Date limite le lundi 03 fév. 2025
La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 proclame en son article 15 : « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration ». Ce droit s'applique notamment à travers les parlements, en particulier dans les régimes classiquement qualifiés de « parlementaires », dont le rôle a évolué avec le temps vers un rôle de contrôle, d'accompagnement (voire de chambre de réflexion pour certaines assemblées), de validation et d'évaluation de l'exécutif.
C'est notamment le sens de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 en France[1], ou celui de l'accord de gouvernement fédéral belge « Vivaldi » 2020-2024 : « Globalement, nous améliorons le cadre d'information et d'évaluation de la politique de Défense pour plus de transparence et d'implication parlementaire (missions, achats et ventes militaires, retours sociétaux, victimes civiles). Le gouvernement examinera si une réglementation sur l'indemnisation des victimes civiles peut être développée. Le contrôle parlementaire sur les dossiers d'achats militaires sera étendu. La cour des Comptes recevra une compétence de contrôle aussi pendant la procédure d'achat, moyennant le respect des exigences légales et de sûreté. Il sera en outre examiné de quelle manière la Commission des achats 2militaires peut mieux se faire assister en vue d'un contrôle parlementaire optimal. »[2].
Les mécanismes de contrôle et d'autocontrôle parlementaires
Outre la censure éventuelle des élections à échéances plus ou moins régulières, quels mécanismes de contrôle, tant internes qu'externes, existent afin de s'assurer que les assemblées respectent les règles non seulement qu'elles imposent, via leur activité législative, aux acteurs sociaux, mais également à elles-mêmes, notamment afin d'éviter certains abus de l'usage de leur souveraineté, voire de potentielles atteintes à l'état de droit ?
Certaines missions de contrôle sont médiatisées (voire politisées en ce qu'elles comportent ou répondent à des enjeux politiques), telles les commissions d'enquête ou, dans une moindre mesure, les questions au gouvernement.
En revanche, les fonctions d'autocontrôle sont moins souvent médiatisées (si ce n'est à l'occasion de scandales, de suspicion de malversations ou de difficultés profondes de gestion, tel au Parlement de Wallonie) et ne sont pas souvent étudiées par la doctrine[3]. En Belgique, après un scrutin, la tâche de vérifier les pouvoirs des parlementaires est confiée aux assemblées nouvellement élues. Dès lors, les parlementaires se trouvent juges et parties pour trancher les litiges qui concernent leur propre élection. Le 10 juillet 2020, dans le cadre de l'affaire Mugemangango c. Belgique, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que la réglementation relative à la vérification des pouvoirs était incompatible avec la Convention des droits de l'homme.
Outre les questions liées à l'éthique et à la déontologie que sous-tend l'autocontrôle, au rôle central des acteurs-même de la vie politique, tels les partis (notamment par le contrôle du financement public et des dépenses électorales), cette démarche vise également les rapports aux instances externes, des juridictions aux citoyens en passant par lobbies.
La fonction évaluative des Parlements
L'enjeu réside également dans l'efficacité et la qualité du travail parlementaire et législatif. Ce qui constitue en outre un enjeu démocratique.
A cet égard, Hortense de Padirac avance que : « Au niveau du Parlement, l'évaluation est perçue comme le moyen d'éclairer le législateur sur les différentes options qui se présentent à lui et l'orienter dans son choix. A une époque où la rationalité du législateur est remise en cause, mesurer l'efficacité des politiques permettrait d'y suppléer. Telle était la position de Jean-Luc Warsmann, rapporteur du projet de loi constitutionnelle à l'Assemblée nationale en 2008 et instigateur de cette compétence, était convaincu des bienfaits intrinsèques de l'évaluation : il pensait que doter le Parlement d'une compétence en matière d'évaluation des politiques publiques freinerait la logorrhée législative tout en améliorant la qualité de la loi. Selon lui, l'évaluation permet de lutter efficacement contre la précipitation avec laquelle le Parlement vote les lois. Elle apporte également plus de rationalité à la loi en recroisant « les informations sur le travail qui peut être fait » . Enfin, l'évaluation constitue un moyen efficace pour réaliser des économies, devenues désormais indispensables. »[4]
(Auto-)Evaluer sa propre action législative, bien souvent, dans un cadre de parlementarisme rationalisé, guidée par l'agenda et les impératifs de l'exécutif, mais également évaluer, et, partant contrôler l'action législative du gouvernement afin de devenir force de prospective et de proposition serait-il une des évolutions auxquelles l'institution parlementaire est promise ?
Une évaluation purement quantitative de l'activité (par exemple, le nombre de questions parlementaires déposées) reflète-t-elle l'exigence et l'éthique du travail parlementaire et rencontre-t-elle la confiance légitime que les citoyens-électeurs peuvent légitimement placer dans l'institution parlementaire ? Ou contribue-t-elle à l'augmentation de la méfiance dans l'institution parlementaire[5], voire du personnel politique en général ?[6]
La performance des contrôles
En France, le contrôle parlementaire est astreint à un devoir de performance. Afin d'améliorer celle-ci, le rapport d'information de la commission des finances déposé le 25 septembre 2007 propose de diversifier les modes de contrôle dont la durée de réalisation est souvent longue et de ce fait, en « retard sur l'évènement », en menant des investigations plus ponctuelles ainsi que des formats de contrôle courts. Au-delà du contrôle parlementaire, la performance de celui-ci induit de faire un bilan de contrôle en y associant l'administration. Le contrôle parlementaire se mesure à sa capacité à faire évoluer les structures.
Les limites des contrôles parlementaires
Les limites du contrôle parlementaire peuvent être d'ordre légal (restrictions du temps de travail, du champ de compétences d'une commission d'enquête), d'ordre politique (discipline de parti), d'ordre humain (formation des députés, complexité des lois) ou d'ordre matériel et financier.
Par ailleurs, le système d'autocontrôle parlementaire évoqué plus haut en Belgique est révélateur d'une importante partialité : le mécanisme conduit des parlementaires (et leur parti) à prendre des décisions qui peuvent avoir des effets directs sur leur propre carrière, sur celle de leurs alliés ou de leurs rivaux politiques, voire sur la constitution d'une coalition majoritaire.
Problématiques
- Les mécanismes de contrôle parlementaire : commissions d'enquête, questions parlementaires, interpellations, visites de terrain, etc.
- L'efficacité du contrôle parlementaire : études de cas, comparaisons internationales, évaluations de politiques publiques.
- Les procédures d'auto-contrôle au sein des parlements : règlements internes, comités d'éthique, transparence des activités parlementaires.
- Les relations entre parlements et autres institutions de contrôle : cours des comptes, autorités indépendantes, organisations non gouvernementales.
- Innovations et réformes : nouvelles technologies et outils de contrôle, réformes institutionnelles visant à renforcer les capacités de contrôle des parlements.
- Impact des contrôles parlementaires sur la gouvernance : conséquences sur la politique publique, la confiance des citoyens, la responsabilité des gouvernants.
- Etudes comparatives : analyses transnationales des pratiques de contrôle et auto-contrôle parlementaires.
Planning éditorial
- Remise des propositions : 03/02/2025
- Sélection des propositions : 17/02/2025
- Textes définitifs : 12/05/2025
Contact : CERAP
Av. F.D. Roosevelt, 50 • ULB • CP 135
B-1050 Bruxelles
cerap@ulb.be
Site Web : http://www.cerap.be
[1] Voir notamment à cet égard : HOUILLON Philippe, « Le contrôle extraordinaire du parlement », Pouvoirs, 2010/3 (n° 134), p. 59-69. DOI : 10.3917/pouv.134.0059. URL : https://www-cairn-info.ezproxy.ulb.ac.be/revue-pouvoirs-2010-3-page-59.htm.
[2] Accord de gouvernement du 30/09/2020, p. 77, disponible sur https://www.belgium.be/sites/default/files/Accord_de_gouvernement_2020.pdf.
[3] Nous noterons toutefois la tenue, en mars 2018, du deuxième symposium international de finances publiques comparées consacré au « financement public des Parlements en Europe : une autonomie financière en débat(s) » : https://univ-droit.fr/recherche/actualites-de-la-recherche/manifestations/26104-2e-symposium- international-de-finances-publiques-comparees, dont les actes ont été publiés ici : https://www.legiscompare.fr/web/IMG/pdf/symposium_mars_2018-ang.pdf.
[4] DE PADIRAC, Hortense. Le Parlement français et l'évaluation. Une institutionnalisation impossible ?. 2018, p. 7.
[5] Voir par ex. : BARBARIT, Simon. Enquête électorale : 73 % des Français n'ont pas confiance dans la nouvelle Assemblée nationale. Public Sénat [en ligne]. 30 août 2024, disponible sur https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/enquete-electorale-73-des-francais-nont-pas-confiance-dans-la-nouvelle-assemblee-nationale.
[6] Voir par ex. : BAROMETRE IPSOS – LA TRIBUNE Octobre 2024, disponible sur https://www.ipsos.com/sites/default/files/ct/news/documents/2024-10/Ipsos-La-Tribune-Dimanche-Barometre-Politique-Octobre-2024-web.pdf.