplinaires, idéologiques) de construction du savoir. Cette thèse, interrogeant le devenir sujet des femmes et ce que peut lui faire la postérité, se propose ainsi de contribuer à une histoire intellectuelle transnationale des femmes et du genre.

  • Aurélien Gabriel Cohen, La vie sans les vivants ? : régimes de précarité et relations aux vivants dans la modernisation agricole et les agroécologies radicales en France, des années 1960 à aujourd'hui, thèse soutenue en 2023 à Université Paris Cité sous la direction de Denis Chartier et Virginie Maris, membres du jury : Christophe Bonneuil (Rapp.), Léa Sébastien, Aliénor Bertrand et Raphaël Larrère  

    En partant d'une redescription des relations de l'agriculture à la précarité, entendue comme un sentiment complexe à la croisée des expériences de l'instabilité ontologique, de l'incertitude épistémique et de l'insécurité sociale, l'objet de cette recherche est d'abord de saisir le rôle d'une certaine rationalité modernisatrice dans le processus de transformation de l'agriculture française au tournant des années 1960-1970 : ce que nous nommons le vitalisme entrepreneurial. Cette formule désigne une réforme de la légitimation de la société de marché qui repose non plus sur sa naturalisation, comme dans le libéralisme classique analysé par Polanyi, mais sur une vitalisation évolutionniste des logiques de marché et de concurrence. Une bascule depuis l'ordre de la nature vers le désordre de la vie, où l'intensité vitale se confond avec le risque économique, et qui trouve l'un de ses fondements philosophiques en France dans l'évolutionnisme moraliste et modernisateur de Bergson. En agriculture, ce vitalisme constitue un levier puissant pour déplacer la précarité légitime depuis les relations aux vivants vers les relations commerciales, défaisant le paysan pour instituer l'agri-entrepreneur. En examinant le rôle discret, mais structurant, de ce vitalisme entrepreneurial, influencé par la pensée néolibérale, dans les politiques agricoles françaises et leurs légitimations théoriques et politiques, nous cherchons à montrer l'importance croissante de la double figure de l'ingénieur (agronome) et de l'entrepreneur (agricole) dans ce processus. Le premier comme agent du surcontrôle agrotechnique des dynamiques du vivant, le second comme nouvelle norme du travail agricole, pris dans un rapport constant aux instabilités des processus marchands. Nous essayons ainsi de caractériser la modernisation agricole comme un renversement de la précarité légitime, depuis la relation labile et variable aux vivants qui caractérise les pratiques paysannes, vers la relation aux marchés qui structure et détermine l'agro-industrie modernisée. Ce travail historique nous permet de mieux comprendre ensuite, à partir d'enquêtes de terrain, la manière dont des pratiques agroécologiques contemporaines radicales cherchent à refaire de la place aux instabilités des vivants, en imaginant des pratiques, des techniques et des relations non dualistes. Pour autant, en mettant davantage l'accent sur des dispositifs techniques sans dessiner une logique proprement politique permettant leur généralisation, nous soutenons que ces pratiques agroécologiques, tout en demeurant structurellement marginales, ne parviennent pas à se libérer réellement du régime de précarité issu de la modernisation et du cadre entrepreneurial dominant, qui continuent de leur imposer la logique du marché comme réalité supérieure. Le dernier enjeu de ce travail est donc d'esquisser les conditions sociales et politiques d'une bascule de la précarité légitime depuis les aléas du marché vers les instabilités du vivant, permettant la constitution d'un front agroécologique pensé et vécu comme un véritable mouvement social. Dans cette perspective, nous nous efforçons d'ébaucher en conclusion une réflexion philosophique opposant deux logiques institutionnelles, l'arche et la forteresse, afin de penser plus précisément l'articulation d'une condition terrestre et d'un devenir politique à la fois destituant et instituant. Ainsi, il s'agit notamment d'envisager la multiplication concrète des dispositifs d'érosion, au sens d'Erik Ollin Wright, du capitalisme agricole modernisateur, en nous inspirant plus particulièrement des logiques autogestionnaires de mise en sécurité sociale, visant à la fois la conquête d'une souveraineté politique sur l'attribution de la valeur, la délibération démocratique sur les stases légitimes, ainsi que la réappropriation collective des moyens d'expérimentation, pour inventer des pratiques agricoles relationnelles, émancipatrices et durables avec les autres qu'humains.

    Nicolas Heimendinger, L’Etat contre la norme : le tournant des institutions publiques vers l'art d'avant-garde, 1959-1977 (Allemagne de l'Ouest, Etats-Unis, France), thèse soutenue en 2022 à Paris 8 sous la direction de Jérôme Glicenstein, membres du jury : Béatrice Joyeux-Prunel (Rapp.), Catherine Dossin et Antje Kramer-Mallordy  

    Les années 1960-1970 sont communément considérées comme le moment de bascule de l’art moderne à l’art contemporain. Nos recherches visent à caractériser ce changement, non pas seulement en termes d’évolutions stylistiques, mais comme l’effet d’une profonde recomposition des structures institutionnelles du champ artistique, dont l’un des principaux facteurs consiste dans l’expansion de l’intervention publique dans ce domaine, suivant en cela le développement général des politiques culturelles dans la plupart des démocraties libérales occidentales. Un trait majeur de ce rapprochement entre art contemporain et puissance publique tient au choix partagé par de nombreuses organisations de s’engager en faveur de l’art d’avant-garde, dans le sens tout à la fois d’un soutien aux innovations artistiques les plus récentes et d’une reconnaissance apportée à leurs aspects les plus anti-conventionnels – ce dont profitent aussi certaines avant-gardes historiques jusqu’alors négligées. Cette réorientation représente une rupture majeure dans l’histoire des avant-gardes, fondées sur une rupture originelle avec les instances officielles, et peut permettre d’expliquer l’épuisement de leur dynamique à la fin des années 1970. Elle marque aussi un tournant dans l’histoire longue des rapports entre Etat et culture et peut être vue comme un symptôme d’une plus large redéfinition de la culture légitime.L’enquête sur les causes de ce changement a permis de mettre en évidence le rôle déterminant des intermédiaires auxquels sont déléguées les décisions artistiques publiques (afin de prévenir tout dirigisme culturel) : parce qu’ils tirent leur légitimité prioritairement du champ de l’art, leurs choix conduisent à importer dans les institutions publiques les valeurs de l’avant-garde. A partir de la fin des années 1960, ce mécanisme est redoublé par les effets des demandes multiples de démocratisation du monde de l’art : à défaut de pouvoir répondre pleinement à ces impératifs de démocratie culturelle (ou pour les contourner), ces intermédiaires exacerbent leur soutien à l’art le moins conventionnel comme le moyen de démontrer, à tout le moins, leur solidarité avec les contestations contemporaines des hiérarchies socio-culturelles.

    Thomás Zicman de Barros, The real (in) democracy : a psychosocial analysis of populism in the yellow vests movement, thèse soutenue en 2022 à Paris Institut détudes politiques sous la direction de Jean-Claude Monod, membres du jury : Jason Glynos (Rapp.), Miriam Debieux Rosa  

    Cette thèse cherche à évaluer le caractère radicalement démocratique d’un mouvement po-puliste tel que les Gilets jaunes en France. Cette recherche s’inscrit dans les critical fantasy studies, et implique une articulation entre théorie politique et psychanalyse. La thèse est divisée en trois parties. La première partie discute l’idée de démocratie radicale formulée par Ernesto Laclau et Chantal Mouffe pour conclure que celle-ci doit être conçue comme étant une éthique – c.-à-d., comme une façon de regarder la réalité tout en se rendant compte de la contingence radicale de nos pratiques sociales. La deuxième partie traite des processus d’identification dans les mouvements de masse. Nous utilisons des interviews psychosociales avec des manifestants Gilets jaunes et la psy-chanalyse de Jacques Lacan pour affirmer que la notion de désir est centrale pour penser les identi-tés collectives. Nonobstant, nous affirmons aussi que les dynamiques fantasmatiques du désir sont incompatibles avec une éthique de la démocratie radicale. Pour continuer l’analyse des Gilets jaunes, la troisième partie évalue de façon critique deux métaphores psychanalytiques fréquemment utilisées pour décrire le populisme : les métaphores du populisme comme symptôme et comme su-blimation. En revenant sur les travaux de Freud et Lacan, nous intégrons les deux métaphores pour différencier entre des identités collectives non-démocratiques et celles radicalement démocratiques. Nous concluons pourtant en affirmant que la frontière qui sépare ces modes d’identification est brouillée, et que s’il y a des potentialités éthiques dans les Gilets jaunes, celles-ci sont hantées par des fantasmes non-démocratiques.

    Marion Labeÿ, « Croire ou brûler » : une génération de révolutionnaires européens face au phénomène soviétique (1914-1939), thèse soutenue en 2022 à Université Paris Cité sous la direction de Sophie Cœuré et Gianluca Fiocco, membres du jury : Patrizia Dogliani (Rapp.), Noëlline Castagnez  

    Cette étude ambitionne de mesurer l'impact du phénomène soviétique - en tant qu’expérience de vie et référant politique - sur une génération de révolutionnaires européens dans l’entre-deux-guerres. Cette recherche porte sur des hommes et des femmes, issus des cultures française, italienne et russe, qui partagent l’expérience de vie en URSS dans les années 1920 et qui sont parmi les premiers à adhérer au projet révolutionnaire bolchévique mais aussi les premiers à s'opposer à l’évolution prise tant par le régime bolchévique que par le mouvement communiste. En utilisant une méthode basée sur l’étude des biographies individuelles, alliant histoire sociale, politique et culturelle, histoire des idées politiques et sociologie du militantisme, nous proposons de faire une analyse processuelle de l'engagement et du désengagement politique à gauche et de la construction d’une image négative spécifique du régime soviétique chez les premiers partisans de la révolution russe. En questionnant le rapport au phénomène soviétique, c’est l’identité même des militants, tout autant que leurs représentations du monde et leurs conceptions de la révolution qui sont étudiées. En s’appuyant sur des archives privées et en particulier sur des égo-documents, ce travail porte moins sur l’analyse du discours produit sur l'URSS que sur les conditions et les modalités de sa construction. Il examine la condition de l’opposant, du dissident, de l’exclu et de l’exilé, le rapport à l’écrit et aux idées politiques. Cette recherche interroge les différentes étapes du désengagement, de la désaffection à la désidentification, et les modalités de la reconversion, du réinvestissement politique de ces hommes et de ces femmes qui sont aussi les témoins et les acteurs du discours historique sur l’URSS et le monde communiste. Ceux qui cherchent à écrire l'histoire à chaud de leur génération font, à la fin des années 1930, le constat de l'échec du mouvement ouvrier dans l’entre-deux-guerres, ce qui les amène éventuellement à remettre en question leurs convictions politiques. Ces facteurs, et l’évolution du régime soviétique au cours de cette période, participent à la formulation de l’anticommunisme chez les premiers partisans de la révolution. Dans cette perspective, cette recherche contribue à mieux comprendre ce qui sous-tend le désengagement et la « lucidité » de ces hommes et de ces femmes dans les années 1920-1930.

    Thibaud Marczak, Les députés socialistes face à de Gaulle : analyse d'une décision critique (13 mai – 1er juin 1958), thèse soutenue en 2022 à Paris EHESS sous la direction de Ivan Ermakoff et Jean-Philippe Heurtin, membres du jury : Quentin Deluermoz (Rapp.), Brigitte Gaïti, Nicolas Rousselier, Johanna Siméant-Germanos et Philippe Urfalino  

    Ce travail de thèse analyse le vote d’investiture du général de Gaulle à Paris le 1er juin 1958 comme un cas empirique de « décision critique ». Il se donne pour tâche d’expliciter les processus décisionnels à l’origine des prises de position des députés socialistes. La classe des « décisions critiques » délimite un ensemble de décisions caractérisées par : 1) des risques personnels ; 2) des risques pour autrui ; et 3) un verrouillage des possibles dans l’avenir. Cette enquête évalue dans un premier temps la pertinence d’une série d’hypothèses explicatives centrées sur la culture politique héritée, les menaces et les engagements, et les interactions entre groupes parlementaires. Face à la portée explicative de chacune d’elle – c’est-à-dire à leurs apports et à leurs limites – il apparaît nécessaire de fournir une explication qui intègre ces trois types de causes mais ne s’y réduit pas. Les interactions internes au groupe, dans la mesure où elles conditionnent les effets de la culture politique, des menaces et des engagements, et des interactions intergroupes, constituent la pierre angulaire des processus décisionnels à l’oeuvre dans le groupe parlementaire socialiste. Ces derniers sont marqués par l’émergence progressive d’un clivage cognitif parmi les membres du groupe, à l’origine de leur division le 1er juin.

    Anne Goullet de Rugy, Changer de vie : une étude sur les bifurcations descendantes et la critique des formes de vie, thèse soutenue en 2021 à Paris 10 sous la direction de Christian Laval, membres du jury : Vincent Chabault (Rapp.), Saskia Cousin, Flora Bajard et Pierre Sauvêtre  

    Cette thèse traite des « bifurcations descendantes », c’est-à-dire des changements d’emploi intentionnels avec baisse de revenu, et les analyses, selon une approche sociologique pragmatique et compréhensive à partir d’une enquête par entretiens biographiques. Elle suit leur déroulement, les conditions sociales de leur réalisation, les registres de justification mobilisés et examine leur portée critique. Le processus critique à l’œuvre dans les bifurcations descendantes concerne principalement le travail, la hiérarchie sociale et institutionnelle des professions, plus que la consommation. Le changement professionnel et la réduction de la consommation sont justifiés par une grammaire marchande, celle de l’arbitrage et de la recherche de l’intérêt individuel, combinée à une grammaire civique se référant à la justice et au respect de la nature. Finalement, la critique porte sur une représentation économiciste de l’intérêt, du travail et des formes de vie dans laquelle la consommation est une fin et le travail réduit à un moyen pourvoyeur de richesses matérielles. Elle se manifeste sous la forme d’une désapprobation du pouvoir de l’argent, de la recherche constante de rentabilité, de l’exploitation de l’homme et de la nature et des nuisances générées par la production et suscite un mouvement de sortie (exit) de certains emplois. La politisation de cette défection est très variable. L’exit s’articule avec deux autres types de réaction au mécontentement : la prise de parole (voice) par la revendication de formes de vie alternatives et l’apathie non comme passivité mais comme critique silencieuse, peu politisée. Cette hybridation entre les catégories exit, voice et apathy pensées par Hirschman comme alternatives, invite à repenser les liens entre le faire et le dire politiques.

    Clément Rodier, "Une bouteille à la mer" : La réception de « l'École de Francfort » en France, thèse soutenue en 2020 à Bordeaux sous la direction de Patrick Troude-Chastenet, membres du jury : Augustin Simard (Rapp.), Frédéric Lambert et Martine Leibovici  

    « L’École de Francfort » constitue l’un des courants de pensée les plus importants du XXème siècle. La mouvance intellectuelle organisée notamment autour de Max Horkheimer, Theodor Adorno, Herbert Marcuse ou Walter Benjamin est à l’origine d’une pensée riche et féconde – la Théorie critique –, aux répercussions vastes. Au sein de sa sphère d’influence, cependant, la France occupe une place singulière. La constellation francfortoise semble, en effet, y avoir rencontré une fortune contrariée. Si le label qui la désigne jouit d’une certaine notoriété, la substance qui la constitue apparaît, quant à elle, imprécise et nébuleuse pour les regards français. Cette exception hexagonale à l’endroit de « l’École de Francfort » tend néanmoins à se dissiper depuis quelques années. Sous l’influence d’une nouvelle génération, les idées portées par la Théorie critique gagnent une résonance inédite et sont la source d’appropriations fertiles. L’enjeu de ce travail de recherche vise, à partir de là, à comprendre la complexité du rapport que le contexte hexagonal entretient avec « l’École de Francfort ». Pour cela, il entreprend, plus précisément, de reconstituer la nature et la teneur du dialogue que le public intellectuel français a noué, et noue aujourd’hui, avec cette mouvance philosophique. À travers cette reconstruction herméneutique, l’étude permet de mettre en lumière tant les obstacles que les relais et les foyers d’appropriation participant à ce processus de réception. Finalement, la trajectoire de la « bouteille à la mer » francfortoise, pour reprendre la métaphore adornienne, offre à la fois le récit d’une aventure philosophique originale et constitue une porte d’entrée unique sur les débats théoriques qui animent la vie intellectuelle nationale.

    Marcella Frisani, Le livre et le drapeau. Le marché de circulation internationale des oeuvres comme construction symbolique : une sociohistoire, entre Paris et Londres, thèse soutenue en 2019 à Paris EHESS sous la direction de Gisèle Sapiro, membres du jury : Delphine Naudier (Rapp.), Julien Duval et Jean-Yves Mollier  

    La thèse s'attache à objectiver les modalités d'intervention de l'Etat dans la construction à la fois économique et symbolique d'un espace de circulation internationale de l'écrit. A l'appui de dossiers d'archive elle fait émerger les acteurs sociaux impliqués dans ce processus (diplomates, éditeurs, bureaucrates, experts), en reproduit les débats et en analyse la redéfinition des enjeux entre 1963 et 1989.Ensuite, elle mobilise une enquête ethnographique et par entretiens (n=103) pour étudier la construction localisée d'un marché mondial de la traduction, en prenant comme cas d'étude emblématique l'action culturelle de la France à Londres, entre le début des années 1990 et 2014. Elle en objective les stratégies à partir de l'analyse du Bureau du livre de Londres, invention bureaucratique de construction d'un espace de proximité. Elle restitue ainsi les lieux, les scènes,les acteurs, les moyens, les destinataires, les temporalités de cette action culturelle extérieure. Pour terminer, la thèse montre le travail de légitimation morale et de production de la croyance dont la construction d'un marché de la traduction fait l'objet, en élargissant le périmètre de l'enquête aux acteurs étatiques européens et aux acteurs non-étatiques.

    Anne Monier, Mobilisations philanthropiques transnationales , thèse soutenue en 2016 à Paris EHESS sous la direction de Michel Offerlé  

    Notre thèse renouvelle l'analyse de la philanthropie, en offrant une perspective « par le bas » de celle-ci, la concevant comme relation de mobilisation. Fondé sur une enquête qualitative (entretiens, ethnographie, archives, analyse de documents) menée en France et aux Etats-Unis, ce travail se centre en particulier sur le cas des associations d'American Friends des institutions culturelles françaises. Croisant une thématique bien investie par les travaux sur la philanthropie individuelle nationale (la relation et les acteurs philanthropiques) avec une perspective transnationale, notre thèse pose la question suivante : Qu'est-ce que le transnational « fait » à la mobilisation philanthropique ? Elle interroge ainsi la manière dont la philanthropie au-delà des frontières conduit à une forme particulière de mobilisation des élites. Elle démontre que la mobilisation philanthropique transnationale nécessite la mise en œuvre d'une forme d'intermédiation diplomatique. Participant au renouvellement des études sur la diplomatie, en les croisant avec la littérature sur l'intermédiation, notre thèse dévoile les liens étroits qui existent entre philanthropie et diplomatie. S'intéressant aux acteurs, elle contribue à la sociologie des élites à travers l'analyse des luttes de pouvoir, des hiérarchisations et modes de distinction des élites dans une perspective transnationale. S'appuyant sur une approche compréhensive, elle met également en avant le rôle des représentations dans les relations inter- et transnationales. Enfin, adoptant une approche écologique, elle contribue aux réflexions sur les transformations de l'Etat, et notamment les reconfigurations public / privé.

    Maria Bigday, L'engagement intellectuel sous régime autoritaire : les " think tankers " biélorusses entre expertise et dissidence, thèse soutenue en 2015 à Strasbourg sous la direction de Vincent Dubois, membres du jury : Dorota Dakowska (Rapp.), Jay Rowell et Alain Blum    

    A travers l’étude de l’émergence et de l’évolution de l’espace de la recherche non étatique en sciences sociales en Biélorussie la thèse revisite la frontière entre la science et la politique et aborde la question de l’engagement intellectuel dans le contexte des transformations postsoviétiques. En 1992, en s’inspirant du modèle des think tanks, des entrepreneurs intellectuels biélorusses ont fondé les premières organisations privées de recherche. Le nouveau mode professionnalisé de production intellectuelle est alors conçu comme un instrument de la « désoviétisation » de la science et de la « démocratisation » de la politique. Les transformations autoritaires de 1995-1996 ont marginalisé cet espace au sein du champ du pouvoir et ont provoqué sa politisation contestataire. Vers 2006 la quasi-totalité des centres fonctionnaient en dehors des cadres légaux. La nouvelle génération de chercheurs qui arrive dans les années 2000 contribue à la reproduction de son caractère à la fois engagé et professionnel. Un nouveau système de relations entre les agents du champ politique et les think tankers permet à ces derniers de prétendre aux rôles d’« experts indépendants » et d’« intellectuels engagés ».

    Christelle Dormoy-Rajramanan, Sociogenèse d’une invention institutionnelle : le centre universitaire expérimental de Vincennes, thèse soutenue en 2014 à Paris 10 sous la direction de Bernard Pudal, membres du jury : André Désiré Robert (Rapp.), Brigitte Gaïti et Charles Soulié    

    Relevant de l’intérêt renouvelé de l’histoire sociale pour la période des « années 1968 », ce travail cherche à comprendre à la fois les conditions de possibilité de la création d’une institution telle que le « Centre universitaire expérimental de Vincennes » et comment celle-ci a été initialement façonnée par les investissements pratiques et les projections de ses concepteurs, fondateurs et premiers acteurs. A la croisée de la sociologie des politiques publiques éducatives et de l´histoire sociale des champs intellectuels, la socio-histoire de cette expérience universitaire participe de la connaissance des effets de la crise symbolique sans précédent de Mai 68, et offre une voie d´entrée à l´histoire des idées qui prend en compte simultanément les acteurs mobilisés et mobilisables que sont les étudiants et les enseignants, et leurs négociations avec le pouvoir politique. A l’échelle macro-sociologique, cette recherche s’attache à éclairer les logiques qui président au développement morphologique et symbolique de l´Université depuis les années 50 et participe de la connaissance du fonctionnement de l’Etat et du pouvoir politique en conjoncture de crise. A l’échelle micro-sociologique, elle se veut attentive aux logiques d’action des acteurs sociaux et aspire à comprendre comment et pourquoi, suivant quels représentations, dispositions et intérêts, les acteurs (individuels et collectifs) investissent leurs rôles et « métiers » (de hauts fonctionnaires, responsables politiques, « intellectuels », enseignants-chercheurs, étudiant), sans sous-estimer les contraintes qui pèsent sur eux. Ce travail s’appuie sur des matériaux complémentaires (archives, entretiens, biographies, statistiques) qui permettent de mettre en perspective « données quantitatives » et « données qualitatives », et de renseigner les deux échelles d’analyse.

    Julien Pallotta, Politique et État à partir de Louis Althusser, thèse soutenue en 2014 à Toulouse 2 sous la direction de Guillaume Sibertin-Blanc, membres du jury : Étienne Balibar (Rapp.), Hourya Bentouhami  

    Ce travail se propose de revenir sur l'intervention de Louis Althusser dans le champ de la théorisation sociale et politique. Il a été motivé par la conviction qu'aujourd'hui Althusser, bien que chronologiquement proche de nous, est oublié, voire refoulé : ainsi, son objectif aura été à la fois de restituer, par l'examen des sources publiées (aussi bien du vivant de l'auteur qu'après sa mort) et de documents inédits du fonds de l'IMEC, la théorie ou l'esquisse de théorisation althussérienne de l'État et de mesurer un « effet-Althusser » sur la conjoncture philosophique française des années 1970 et suivantes (auprès de ses collaborateurs fidèles, comme Balibar, et dans une moindre mesure, Poulantzas, ou infidèles, comme Rancière ou Badiou, aussi bien qu'auprès de ses ennemis « intimes » Foucault et Bourdieu). Le résultat de cette enquête sur la théorisation althussérienne de la politique et de l'État a révélé une tension insurmontable en son sein : la politique y est écartelée entre deux modes d'existence distincts et, à la limite, incompatibles, entre, d'un côté, la thèse d'une régulation continue de la conflictualité sociale par l'État, et d'un autre côté, la thèse d'une alternative radicale incarnée par un hypothétique, nécessaire et improbable « parti hors-État ».

    Delia Georgiana Badoi, La sociologie publique , thèse soutenue en 2014 à Paris EHESS sous la direction de Jean-Louis Fabiani et Lazăr Vlasceanu  

    Cette thèse de doctorat se propose d'analyser la sociologie comme science publique et son développement, dans une approche comparative, aux Etats-Unis, en France et en Roumanie L'objectif principal est d'explorer la notion de «public sociology» et la critique de la connaissance sociologique dans le contexte de la société contemporaine de la connaissance. Malgré plusieurs connotations culturelles de la « circulation des idées » qui changent les interprétations de «public sociology» (Burawoy, 2004), les analyses réalisées portent sur plusieurs controverses épistémologiques sur la pertinence et la réflexivité de la connaissance sociologique. L'analyse part de la ligne théorique proposée par la sociologie critique américaine et, ensuite, de théories sociales de la sociologie française postérieures aux années 1960. Ainsi, les études réalisées dans cette thèse se trouvent au carrefour des modèles théoriques utilisés par la sociologie des idées, la sociologie de la connaissance scientifique et la sociologie des sciences Le but principal a été de développer une analyse critique et empirique sur le rôle des nouvelle configurations du savoir et pour l'interprétation donné à deux questions: La sociologie pour qui ?; Pourquoi la sociologie ? La thèse est construite en trois sections: Comprendre la notion de sociologie publique par une division du travail dans la sociologie américaine; Analyser les alternatives épistémologiques de la sociologie publique en France; Rendre compte des usages sociaux et politiques de la production scientifique de la sociologie roumaine et la construction d'une division du travail sociologique en Roumanie à partir d'une étude ethnographique.

    Raphaëlle Parizet, Le politique du développement : les usages politiques des savoirs experts et de la participation des populations indiennes au Mexique, thèse soutenue en 2013 à Lille 2 sous la direction de Olivier Nay, membres du jury : Camille Goirand (Rapp.), Irène Bellier et Jean-Gabriel Contamin    

    Mot valise véhiculé par les agences internationales, la notion de « développement avec identité » traduit une volonté de prendre en compte les spécificités locales et culturelles des populations autochtones et la promotion d’une approche en terme de développement, présenté comme universel et apolitique. C’est cette contradiction que cette thèse propose d’explorer. À partir du cas mexicain, il s’agit de comprendre comment les dispositifs de développement fonctionnent comme des instruments de connaissance, mais également comme des instruments performatifs par leurs inductions prescriptives et les usages sociaux qui en sont faits. Au final, le « développement avec identité » renvoie à un « art de gouverner » les populations marquées par une disqualification sociale. Celui-ci s’appuie sur deux volets : l’élaboration de savoirs spécifiques sur ces populations et la participation des individus et groupes autochtones aux dispositifs de développement. Cette thèse propose une contribution sociologique à l’analyse du développement et aux travaux sur la question autochtone. Cette étude de la circulation des discours, des instruments et des pratiques du développement se fonde sur une enquête ethnographique de trois espaces où se construisent, s’élaborent et se mettent en pratique les dispositifs du développement autochtone au Mexique : le bureau du Programme des Nations unies à Mexico, l’instance nationale en charge de l’action publique de développement des populations autochtones, et enfin des groupes sociaux de la région du Chiapas dans lesquels des dispositifs de développement sont également élaborés et mis en œuvre.

    Elsa Rambaud, Médecins sans frontières : Sociologie d'une institution critique, thèse soutenue en 2013 à Paris 1 sous la direction de Michel Dobry, membres du jury : Didier Demazière (Rapp.), Patrick Lehingue et Isabelle Delpla  

    Première ONG de secours médical d'urgence, MSF est de ces organisations qui ont institutionnalisé la critique. Les courants sociologiques les plus opposés y ont vu une activité « extra - ordinaire» dont les ressorts seraient essentiellement idéels. Mettant à mal cette hypothèse unificatrice, MSF permet d'étudier l'ancrage social de ces pratiques. On étudie la construction par ses leaders d'une position d'avant-garde dans le champ humanitaire. Dotée d'un centre de recherche, MSF dispose de sa grammaire - entendue ici dans un sens métaphorique et de ses « grammairiens ». L'un dans l'autre, elle peut déployer de magistraux coups critiques comme l'arrêt de sa collecte pour le tsunami. L'analyse des dispositions et du charisme critiques du « Roi René )) des MSF, Rony Brauman, s'avère indispensable à la compréhension des « instances» associatives dédiées à cette activité. Elle repose aussi sur une répartition incertaine des espaces de travail et un ensemble de techniques de fragmentation du pouvoir. Après avoir analysé le «jeu du rappel à l'ordre )), on verra les MSF composer avec les attentes critiques de l'ONG. Ces différentes adaptations éclairent un cens critique qui n'est pas sans effet sur les opérations de MSF. La critique étant indissociable de l'exercice du pouvoir, son étude donne la clef d'une gouvernance interne ponctuée de« crises» et nourrie d'attachements puissants à MSF. Croisant sociologie des relations internationales, du militantisme et de la critique à l'appui de cette normalisation épistémologique, cette thèse repose sur une série d'entretiens et de discussions informelles, différents fonds d'archives et de nombreuses observations de type ethnographique.

    Pierre Sauvêtre, Crises de gouvernementalité et généalogie de l’État aux XXe et XXIe siècles : recherche historico-philosophique sur les usages de la raison politique, thèse soutenue en 2013 à Paris Institut détudes politiques sous la direction de Jean-Marie Donegani, membres du jury : Frédéric Gros (Rapp.), Lisa Jane Disch et Isabelle Bruno  

    La thèse, composée de deux grands ensembles, explicite d’abord la trajectoire de la notion de « gouvernementalité » dans les cours de Michel Foucault au Collège de France de 1976 et 1984 afin d’établir un nouveau cadre théorique d’analyse du conflit politique à partir de l’étude des rapports de réciprocité entre les pratiques étatiques et les contre-conduites. Dans un deuxième temps, elle met ce cadre théorique à l’épreuve d’ensembles empiriques afin de tracer une généalogie de l’État au XXème et XXIème siècles à partir d’une ethnologie du dire-vrai dans la pratique sociale. Sur des aires, des temps et des populations variables, elle identifie quatre régimes différents de véridiction/juridiction des pratiques gouvernementales logiquement articulés les uns aux autres par des rapports de réciprocité successifs :1 / le régime libéral social de la res socialis en France des années 1890 aux années 1960 ; 2/ le régime de la res nullius dans les comités d’action en France dans les années 68 ; 3/ le régime néolibéral de la res economica à l’échelle mondiale depuis les années 1970 ; 4/ le régime de la res communis dans la Coordinadora del agua et les comités de l’eau boliviens dans les années 2000. Chacun de ces régimes implique une expérience différente de l’État en termes de degré et d’espaces de gouvernementalité, d’effets des politiques étatiques sur le niveau des inégalités et la structuration des rapports entre classes sociales ou sur le degré de démocratisation de la vie publique. C’est donc à une évaluation historiquement différenciée de l’État qu’invite la méthode foucaldienne d’analyse des formes de véridiction sur lesquelles sont indexées les pratiques gouvernementales.

    Radoslav Gruev, Construction de l’acteur « ennemi » et institution concentrationnaire : étude comparative entre les camps de Rivesaltes (sous Vichy) et de Béléné (République populaire de Bulgarie), thèse soutenue en 2013 à Paris 5 sous la direction de Antigone Mouchtouris, membres du jury : Philippe Combessie (Rapp.), Bernard Valade    

    Notre étude s’interroge sur la construction de l’acteur « ennemi » dans l’institution sociale totale du camp de concentration à travers la comparaison de deux formes ; ceci dans des contextes sociaux, nationaux, idéologiques et étatiques différents – le camp de Rivesaltes et l’État Français et le camp de Béléné et la République Populaire de Bulgarie. Ces deux institutions sont traitées à partir de l’hypothèse de « différence de degré », qui se décline dans les notions de « singularité » et « pluralité », permettant de les saisir aussi bien au niveau politique qu’au niveau de l’institution concrète. Cette étude concerne la construction de la figure de l’acteur « ennemi » en partant du niveau social et politique pour arriver à la vie quotidienne au sein des deux formes concentrationnaires. Nous avons analysé la figure de l’ennemi, tout d’abord comme un produit d’une dynamique tournée vers la transformation sociale fondamentale. Nous avons également voulu comprendre les raisons d’apparition des formes concentrationnaires comme partie intégrante de ce « projet de société », et puis nous les avons analysées à travers la vie quotidienne qui s’établit en leur sein. L’institution concentrationnaire a assuré en soi une certaine stabilité qui lui a permis de bien remplir sa fonction dans la dynamique de transformation de la société. Cette stabilité est assurée par l’insertion de l’individu dans une série de cercles, sa soumission à une forme spécifique de pouvoir qui le transforme dans son essence de personne et d’être humain, mais aussi le posant comme un acteur dans un univers interactionnel particulier. Alors, quelle est la place de l’acteur « ennemi » dans la vie concentrationnaire et quelles interactions s’établissent-elles entre les différents acteurs au sein des camps ?

  • Quentin Hardy, Irrésistible progrès ? : essayistes-philosophes au cœur de la querelle du machinisme dans la France de l'entre-deux-guerres, thèse soutenue en 2022 à Paris 1 sous la direction de Bernadette Bensaude-Vincent, membres du jury : Emmanuelle Loyer et Frédéric Fruteau de Laclos  

    Fondée sur un corpus d’essayistes-philosophes français des années 1930, cette thèse est une contribution à l’histoire des critiques du progrès au XXe siècle. Elle montre que le machinisme, cible principale des critiques, est promu comme une catégorie légitime pour penser le monde contemporain, qui oblige à élargir le champ de la philosophie. Aux yeux de ces essayistes, la philosophie doit partir des contingences historiques et des hommes concrets pour penser le tragique de/dans l’ordinaire. Ces auteurs marginalisés enrichissent le diagnostic sur la modernité industrielle, le capitalisme et le soviétisme en les examinant sous l’angle du productivisme. Soucieux de comprendre les spécificités idéologiques de l’entre-deux-guerres et de mieux situer les contours de la controverse sur le machinisme, cette thèse propose un tour d’horizon des discours sur la modernité de cette époque. La « Machine » devient le lieu d’une explication entre plusieurs auteurs sur le sens de la modernité industrielle. D’où une tension entre l’impératif de rationalisation associé au productivisme et la dénonciation de ce qui est perçu comme un ordre hétéronome, dépossédant les individus et les sociétés de leurs devenirs propres. Après avoir dégagé les enjeux des discours sur la modernisation, nous distinguons deux types de critiques : une critique spiritualiste et une critique socio politique de la société industrielle où capitalisme et soviétisme se rejoignent dans leur élan productiviste. Si tous les auteurs considérés s’élèvent contre la philosophie de l’histoire dominante et sa promesse d’un progrès linéaire, certains essayistes-philosophes invitent à penser une histoire désorientée, ouverte à une transformation révolutionnaire.

    Mehdi Arfaoui, « Creative Europe » ou l’action publique par projets : enquête sur une modernisation des politiques publiques en Europe, thèse soutenue en 2019 à Paris EHESS sous la direction de Ève Chiapello, membres du jury : Laure de Verdalle (Rapp.), Hélène Michel (Rapp.), Philippe Bezes et Claude Rosental  

    Cette thèse prend pour objet la mise en œuvre d’un programme européen de financement de projets culturels intitulé Europe Créative, adopté en 2013 par l’Union européenne (UE). La recherche donne à voir les conditions de la réforme des politiques européennes pour la culture et montre comment celle-ci s’inscrit dans un processus au long cours de métamorphose de l’action publique en Europe. La littérature académique portant sur les réformes récentes de la politique culturelle de l’UE décrit souvent un « tournant néolibéral » associé à un « tournant créatif ». La redéfinition des politiques culturelles européennes au nom de la « créativité » s’accompagne en effet d’une généralisation du financement par projets et de l’introduction d’un lexique entrepreneurial et d’outils propres au nouveau management public pour encadrer le subventionnement de la culture. Ces travaux se limitent néanmoins généralement à traiter le changement de politique sous l’angle conceptuel, discursif ou strictement formel des transformations engendrées. Notre enquête cherche a contrario à questionner l’hypothèse d’un « tournant » en explorant les traductions pratiques de ces transformations. Ce faisant, l’étude de la réforme de la politique européenne permet d’aborder les processus concrets à l’œuvre dans ce que l’on a coutume de présenter comme une « néolibéralisation » des politiques publiques.Nous mettons en lien trois niveaux d’observation : celui des cadres cognitifs qui justifient une politique publique et sa réforme, celui de l’élaboration des instruments politiques qui lui donne corps et celui de la mise en œuvre concrète de ces instruments. Notre cadre théorique mêle la sociologie de la justification, la sociologie politique des instruments de l’action publique et des outils de gestion ainsi que la sociologie de la traduction. Notre matériau se fonde sur une analyse de la littérature académique traitant du « tournant créatif » et de la littérature grise produite par les institutions européennes, ainsi que sur une série d’entretiens et d’observations ethnographiques – dont plusieurs semaines au sein des points de contact du programme Europe Créative, et de nombreux mois au sein d’un lobby pour la culture à Bruxelles.Cette thèse contribue à montrer que l’entreprise réformatrice induit une appropriation plurielle et contradictoire des politiques par les acteurs concernés. Nous préférons alors, au terme homogénéisant de « néolibéralisation », celui de « modernisation » pour souligner les conflits et les compromis émergeant de ces appropriations dissonantes. À chacun des trois niveaux d’observation, nous révélons les efforts réalisés par les acteurs pour interpréter, modeler et renégocier localement le sens des réformes. Nous donnons à voir les disputes relatives à ce que serait une « bonne » politique culturelle et le travail d’interprétation du programme réalisé au guichet des institutions européennes, ou encore la malléabilité du sens donné à la notion de « projet ». Nous mettons en exergue la façon dont le financement par projets transforme non seulement les modalités de travail des organisations culturelles financées, mais également leur capacité à élaborer une prise de position critique vis-à-vis de la politique menée par l’UE.

    David Albert Hoare, La notion d’information dans les structures narratives de Mark Lombardi (1994-2000) : une esthétique du détournement cybernétique, thèse soutenue en 2019 à Paris 8 sous la direction de Roberto Barbanti, membres du jury : Jean-Marc Lachaud (Rapp.), Aline Caillet et Anne Zeitz  

    Cette thèse se propose de renseigner les rapports entre le travail d’investigation politico-artistique de Mark Lombardi de la fin des années 90 avec les notions issues de la première cybernétique. À travers la démarche de l’artiste, de références historiques, et des parallèles théoriques et critiques opérés, la thèse produit un discours à rebours des écrits faisant autorité sur le sujet jusque là. La thèse suit une démarche que l’on pourrait appeler archéo-critique : il s’agit pour nous de remonter le fil des œuvres de l’artiste, de ses références, pour se situer en dehors des conclusions attendues et dominantes sur son travail. Après un travail d’articulation des enjeux entre œuvre et document, s’en suit une critique des rapprochements avec l’art conceptuel, pour continuer sur l’héritage historique plus lointain. En parallèle de cette approche plus historique, la notion d’information est introduite et critiquée pour montrer le lien plastique qui s’opère dans l’œuvre : information et réification sont entrelacés dans la représentation diagrammatique de l’artiste.

    Charitini Karakostaki, Les fêtes nouvelles. Enquête sur les idéaux de la société ouverte et leur mise en scène : Paris 1981-2014, thèse soutenue en 2018 à Paris Sciences et Lettres ComUE sous la direction de Luc Boltanski, membres du jury : Claude Rosental, Luca Pattaroni et Anne Raulin  

    La présente thèse porte sur la mise en place des nouvelles manifestations festives en France, et plus particulièrement à Paris, depuis les années 80. Ces fêtes marquent un déplacement par rapport aux fêtes « traditionnelles » qui étaient en grande partie organisées autour des concepts de sacré et de nation. Nourri par une observation ethnographique de plusieurs années, ce travail met en évidence une multiplicité de facettes des fêtes nouvelles: les processus de conceptualisation et de création par les autorités publiques ; leur gestion et mise en œuvre par des managers culturels ou par des associations et des collectifs ; l’invention de nouvelles formes rituelles ou l’adaptation de plus anciennes ; les mises en scène urbaines et l’emploi des codes distinctifs ; l’appropriation de ces fêtes par la société et les différents débats qu’elles ont soulevés. Chacune des trois parties de la thèse est consacrée à une fête. Une place majeure est réservée à la Fête de la musique, la Marche des fiertés et la Nuit blanche, sans pour autant passer sous silence d’autres fêtes résolument nouvelles et d’envergure, telles que la Capitale européenne de la culture et les Allumées de Nantes, permettant de mieux saisir les mutations qui s’opèrent au niveau européen. Enfin, s’appuyant sur la thèse classique de Durkheim, ce travail propose d’envisager ces fêtes comme points d’entrée pour appréhender les idéaux de la société ouverte. L’intention affirmée des organisateurs de mettre en place une nouvelle conception du vivre ensemble et du lien social, est à bien des égards l’occasion de célébrer une société française et européenne, pacifique, réconciliée et tolérante.

    Yann Renisio, L'infortune des sciences sociales : sociologie d'une illégitimation scientifique récurrente, thèse soutenue en 2017 à Paris EHESS sous la direction de Eric Brian et Yves Gingras, membres du jury : François Héran et Pierre-Michel Menger  

    À la croisée des sociologies des sciences, de l’éducation et du travail, cette thèse présente, à partir d’une analyse de l’ensemble des disciplines de l’enseignement supérieur, une série de processus qui contribuent à la perpétuelle remise en cause de la légitimité scientifique des sciences sociales dans la recherche française contemporaine. Cette analyse en trois temps, historique, statistique puis par enquête par questionnaire et entretiens met en évidence un phénomène de désavantages cumulatifs de ces domaines. Institutionnalisées dans les facultés de lettres et de droit dans une période d’ascension forte de la légitimité de celle des sciences, les sciences sociales occupent une position inconfortable d’altérité et d’infériorité scientifiques, que l’enseignement secondaire contemporain contribue à entretenir. Situées à l’intersection des pratiques des sciences humaines, biologiques et mathématiques, ces disciplines se voient fréquemment accusées de ne pas répondre au modèle des sciences physiques. Scindées en deux facultés, les profils scolaires et sociaux de leurs étudiants et de carrières de leurs chercheurs sont plus hétérogènes que dans les sciences non sociales, ce qui affaiblit leur cohérence. Intériorisant leur position dominée, ces disciplines naturalisent la faiblesse des moyens qui leurs sont accordés en les justifiant par des besoins temporels spécifiques et une imprévisibilité indépassable.

    Danielle Papiau, Psychiatrie, psychanalyse et communisme : essai de sociobiographie des psychiatres communistes (1924 – 1985), thèse soutenue en 2017 à Paris 10 sous la direction de Bernard Pudal, membres du jury : Frédérique Matonti (Rapp.), Patrice Pinell (Rapp.), Marie-Claire Lavabre et Francine Muel-Dreyfus      

    Cette thèse se donne pour objet les relations entre psychiatrie, psychanalyse et communisme durant la période 1934-1985, du Front populaire au déclin du PCF dans les années 1980. Elle étudie cette histoire dans sa relation au courant réformateur de l’ordre psychiatrique institué par la loi sur les aliénés du 30 juin 1838 qui émerge dans le champ médical dans les années trente, jusqu’à la normalisation du sous-champ de la psychiatrie publique à la fin des années 80, courant conforté par l’introduction en France de la psychanalyse. A partir de l’analyse des trajectoires biographiques des psychiatres communistes et de la biographie collective du groupe qu’ils constituent en 1945, il s’agit d’articuler l’analyse compréhensive des raisons d’agir avancées par les acteurs et l’objectivation des positions occupées, tant au plan professionnel qu’au plan politique, dans la perspective d’un engagement partisan rapporté à son insertion dans l’histoire sociale du groupe des psychiatres publics. Articulant sociologie des mobilisations et sociologie des professions, l’étude se centre sur les formes d’hybridation sociale pratique et intellectuelle qui se nouent dans l’action entre pratiques militantes et activité professionnelle vécue comme un engagement.Après avoir mis au jour les dispositions des acteurs et les événements qui créent les prémisses d’une identité de psychiatre communiste, seront étudiées l’action conjointe des mécanismes d’homogénéisation et d’encadrement mis en place par le PCF et les appropriations réalisées par les acteurs, en relation avec les différentes configurations de l’entreprise militante et les reconfigurations de l’espace professionnel. On montre en quoi le capital acquis dans l’espace professionnel est mis au service des objectifs de l’entreprise politique, et en quoi le capital militant est une ressource dans les luttes de reconnaissance de la psychiatrie dans le champ médical. Dans le jeu de ces interactions se construit une identité de psychiatre communiste appelée à se rénover suite à la crise internationale du communisme de 1956 et à l’autonomisation de la psychiatrie qui se réalise en 1968.A la différence d’autres espaces médicaux spécialisés, la nature de l’objet de la psychiatrie, la maladie mentale, met en jeu des conceptions indissociablement médicales et philosophiques quant à la nature de l’individu, à son rapport au monde social et aux normes qui définissent le normal et le pathologique. A ce titre les débats qui traversent la psychiatrie ne sont pas indépendants des controverses philosophiques et du développement des sciences sociales. L’étude s’inscrit donc aussi dans une sociologie historique des intellectuels et dans la problématique du rapport des professions intellectuelles avec le politique. Sont aussi interrogées, les relations entre professions intellectuelles et cadres ouvriers devenus des intellectuels d’institution au sein de l’intellectuel collectif communiste, le lien entre discours savant et discours politique, et les tensions entre définition identitaire et clôture du groupe, et vocation messianique impliquant une ouverture aux évolutions du monde social. En modulant l’image d’un affrontement irréconciliable entre marxisme et psychanalyse, la thèse met au jour un lien fort, fait d’alliances et de concurrences entre le marxisme et la psychanalyse, contre les conceptions biologiques du psychisme.

    Fabien Carrié, Parler et agir au nom des « bêtes » : production, diffusion et réception de la nébuleuse idéologique « animaliste » (France et Grande-Bretagne, 1760-2010), thèse soutenue en 2015 à Paris 10 sous la direction de Bernard Pudal, membres du jury : Fabrice Bensimon (Rapp.), Dominique Guillo (Rapp.), Johanna Siméant-Germanos et Gisèle Sapiro    

    On propose une sociogenèse de la nébuleuse idéologique « animaliste », une histoire sociale de l’idée de représentation politique des bêtes au Royaume-Uni et en France depuis la seconde moitié du 18ème siècle jusqu’à la période contemporaine. Le point de départ de l’étude réside en un constat, à savoir l’existence de rapports et de représentations différenciés à l’animal de chaque côté de la Manche. Ces rapports et représentations s’objectivent dans le niveau de développement des mobilisations collectives pour la libération et le droit des animaux, puissant au Royaume-Uni, faible en France. Il s’agit ici de rendre compte des logiques sociales de production, diffusion, réception et réappropriation, d’une configuration nationale à l’autre, des acceptions successives de l’idée de porte-parolat des bêtes. L’examen des trajectoires, propriétés et positions des agents et des groupes qui se sont saisis de cette idéologie, articulé à l’analyse interne de leurs prises de position, met au jour les enjeux des luttes engagées autour de la prise de parole au nom de l’animal, la prescription des interactions appropriées entre les hommes et les bêtes permettant aux producteurs de l’idée d’affirmer, par analogies, une définition légitime du monde social . En s’attachant à suivre les processus pluriels à l’aune desquels est structurée la nébuleuse, on peut ainsi expliquer les modalités de naturalisation ou non de l’idée de porte-parolat des bêtes en France et au Royaume-Uni et rendre compte des mécanismes de l’universalisation des idéologies au sein des configurations nationales.

    Romain Lecler, Une mondialisation à domestiquer : sociologie d'une politique française des échanges audiovisuels internationaux (1984-2012), thèse soutenue en 2015 à Paris 1 sous la direction de Frédérique Matonti, membres du jury : Gisèle Sapiro (Rapp.), Sophie Dubuisson-Quellier (Rapp.), Didier Demazière  

    Qu'est-ce la mondialisation ? On répond à cette question à partir du cas de l'audiovisuel international, envisagé sous l'angle des échanges commerciaux et des politiques publiques. Une enquête a été menée de 2008 à 2012 au sein de l'administration, des ambassades et de diverses agences françaises ainsi que sur les marchés audiovisuels internationaux. On vérifie que la mondialisation, loin d'être une force économique s'imposant de l'extérieur, reste le produit de politiques visant à « dompter» ce qui semble dépasser le cadre national (comme la diffusion des contenus audiovisuels par satellite au tournant des années 1980), et peut toujours être rapportée à des enjeux « domestiques » (le terme de mondialisation étant lui-même instrumentalisé par de nombreux acteurs). La thèse examine d'abord comment l'administration s'est saisie de l'audiovisuel international, suscitant tout un entrepreneuriat bureaucratique au sein des Affaires étrangères, mais aussi une âpre compétition pour être nommé à la tête des nouvelles chaînes publiques transnationales, et conduisant au recrutement d'un réseau original de diplomates spécialistes de l'audiovisuel. On étudie ensuite l'essor considérable des marchés audiovisuels internationaux, leur rôle désormais central dans le commerce international des biens audiovisuels, et comment l'administration a soutenir la professionnalisation des exportateurs français. On analyse enfin le rôle fondamental des politiques d'exportation en analysant la promotion française de la diversité culturelle, négociée entre les professionnels et l'administration, profondément ambivalent et articulant des enjeux à la fois culturels, diplomatiques et marchands.

    Yauheni Kryzhanouski, Contester par la musique sous régime autoritaire : rock et politisation en Biélorussie, thèse soutenue en 2015 à Strasbourg sous la direction de Vincent Dubois, membres du jury : Christophe Traïni (Rapp.), Alain Blum (Rapp.), Françoise Daucé    

    Cette thèse examine la politisation dans un régime autoritaire à travers l’étude de deux mouvements rock contestataires en Biélorussie. Le rock « national » s’est constitué en tant que mouvement artistique dans les années 1980 autour de la production de la musique contemporaine d’inspiration occidentale chantée en langue biélorusse et de la promotion d’une vision hétérodoxe de l’« identité nationale ». Le tournant autoritaire des années 1995-1996 a provoqué la repolitisation contestataire de ce mouvement artistique. Les acteurs du rock « national » continuent de revendiquer le statut « underground » tout en aspirant à la professionnalisation dans le cadre du système de production commercial. C’est aussi au milieu des années 1990 qu’un autre mouvement contestataire se constitue – le rock anarcho-punk DIY imprégné des conventions du modèle Do it yourself internationalisé. Ce mouvement proche des groupements anarchistes prône l’amateurisme, la production artistique restreinte et le radicalisme des prises de position. Sur l’exemple de ces deux mouvements artistiques, la thèse étudie les logiques de politisation et les modes de contestation.

    Tristan Leperlier, Une guerre des langues ? , thèse soutenue en 2015 à Paris EHESS sous la direction de Gisèle Sapiro  

    Entre sociologie de la littérature et des intellectuels, cette thèse rend compte du champ littéraire algérien comme champ bilingue, transnational, en période de crise : elle rompt avec ce que nous avons appelé le « monolinguisme méthodologique », se situe dans les recherches qui se détachent du « nationalisme méthodologique » et de l'« exceptionnalisme de la crise ». Elle évalue le rôle du facteur linguistique (arabe/français, tamazight traité à part) dans les prises de position politique des écrivains pendant la guerre civile : nous montrons que la dimension transnationale du champ est plus explicative, même si la guerre est devenue ce que certains ont appelé une « guerre des langues » dans le champ littéraire. En outre, dans un contexte d'exil massif d'écrivains notamment en France, la crise questionne la « littérature nationale », tant dans sa définition interne que dans son image dans l'ancien pays colonisateur, entre universalité littéraire et niche commerciale. Enfin elle pose la question de l'articulation entre littérature et politique, alors que la valeur littéraire de l'engagement est différente en Algérie et en France, et que la figure de l'écrivain engagé est concurrencée par d'autres figures intellectuelles. L'enquête empirique s'appuie sur deux bases de données originales, la première bibliographique recensant près de 1600 œuvres littéraires publiées par des Algériens, la seconde prosopographique, portant sur 174 écrivains en activité pendant la période et permettant une Analyse des Correspondances Multiples ; environ 80 entretiens semi-directifs ; des documents d'archive ; le dépouillement de titres de presse ; et des analyses d'œuvres littéraires.

    Cyprien Tasset, Les intellectuels précaires, genèses et réalités d ' une figure critique, thèse soutenue en 2015 à Paris EHESS sous la direction de Luc Boltanski  

    Les intellectuels précaires sont la nomination synthétique d'une figure sociale qui, à travers des termes variables, était couramment évoquée au cours de la décennie 2000 dans des discours savants sur la société. Notre recherche a pris pour point de départ deux questions : celle des réalités de ce groupe théorique ou latent dans la société française contemporaine, et celle de sa propension à critiquer la société et même à nourrir ce que Luc Boltanski a appelé une « critique radicale » de celle-ci. Pour cela nous articulons une enquête de première main auprès de personnes occupant aujourd'hui des emplois précaires parmi les professions intellectuelles et culturelles, avec une approche généalogique. Celle-ci retrace la genèse et les métamorphoses de figures d'intellectuels défavorisés, comme figures de crise, depuis l'Ancien Régime jusqu'aux années 1970, montre la résurgence de ce thème au début du 21e siècle, et typologise les mises en forme inchoatives de ce groupe social dans les discours savants et politiques contemporains. De plus, à partir de sources syndicales, sociologiques, journalistiques et militantes, nous analysons la mise en place de trois modes de problématisation critique de la précarité et des précaires à la fin des années 1970, qui préfigurent les hésitations et les contradictions des rapports des personnes interviewées à la catégorie au nom de laquelle était menée l'enquête. On comprend mieux, alors, les formes variables prises par les investissements politiques des précaires, notamment « intellectuels », ainsi que les limites de leurs chances de prendre consistance.