Brigitte Gaïti

Professeur
Science politique.
École de Droit de la Sorbonne

Centre Européen de Sociologie et de Science Politique

Responsabilités administratives et scientifiques :

  • THESE

    De la quatrième à la cinquième République : les Conditions de la réalisation d'une prophétie, soutenue en 1992 à Paris 1 sous la direction de Daniel Gaxie 

  • Brigitte Gaïti, Patrick Lehingue, Lorenzo Barrault-Stella (dir.), La politique désenchantée ? Perspectives sociologiques autour des travaux de Daniel Gaxie: perspectives sociologiques autour des travaux de Daniel Gaxie, Presses universitaires de Rennes et OpenEdition, 2022, 372 p.  

    Cet ouvrage collectif propose une réflexion de politistes et de sociologues qui s'adosse aux travaux de Daniel Gaxie. C'est l'occasion de reprendre le débat autour des nombreux domaines qu'il a défrichés, qu'il s'agisse de travaux sur la représentation et la professionnalisation politiques, sur la politisation des « profanes », sur le militantisme et ses rétributions ou encore sur les luttes au principe de l'action publique. Le pari était le suivant : montrer comment cette sociologie qui, dans les années 1970, dévoilait les ressorts sociaux d'un enchantement largement partagé de la politique démocratique, montrant la faible démocratisation du recrutement des représentants, définissant les contours d'un « cens caché », critiquant une vision héroïsée de l'action publique, pouvait analyser aujourd'hui un monde politique nouveau, largement désenchanté (« crise » de la représentation, suspicions autour de l'activité politique, jugements désabusés sur son impuissance...). La fameuse lutte contre les prénotions qui habitait le métier de sociologue doit désormais emprunter des chemins beaucoup plus escarpés. Les textes réunis posent frontalement la question de l'actualisation des apports de cette sociologie politique et s'interrogent sur les manières de la renouveler en soulignant des manques, en suggérant des prolongements et en proposant des pistes pour l'avenir.

    Brigitte Gaïti, Johanna Siméant-Germanos (dir.), La consistance des crises – Autour de Michel Dobry.: autour de Michel Dobry, Presses universitaires de Rennes et OpenEdition, 2022, 330 p.  

    L'oeuvre de Michel Dobry apparaît comme une des plus singulières et fécondes dans l'univers de la science politique contemporaine. Les réflexions tirées de Sociologie des crises politiques, récemment réédité, sont soumises ici à des épreuves empiriques et des questions théoriques renouvelées. Les hypothèses et méthodes proposées dans le livre de 1986 y résistent bien : elles permettent de saisir les logiques des basculements historiques, de ces moments où les repères ordinaires s'effondrent et où la légitimité des dirigeants s épuise brutalement. Et parce que cette sociologie nous engage à saisir l'effectuation même de ces processus d'écroulement, sans postuler qu'ils doivent tout à des causes lointaines, sans faire du résultat des crises le moteur de leur déroulement, elle est un des remèdes efficaces contre ces lectures étiologiques et rétrospectives qui encombrent l'histoire des révolutions. D'autres points sont soumis à la question : comment la sociologie des crises s'accommode-t-elle d'une sociologie de l'habitus avec qui elle entend cohabiter, ou encore comment intègre-t-elle l'historicité des sciences sociales : est-on voué à penser la crise sur le mode de la contingence ou faut-il viser une épistémologie à prétention nomologique souvent laissée aux seules sciences dures ? Nul doute qu il y a là des interrogations qui traversent les sciences sociales contemporaines et auxquelles un entretien avec Michel Dobry, publié en fin de volume, apporte quelques réponses

    Brigitte Gaïti, Nicolas Mariot (dir.), Intellectuels empêchés. Ou comment penser dans l’épreuve: ou comment penser dans l'épreuve, ENS Éditions et OpenEdition, 2021, Sociétés, espaces, temps, 288 p.  

    Germaine Tillon, Jean-Paul Sartre, Marc Bloch, Charlotte Delbo, Bruno Bettelheim ou Roland Barthes : voici quelques-uns des intellectuels que l’on croisera dans ce livre. Ils ont en commun d’avoir éprouvé, plus ou moins longtemps et durement, des moments où ils ont été empêchés de lire, d’écrire, d’enseigner, de peindre, etc. Tous ont témoigné de ces épisodes de mise à l’épreuve dont parfois on ne se remet jamais. Certains ont été internés en prison ou en camp. D’autres ont connu l’enfermement du sanatorium. D’autres encore ont choisi de rompre avec le monde intellectuel en s’établissant en usine ou en partant vers un ailleurs lointain. L’ouvrage prend ces situations d’empêchement, subies ou choisies, comme autant de terrains d’enquête : que disent-elles de la condition intellectuelle ? Que mobilisent ces hommes et femmes pour faire face aux privations dont ils et elles sont l’objet ? Leurs réactions nous révèlent combien la condition intellectuelle ordinaire tient à des apprentissages lettrés, mais aussi à des équipements matériels (le bureau, le livre), à des publics (les lecteurs, les élèves) et à des solidarités (les pairs), autrement dit à des mondes qui soutiennent l’identité. Au fond, ce que nous donnent à voir ces récits de captivité, ces carnets de guerre ou ces correspondances d’exil, ce sont les tentatives pour reconstruire ces mondes. Dans l’épreuve et malgré elle.

    Brigitte Gaïti, Delphine Dulong (dir.), La coordination du travail gouvernemental, ENA, 2020, 559 p. 

    Brigitte Gaïti (dir.), Le passé mobilisé, De Boeck, 2015, 229 p. 

    Brigitte Gaïti, Vincent Gayon, Benjamin Lemoine (dir.), Mise en ordre de l'économie, De Boeck, 2014, 236 p. 

    Brigitte Gaïti, Yannick Barthe (dir.), Figures de la décision, A. Colin, 2008, 212 p. 

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald (dir.), La démocratie aux extrêmes: sur la radicalisation politique, la Dispute, 2006, Pratiques politiques, 338 p. 

    Brigitte Gaïti, Matthieu Bera, Nicolas Defaud, Vincent Guiader, Jérémie Nollet, Revue des revues, Association des étudiants en science politique de Paris 1, Paris : Association des étudiants en science politique de Paris 1 et PERSÉE : Université de Lyon, CNRS & ENS de Lyon, 2004, 189202 p.    

    Bera Matthieu, Defaud Nicolas, Gaïti Brigitte, Guiader Vincent, Nollet Jérémie. Revue des revues. In: Politix, vol. 17, n°65, Premier trimestre 2004. Trajectoires de la notabilité. I. Pratiques et stratégies sous la direction de Jean-Louis Briquet. pp. 189-202.

    Brigitte Gaïti, Patricia Bell, Nicolas Defaud, Jean-Noël Jouzel, Nicolas Offenstadt [et alii], Revue des revues, Association des étudiants en science politique de Paris 1, Paris : Association des étudiants en science politique de Paris 1 et PERSÉE : Université de Lyon, CNRS & ENS de Lyon, 2003, 205212 p.    

    Bell Patricia, Defaud Nicolas, Gaïti Brigitte, Jouzel Jean-Noël, Offenstadt Nicolas, Robert Cécile. Revue des revues. In: Politix, vol. 16, n°64, Quatrième trimestre 2003. La question animale, sous la direction de Nicolas Dodier, Pierre-Benoît Joly et Cyril Lemieux. pp. 205-212.

    Brigitte Gaïti, Liora Israël (dir.), La cause du droit, Hermès Science et Lavoisier, 2003, 215 p. 

    Brigitte Gaïti, Jean-Louis Briquet, Annie Collovald, Corinne Delmas, Nicolas Kaciaf [et alii], Revue des revues, Association des étudiants en science politique de Paris 1, Paris : Association des étudiants en science politique de Paris 1 et PERSÉE : Université de Lyon, CNRS & ENS de Lyon, 2002, 213232 p.    

    Briquet Jean-Louis, Gaïti Brigitte, Collovald Annie, Delmas Corinne, Kaciaf Nicolas, Sawicki Frédéric, Taiclet Anne-France, Vanommeslaghe Laurence, Verrier Benoît. Revue des revues. In: Politix, vol. 15, n°58, Deuxième trimestre 2002. Guerres et paix, sous la direction de Annie Collovald et Pierre Lascoumes. pp. 213-232.

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald (dir.), La radicalisation politique: table ronde n°4, AFSP et Sciences Po, 2002 

    Brigitte Gaïti, Dominique Cardon, Tangui Coulouarn, Corinne Delmas, Delphine Dulong [et alii], Revue des revues, Association des étudiants en science politique de Paris 1, Paris : Association des étudiants en science politique de Paris 1 et PERSÉE : Université de Lyon, CNRS & ENS de Lyon, 2001, 195215 p.    

    Cardon Dominique, Coulouarn Tangui, Delmas Corinne, Dulong Delphine, Foret François, Gaïti Brigitte, Godmer Laurent, Guionnet Christine, Kaciaf Nicolas, Legavre Jean-Baptiste, Taiclet Anne-France, Verrier Benoît. Revue des revues. In: Politix, vol. 14, n°55, Troisième trimestre 2001. Analyses politiques allemandes, sous la direction de Fabien Jobard et Pascale Laborier. pp. 195-215.

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald (dir.), Changer de régime, L'Harmattan et Numilog, 1999, 192 p. 

    Brigitte Gaïti, De Gaulle, prophète de la Cinquième République, 1946-1962, Presses de Sciences Po, 1998, 372 p.   

    Brigitte Gaïti, Arthur Jobert, Jérôme Valluy (dir.), Définir l'intérêt général, L'Harmattan, 1998, 223 p. 

    Brigitte Gaïti, Frédéric Sawicki (dir.), L'institution des rôles politiques, l'Harmattan, 1997, 188 p. 

    Brigitte Gaïti, Daniel Gaxie, Loïc Blondiaux, Rapport sur l'analyse secondaire des enquêtes d'opinion relatives à l'immigration et à la présence étrangère en France, Université de Paris I, 1995, 189 p. 

    Brigitte Gaïti, Daniel Gaxie, Loïc Blondiaux, Rapport sur l'analyse secondaire des enquêtes d'opinion relatives à l'immigration et à la présence étrangère en France: Annexes, Université de Paris I, 1995, 86 p. 

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald (dir.), Causes entendues, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1992, 186 p. 

    Brigitte Gaïti, Bastien François, Jean-Philippe Heurtin (dir.), L'ordre parlementaire, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1992, 208 p. 

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald (dir.), Causes entendues, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1991 

    Brigitte Gaïti, Daniel Gaxie, Annie Collovald, Le social transfiguré: sur la représentation politique des préoccupations sociales, Presses universitaires de France, 1990, Publications du Centre universitaire de recherches administratives et politiques de Picardie, 203 p.   

    Brigitte Gaïti, Les modernisateurs dans l'administration d'après-guerre: histoire de la formation d'un groupe, 1987 

    Brigitte Gaïti, L'Intégration des universités et des universitaires dans la société américaine, 1982 

  • Brigitte Gaïti, « " Les métamorphoses du « grand commis ». Regard politiste sur une figure du haut fonctionnaire" », Qu'est-ce qu'un grand commis de l'Etat. Passé et avenir, Actes de colloque, Comité d'histoire du Conseil d'Etat et de la juridiction administrative, coll. "Histoire et Mémoire", Paris, La documentation française, 2022 

    Brigitte Gaïti, « L’impuissance ministérielle. Désenchantement du politique et transformation du métier gouvernemental, chapitre 12, pp. 243-262 », La politique désenchantée ? Perspectives sociologiques autour des travaux de Daniel Gaxie, 2019 

    Brigitte Gaïti, « "La IVe République a-t-elle existé ? Mort et résurrection d'un régime et de sa Constitution. Regard d'une politiste", pp. 154-176 », La Constitution du 27 octobre 1946. Nouveaux regards sur les mythes d'une Constitution "mal aimée", dirigé par Emmanuel Cartier et Michel Verpeaux, 2018 

  • Brigitte Gaïti, Marie Scot, « Une science sur ordonnance », 2023  

    « La Fondation ? L’Institut ? Est-ce l’Institut qui est national ou la Fondation qui est Études politiques ? Personne ne sait très bien ce que sont les titres exacts, encore moins ce qu’ils recouvrent. » Ce constat formulé en 1953 par Jacques Chapsal, directeur de Sciences Po de 1947 à 1979, témoigne de l’ambiguïté du statut et de l’objet social de la nouvelle institution créée par l’ordonnance du 9 octobre 1945. Si les missions de l’Institut d’études politiques (IEP), rattaché à l’université...

    Brigitte Gaïti, « Les nouvelles voies de la présidentialisation d'un régime (2007-2022), SIlomag, n°14 », SiloMag, 2022 

    Brigitte Gaïti, Delphine Dulong, « Introduction », Revue française d’administration publique, 2020, n°3, pp. 559-563 

    Brigitte Gaïti, « Gouverner le Gouvernement : les trajectoires des politiques de coordination gouvernementale en France (1935-2019) », Revue française d’administration publique, 2020, n°3, pp. 565-585 

    Brigitte Gaïti, Marie Scot, « Une science sans savants ? Les paradoxes de l’émergence de la science politique en France entre 1945 et 1968 », Revue Française de Science Politique, 2017, n°1, pp. 13-42 

    Brigitte Gaïti, Marie Scot, « Une science sans savants ? »: Les paradoxes de l’émergence de la science politique en France entre 1945 et 1968, Revue Française de Science Politique, 2017, n°1, pp. 13-42 

    Brigitte Gaïti, «  À partir de quoi pouvait-on reconstruire ?  Les turbulences de l’écriture de l’histoire dans la Russie post-soviétique », Politix , 2015, n° ° 110, pp. 111-135   

    Brigitte Gaïti, « L'érosion discrète de l'État-providence dans la France des années 1960 : Retour sur les temporalités d'un  tournant néo-libéral  », Actes de la recherche en sciences sociales , 2014, n° ° 201-202, pp. 58-71    

    L’article tend à montrer la brièveté de l’épisode keynésien dans la vie politique française et la fragilité des conversions de l’élite politico-administrative au keynésianisme. Les transformations des compétitions bureaucratiques dans les années 1960 et le caractère extrêmement dispersé et fluctuant des politiques économiques et sociales de la présidence gaulliste permettent de repérer l’émergence d’orientations, de pratiques, de méthodes, plus sensibles à la question de la réduction de la dépense publique et à la restauration des grands équilibres économiques. Au cours des années 1970, ces réformes discrètes de l’appareil d’État et des politiques publiques sont publicisées et accentuées, formant ce qui devient un tournant néo-libéral.

    Brigitte Gaïti, « Comment écrire une histoire qui tient ? À propos de l'opinion publique », Le Mouvement Social , 2010, n° ° 230, pp. 145-150   

    Brigitte Gaïti, « La décision à l'épreuve du charisme : Le général de Gaulle entre mai 1968 et avril 1969 », Politix , 2008, n° ° 82 , pp. 39-67    

    Comment saisir et rendre compte de l’émergence et du déploiement de configurations décisionnelles charismatiques ? C’est cette question que l’article aborde à partir de l’analyse de quelques initiatives singulières prises par le général de Gaulle entre la fin du mois de mai 1968 et la fin du mois d’avril 1969. L’interrogation part d’une énigme : comment comprendre que le président de la République qui dispose alors de fortes ressources institutionnelles et politiques se lance dans des décisions extrêmement risquées, spectaculaires, personnalisées : le refus de dévaluer en novembre 1968, l’initiative référendaire lancée en mai 1968, abandonnée puis relancée dès juin, et pour finir l’engagement de sa responsabilité personnelle sur un référendum incertain en avril 1969. On verra que la solution à cette énigme suppose de se dégager du personnage de Gaulle pour aller interroger les propriétés sociales et politiques de la configuration collective qui se met progressivement en place à partir des événements de mai 1968.

    Brigitte Gaïti, « L'opinion publique dans l'histoire politique : impasses et bifurcations », Le Mouvement Social , 2007, n° ° 221, pp. 95-104   

    Brigitte Gaïti, Fariba Adelkhah, « Expatriation et notabilité. L'évergétisme et la diaspora iranienne », 2004, pp. 73-92    

    Expatriation et notabilité. L'évergétisme dans la diaspora iranienne Fariba Adelkhah La figure notabiliaire est omniprésente dans la société politique iranienne. C'est notamment elle qui articule au pouvoir d'Etat la diversité régionale, ethnique ou religieuse, dans un pays multiculturel, multilinguistique, et multiconfessionnel. Aussi la continuité de la figure notabiliaire de l'Empire à la République l'emporte sur la discontinuité. Dans les provinces, le rôle joué par les hommes de confiance, notamment lors des élections, est considérable. En même temps, l'acte de se porter candidat est une façon de se voir reconnaître le statut de notable, en dépit éventuellement d'une chance minime d'être élu(e). Toutefois la notabilité n'a pas de frontière, que celle-ci soit sociale ou géographique, et l'on peut devenir notable dans l'émigration dont l'aventure fournit souvent elle-même des ressources spécifiques en la matière. Ainsi le marché cambiaire a représenté depuis 1980 une ressource notabiliaire formidable pour les émigrés, compte tenu de la faiblesse et de la dépréciation continue du rial des années 1980 jusqu'à 2001. Les investissements évergétiques que prodigue l'« homme de bien » de la diaspora sont ainsi devenus spectaculaires. Ce travail analyse le parcours évergétique de l'homme de bien, d'une part, comme une facette de la recomposition de la communauté iranienne dans la diaspora et, de l'autre, comme une interrogation décalée sur l'une des institutions les plus anciennes de la société d'origine, le vaqf.

    Brigitte Gaïti, Liora Israël, « Sur l'engagement du droit dans la construction des causes », 2003, pp. 17-30    

    Sur l'engagement du droit dans la construction des causes Brigitte Gaïti, Liora Israël Cet article se propose de présenter les enjeux spécifiques portés par une analyse des causes juridiques et judiciaires partiellement inspirée des travaux d'origine anglo-saxonne sur le cause lawyering. Un premier enjeu concerne la manière dont on peut s'intéresser à ce que le droit fait à la cause, c'est-à-dire aux formes de traduction et d'élaboration spécifiques des cas opérées par les professionnels du droit. Mais on peut également se demander ce que la cause fait au droit, afin de comprendre comment les acteurs et les institutions juridiques et judiciaires sont reconfigurés par ces usages politiques du droit. Enfin, cette approche permet de mettre en évidence les caractéristiques de l'engagement du droit dans la construction des causes par comparaison avec d'autres formes d'expertise concurrentes.

    Brigitte Gaïti, Robert Garner, « Le mouvement pour la protection des animaux aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Recrutement, idéologie et stratégie », 2003, pp. 75-102    

    Le mouvement pour la protection des animaux aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Recrutement, idéologie et stratégie Robert Garner Depuis les années 1970, les associations pour la protection des animaux ont connu aux Etats-Unis comme en Grande-Bretagne un très net regain de vitalité, en même temps que leurs actions se sont radicalisées. Ces organisations constituent désormais, dans ces deux pays, un acteur incontournable sur la scène des mouvements sociaux et des groupes de pression. Cet article s'attache dans un premier temps à examiner, en repartant d'une problématique inspirée par les travaux de Mancur Olson, de quelle façon de telles organisations ont réussi à faire face à leurs difficultés en matière de recrutement des militants et de survie organisationnelle. Ces considérations, qui incitent à une sortie du modèle olsonien, conduisent l'auteur, dans un second temps, à essayer de cerner les enjeux sous-jacents au débat central qui traverse le mouvement pour la protection animale et qui oppose, pour le dire schématiquement, les fondamentalistes des « droits de l'animal » aux partisans d'une approche plus pragmatique fondée sur la conciliation de l'objectif de reconnaissance de ces droits avec des buts plus immédiats de promotion du bien-être animal. L'auteur, lui-même impliqué dans ce débat entre militants, discute la position des premiers et plaide, aux côtés des seconds, pour la poursuite de stratégies réformistes.

    Brigitte Gaïti, « Les modernisateurs dans l'administration d'après-guerre l'écriture d'une histoire héroïque », Revue française d'administration publique , 2002, n° 102, pp. 295-306   

    Brigitte Gaïti, Roland Marchal, « Les frontières de la paix et de la guerre », 2002, pp. 39-59    

    Les frontières de la paix et de la guerre Roland Marchal Guerre et paix, ni guerre ni paix, paix dans la guerre et guerre dans la paix : la contestation d'une claire division entre état de guerre et état de paix, si elle apparaît soudainement possible, n'est pas le produit d'un simple effet de rhétorique. Elle tient réellement à une indécision fondamentale sur le statut de situations qui se sont multipliées depuis longtemps, sans doute bien avant la fin de la Guerre froide et l'avènement de la globalisation. A partir d'exemples concrets, l'article s'attache à le démontrer.

    Brigitte Gaïti, « Les manuels scolaires et la fabrication d'une histoire politique : L'exemple de la IVe République », Genèses , 2001, n° 44, pp. 50-75    

    RésuméL’article se propose de suivre les processus de fabrication d’une histoire politique de la France de l’après 1940 à partir d’un terrain singulier : celui des manuels scolaires de Terminale publiés depuis 1983. Nous interrogerons d’abord la conjoncture dans laquelle se comprend l’introduction de l’histoire du temps présent dans les lycées, avant de dégager les modes de production et d’organisation d’un récit scolaire stabilisé de l’histoire politique de la IVe République. L’étude vise à questionner les possibilités de reconstruire des hypothèses de recherche sur la période contemporaine à la faveur de l’intérêt élargi qu’elle suscite désormais, à la faveur également des recompositions et de nouvelles alliances disciplinaires engagées par des historiens du temps présent moins perméables à la demande sociale. Quelles que soient les contraintes pédagogiques et scolaires propres aux manuels, l’enjeu reste celui d’une réouverture globale des cadres interprétatifs disponibles.

    Brigitte Gaïti, Adrienne Héritier, « La régulation comme patchwork . La coordination de la multiplicité des intérêts dans le processus décisionnel européen », 2001, pp. 125-147    

    La régulation comme « patchwork ». La coordination de la multiplicité des intérêts dans le processus décisionnel européen Adrienne Héritier La pratique politique européenne de régulation se déploie dans un contexte de multiplicité des intérêts et des traditions des Etats-membres. Ces traditions politiques différentes s'opposent dans l'arène européenne et doivent être mises en balance. Au cours de ce processus, certains modèles de coordination commune émergent qui, enchâssées dans les institutions européennes, sont typiques dans la pratique politique de régulation en Europe. Ces modèles comportent la « stratégie du premier pas » par les Etats-membres, la « résolution du problème » et la « coordination négative, négociation et compensation ». Le résultat de la dynamique de ces modèles de coordination dans la pratique politique de régulation est une régulation semblable à un « patchwork » au niveau européen. La diversité des modèles de coordination, leur cheminement typique et leur conséquences politiques sont illustrés par la discussion sur la législation européenne concernant la qualité de l'air.

    Brigitte Gaïti, « Les inconstances politiques », 2001, pp. 17-42    

    Les inconstances politiques Brigitte Gaïti L'article présente les conditions d'une rencontre possible entre historiens et sociologues sur le terrain des adhésions politiques. Dans un premier temps, il propose un retour sur la fabrication des figures de l'inconstance dans les compétitions politiques avant de dégager, en s'appuyant sur les transformations des approches savantes de l'objet, les contours d'une économie politique élargie des consentements.

    Brigitte Gaïti, « Les incertitudes des origines. Mai 58 et la Ve République », 1999, pp. 27-62    

    Les incertitudes des origines. Mai 1958 et la Cinquième République. Brigitte Gaïti [ 27-62]. L'article se propose d'étudier les controverses politiques et scientifiques qui entourent les origines de la Ve République et notamment la focalisation des questions sur le partage qui s'opère entre factieux et légalistes, entre coup d'État et changement de régime dans les formes constitutionnelles. Cette controverse est souvent réglée dans l'issue : la fin du conflit algérien dans l'indépendance et l'avenir démocratique de la Ve République rendraient inutiles tout questionnement sur les événements de mai et l'identité politique de Charles de Gaulle. L'article veut montrer comment a été produite et naturalisée cette frontière entre le légal et l'illégal.

    Brigitte Gaïti, « Jean Lacouture biographe », 1994, pp. 76-93    

    Gaïti Brigitte. Jean Lacouture biographe. In: Politix, vol. 7, n°27, Troisième trimestre 1994. La biographie. Usages scientifiques et sociaux, sous la direction de Luc Berlivet, Annie Collovald et Frédéric Sawicki. pp. 76-93.

    Brigitte Gaïti, « Les ratés de l’histoire. Une manifestation sans suites : le 17 octobre 1961 à Paris », 1994, pp. 11-37    

    L'article se propose d'aborder un problème à la fois historiographique et politique : pourquoi le souvenir de la répression sanglante d'une manifestation organisée le 17 octobre 1961 à Paris par le FLN s'est-il perdu ? Afin de comprendre les conditions de "l'organisation de l'oubli" d'un événement, l'article revient sur le contexte du déroulement de la manifestation puis étudie les formes du retour de l'événement dans une actualité éditoriale et politique. À travers cette étude, c'est la question de l'approche sociologique d'un événement qui est posée : comprendre les actions, les stratégies engagées par ses protagonistes, retrouver les propriétés des configurations historiques dans lesquelles prennent sens les mobilisations, analyser enfin les conditions pour qu'un événement trouve des porte-parole pour l'Histoire.

    Brigitte Gaïti, Annie Collovald, « Des causes qui parlent... », 1991, pp. 7-22    

    Collovald Annie, Gaïti Brigitte. Des causes qui "parlent".... In: Politix, vol. 4, n°16, Quatrième trimestre 1991. Causes entendues - Les constructions du mécontentement (1) sous la direction de Annie Collovald et Brigitte Gaïti. pp. 7-22.

    Brigitte Gaïti, « La levée d'un indicible : l'indépendance de l'Algérie (1956-62) », 1990, pp. 110-123    

    Gaïti Brigitte. La levée d'un indicible : «l'indépendance» de l'Algérie (1956-62). In: Politix, vol. 3, n°10-11, Deuxième et troisième trimestre 1990. Codification(s) sous la direction de Bastien François et Jean-Philippe Heurtin. pp. 110-123.

    Brigitte Gaïti, Jean-Baptiste Legavre, « Le débat télévisé Mitterrand/Chirac de 1988 raconté par plusieurs de ses acteurs », 1990, pp. 86-93    

    Legavre Jean-Baptiste. Le débat télévisé Mitterrand/Chirac de 1988 raconté par plusieurs de ses acteurs. In: Politix, vol. 3, n°9, Premier trimestre 1990. En Vert et contre tout ? L'écologie en politique. pp. 86-93.

    Brigitte Gaïti, « Des ressources politiques à valeur relative : le difficile retour de Valéry Giscard d'Estaing », 1990, pp. 902-917    

    Gaïti Brigitte. Des ressources politiques à valeur relative : le difficile retour de Valéry Giscard d'Estaing. In: Revue française de science politique, 40ᵉ année, n°6, 1990. pp. 902-917.

    Brigitte Gaïti, « Histoire d'une renaissance, l'histoire du service public », 1989, pp. 61-67    

    Gaïti Brigitte. Histoire d'une renaissance, l'histoire du service public. In: Politix, vol. 2, n°6, Printemps 1989. Les liaisons dangereuses. Histoire, sociologie, science politique, sous la direction de Sylvain Bourmeau, Dominique Cardon, Annie Collovald et Jean-Philippe Heurtin. pp. 61-67.

  • Brigitte Gaïti, La décision dans la crise sanitaire ou la logique du désordre, The Conversation, The Conversation Media Group, 2021 

    Brigitte Gaïti, Lucien Chabasson, Un énarque en vert, Association des étudiants en science politique de Paris 1, Paris : Association des étudiants en science politique de Paris 1 et PERSÉE : Université de Lyon, CNRS & ENS de Lyon, 1990, pp. 54-55    

    Chabasson Lucien, Gaïti Brigitte. Un énarque en vert. In: Politix, vol. 3, n°9, Premier trimestre 1990. En Vert et contre tout ? L'écologie en politique. pp. 54-55.

  • Brigitte Gaïti, « De Serval à Barkhane », le 25 avril 2024  

    Colloque organisé par l'Institut pour la paix et le Sorbonne War Studies, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

    Brigitte Gaïti, « Alternance politique, continuité administrative ? », le 18 septembre 2023  

    Colloque organisé par Kévin Bernard, Tanguy Levoyer et Raphaëlle Sors et co-financé par l'Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales (IRISSO, Université Paris-Dauphine, PSL) et l'Institut de Recherche Interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (IRIS, Ecole des hautes études en sciences sociales, EHESS)

    Brigitte Gaïti, « Qu’est-ce qu’un grand commis de l’État ? », le 05 février 2021  

    Organisé par le Comité d’histoire du Conseil d’État et de la juridiction administrative.

    Brigitte Gaïti, « 1946-2016. La Constitution du 27 octobre 1946 », le 09 novembre 2016  

    À l’initiative de l’Association française de droit constitutionnel

Actualités Publications ENCADREMENT DOCTORAL
  • Léna Krief, La politisation transversale de l'alimentation en France. Une analyse du changement dans l’action publique, thèse en cours depuis 2023 en co-direction avec Anne-France Taiclet 

    Anja Rakotonirina, Penser les indépendances , thèse en cours depuis 2022 

    Clément Lescloupé, Une configuration indécidable : retour sur vingt années de réforme ininterrompue des institutions du Grand Paris (2000-2020), thèse soutenue en 2021 à Paris 1, membres du jury : Rémy Le Saout (Rapp.), Gilles Pinson (Rapp.), Anne-France Taiclet  

    La Métropole du Grand Paris est une institution politique peu évoquée dans la presse pour ses réalisations ; et davantage en raison du flou et de l’instabilité qui entourent son organisation, ses missions, et son devenir. Créée le 1er janvier 2016, elle regroupe la ville-capitale ainsi que 130 communes de sa banlieue. Elle prend place à la suite d’une quinzaine d’années de coopérations, de négociations et de luttes partisanes, institutionnelles et territoriales, entre acteurs politiques et administratifs franciliens et étatiques. Son établissement mettait un terme à une exceptionnalité parisienne. Mais loin de rationaliser le paysage politico-administratif francilien et de constituer un acteur collectif unique à l’échelle de l’agglomération parisienne, la réforme a institué une situation d’une complexité inédite. Aux incertitudes autour du contenu de la réforme institutionnelle du Grand Paris, engagée depuis le début des années 2000 jusqu’à la décision entrée en vigueur en 2016, ont succédé de nouvelles incertitudes sur la pérennité de l’architecture institutionnelle aujourd’hui à l’œuvre et la forme de celle qui pourrait s’y substituer. En croisant la sociologie des réformes institutionnelles et l’analyse décisionnelle, c’est le Grand Paris en tant que configuration indécidable - en ce qu’aucune décision sur la distribution des pouvoirs dans l’agglomération n’est parvenue à s’imposer durablement - que nous souhaitons investiguer au sein de cette thèse ; en revenant sur une vingtaine d’années, de 2000 à 2020, d’incertitudes, de flou, de récit institutionnel brouillé, d’indécisions et de décisions sans cesse révisées.

    Thomas Lépinay, Le pouvoir des rapports , thèse soutenue en 2020 à Paris 1  

    Entre l’après-guerre et le début du XXIe siècle, la Cour des comptes, grand corps de l’État dont les membres ont pour la plupart compté parmi les meilleurs élèves de l’ENA, a connu une trajectoire singulière : autrefois cantonnée au jugement des comptes publics, elle a progressivement étendu ses missions vers des tâches réputées plus politiques. De surcroît, ce changement ne s’est pas fait dans la discrétion : la Cour est devenue dans le même temps une institution fortement médiatisée. En d’autres termes, les magistrats ont construit de nouveaux publics, ont renouvelé leur profession et ont déplacé la « frontière » entre le politique et l’administratif. Au rebours des approches traditionnelles sur les grands corps de l’État, qui tendent à mettre l’accent sur les circulations des membres hors de l’institution, l’hypothèse développée est que les membres du corps ont modelé leur travail quotidien dans les murs, c’est-à-dire l’écriture de rapports, pour renforcer leur position au sommet de l’État. La thèse interroge ainsi les évolutions des formes de contrôle de la Cour en les contextualisant dans les transformations de l’État. Elle examine ensuite la manière dont les acteurs ont fait reconnaître leur expertise par des publics variés. Elle entre enfin dans la boîte noire de la production et de la réception des rapports, pour comprendre comment une institution peut être durablement reconnue comme « lieu neutre ». L’approche retenue utilise les outils de la sociologie des institutions et de la réputation organisationnelle. Elle exploite divers matériaux : entretiens, archives écrites et orales, observations, analyse de la presse et de rapports publics.

    Thomas Lépinay, Le pouvoir des rapports, thèse soutenue en 2020, membres du jury : Florence Descamps (Rapp.), Jean-Michel Eymeri-Douzans (Rapp.), Daniel P. Carpenter et Philippe Bezes    

    Entre l’après-guerre et le début du XXIe siècle, la Cour des comptes, grand corps de l’État dont les membres ont pour la plupart compté parmi les meilleurs élèves de l’ENA, a connu une trajectoire singulière : autrefois cantonnée au jugement des comptes publics, elle a progressivement étendu ses missions vers des tâches réputées plus politiques. De surcroît, ce changement ne s’est pas fait dans la discrétion : la Cour est devenue dans le même temps une institution fortement médiatisée. En d’autres termes, les magistrats ont construit de nouveaux publics, ont renouvelé leur profession et ont déplacé la « frontière » entre le politique et l’administratif. Au rebours des approches traditionnelles sur les grands corps de l’État, qui tendent à mettre l’accent sur les circulations des membres hors de l’institution, l’hypothèse développée est que les membres du corps ont modelé leur travail quotidien dans les murs, c’est-à-dire l’écriture de rapports, pour renforcer leur position au sommet de l’État. La thèse interroge ainsi les évolutions des formes de contrôle de la Cour en les contextualisant dans les transformations de l’État. Elle examine ensuite la manière dont les acteurs ont fait reconnaître leur expertise par des publics variés. Elle entre enfin dans la boîte noire de la production et de la réception des rapports, pour comprendre comment une institution peut être durablement reconnue comme « lieu neutre ». L’approche retenue utilise les outils de la sociologie des institutions et de la réputation organisationnelle. Elle exploite divers matériaux : entretiens, archives écrites et orales, observations, analyse de la presse et de rapports publics.

    Éléanor Breton, La raison du territoire départemental , thèse soutenue en 2019 à Paris CNAM en co-direction avec Marie-Anne Dujarier  

    Cette thèse porte sur la contractualisation des subventions mise en place par les conseils généraux, à destination des collectivités locales infra-départementales. Ces politiques de territorialisation de l’action publique s’inscrivent dans des dynamiques de recomposition des rapports de pouvoir entre les collectivités locales. A partir d’une étude de cas, la thèse montre comment les « contrats de territoire » sont construits et mis en œuvre, dans les années 2000, comme des instruments devant permettre au conseil général, fragilisé par les réformes des institutions locales, d’exercer une emprise sur son territoire. La confection de règles, d’organisations du travail, de savoirs et d’outils statistiques et cartographiques, contribue à structurer une « raison du territoire » départemental. Ces ressources constituent pour le conseil général de nouveaux appuis qui lui permettent d’endosser un rôle d’« expert-prescripteur » de l’aménagement de son territoire. Les processus qui concourent à la revendication de cette juridiction territoriale par le conseil général sont saisis empiriquement à partir de l’analyse des multiples investissements matériels et idéels qu’elle suppose et des relations politico-administratives qui la trament. Cette approche à hauteur d’acteurs permet de mettre en évidence les rapports d’interdépendance et les asymétries qui configurent les relations politiques locales et de saisir les limites d’une telle entreprise. La thèse se situe à la croisée d’une sociologie de l’action publique « en train de se faire », et d’une sociologie du travail politique et administratif. Elle interroge ce que les instruments de gouvernance, comme la contractualisation, et les tentatives de contrôle politique qu’ils renferment peuvent nous apprendre sur les formes contemporaines de gouvernement local et d’inscription territoriale du pouvoir.

    Natália Frozel Barros, Un océan d'incertitudes : problématisations et mise en forme légale des fonds marins par le travail diplomatique, thèse soutenue en 2019 à Paris 1, membres du jury : Yannick Barthe (Rapp.), Delphine Placidi (Rapp.), Sandrine Lefranc et Dorota Dakowska  

    Cette thèse étudie la création, la réécriture et les successives mobilisations du régime juridique de patrimoine commun de l’humanité au prisme de l’activité diplomatique multilatérale aux Nations Unies (1960-2016). Il est étonnant que ce principe idéaliste et lié à des demandes des pays dominés revienne sans cesse au centre de la politique multilatérale, alors que sa trajectoire dévoile la transformation d’un droit international des mers idéaliste en un droit gestionnaire. Le propos central est de prendre l’activité diplomatique à la lumière de la sociologie de l’action publique. Cette démarche permet de saisir l’évolution du droit comme une transformation dans la manière dont les diplomates problématisent les enjeux liés aux fonds marins et dans la façon dont ils gèrent les incertitudes (techniques, économiques, politiques) dans la négociation. Durant quatre reproblématisations successives des fonds marins (sécuritaire, économique-morale, économique marchande et environnementale), les calculs des diplomates sont moins captés par les clivages du jeu politico-diplomatique que par la place occupée par leurs pays au sein du marché international. Cela s’explique en raison de trois facteurs : la consolidation d’instruments managériaux et techniques dans les arènes nationales et internationales ; l’impératif de « désétatisation » dans le sens d’une dépersonnalisation des solutions défendues en négociation ; et le déclin des camps politiques clairs de la Guerre froide. Il s’opère ainsi une transformation dans le travail d’écriture du droit international, les diplomates ne réduisent plus les incertitudes grâce à un jeu politique clair, capable d’apporter ses propres certitudes. Désormais, en écrivant des règles flexibles, ils composent avec l’incertain.

    Juliette Fontaine, Vichy face au corps enseignant : réformer les politiques scolaires en contexte autoritaire, thèse soutenue en 2019 à Paris 1, membres du jury : Bertrand Geay (Rapp.), Patricia Legris et Francine Muel-Dreyfus  

    Sous Vichy, une réforme de l’institution scolaire en rupture avec celle de la Troisième République est affichée comme prioritaire par les gouvernants du nouveau régime et des décisions sont prises en ce sens : les fondements de la citoyenneté républicaine et les acquis démocratiques de l’entre-deux-guerres sont contestés. Comment et à quelles conditions le Gouvernement de Vichy a-t-il réformé le secteur de l’éducation alors que le corps enseignant sur lequel repose la politique éducative sous la Troisième République lui est majoritairement hostile ? C’est la question à laquelle cette thèse propose de répondre, dans la continuité des travaux qui critiquent la mise à distance de la dimension politique de l’action publique et qui interrogent les tournants de l’action publique notamment dans des contextes autoritaire et d’alternance politique. Pour ce faire, la thèse retrace le déploiement des politiques scolaires sous Vichy, en prêtant attention aux configurations historiques et administratives particulières dans lesquelles elles s’inscrivent. En nous appuyant principalement sur l’analyse de revues, de mémoires et d’archives, nous montrons d’une part que les changements impulsés par Vichy sont préparés sous la Troisième République et trouvent leur fondement dans des alliances nouées entre de futurs dirigeants du régime et une branche conservatrice et minoritaire du groupe enseignant ; nous montrons d’autre part que même si le nouveau régime se donne pour priorité le renouvellement du corps enseignant, les pratiques professionnelles et les habitus des instituteurs sur le terrain entravent largement le volontarisme des dirigeants de l'État français.

    Alessio Motta, J-1 : sociologie des déclenchements d'actions protestataires, thèse soutenue en 2019 à Paris 1 sous la direction de Michel Dobry, membres du jury : Annie Collovald (Rapp.), Lilian Mathieu (Rapp.)  

    Les déclenchements d’actions de protestation collectives ont souvent trop brièvement traités par la littérature scientifique et expliqués par les métaphores de la « goutte d’eau », de l’explosion, ou par d’autres mythes plus savants. Pour remédier à ce manque, cette thèse construit un cadre théorique inspiré des approches interactionniste et constructiviste, permettant de détailler les facteurs qui structurent ces déclenchements. Elle mêle plusieurs enquêtes qualitatives et quantitatives, par entretiens, archives, études de documents en ligne, observations directes et méthodes expérimentales, sur des mobilisations lycéennes et étudiantes, émeutes dans la banlieue lyonnaise et diverses autres actions collectives. Le volet microsociologique sur lequel s’ouvre cette recherche porte sur les rôles déterminants, aux seuils de ces déclenchements, des stratégies de mise en scène de soi et de la construction d’une croyance certaine dans le fait que d’autres acteurs agiront. Le second volet, sociohistorique et macrosociologique, porte sur les effets des connaissances institutionnalisées et partagées qui apportent aux acteurs des repères dans leurs calculs et leur permettent de faire face à l’incertitude qui précède les moments déclencheurs. On y présente différents « facteurs de probabilité » qui, en rendant l’action subjectivement certaine, contribuent à sa réalisation objective. Un accent est mis en particulier sur l’existence de « déclencheurs types » ou « situations déclencheuses types» parfois liés par les traditions ou clichés à des modes d’actions donnés («réactions collectives types»). L’ambition de l’ouvrage est non seulement de bâtir une théorie des déclenchements d’actions collectives, mais aussi d’apporter plusieurs nouvelles pistes pour les anticiper ou les réaliser, que l’on soit chercheur ou militant.

    Éléanor Breton, La raison du territoire départemental, thèse soutenue en 2019 en co-direction avec Marie-Anne Dujarier, membres du jury : Anne-Cécile Douillet (Rapp.), Philippe Bezes (Rapp.), Olivier Giraud et Marie-Vic Ozouf-Marignier    

    Cette thèse porte sur la contractualisation des subventions mise en place par les conseils généraux, à destination des collectivités locales infra-départementales. Ces politiques de territorialisation de l’action publique s’inscrivent dans des dynamiques de recomposition des rapports de pouvoir entre les collectivités locales. A partir d’une étude de cas, la thèse montre comment les « contrats de territoire » sont construits et mis en œuvre, dans les années 2000, comme des instruments devant permettre au conseil général, fragilisé par les réformes des institutions locales, d’exercer une emprise sur son territoire. La confection de règles, d’organisations du travail, de savoirs et d’outils statistiques et cartographiques, contribue à structurer une « raison du territoire » départemental. Ces ressources constituent pour le conseil général de nouveaux appuis qui lui permettent d’endosser un rôle d’« expert-prescripteur » de l’aménagement de son territoire. Les processus qui concourent à la revendication de cette juridiction territoriale par le conseil général sont saisis empiriquement à partir de l’analyse des multiples investissements matériels et idéels qu’elle suppose et des relations politico-administratives qui la trament. Cette approche à hauteur d’acteurs permet de mettre en évidence les rapports d’interdépendance et les asymétries qui configurent les relations politiques locales et de saisir les limites d’une telle entreprise. La thèse se situe à la croisée d’une sociologie de l’action publique « en train de se faire », et d’une sociologie du travail politique et administratif. Elle interroge ce que les instruments de gouvernance, comme la contractualisation, et les tentatives de contrôle politique qu’ils renferment peuvent nous apprendre sur les formes contemporaines de gouvernement local et d’inscription territoriale du pouvoir.

    Laura Gomes dacruz, L'expérience carcérale dans la trajectoire biographique. Comprendre l'engagement au sortir de la prison, thèse en cours depuis 2017 

    Pierre Mayance, Maintenir les frontières d’un secteur d’action publique. Acteurs politiques, associatifs et industriels dans le gouvernement de l’agriculture en France (des années 1980 aux années 2010), thèse en cours depuis 2015 

    Jeanne Chabbal, Changer la prison : la cause du Parlement. L'intrusion parlementaire dans les politiques pénitentiaires françaises (1999-2009), thèse soutenue en 2014 à Paris 9  

    À partir de l’exemple de la politique pénitentiaire, la thèse met au jour le rôle du Parlement français dans la réforme d’un secteur d’action publique confiné. Elle montre comment la mobilisation de députés et sénateurs sur un dossier contribue à en redéfinir les problématisations, à susciter des changements incrémentaux dans son traitement et à redessiner les contours de son réseau d’intervenants. La prison a longtemps été gérée par des acteurs administratifs producteurs de leurs propres normes. À l’issue d’un long processus de décloisonnement de l’institution carcérale et de l’éclatement d’un scandale médiatique autour des conditions de détention, deux commissions d’enquête parlementaires font intrusion en prison et initient des apprentissages individuels et collectifs sur celle-ci. Une spécialité parlementaire sur la prison émerge et se consolide sur une décennie, au terme de laquelle la prison est susceptible d'être rapatriée dans le domaine de la loi et de la décision politique.

    Sébastien Plot, Les enjeux d’une mise en risque , thèse soutenue en 2011 à Paris 9  

    La thèse porte sur l’émergence du surendettement des particuliers comme problème public à la fin du XXe siècle en France. Elle examine en quoi cette nouvelle catégorie d’action publique fait l’objet de luttes de définition tout en servant de solution politique dans le développement du marché du crédit. À travers une enquête sur le dispositif de traitement du problème (et notamment les commissions départementales de surendettement), cette recherche analyse dans quelle mesure on peut parler d’une mise en risque de la dette du particulier. Elle montre comment les professionnels de la politique ont estimé devoir prendre en compte une activité potentiellement dangereuse dans la vie collective en construisant un individu rationnel capable d’intérioriser des discours publics et en s’appuyant sur une logique mixte alliant cadre légal et logiques discrétionnaires locales. Il s’agit donc d’esquisser les manières de fixer les contours de la « conformité » économique et de mettre en relation cette conformité avec les institutions qui interviennent dans la définition du bon consommateur

    Farkhad Alimukhamedov, Des Migrations pour études , thèse soutenue en 2011 à Paris 9 

    Alice Mazeaud, La fabrique de l'alternance : la « démocratie participative » dans la recomposition du territoire régional, Poitou-Charentes 2004-2010, thèse soutenue en 2010 à La Rochelle, membres du jury : Loïc Blondiaux (Rapp.), Rémi Lefebvre (Rapp.), Pierre Sadran et Pierre Mazet  

    En 2004, la région Poitou-Charentes connait sa première alternance : l'équipe nouvelle affiche son intention de changer la politique régionale et présente « la démocratie participative » comme un choix de méthode d'action publique discriminant. En analysant conjointement les conditions d'importation et de mobilisation des idées et le travail de négociation, de mobilisation et de transaction entre les acteurs engagés à titre divers dans la production de l'action publique, nous mettons en évidence les dimensions idéologique, politique et institutionnelle de la fabrique de l'alternance, entendue comme le processus au cours duquel une équipe nouvellement élue tente de faire reconnaître son offre politique comme discriminante, de convertir l'organisation aux nouveaux objectifs qui lui sont assignés et de renégocier l'identité, les ressources et la valeur des porte-parole du territoire régional, institués par l'équipe précédente ; porte-parole avec lesquels et sur lesquels elle doit agir pour engager une action de transformation de la société locale et assoir sa position dans la compétition politique. En comparant trois dispositifs participatifs ("Budget participatif des lycées", "Jury citoyen d'évaluation de la politique régionale Transport et Mobilité" et "forum participatif sur l'eau"), nous analysons comment l'environnement régional, institué autour des politiques conduites par l'équipe précédente, se décompose et se recompose au cours de la mise en œuvre des procédures participatives qui mobilisent un public élargi de citoyens ordinaires. Ainsi, nous montrons comment ces instruments participatifs sont des vecteurs et des révélateurs d'une redéfinition du style politique et des catégories d'intervention publique régionaux.

    Patricia Legris, L'écriture des programmes d'histoire en France (1944-2010) , thèse soutenue en 2010 à Paris 1 en co-direction avec Yves Déloye  

    Cette thèse est consacrée à l'étude du processus d'élaboration des programmes d'histoire dans le second degré en France depuis la Libération. Le circuit d'écriture des curricula prescrits s'ouvre tout au long de la période retenue. Alors que la production de cet instrument d'une politique éducative se fait jusque dans les années 1960 essentiellement en cogestion entre l'Inspection générale et la SPHG, association de spécialistes, les circuits d'écriture suivants, dont les configurations sont variables, intègrent d'autres acteurs (didacticiens, historiens universitaires, groupes mémoriels, politiques, etc. ). Cette ouverture du circuit s'accompagne de changements à la fois dans les contenus des curricula et dans la conception de la citoyenneté promue par cet enseignement. L'étude des circuits d'écriture des programmes scolaires est donc à intégrer dans celle des politiques éducatives (touchant à l'histoire) ainsi que dans celle d'autres politiques publiques.

    Vincent Gayon, L'OCDE au travail , thèse soutenue en 2010 à Paris 9  

    If the OECD’s publications are often referred to or criticized, very few academic efforts have actually tried to analyze their elaboration. Based on the organization’s archives, the objective of this thesis is to fill in this gap by analyzing the production of OECD expertise on unemployment and employment, from the beginning of the 1970s to nowadays. The OECD is an institution marked by political and scientific power struggle, and influenced by political evolutions in its key member countries. Through this expertise, it is more largely the evolution of economic policy models that is questioned in an international framework: the assertion of a « monetarist consensus » overtaking the post-war « Keynesian consensus » in the 1970-1980s, and the promotion of « active » social policies in the 1990-2000s. This transformation of economic policies redefines the role of the state in the economic system, the political nature of unemployment and solutions that can be brought to this issue, and the forms of international economic cooperation itself (through benchmarking). The OECD is directly related to the transformations it tries to anticipate,provoke or rationalize

    Aude Soubiron, L'action publique expérimentale , thèse soutenue en 2010 à Paris 9 

    Ivan Chupin, Les écoles du journalisme , thèse soutenue en 2008 à Paris 9 

    Benoît Verrier, Loyauté militante et fragmentation des partis , thèse soutenue en 2003 à Université Robert Schuman Strasbourg 19712008  

    La thèse a pour objet les transformations du courant socialiste dirigé par l-P. Chevènement (CERES, Socialisme et République, MDC). Elle interroge les modes de cohésion d'un courant politique pris dans une histoire politique longue de la gauche et de la Vème République (de 1958 à 2000) et veut saisir les conditions de la survie d'un groupe politique sous une forme collective dans une conjoncture de fragmentation partisane et de délitement des liens politiques. Les réinventions successives du groupe, autour de ses dispositions sociales dans les années 60, d'alliances internes dans les années 70 et autour d'un nom, Chevènement, dans la période la plus récente constituent les trois séquences structurant le travail. Elles montrent que le maintien d'un collectif est le produit d'une capacité à se laisser investir et redéfinir par des groupes de soutien. Elles permettent aussi de relire les thèses classiques de l'histoire du PS et de son intégration dans le jeu de la Vème République.

    Philippe Hamman, Les transformations de la notabilité , thèse soutenue en 2000 à Strasbourg 3  

    Depuis le milieu du XIXe siècle, le paternalisme sarregueminois révèle au-delà de l'unique rationalité économique un véritable travail politique d'enclosure. La production patronale d'un temps et d'un lieu spécifiques et homogènes retient l'attention. Ce mode d'organisation sociale si singulier est toutefois largement scande par le développement des élections, de la citoyenneté, des syndicats, des partis politiques, etc. Ainsi, l'activité de ces patrons - notables recouvre un métier politique original qui se déploie sur tous les fronts, et pas seulement l'élection. Les handicaps se cumulent dans la configuration France - Allemagne, tout spécialement après l'annexion de 1871. Les dirigeants de la fabrique, qui ont largement bénéficie du soutien de Napoléon III, sont brutalement confrontés à un décalage complet de leurs propriétés. Ils parviennent à conserver la maîtrise de la fai͏̈encerie en soudant l'ensemble des personnels dans une mobilisation patriotique anti-allemande. Les luttes politiques s'intensifient autour d'un clivage national et avec l'irruption des partis politiques allemands. Aussi, la clôture patronale initialement indivise se différencie entre les sphères économique, politique, sociale. . . Faute de pouvoir tout contrôler dans l'espace local, les directeurs ne parviennent plus a maintenir l'enclosure au XXe siècle. Toutefois, ce n'est qu'en 1978 que le système patronal s'effondre. Ce caractère tardif révèle la puissance des pratiques identitaires suscitées par les directeurs de la fabrique, et la récente réappropriation de la mémoire de l'univers fai͏̈encier dans les politiques publiques municipales peut également s'expliquer de la sorte.

    Michel Mangenot, Une Europe improbable , thèse soutenue en 2000 à Université Robert Schuman Strasbourg 19712008  

    Ce travail entend répondre à la question : . L'étude d'un groupe - les hauts fonctionnaires français - apparaît comme le moyen de dépasser les oppositions qui structurent habituellement le discours sur l'Europe en saisissant la dynamique européenne à un double niveau : celui des institutions communautaires et celui des administrations nationales. L'étude des années 1948 à 1954 permet d'abord de restituer la configuration spécifique des hauts fonctionnaires vis-à-vis des enjeux européens. Si, en suivant F. G. Bailey, elle donne à voir une structuration en équipes, cette pré-histoire met surtout au jour les origines brouillées, concurrentielles et souvent endogènes de la construction européenne, construction qu'il faut bien mettre au pluriel. Les engagements initiaux de ces premières équipes apparaissent ensuite contrariés par le développement de l'Europe communautaire, l'investissement dans la CEE se faisant par les marges. En décalage ou dans des positions secondes, ces nouveaux fonctionnaires n'en vont pas moins, en donnant à l'administration bruxelloise son , contribuer à créer de véritables (path dependence). A partir du milieu des années 1980 suivra une génération plus légitime qui mènera à son terme le projet du traite de Rome, permettant alors à l'ENA de se revendiquer comme . C'est donc la vision d'une européanisation linéaire comme celle d'une brusque conversion qui s'estompe. On observe plutôt une pluralité de processus autonomes, des tournants avant le tournant néo-libéral décrit par B. Jobert. Enfin, l'Europe prend forme à Paris dans des concurrences préexistantes entre différents pôles de la haute administration, principalement les , les diplomates et les membres du conseil d'état, la construction européenne provoquant une reformulation de l'excellence administrative.

  • Melaine Robert, L’appel du marché : l'entrepreneurialisation de l'administration française des Télécommunications (1960-1991), thèse soutenue en 2023 à Strasbourg sous la direction de Vincent Dubois et Valérie Lozac'h, membres du jury : Philippe Bezes (Rapp.), Fabien Éloire (Rapp.), Antoine Roger    

    En 1991, l’administration des Postes et Télécommunications (PTT) disparaît et donne notamment naissance à l’entreprise France Télécom. Cette sortie de l’État n’est pas brutale : elle est le produit de réformes successives et de luttes entre acteurs administratifs depuis les années 1960. Cette thèse prend pour objet ces transformations de l’administration publique des Télécommunications, des années 1960 au début des années 1990. Elle met en évidence un processus d’entrepreneurialisation, défini comme l’autonomisation progressive des Télécommunications vis-à-vis de l’État et leur encastrement dans un champ entrepreneurial. À partir d’une enquête mêlant entretiens biographiques, archives ministérielles, base de données prosopographiques et traitements statistiques, la thèse développe une analyse dynamique des champs de l’action publique. Elle montre comment l’entrepreneurialisation est provoquée par les luttes entre hauts fonctionnaires ; contrainte par les logiques des champs politique et syndical ; modelée par l’état du champ spécifique de la réforme des télécommunications ; aiguillée par l’empilement des réformes successives qui, sans opérer de basculement, rendent de moins en moins probables les possibles alternatifs. La thèse propose ainsi une explication à l’apparent paradoxe qui voit les luttes entre des acteurs très majoritairement liés à l’État produire la sortie de l’État d’un de ses segments. Elle contribue plus largement à documenter la construction d’un ordre économique marchand par l’État et selon des logiques et enjeux qui lui sont propres.

    Thibaud Marczak, Les députés socialistes face à de Gaulle : analyse d'une décision critique (13 mai – 1er juin 1958), thèse soutenue en 2022 à Paris EHESS sous la direction de Ivan Ermakoff et Jean-Philippe Heurtin, membres du jury : Quentin Deluermoz (Rapp.), Laurent Jeanpierre (Rapp.), Nicolas Rousselier, Johanna Siméant-Germanos et Philippe Urfalino  

    Ce travail de thèse analyse le vote d’investiture du général de Gaulle à Paris le 1er juin 1958 comme un cas empirique de « décision critique ». Il se donne pour tâche d’expliciter les processus décisionnels à l’origine des prises de position des députés socialistes. La classe des « décisions critiques » délimite un ensemble de décisions caractérisées par : 1) des risques personnels ; 2) des risques pour autrui ; et 3) un verrouillage des possibles dans l’avenir. Cette enquête évalue dans un premier temps la pertinence d’une série d’hypothèses explicatives centrées sur la culture politique héritée, les menaces et les engagements, et les interactions entre groupes parlementaires. Face à la portée explicative de chacune d’elle – c’est-à-dire à leurs apports et à leurs limites – il apparaît nécessaire de fournir une explication qui intègre ces trois types de causes mais ne s’y réduit pas. Les interactions internes au groupe, dans la mesure où elles conditionnent les effets de la culture politique, des menaces et des engagements, et des interactions intergroupes, constituent la pierre angulaire des processus décisionnels à l’oeuvre dans le groupe parlementaire socialiste. Ces derniers sont marqués par l’émergence progressive d’un clivage cognitif parmi les membres du groupe, à l’origine de leur division le 1er juin.

    Elouan Rochcongar, Devenir collaborateur : carrières d'indignes dans les dossiers de la cour de justice de la Somme (1940-1948), thèse soutenue en 2019 à Paris 1 sous la direction de Nicolas Mariot, membres du jury : Laurent Joly, Anne Simonin et Gilles Morin  

    À partir du mois d'août 1944 et de la Libération de la Somme, des individus venus d'horizons sociaux circonscrits sont mis en état d'arrestation car désignés comme des collaborateurs. Cette étape se présente à la fois comme l'ultime phase de carrières entamées en cours d'Occupation et comme la première de leur labellisation éventuelle comme indignes. Notre travail se propose de relire la manière dont ces individus sont devenus des collaborateurs. Alors que l'historiographie envisage ce devenir au prisme de motivations, de dispositions idéologiques ou sociales et sous l'angle du choix ou de la contrainte, nous nous demanderons comment et non pourquoi ils sont devenus tels. En mobilisant la notion de carrière et les outils traditionnels des sciences sociales, nous verrons comment ces accusés sont entrés en collaboration et participé, à raison de propriétés spécifiques, à des pratiques collaboratrices apparaissant parfois anodines au premier abord. Puis nous décrirons comment, alors que certains sortent de la collaboration, une éventuelle labellisation entamée sous l'Occupation en isolent d'autres et les conduit à adopter des attitudes identifiées comme toujours plus radicales et que les dossiers d'instruction puis l'historiographie percevront comme intrinsèquement liées à un état d'esprit qui explique pourtant moins ces carrières qu'il n'en dépend.

    Marion Demonteil, Des corps à l’ouvrage. Les inspections du ministère de la Culture face au new public management (1959-2017), thèse soutenue en 2019 à Ecole doctorale SDOSE Paris sous la direction de Brigitte Le Grignou, membres du jury : Philippe Bezes (Rapp.), Odile Join-Lambert (Rapp.), Choukri Hmed et Jean-Michel Tobelem  

    Cette thèse prend pour objet l’institutionnalisation paradoxale d’une fonction d’inspection de la culture. Alors que le contrôle de l’État sur la culture représente un tabou, cette administration a considérablement renforcé et rendu visibles ses capacités d’inspection entre 1959 (création du ministère) et nos jours. Les conditions de possibilité d’un tel retournement constituent donc une énigme historique. Notre argumentation éprouve l’idée selon laquelle le contrôle de l’État sur les politiques culturelles n’a pu s’afficher et être assumé comme tel, depuis les années 2000, qu’à la condition d’être présenté comme une modalité de surveillance dépolitisée. À travers le cas de l’administration de la culture, et plus particulièrement des usages politiques de ses inspections, nous questionnons donc plus largement la dépolitisation de la décision politique. L’enquête commencée en 2013 mobilise une méthodologie mixte, qui associe étroitement méthodes qualitatives et quantitatives, au service d’une perspective diachronique embrassant la période 1950-2017.

    Sylvain Bertschy, De la médecine de guerre à la médecine en guerre : administration des blessés et malades de guerre et métamorphoses du champ médical en 14-18, thèse soutenue en 2018 à Montpellier 3 sous la direction de Frédéric Rousseau et François Buton, membres du jury : Frédéric Pierru (Rapp.), Cécile Robert (Rapp.), Vincent Viet et Martine Kaluszynski  

    Quels sont les effets de la Grande Guerre sur le champ médical et comment les agents et les institutions qui le peuplent ont-ils traversé ce « moment critique » ? La thèse présentée ici explore cette rencontre entre un temps d’exception (la séquence 14-18) et un espace social (la médecine) et elle entend montrer comment la mise en guerre du champ médical, en suspendant les logiques ordinaires de son fonctionnement social, a contribué à rendre possible une réforme de la prise en charge des blessés et malades militaires. L’enquête met en lumière le rôle des civils mobilisés, notamment des professionnels de santé – jeunes patrons de la médecine universitaire, agrégés et internes, hospitaliers, chercheurs (fondamentalistes) - qui vivent avec leur mise en guerre une expérience malheureuse de désajustement et de désœuvrement. Placés en position de subalternes dans un corps de santé ou prime une logique bureaucratique, une partie de ces élites médicales mobilise dès l’automne ses réseaux politiques et appelle à une « réforme globale » de l’organisation sanitaire, envisagée comme une « remise en ordre » de la médecine de guerre en ce qu’elle est censée remettre tout le monde à sa place, selon ses compétences, en restaurant les normes et hiérarchies du champ médical. L’accès au pouvoir des réformateurs en juillet 1915, incarné par la création d’un sous-secrétariat au service de santé dirigé par Justin Godart, s’explique alors moins par la « prise de conscience » de la situation objective des blessés et malades ou par les mobilisations des premières associations de blessés que par l’entrée dans le jeu des élites hospitalo-universitaires à partir de janvier 1915.

    Anne Bellon, Gouverner l’internet : mobilisations, expertises et bureaucraties dans la fabrique des politiques numériques (1969-2017), thèse soutenue en 2018 à Paris 1 sous la direction de Frédérique Matonti, membres du jury : Sophie Dubuisson-Quellier (Rapp.), Philippe Bezes (Rapp.), Yannick Barthe et Dominique Cardon  

    La thèse porte sur l’émergence et la transformation des politiques numériques, plus particulièrement en France à partir des années 1990. Face à la concurrence des acteurs techniques et aux institutions d’une gouvernance multipartite des réseaux, elle propose d’élucider les conditions de possibilité (et d’impossibilité) d’une intervention publique sur internet. Alors que les travaux sur la révolution numérique ont souvent négligé le rôle qu’y ont joué les acteurs publics, cette recherche réinscrit l’étude du gouvernement de l’internet dans l’espace administratif, en tenant compte de ses luttes internes et de ses échanges avec les univers militants, économiques ou scientifiques. L’enquête multi-site combine ainsi l’observation de collectifs d’internautes mobilisés à celle de l’État au quotidien, à partir d’un cabinet ministériel. Elle articule de nombreux entretiens avec l’analyse quantitative des réseaux d’action publique et s’appuie également sur l’étude de rapports publics et des archives du web. On montre alors comme les agents bureaucratiques se sont progressivement approprié la révolution numérique, l’ont accompagnée et en ont importé les logiques au sein de l’État, participant à la transformation plus générale de l’action publique. Contribution à l’analyse des politiques publiques et à l’étude des recompositions de l’État, la thèse permet ainsi d’éclairer les mécanismes et les stratégies par lesquelles les élites préservent leur capacité d’action dans une société bouleversée par la diffusion des nouvelles technologies.

    Marion Guenot, « Le crime ne paie pas » , thèse soutenue en 2018 à Paris 8 sous la direction de Violaine Roussel et Odile Henry  

    Cette thèse s’intéresse au travail des GIR, qui rassemblent des policiers, gendarmes, douaniers, inspecteurs de la douane, des impôts, du travail, du recouvrement de l’URSSAF et de la CPAM face à « l’économie souterraine » ou « patrimoine criminel ». Entre 2014 et 2017, j’ai enquêté par observation, entretiens, travail sur archives policières dans trois GIR et leurs juridictions ; et par questionnaire sur la promotion 2016 de la formation « enquêteur GIR ». Créés en 2002, les GIR ont prêté à controverse, étant l’élément-phare de la communication de N. Sarkozy sur les banlieues. Les professionnels recrutés dans les GIR ont conquis leur autonomie en élaborant un nouveau champ d’activité pénale permettant de viser des biens de grande valeur : « le patrimoine criminel » des délinquants aguerris ou appartenant aux milieux aisés. Les policiers, qui apprennent à mener ces procédures atypiques « sur le tas », définissent et mettent en œuvre des catégories de jugement sur la richesse, la pauvreté et l’immoralité de la recherche de profit à partir de leurs propres valeurs et pratiques économiques. La thèse montre comment ces équipes très hétérogènes parviennent à fabriquer et défendre un objectif commun, non prescrit, répondant aux principes d’une justice redistributive. Pour que leurs affaires réussissent, dans un univers professionnel encore peu acquis à leur cause, les agents des GIR développent des compétences de « diplomates » et de « VRP » du « patrimoine criminel ». Ainsi, ces groupes constituent un cas intéressant de « management par le projet » dans les institutions régaliennes.

    Marion Guenot, « Le crime ne paie pas », thèse soutenue en 2018 sous la direction de Violaine Roussel et Odile Henry, membres du jury : Alexis Spire (Rapp.), Jacques de Maillard (Rapp.), Martine Kaluszynski    

    Cette thèse s’intéresse au travail des GIR, qui rassemblent des policiers, gendarmes, douaniers, inspecteurs de la douane, des impôts, du travail, du recouvrement de l’URSSAF et de la CPAM face à « l’économie souterraine » ou « patrimoine criminel ». Entre 2014 et 2017, j’ai enquêté par observation, entretiens, travail sur archives policières dans trois GIR et leurs juridictions ; et par questionnaire sur la promotion 2016 de la formation « enquêteur GIR ». Créés en 2002, les GIR ont prêté à controverse, étant l’élément-phare de la communication de N. Sarkozy sur les banlieues. Les professionnels recrutés dans les GIR ont conquis leur autonomie en élaborant un nouveau champ d’activité pénale permettant de viser des biens de grande valeur : « le patrimoine criminel » des délinquants aguerris ou appartenant aux milieux aisés. Les policiers, qui apprennent à mener ces procédures atypiques « sur le tas », définissent et mettent en œuvre des catégories de jugement sur la richesse, la pauvreté et l’immoralité de la recherche de profit à partir de leurs propres valeurs et pratiques économiques. La thèse montre comment ces équipes très hétérogènes parviennent à fabriquer et défendre un objectif commun, non prescrit, répondant aux principes d’une justice redistributive. Pour que leurs affaires réussissent, dans un univers professionnel encore peu acquis à leur cause, les agents des GIR développent des compétences de « diplomates » et de « VRP » du « patrimoine criminel ». Ainsi, ces groupes constituent un cas intéressant de « management par le projet » dans les institutions régaliennes.

    Sarah Kolopp, Le Trésor et ses mondes (1966-1995) : contribution à une sociologie relationnelle de l'État, thèse soutenue en 2017 à Paris Sciences et Lettres ComUE sous la direction de Michel Offerlé, membres du jury : Jean-Michel Eymeri-Douzans (Rapp.), Pierre François (Rapp.), Valérie Boussard et Herrick Chapman  

    Entre histoire du capitalisme, sociologie des élites et sociologie de l’État, cette thèse prend pour objet le rôle de la direction du Trésor – direction phare du ministère des Finances – dans la fabrique de « mondes » à la fois hybrides et intégrés d’institutions, de réseaux et d’acteurs, aux sommets du pouvoir et au croisement entre État et affaires, administration et économie, public et privé. A partir d’une enquête mêlant entretiens biographiques, base prosopographique et fonds d’archives publics et privés, elle explore les mécanismes concrets par lesquels la direction du Trésor produit du flou, du flux et de la hiérarchie au sein de ses mondes, dans une configuration historique précise (milieu des années 1960- milieu des années 1990). La thèse est organisée selon trois niveaux d’analyse des relations entre le Trésor et ses mondes. Au niveau écologique – celui des alliances – elle montre la transformation des coalitions de soutien du Trésor pour peser dans l’État, du Plan à la « place », organisant les modalités du ralliement de la direction aux réformes libérales à partir des années 1960. Au niveau institutionnel, elle analyse les échanges qui forgent la porosité entre le Trésor et ses mondes, et les contraintes institutionnelles qui leur donnent sens et forme, et montre que la direction du Trésor fonctionne alors comme une entreprise de placement. Au niveau individuel, elle analyse la construction des carrières dominantes (de la « grandeur ») au sein des mondes du Trésor, et les liens d’obligation, de cooptation et de parrainage sur lesquelles elles s’appuient. La thèse contribue, ainsi, à documenter les formes d’indifférenciation des activités qui caractérisent les sommets de l’État.

    Florian Pedrot, Comment devient-on "victime" ? : le cas de surirradiés en milieu hospitalier, thèse soutenue en 2016 à Nantes sous la direction de Annie Collovald et Sarah Ghaffari, membres du jury : Yannick Barthe (Rapp.), Lilian Mathieu (Rapp.), Emmanuel Henry  

    À partir d’une étude de cas d’accidents médicaux – les surirradiations de patients traités par radiothérapie survenues dans les hôpitaux d’Épinal et Toulouse, révélées en 2006-2007 – cette thèse examine les effets des précédentes crises sanitaires sur l’action publique en santé et sur les mobilisations de victimes. Au croisement d’une sociologie politique, des problèmes de santé publique, du droit et des mobilisations, elle montre que ces précédents pèsent désormais sur les acteurs d’un drame sanitaire. Parce qu’elles surgissent après d’autres affaires où les acteurs politiques ont été mis en cause judiciairement par des victimes, ces surirradiations donnent lieu à des anticipations. Pour le personnel politique, il s’agit d’éviter leur transformation en crise sanitaire et politique. Devançant les journalistes dans l’accès aux accidents, il obtient un alignement du traitement médiatique sur sa propre définition, au prix de la victimisation des patients. Mais tous les patients ne se reconnaissent pas victimes et, en dépit de la publicisation des accidents et d’un droit de la responsabilité médicale favorable, un travail de réalisation des surirradiés en victimes a été nécessaire. L’intervention d’acteurs du droit – les avocats – a été indispensable pour faciliter la naissance d’associations de victimes et pour mettre en valeur les causes de leur état. Ces avocats transforment la cause en canalisant les griefs des victimes jusqu’au procès. En s’appuyant sur des archives de presse et administratives, des entretiens, des questionnaires, des observations, la thèse propose l’analyse paradoxale de la nonémergence d’une crise sanitaire et sa transformation en affaire judiciaire.

    Camille Herlin-Giret, Les mondes de la richesse : Travailler et faire travailler le capital, thèse soutenue en 2016 à Ecole doctorale SDOSE Paris sous la direction de Brigitte Le Grignou, membres du jury : Alexis Spire (Rapp.), Anne-Catherine Wagner, Choukri Hmed et Pierre François  

    Pour étudier les acteurs et les activités qui façonnent les mondes de la richesse, la thèse propose une approche relationnelle et articule les notions d’identification, de conversion et de soutien statutaire. Cela conduit tout d’abord à se demander comment l’État, au travers de la création d’un impôt sur la fortune, et les conseillers patrimoniaux, lorsqu’ils distinguent une clientèle d’ayants droit du tout venant, identifient et fabriquent différents groupes de fortunés. En examinant ensuite les modalités concrètes de prise en charge des capitaux, on discute l’hypothèse d’une compétence financière des fortunés, on montre que la transformation de l’argent en marques visibles de richesse n’est pas le fait de tous et on s’arrête sur les résistances discrètes que peut susciter l’impôt. Enfin, les activités des conseillers patrimoniaux sont examinées. En façonnant en douceur les patrimoines et les dispositions économiques de leurs clients et en leur apprenant à jouer avec les règles de droit sans craindre de sanctions, ces professionnels ne se limitent pas à faire fructifier des capitaux et constituent plus largement des gardiens du statut.

    Romain Lecler, Une mondialisation à domestiquer : sociologie d'une politique française des échanges audiovisuels internationaux (1984-2012), thèse soutenue en 2015 à Paris 1 sous la direction de Frédérique Matonti, membres du jury : Gisèle Sapiro (Rapp.), Sophie Dubuisson-Quellier (Rapp.), Didier Demazière et Laurent Jeanpierre  

    Qu'est-ce la mondialisation ? On répond à cette question à partir du cas de l'audiovisuel international, envisagé sous l'angle des échanges commerciaux et des politiques publiques. Une enquête a été menée de 2008 à 2012 au sein de l'administration, des ambassades et de diverses agences françaises ainsi que sur les marchés audiovisuels internationaux. On vérifie que la mondialisation, loin d'être une force économique s'imposant de l'extérieur, reste le produit de politiques visant à « dompter» ce qui semble dépasser le cadre national (comme la diffusion des contenus audiovisuels par satellite au tournant des années 1980), et peut toujours être rapportée à des enjeux « domestiques » (le terme de mondialisation étant lui-même instrumentalisé par de nombreux acteurs). La thèse examine d'abord comment l'administration s'est saisie de l'audiovisuel international, suscitant tout un entrepreneuriat bureaucratique au sein des Affaires étrangères, mais aussi une âpre compétition pour être nommé à la tête des nouvelles chaînes publiques transnationales, et conduisant au recrutement d'un réseau original de diplomates spécialistes de l'audiovisuel. On étudie ensuite l'essor considérable des marchés audiovisuels internationaux, leur rôle désormais central dans le commerce international des biens audiovisuels, et comment l'administration a soutenir la professionnalisation des exportateurs français. On analyse enfin le rôle fondamental des politiques d'exportation en analysant la promotion française de la diversité culturelle, négociée entre les professionnels et l'administration, profondément ambivalent et articulant des enjeux à la fois culturels, diplomatiques et marchands.

    Christelle Dormoy-Rajramanan, Sociogenèse d’une invention institutionnelle : le centre universitaire expérimental de Vincennes, thèse soutenue en 2014 à Paris 10 sous la direction de Bernard Pudal, membres du jury : Laurent Jeanpierre (Rapp.), André Désiré Robert (Rapp.), Charles Soulié    

    Relevant de l’intérêt renouvelé de l’histoire sociale pour la période des « années 1968 », ce travail cherche à comprendre à la fois les conditions de possibilité de la création d’une institution telle que le « Centre universitaire expérimental de Vincennes » et comment celle-ci a été initialement façonnée par les investissements pratiques et les projections de ses concepteurs, fondateurs et premiers acteurs. A la croisée de la sociologie des politiques publiques éducatives et de l´histoire sociale des champs intellectuels, la socio-histoire de cette expérience universitaire participe de la connaissance des effets de la crise symbolique sans précédent de Mai 68, et offre une voie d´entrée à l´histoire des idées qui prend en compte simultanément les acteurs mobilisés et mobilisables que sont les étudiants et les enseignants, et leurs négociations avec le pouvoir politique. A l’échelle macro-sociologique, cette recherche s’attache à éclairer les logiques qui président au développement morphologique et symbolique de l´Université depuis les années 50 et participe de la connaissance du fonctionnement de l’Etat et du pouvoir politique en conjoncture de crise. A l’échelle micro-sociologique, elle se veut attentive aux logiques d’action des acteurs sociaux et aspire à comprendre comment et pourquoi, suivant quels représentations, dispositions et intérêts, les acteurs (individuels et collectifs) investissent leurs rôles et « métiers » (de hauts fonctionnaires, responsables politiques, « intellectuels », enseignants-chercheurs, étudiant), sans sous-estimer les contraintes qui pèsent sur eux. Ce travail s’appuie sur des matériaux complémentaires (archives, entretiens, biographies, statistiques) qui permettent de mettre en perspective « données quantitatives » et « données qualitatives », et de renseigner les deux échelles d’analyse.

    Sylvain Antichan, Mettre la France en tableaux : la formation politique et sociale d'une iconographie nationale au musée historique du château de Versailles (1830-1950), thèse soutenue en 2014 à Paris 1 sous la direction de Yves Déloye, membres du jury : Vincent Dubois (Rapp.), Olivier Ihl (Rapp.), Pierre Birnbaum et Jean-François Chanet  

    En 1837, le château de Versailles est « converti » en un vaste musée visant à « réunir tous lessouvenirs historiques nationaux qu’il appartient aux arts de perpétuer ». Durant près d’unsiècle, cette histoire muséale de la France est reconduite, remaniée et actualisée jusqu’auprésent du Second Empire puis de la Troisième République. Notre thèse tente de comprendre,à partir d’un matériau archivistique dense, la contribution du musée à l’élaboration tout autantqu’à la diffusion d’un imaginaire national et civique.L’analyse iconographique de près de 1300 peintures, réinscrites dans leur cadre palatial,permet d’approcher les mises en forme picturales et matérielles du politique, ses variations etses invariants. Dès lors, l’enjeu est d’appréhender comment ces visions historicisées d’unÉtat-nation ont pu tenir et être appropriées. Leurs succès ne relèvent pas seulement d’uneaction politique et administrative mais s’arriment à l’agencement réciproque de différentessphères sociales et strates d’appartenance. Cette histoire nationale se forme en retraduisant lesunivers les plus familiers des acteurs, en empruntant à la mémoire domestique des « grandsnotables », aux normes et aux enjeux de groupements professionnels (peintres, historiens,militaires) ou encore en solennisant les pratiques routinières d’un « public mêlé ». L’histoirede France s’objective dans cette interpénétration des identités et des loyautés, dans cesconsolidations croisées de secteurs sociaux, dans ces dynamiques de politisation du social etde socialisation du politique. Saisir la formation, le contenu et la diffusion de cet imaginairenational équivaut alors à scruter des systèmes de relation entre groupements sociaux, desarticulations variables entre le quotidien et le national, entre l’art et l’histoire, entre le social etle politique.

    Nazli Nozarian, Les mondes de la "démocratisation" des grandes écoles et la sociodicée des élites : le cas des conventions ZEP/Sciences Po Paris, thèse soutenue en 2013 à Paris 1 sous la direction de Daniel Gaxie, membres du jury : Érik Neveu (Rapp.), Vincent Dubois, Agnès Van Zanten et Jean-Yves Rochex  

    La thèse porte sur les usages des dispositifs de « démocratisation » des grandes écoles dans différents espaces sociaux. Elle analyse comment les grandes écoles ont opéré un double retournement: d'une part, en se mobilisant, dans les années 2000, comme acteurs dans la résolution du problème de la reproduction des inégalités sociales par l'École; d'autre part, en bénéficiant d'une large approbation sociale dix ans après les premières controverses. L'enquête étudie plus particulièrement le cas des conventions signées entre Sciences Po Paris et certains lycées situés en zone d'éducation prioritaire (ZEP) ou assimilés comme tels. Elle articule techniques qualitatives et quantitatives. Elle donne à voir des usages pluriels de cette action publique. Ces usages conduisent à pérenniser ce dispositif d'abord controversé et à imposer un impératif de « diversité» dans les grandes écoles et dans d'autres espaces sociaux (entreprises privées et publiques, champ politique ... ). Si les intérêts des protagonistes de ces différents espaces sociaux sont souvent divergents, ils convergent ici en une même stratégie de justification de leurs propres positions, généralement dominantes. La « démocratisation », en réactivant le mythe méritocratique, est donc au cœur de leur sociodicée. Ces « mondes de renfort» contribuent au succès du dispositif malgré l'écart entre les objectifs affichés de recrutement et la réalité des origines des étudiants admis. S'il est destiné à des lycéens défavorisés, l'enquête montre que des mécanismes de reproduction sont toujours à l'œuvre. Il accentue encore la stigmatisation des élèves de ZEP et renforce paradoxalement les inégalités.

    Floran Vadillo, L’Élysée et l’exercice du pouvoir sous la Ve République : le cas de la politique de lutte antiterroriste (1974-1997), thèse soutenue en 2012 à Bordeaux 4 sous la direction de Pierre Sadran, membres du jury : Jean-Claude Colliard (Rapp.), Frédéric Ocqueteau (Rapp.), Bernard Lachaise  

    A rebours des idées reçues, nous postulons que l’intervention de l’Élysée en matière de lutte antiterroriste s’avère peu prégnante, le caractère exceptionnel de l’implication mitterrandienne parasitant souvent le jugement. Quels que soient les facteurs et paramètres d’une intervention, la personnalité du Président de la République décide du périmètre de son rôle qui ne saurait empiéter sur les attributions du ministre de l’Intérieur, s’affranchir d’une configuration institutionnelle et politique. En outre, dans le cas de l’ingérence mitterrandienne, si l’entourage a eu une forte incidence sur l’action gouvernementale en matière de lutte antiterroriste, il représente une indéniable exception. D’une manière générale, il apparaît que l’influence des conseillers sur le Président de la République est occasionnelle, discontinue mais réelle. En sus, les conseillers n’exercent ni pouvoir ni autorité en dehors de la volonté du Président de la République et sont privés de tout relais administratif.

  • Léo Vennin, Administrer l'émancipation : socio-histoire de l'éducation populaire en France (1944-1985), thèse soutenue en 2022 à Université Grenoble Alpes sous la direction de Olivier Ihl et Emmanuel Taïeb, membres du jury : Patricia Loncle-Moriceau (Rapp.), Elsa Guillalot et Francis Lebon  

    Cette thèse vise à questionner les tensions et les ambivalences dans l'action publique en matière d'éducation populaire, à travers l'étude des relations historiquement tissées entre les mouvements d'éducation populaire et l'État. A l'appui d'un matériau empirique croisant les archives administratives et celles des mouvements et fédérations d'éducation populaire, de la Libération jusqu'au milieu des années1980, il s'agit d'historiciser et de mettre à plat les mécanismes à l'œuvre dans ce secteur des politiques publiques en revenant sur sa genèse. Inscrit dans une sociologie historique de l'administration, ce travail fait l'hypothèse que la constitution et l'inscription dans le paysage institutionnel de l'éducation populaire est rendu possible par un consensus façonné par la confrontation d'acteurs publics et privés. A travers leurs interactions, inscrites pour partie dans l'appareil d'État, on observe la production d'une nouvelle norme éducative au cœur des processus de socialisation démocratique et de formation du citoyen. La convergence vers l'institutionnalisation agit alors comme consécration d'une norme co-construite, participant en retour à développer et à légitimer des discours et des pratiques en voie de consolidation et à évincer des voies plus directement contestataires de l'action publique.. Marqués par la diversification des modes d'intervention et des logiques d'action ainsi que par la bureaucratisation et la spécialisation des formes d'entrée dans la sphère publique, les processus que traverse ces pays agissent comme des révélateurs d'un mouvement plus large de recomposition et de renouvellement de la régulation sociale d'un certain rapport au savoir éducatif.

    Juliette Ruaud, À la lisière du vote. Socio-histoire de l’institution électorale dans le Sénégal colonial (années 1840-1960), thèse soutenue en 2021 à Bordeaux sous la direction de Yves Déloye et Marie Brossier, membres du jury : Romain Bertrand (Rapp.), Frederick Cooper et Mounia Bennani-Chraïbi  

    À partir d’une collecte d’archives et d’entretiens, cette thèse propose de renouveler l’histoire de l’institution électorale au Sénégal durant la période coloniale. Ce travail affirme la double nécessité d’historiciser les phénomènes de circulation internationale et d’extraversion des normes et des dispositifs de vote, et d’élargir l’horizon géographique de la socio-histoire du vote pour tendre vers une histoire plus polycentrée. Revisiter le cas sénégalais, qui incarne le modèle triomphal de la diffusion des pratiques électorales depuis un centre européen, incite à questionner un récit de l’universalisation du vote individuel-majoritaire et secret qui serait d’office celui d’une victoire progressive. En nous détachant des conceptions les plus évidentes du vote et en analysant les catégories produites dans le contexte colonial, nous mettons au jour des pratiques jusque là négligées ou envisagées de manière cloisonnée : élections menées par les militaires lors de la conquête à partir des formes électives vernaculaires, pratiques locales de dévolution du pouvoir, dispositifs de participation et de délibération nés de la pratique administrative, élections dans les chefferies, élections séditieuses, etc. Seule la prise en compte de cette pluralité de pratiques et de procédures permet de comprendre la forme prise par l’institution électorale dans le pays et sa consolidation. Ceci, sans nous limiter à un inventaire, mais en passant de l’étude de l’acte de vote à celle d’un espace de pratiques. Nous défendons ainsi la nécessité d’une approche relationnelle, capable de montrer que l’institutionnalisation du vote s’est d’abord jouée à ses frontières. En nous situant successivement à l’échelle de la société coloniale et au plus proche de ces activités, nous montrons les influences réciproques qui existent entre les pratiques et les formes de concurrences, de différenciations et de requalifications à l’oeuvre. Arpenter l’histoire du vote au Sénégal permet en retour d’interroger plus largement les temporalités et les rythmes de l’histoire de l’institution électorale et partant d’en proposer un récit moins linéaire.

    Thoma Lamb, Linky, un compteur pour les gouverner tous : Introduction controversée d'un instrument de « la » transition énergétique, thèse soutenue en 2020 à Paris 2 sous la direction de Yves Surel, membres du jury : Patrick Hassenteufel (Rapp.), Henri Bergeron, Aurélien Evrard et Natacha Gally  

    Cette thèse s'intéresse à l'ensemble des effets politiques et sociaux produits par l'introduction des compteurs communicants Linky en France. Dans la mesure où les données de consommations enregistrées par ce compteur sont supposées alimenter l’évolution du secteur énergétique vers un futur plus durable, cette recherche aborde plus largement deux grandes dynamiques de changement qui touchent l'action publique : la révolution numérique et la transition énergétique. Partant des théories de l’instrumentation de l’action publique, ce travail propose de considérer Linky comme un nouvel instrument de régulation du sous-système électrique dont les étapes successives de conception impliquent une pluralité d’acteurs, d’institutions et de représentations concurrentes. Marquée tout à la fois par l’histoire du réseau électrique français, l’évolution des méthodes de métrologie et l’européanisation des politiques énergétiques, l’instrumentation du compteur Linky est ainsi envisagée comme un processus itératif changeant au gré des mobilisations de plusieurs coalitions d’acteurs portant chacune leur projection idéalisée du dispositif. Ces projections imprégnées de savoir et d’expertises contradictoires sont notamment déterminées par les enjeux que chaque acteur considère comme prioritaires pour l’avenir du secteur de l’énergie. Elles varient aussi en fonction des différentes controverses techniques et politiques entourant Linky. L’étude de la mise en œuvre du compteur démontre à ce titre les effets concrets de la reception d’un instrument de politique publique par ses destinataires en suivant l’évolution de sa trajectoire depuis le statut d’objet technique jusqu’à celui de risque politique.

    Georges Meyer, L'Etat, l'art et les moeurs : sociologie historique de la censure du cinéma (1961-1975), thèse soutenue en 2017 à Paris 8 sous la direction de Violaine Roussel et Laurent Jeanpierre, membres du jury : Gisèle Sapiro (Rapp.), Emmanuel Taïeb et Philippe Bouquillion  

    Cette thèse a pour objet la transformation de l’institution de la censure d’État du cinéma en France, entre 1961, date d’une réforme qui la durcit, à 1975, année de la mise en place de la classification « X » et de l’octroi de la liberté d’expression au cinéma. Son enjeu principal est d’interroger, à travers cette institution et sa mutation, ce qui se joue dans-la bifurcation des années 1968. Pour cela, cette thèse est construite autour d’un cadre théorique spécifique articulant notamment la sociologie politique des institutions et la théorie de la « civilisation » de Norbert Elias. Ses matériaux sont essentiellement des archives étatiques, mais aussi des sources imprimées comme la presse.

    Harold Mazoyer, Les calculs de la puissance , thèse soutenue en 2011 à Lyon 2 sous la direction de Gilles Pollet  

    A partir du début de la Vème République, l’économie des transports s’institutionnalise progressivement comme une science de gouvernement. Peu à peu, le recours aux économistes, et à leurs savoirs, dans les processus de décision publique s’impose comme une nécessité sociale. Cette recherche vise à comprendre les ressorts de cette dynamique. Elle s’efforce, plus généralement, de saisir l’origine et la nature de l’autorité dont ils bénéficient dans un domaine d’action publique. Pour ce faire, le regard est porté, tout d’abord, sur les services de l’administration centrale où des ingénieurs-économistes deviennent alors perçus comme d’influents « conseillers du prince », puis s’imposent comme les principaux animateurs d’une tentative de réforme de l’administration. La thèse interroge également le développement d’une expertise savante en investiguant l’univers académique. L’enquête porte, enfin, sur le processus d’expertise et de décision d’un projet, le métro de Lyon, pour saisir comment les économistes interviennent dans le dialogue noué entre le pouvoir central et le pouvoir local. La dynamique d’institutionnalisation d’une science de gouvernement est envisagée à travers les processus qui participent à la construction, et à l’affirmation, des rôles de l’économiste dans ces trois univers distincts. Il s’agit ainsi d’éclairer les processus singuliers se déroulant dans chacun d’eux mais également de comprendre ce qui se joue dans leurs connexions. Cette approche donne à voir le succès des économistes dans le gouvernement des transports comme l’appropriation d’un projet de réforme de l’action publique porté, à l’origine, par des élites et des institutions « centralistes ». En outre, elle montre comment la gestion des affaires publiques territoriales constitue alors un enjeu décisif qui participe à forger les attentes qui pèsent sur les économistes. Empruntant une démarche socio-historique, l’analyse se nourrit d’un matériau essentiellement archivistique mais également de plus de soixante-dix entretiens semi-directifs.

    Harold Mazoyer, Les calculs de la puissance, thèse soutenue en 2011 sous la direction de Gilles Pollet, membres du jury : Frédéric Lebaron (Rapp.), Vincent Spenlehauer    

    A partir du début de la Vème République, l’économie des transports s’institutionnalise progressivement comme une science de gouvernement. Peu à peu, le recours aux économistes, et à leurs savoirs, dans les processus de décision publique s’impose comme une nécessité sociale. Cette recherche vise à comprendre les ressorts de cette dynamique. Elle s’efforce, plus généralement, de saisir l’origine et la nature de l’autorité dont ils bénéficient dans un domaine d’action publique. Pour ce faire, le regard est porté, tout d’abord, sur les services de l’administration centrale où des ingénieurs-économistes deviennent alors perçus comme d’influents « conseillers du prince », puis s’imposent comme les principaux animateurs d’une tentative de réforme de l’administration. La thèse interroge également le développement d’une expertise savante en investiguant l’univers académique. L’enquête porte, enfin, sur le processus d’expertise et de décision d’un projet, le métro de Lyon, pour saisir comment les économistes interviennent dans le dialogue noué entre le pouvoir central et le pouvoir local. La dynamique d’institutionnalisation d’une science de gouvernement est envisagée à travers les processus qui participent à la construction, et à l’affirmation, des rôles de l’économiste dans ces trois univers distincts. Il s’agit ainsi d’éclairer les processus singuliers se déroulant dans chacun d’eux mais également de comprendre ce qui se joue dans leurs connexions. Cette approche donne à voir le succès des économistes dans le gouvernement des transports comme l’appropriation d’un projet de réforme de l’action publique porté, à l’origine, par des élites et des institutions « centralistes ». En outre, elle montre comment la gestion des affaires publiques territoriales constitue alors un enjeu décisif qui participe à forger les attentes qui pèsent sur les économistes. Empruntant une démarche socio-historique, l’analyse se nourrit d’un matériau essentiellement archivistique mais également de plus de soixante-dix entretiens semi-directifs.

    Marie-Émmanuelle Pommerolle, À quoi servent les droits de l'homme ? , thèse soutenue en 2005 à Bordeaux 4 sous la direction de Daniel Bourmaud  

    A partir d'une étude comparée d'organisations non-gouvernementales de défense des droits de l'Homme au Kenya et au Cameroun, notre travail montre que les droits de l'Homme, en tant que discours de revendication et de protestation, ne sont pas universellement efficaces. Les usages, par des groupes non étatiques, de ces principes reconnus par tous sont redevables des conditions de déploiement d'une action collective dans des contextes de récente libéralisation. L'émergence et les tentatives de pérennisation de ces nouveaux groupes politiques mettent en évidence les tensions entre contraintes historiques et marges d'invention encadrant tout type d'action collective. Alors que la forme inédite ou mimétique des organisations traduit les possibilités d'innovation face aux contraintes de l'environnement politique, le vivier de militants susceptibles d'user des droits de l'homme comme discours de revendication apparaît dépendant de l'histoire des oppositions dans ces pays. De plus, bien que la relative flexibilité des répertoires d'action concourt à sa diffusion à partir de supports divers, la disponibilité de discours et de symboles partagés et construits historiquement demeure déterminante pour énoncer les droits de l'Homme et asseoir leur légitimité. Enfin, si la participation des organisations de défense des droits de l'Homme à l'action publique se transforme au gré de leurs interactions avec les autorités, elle est tributaire des modes historiques de ces relations, et son efficacité est contrainte par les limites internes aux discours des droits de l'Homme et aux réformes menées en leur nom. Finalement, à la question de départ : "à quoi servent les droits de l'Homme?", ce travail répond qu'en tant qu'objet d'étude, les usages des droits de l'Homme permettent d'explorer les cultures du politique et certains mécanismes institutionnels des régimes étudiés ; il démontre, qu'en tant qu'objet de revendication et de protestation, les droits de l'Homme ne sont pas en eux-mêmes un vecteur puissant et suffisant du changement politique.

  • Julien Arnoult, Les organes de conseil et de réflexion de Matignon : un modèle français de think tank public ?, thèse soutenue en 2020 à Paris 2 sous la direction de Jacques Chevallier, membres du jury : Nicolas Kada (Rapp.), Yves Poirmeur (Rapp.)  

    Ce travail met en lumière la place du conseil et de la réflexion stratégiques et prospectives, de nature économique et sociale, dans l’action gouvernementale. Cette activité est matérialisée par des organes dédiés et situés dans les services du Premier ministre, ce dernier étant constitutionnellement le centre du pouvoir politique et administratif. Ces entités ont la particularité d’être situées en amont du processus de décision et d’être déliées de l’opérationnel. L’analyse se fonde sur des sources principalement primaires et adopte une approche pluridisciplinaire. Elle révèle plus largement la façon dont le travail gouvernemental est confectionné. Ces organes sont inspirés de modèles étrangers et ont été adaptés à la situation française, afin de renouveler un exercice historiquement marqué par la planification. Ils ont été multipliés, ce qui souligne le besoin du Premier ministre, et plus largement, du Gouvernement, de s’appuyer sur un conseil dont l’origine est extérieure à l’administration publique. Toutefois, la formule idéale n’a pas été trouvée, s’agissant de leur composition, de leur périmètre, de leur fonctionnement et leur mission ; l’usage de ce savoir par le Gouvernement n’est pas constant.La culture politique et administrative française limite l’impact de conseil et de cette réflexion. En effet, il est difficile pour le Gouvernement de s’intéresser à des enjeux n’entrant ni dans son programme, ni dans son agenda et ni dans des événements politiques. Pourtant, les débats autour des fonctions stratégique et prospective perdurent, confirmant la nécessité d’un accompagnement de l’action sur un temps long.

    Jean Baptiste Paranthoën, L’organisation des circuits courts par les intermédiaires : la construction sociale de la proximité dans les marchés agroalimentaires, thèse soutenue en 2016 à Dijon sous la direction de Gilles Laferté, membres du jury : Sophie Dubuisson-Quellier (Rapp.), Frédéric Lebaron, Jean-Christophe Marcel et Antoine Roger  

    La thèse porte sur l’institutionnalisation de la proximité dans les marchés agroalimentaires et la place qu’occupent un certain nombre d’intermédiaires non économiques (salariés d’association, chercheurs, membres du ministère de l’Agriculture, conseillers des chambres d’agriculture) dans ce processus. En variant les échelles d’enquête, du national au départemental, et en articulant les méthodes qualitatives et quantitatives, ce travail pointe le paradoxe que constitue le développement de ces agents à mesure que la proximité est définie et objectivée comme caractéristique vertueuse de la relation marchande. A partir d’une sociologie des institutions marchandes attentive à l’étude concomitante des conditions historiques et sociales de la construction des marchés et de leurs logiques concrètes de fonctionnement, il s’agit de restituer les luttes pour le monopole de la définition légitime des « circuits courts » entendus comme catégorie d’organisation marchande. Dans un contexte de reconfiguration des alliances qui encadraient et hiérarchisaient jusqu’alors les marchés agroalimentaires, l’analyse montre que le rapprochement des agriculteurs et des consommateurs dans les échanges marchands repose sur la réduction de leur distance sociale et politique. Mais la structuration des « circuits courts » n’est finalement permise qu’au prix de l’autonomisation d’agents d’intermédiations qui contribuent à les légitimer et à les définir, dans le même temps qu’ils tendent à rendre invisible leurs propres pratiques. En accédant à une position réticulaire sur ces marchés, ces intermédiaires participent ainsi à redéfinir les frontières de l’espace des producteurs.

    Emmanuel Blanchard, Encadrer des "citoyens diminués" , thèse soutenue en 2008 à Dijon sous la direction de Jean-Marc Berlière  

    Cette thèse est consacrée à l’étude des pratiques des services de polices active (police judiciaire, renseignements généraux, sécurité urbaine) à l’égard des « Français musulmans d’Algérie » émigrés en région parisienne entre 1944 et 1962. Ce gouvernement policier est analysé comme une modalité de l’inscription métropolitaine de la « situation coloniale ». Le répertoire d’action policier est étudié en regard de l’histoire des polices métropolitaines et des dispositifs appliqués à d’autres groupes de « citoyens diminués » (vagabonds, prostituées, homosexuels). Les matériaux analysés (archives de la Préfecture de police et de la Sûreté nationale, manuels de police, publications syndicales, enquêtes orales auprès de policiers retraités…) visent à rendre compte des techniques ordinaires des métiers de police et d’une « culture institutionnelle » appréhendées au travers d’une socialisation, de représentations et de pratiques partagées par les agents. La diversité des grades, des métiers et des services est replacée dans leurs relations de concurrence et de complémentarité, afin d’appréhender l’action des polices de cette époque. Les rapports et les confrontations de genre entre un groupe professionnel exclusivement composé d’hommes, garants des rapports sociaux de sexe, et des migrants, le plus souvent venus sans femme, font l’objet d’une attention particulière. La périodisation choisie et l’attention aux routines ou pratiques ordinaires favorisent la compréhension d’événements « hors norme », tel le massacre du 17 octobre 1961. Celui-ci est intégré à l’histoire des dispositifs policiers (rafles, internement administratif…), à une sociologie des relations entre administrations policières et pouvoirs politiques et à l’étude des reconfigurations impériales intervenues au moment des décolonisations.

    Laure Blévis, Sociologie d'un droit colonial , thèse soutenue en 2004 à AixMarseille 3 sous la direction de Jean-Robert Henry